Edito du PES n° 26 (paru début octobre 2016)
Surenchères sécuritaires et austéritaires
Le grand cirque médiatique des
primaires et des élections présidentielles et législatives qui s’en suivront,
va être l’occasion de diffuser la peur et l’angoisse. Pour les castes
politiciennes en concurrence qui aspirent à gouverner, il s’agit de démontrer
démagogiquement qu’elles pensent rassurer et protéger le corps social. Face à
la menace d’attentats des partisans de l’OEI, tout un arsenal répressif a été
mis en place afin que les gouvernants ne perdent pas la face. Quant à la montée
du chômage et de la précarisation de la société, elles comptent juguler la
colère sociale en criminalisant le mouvement syndical et associatif, tout en
démantelant encore plus les droits du travail. La loi El Khomry est en effet
jugée insuffisante au regard de la déréglementation mise en œuvre dans les
autres pays européens.
Les Hollande/Valls auront permis la
mise en place d’un régime répressif sans équivalent. A l’occasion de la
prolongation de l’état d’urgence et suite à l‘attentat de Nice le 14 juillet,
une nouvelle loi s’est greffée sur le texte initial. Même le syndicat des
magistrats (USM) classé à droite l’a jugé « inquiétante ». Tout pouvoir est donné aux préfets et procureurs
pour procéder à des perquisitions administratives, des saisies informatiques,
des contrôles d’identité et fouilles de véhicules. « L’élargissement » des écoutes à toute personne susceptible
d’être en lien avec une menace… Certains députés ont même affirmé que ces
mesures pourraient s’appliquer « au
gré des faits divers » comme « le
viol ou le meurtre d’un policier ». Le principe de l’individualisation
des peines et la restriction du pouvoir des juges font dire à certains :
« le droit se meurt ».
Et tous ces présidentiables, comme
Sarko et Le Pen, de renchérir sur les assignations à résidence, la rétention
dans des centres fermés. Hervé Morin
prône, quant à lui, « l’israélisation » de notre sécurité : loi
des suspects, lettre de cachet… Police partout et justice nulle part. En
juillet 2015 déjà, Delarue qui préside la commission du renseignement,
s’inquiétait qu’une loi raisonne en fonction des entourages et non plus des
seuls individus répertoriés comme dangereux.
Mais, ce qui est bien plus grave,
c’est la certitude que ces mesures présentées comme visant les terroristes sont
appelées à être détournées. A l’occasion de la COP 21 déjà, 481 militants
écolos étrangers ont été interpelés, 27 français assignés à résidence. Lors des
manifestations contre la loi dite Travail, 130 assignations à résidence ont été
prononcées sans compter les violences policières, les procès contre les
syndicalistes. Car la violence sociale va s’accentuer, les fermetures
d’entreprises se succédant, le chômage (55 200 chômeurs catégorie A en
plus viennent d’être annoncés) et la précarisation ne font que croître.
Face à cette réalité, tous les
prétendants au poste suprême se proposent de « libéraliser »
encore plus le marché du travail et de réduire les prestations sociales. Les 35
heures aux oubliettes, la retraite à 67 ans… Il s’agit d’accroître le taux
d’exploitation des classes populaires et d’organiser une paupérisation « acceptable » pour réduire la dette
de l’Etat. Enfin, l’agitation médiatique autour de l’identité franchouillarde
et autres gauloiseries de Sarko, l’Astérix de fraîche date, vise à dresser les
français de souche contre les étrangers et les musulmans. Cette guerre civile
contre les « inassimilables »
est en germe dans les propos racistes tenus, plus ou moins, par les uns et par
les autres.
Certes, dans l’opinion, la parole des
politiciens est dévaluée, la défiance assez générale, toutefois, trop d’illusions
persistent ; le Macron a la cote auprès des bobos, Juppé peut sembler le moindre
mal, voire la Le Pen remettre de l’ordre. Et puis, même si l’abstention se fait
massive, rien ne changera. Reste la perturbation sociale du cirque électoral,
l’intrusion sur la scène publique de mouvements sociaux d’ampleur faisant vivre
l’utopie réaliste de la rupture avec la chape de plomb du capitalisme
financiarisé qui ne peut se maintenir que par la peur, l’angoisse ici et les
guerres ailleurs.