Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


dimanche 13 janvier 2013


Où va Syriza ?

Par Panous Petrou – membre dirigeant de l’organisation anticapitaliste Gauche internationaliste des Travailleurs (DEA), l’un des groupes fondateurs de Syriza en 2004. Il a publié un article sur le site socialisworker.org le 19 décembre 2012 (traduit de l’anglais par Jean-Philippe Divès) dont nous livrons les éléments les plus significatifs

La coalition de la gauche radicale, connue sous le nom de Syriza, a créé un choc en Grèce et à l’échelle internationale quand, au printemps 2012, elle est à deux reprises passée à quelques points d’une victoire dans les élections nationales. Syriza proposait une alternative à l’austérité drastique défendue par l’establishment de la politique et de l’économie grecques avec, derrière lui, les dirigeants européens.

Syriza a tenu du 30 novembre au 2 décembre 2012 sa première conférence nationale de délégués élus, premier pas d’un processus visant à constituer une organisation plus unifiée au printemps 2013.

Syriza compte aujourd’hui près de 500 sections et plus de 30 000 membres dans tout le pays. Ces membres ont élu 3 000 délégués à la conférence nationale, qui à leur tour ont élu une nouvelle direction de la coalition. La transformation de Syriza en une organisation de masse avec la mise en place de droits démocratiques et d’une représentation nationale ou parlementaire est d’autant plus nécessaire que la majorité de ses membres sont des milliers de militants non organisés ayant rejoint Syriza surtout depuis les élections d’une part, et, d’autre part que la coalition est actuellement composée d’une douzaine d’organisations de gauche, allant du socialisme révolutionnaire au réformisme radical. Il y a des raisons urgentes de clarifier le niveau d’accord entre les différentes composantes de Syriza. Si des élections étaient convoquées, Syriza pourrait être amenée à prendre la tête d’un gouvernement avant son congrès de fondation prévu au printemps. C’est pour ces raisons que des forces au sein de Syriza ont décidé de rendre public le débat politique. En effet, des divergences de fond existent entre les organisations formant la Coalition, sur les questions controversées notamment de l’alliance avec le Parti communiste (KKE) et Antarsya (la Gauche anticapitaliste qui regroupe plusieurs organisations), de la dette et la zone euro, du refus de tout chantage de l’UE destiné à maintenir l’austérité. Si Synaspismos compose l’essentiel de la direction actuelle de Syriza et compte dans ses rangs Alexis Tsipras (président du groupe des 71 députés Syriza), pour autant deux tendances fortes existent au sein du mouvement de la Coalition.  Elles se sont exprimées lors du Congrès récent et ont exprimé leurs divergences :  

-         Celles qui ont formé «le Bulletin unitaire» : la majorité de Synaspismos, soutenant la direction en place et Alexis Tsipras, l’Organisation communiste de Grèce (KOE, organisation maoïste), la Gauche de renaissance communiste et écologique (AKOA, d’orientation eurocommuniste), les communistes libertaires du Groupe de la gauche radicale (Roza) ainsi que des groupes d’anciens membres du Pasok ayant rejoint Syriza. Cette alliance défendait le projet de déclaration s’accordant sur l’idée que Syriza évolue dans la bonne direction. Elle a remporté 75% des voix
-         Celles de «la Plateforme de Gauche» qui a obtenu 25% des voix : le Courant de Gauche de Synaspismos, le «Regroupement de Gauche» avec la Gauche internationaliste des travailleurs (DEA), Kokkino («Rouge») et les anticapitalistes (APO)

Le Bulletin unitaire a intégré un large spectre de forces, depuis les membres du Synaspismos les plus modérés, qui poussent à ajuster le programme de Syriza dans le sens du «réalisme» jusqu’à des camarades de gauche très radicaux qui ont probablement pensé que la meilleure façon de faire avancer Syriza était d’argumenter en faveur de leurs positions dans le cadre de la majorité, ou bien qui ont priorisé le besoin pour la coalition d’apparaître «unie», certains éléments de la majorité présentant La Plateforme de gauche comme des «diviseurs».

La Plateforme de Gauche s’est formée sur la base d’un accord sur les points principaux suivants :
-         Syriza doit maintenir son engagement en faveur d’un «gouvernement de gauche» avec des appels à une collaboration avec le Parti communiste et Antarsya
-         Syriza ne doit accepter qu’un «gouvernement de gauche», c’est-à-dire refuser tout soutien à une coalition gouvernementale incluant des partis bourgeois
-         Elle doit défendre la fin immédiate du paiement de la dette et refuser le moindre sacrifice pour sauver l’euro
-         Elle doit défendre la fin de l’austérité par tous les moyens nécessaires et placer les besoins des travailleurs au-dessus des   propositions «réalistes» destinées à satisfaire les besoins du capitalisme.
La Plateforme de Gauche a présenté des amendements qui, s’ils n’ont pas été adoptés, ont obtenu plus que 25% : par exemple, l’amendement disant que l’unité devait être recherchée avec le Parti communiste et Antarsya ou celui sur la dette et la zone euro, ont frôlé les 40% des délégués.

L’émergence de la Plateforme de gauche et les efforts de ceux qui l’ont formée afin d’ouvrir le débat politique établissent, pour Syriza, d’importants précédents, en imposant quelques règles élémentaires pour le fonctionnement d’une coalition plus unifiée, en particulier le droit de critiquer la direction, d’exprimer et de défendre les divergences politiques qui existent, comme un contrepoids face à toute tentative de faire virer Syriza à droite. La Plateforme de gauche a envoyé aux membres dirigeants de Syriza, à la classe dirigeante qui entend domestiquer Syriza, aux camarades du parti communiste et d’Antarsya, le message qu’existe une opposition de gauche forte et visible face à toute tentative d’imprimer à Syriza un tournant à droite ou un certain modérantisme.

L’une de nos tâches les plus importantes est d’organiser ces forces, de les engager dans les luttes sociales et de les coordonner en leur donnant une voix politique. Cela peut s’avérer la plus importante contribution afin de mettre un terme aux rêves des barons des médias qui voient Syriza capituler dans le futur devant le modérantisme. Notre organisation, DEA, combat pour ces objectifs depuis maintenant des années et continuera à le faire avec les camarades partageant notre contribution commune avec Kokkino et APO, avec ceux qui ont formé la Plateforme de gauche, et avec tous les camarades souhaitant lutter pour une véritable alternative ouvrière à la crise du capitalisme. La route qui nous attend ne sera pas facile mais il est clair que l’avenir de la gauche et de la lutte des classes en Grèce dépendra dans une très large mesure du cours que prendra Syrisa. Personne ne devrait s’abstenir de la bataille qui se mène pour ce cours politique.