PES n° 22
l'édito
Ébranler
le pouvoir fragilisé
de
Valls/Hollande, c’est possible
Ils
ont osé présenter une loi rétrograde dite « en faveur de
l’emploi » avec comme recettes : le recours à des
journées de travail portant la semaine à 46H voire 60H par accord
d’entreprise, la possibilité de réduire à 10% la rémunération
majorée des heures supplémentaires, la mise hors-jeu des syndicats
majoritaires en utilisant les minoritaires collabos pour imposer des
accords régressifs, accroître l’exploitation des apprentis de
moins de 18 ans jusqu’à 10H par jour et 40H par semaine, retirer
aux juges prud’homaux le pouvoir d’appréciation des préjudices
subis lors de licenciements abusifs…
Valls/Hollande,
pressés par la Commission européenne, en bons élèves des
politiques austéritaires et de casse des droits des salariés,
voulaient passer en force en brandissant l’arme du 49.3. Mal leur
en prit : une pétition de plus d’un million de signatures, la
bronca au parti socialiste, las d’être traité comme un vulgaire
godillot, la jeunesse étudiante et lycéenne mobilisée, les
travailleurs avec eux dans la rue.
Et
ce furent, dès lors, de piètres reculades en s’appuyant sur les
syndicats d’accompagnement, afin de diviser le mouvement social et
de sauver le PS en déliquescence.
Reste
la question essentielle : le mouvement social peut-il obtenir le
retrait de la loi El Khomri, ébranler ce pouvoir affaibli ? Ce
qui est sûr, c’est qu’il en est profondément bousculé, à
preuve les crispations régressives contre les lycéens, la peur de
voir l’UNEF débordée, la crainte de voir à Nantes s’opérer la
jonction entre les étudiants et les zadistes, la surveillance
renforcée dans les universités de Montpellier, Rennes, Caen… Et
puis, il y a tout ce qui hérisse : les lois répressives de
l’État d’urgence, la déchéance de nationalité, le traitement
indigne des exilés, migrants et sans papiers, l’ignoble
marchandage d’êtres humains avec la Turquie pour les renvoyer en
masse dans des camps de tri…
C’est
là un cocktail révulsif prompt à affecter les plus timorés des
indignés. N’en demeurent pas moins des contre-feux
démobilisateurs : le télescopage avec les attentats
terroristes, la novlangue des forces dominantes assurant qu’il n’y
a pas d’alternative, le racisme et la xénophobie… et surtout,
les institutions de la 5ème République qui cadenassent
l’ordre existant, encore accentuées par le pouvoir jospinien en
2001 en inversant le calendrier électoral et réduisant le mandat
élyséen afin de renforcer, encore, le pouvoir exécutif…
Certes,
faire véritablement reculer le pouvoir, obtenir le retrait de la loi
El Khomri, voire, précipiter la chute de Valls sont de l’ordre du
possible. Encore faut-il que le mouvement social dure, s’amplifie,
se consolide pour faire mûrir la perspective de transformation
sociale radicale. Il risque de rencontrer non seulement les forces
répressives mais, en son sein, la peur de l’inconnu, celui de
l’avenir qu’il dessine. En tout état de cause, ce régime, ces
institutions à bout de souffle, ces partis dominants rejetés,
devraient inciter à l’optimisme, d’autant qu’il semble que la
loi El Khomri soit encore loin d’être votée.
Le
29.03.2016