La
comedia dell’arte parlementaire
L’éditorial
du n° 11 de PES - Pour l’Emancipation
Sociale
Il en a pourtant usé de la salive,
Macron, ce petit énarque issu des milieux bancaires, il a même reculé sur
certains points mineurs qui, il est vrai, compromettaient les intérêts
corporatistes des notaires et autres huissiers de justice. En catastrophe, face
à la mobilisation des journalistes, il a dû retirer un article liberticide,
interdisant l’investigation dans le milieu des affaires. Deux semaines de
commissions spéciales, trois semaines en séance pour se retrouver, avec cette
majorité éclatée alors même qu’Hollande avait décrété l’union nationale qui,
comme un feu de paille s’est éteinte. Et ce fut le mémorable heurt entre
godillots et frondeurs. Les coups de menton de Valls pour mettre de l’ordre
dans les rangs. Rien n’y fit, de décompte en décompte, il manquait toujours 46
députés adeptes du vote contre ou de l’abstention. La « petite loi »
Macron de grand détricotage des droits allait être retoquée, même si l’on
pouvait compter sur le ralliement de 4 UMP et 8 UDI. Alors, dans une dernière
posture autoritaire mal assurée, Valls en vint à brandir des mesures
disciplinaires et des noms d’oiseaux de fuser au sein des groupes
parlementaires PS : « irresponsables », « immatures »,
« nuisibles ». Et face à cette comédie pitoyable, le député du Tarn, Jacques
Valay, de s’apitoyer : « Autrefois,
tout était verrouillé, aujourd’hui, tout est vérolé ». Le 19 février,
face à la gravité rocambolesque de la situation, un conseil des ministres
convoqué en urgence décida que le compte n’y était pas, il fallait recompter.
Peine perdue à 16h15, Valls téléphona à Hollande, lui signifiant qu’en matière
d’additions, c’était le zéro pointé. A 17h, le 1er ministre
d’opérette qui n’avait pu convaincre quelques récalcitrants, engageait la procédure
du 49-3 et le texte de loi fut adopté sans vote.
Mais la comédie allait se
poursuivre : motion de censure déposée par la droite, divisions des élus
du Front de Gauche, admonestations de Mélenchon tempêtant contre le manque de
concertation puis comme d’autres, se ravisant : on ne peut pas voter une
motion de censure qui, dans ses attendus, demande encore plus de réformes
libérales ! Et impossible de trouver 58 députés pour en déposer une autre…
de « gauche ». La motion de censure de la droite connut
néanmoins les ralliements insuffisants de 6 voix du Front de gauche et d’une
écolo. Mais, la farce risque de se poursuivre au Sénat en avril avant de
revenir à l’Assemblée nationale pour finir en commission mixte. D’ici là, la
loi Rebsamen de détricotage des droits du travail risque de provoquer d’autres
remous du plus mauvais effet pour l’avenir du parti de droite qui se dit de
gauche et n’ose pas (encore !) prôner l’union sacrée avec l’UMP à l’image
de ce que fit le Pasok en Grèce. Les manifestations prévues en avril contre les
politiques d’austérité, la Berezina électorale annoncée, les ralliements de
notables UMP et UDI au FN, promettent des jours agités à la caste qui tient à
ses places. Quant à l’UMP divisée, en faillite financière, on la voit mal être
capable de rigueur à moins que cela soit sous la férule de Merkel et, qui sait,
de la troïka. Quant au Front de gauche, laissons la parole à Mélenchon :
« c’est un cartel de partis sans
ancrage de masse, ni de volonté d’en avoir ». Bref, l’ingouvernementabilité
a encore de beaux jours devant elle… pourvu qu’elle fasse prendre conscience au
plus grand nombre qu’ils sont les vrais acteurs du changement social.