Egypte, le 5 juillet 2013 par
Yannis
La colère de
beaucoup d’Egyptiens contre l’incapacité de Morsi à répondre aux problèmes de
l’Egypte est légitime, en revanche un coup d’Etat d’une armée criminelle contre
un président élu est inacceptable. La seule voie légitime et démocratique pour
virer le gouvernement de Morsi aurait été de voter pour un autre parti à la fin
du mandat présidentiel, si la majorité du peuple le souhaite.
L’armée a déjà
réinstauré les méthodes du régime de Moubarak. Sous le gouvernement des Frères
Musulmans, la majorité des médias était plutôt hostile à Morsi et jouissait
d’une liberté de critique assez élevée. Aujourd’hui l’armée a fermé l’ensemble
des chaînes de télévision susceptibles de soutenir les Frères Musulmans (en
plus d’avoir interdit toute diffusion de manifestations pro Morsi sur la chaine
nationale) et cela, avec le soutien des leaders de l’opposition. Aujourd’hui
encore 10 manifestants pro Morsi ont été tués par la police égyptienne. Tous
ceux qui contestent le coup d’Etat et dénoncent la spoliation des urnes sont
encerclés par des chars, 300 responsables des Frères Musulmans ont été arrêtés
(dont le guide de la confrérie) de manière arbitraire, en dehors de toute
légalité et certains arrivent à justifier cela au nom de la démocratie (le
ridicule ne tue pas).
A ceux, en France,
qui lisent les évènements avec une grille de lecture laïcarde, sachez que
Baradei (leader de l’opposition) a même fait alliance avec les salafistes de
Hizb Nour pour contrer les Frères Musulmans, et ce parti a signé la feuille de
route de l’armée. ça ne m’étonne pas que le premier pays à avoir salué ce coup
d’Etat ne soit autre que l’Arabie Saoudite. Baradei qui est prédit comme le
futur premier ministre avait fait un score minable aux élections, sa seule
chance d’obtenir le pouvoir était un coup de force, de plus sa proximité avec
l’administration américaine est connue. Dans un article du New York Times du 31
janvier 2011, il est clairement établi que ce dernier est un outil de la stratégie
américaine en Egypte. L’ancien conseiller au département d’Etat américain
Philip D. Zelikow, affirmait que la stratégie américaine était de ne pas
montrer qu’ils soutiennent Baradei pour que celui-ci puisse faire avancer les
intérêts des USA en Egypte, en restant crédibles dans l’opinion publique
égyptienne « nous ne devons rien
faire pour donner l’impression que nous l’aimons ».
Les électeurs de
Morsi dépossédés de leur victoire ne resteront pas les bras croisés, le risque
de guerre civile est donc bien présent, de plus, l’armée a déjà réprimé dans le
sang par le passé, elle peut tout à fait recommencer. Les Egyptiens victimes
des difficultés économiques se rendront compte très rapidement que le départ de
Morsi ne va rien changer à l’effondrement de l’économie égyptienne, bien au
contraire, la division et les tensions qui sont à leur apogée aujourd’hui vont
favoriser le blocage économique.
Enfin, si un nouveau
gouvernement d’un autre parti est élu, il est très probable que ceux qui seront
alors l’opposition agissent de la même manière que les opposants actuels et
mobilisent les foules à chaque mécontentement en exigeant eux aussi la
destitution du président. Ainsi l’instabilité et le blocage politique deviendront
une tradition égyptienne et un cercle vicieux sans fin.