Ci-dessous l'édito du n° 38 de PES
Le
« sang impur », la gangrène et la colère
Le 23 octobre dernier, Al Sissi, le
Pinochet égyptien, était reçu en grande pompe à l’Elysée avec toute sa cohorte
de ministres affairistes. Vis-à-vis de ce despote en treillis qui a transformé
le printemps arabe de ce pays en
tombeau des droits de l’Homme, il n’était pas question pour le petit Jupiter de
lui « donner des leçons, hors
contexte ».
Sûr que la répression sanglante des
Frères Musulmans, soutenus par les princes du Qatar mais honnis par les amis
d’Al Sissi pétro-monarques d’Arabie Saoudite, a provoqué l’émergence de
djihadistes-terroristes, confortant ainsi l’idée consensuelle qu’il faut
abreuver les sables du Sinaï et du désert libyen du « sang impur ».
Pas si sûr qu’il faille armer ce dictateur pour qu’il intervienne dans le chaos
libyen, provoqué notamment par Sarko. Aider l’ex-kadhafiste, le colonel Haftar,
contre son adversaire imposé par ladite communauté internationale, c’est
ajouter la guerre à la guerre. Ce qui est certain, en revanche, pour l’industrie
de la mort, c’est que plus il y a de guerres et de répressions, plus elle est
prospère.
Et qu’importe ce « hors contexte », ces 14 000 tués lors des
manifestations, ces 60 000 prisonniers politiques, syndicalistes,
associatifs, journalistes, homosexuels. Qu’importe qu’ils soient torturés avant
d’être condamnés à mort (500 peines prononcées, 81 exécutées). Ce n’est que du
« sang impur » pour les gradés et les juges égyptiens ! Macron
s’est réjoui de serrer les mains ensanglantées d’Al Sissi, lui assurant les
moyens de massacrer et de tuer encore plus. C’est qu’il en va du rang de la
France, 4ème exportateur d’armes dans le monde. Les promesses de
livraisons doivent être tenues : 6 milliards d’euros de
porte-hélicoptères, d’avions Rafale, de missiles et autres munitions, ça fait
le bonheur de Dassault, Safran, Thales, Nexter… et des emplois :
200 000 salariés, plus que dans l’industrie automobile ! Jean-Yves Le
Drian, l’excellent VRP socialo,
est le symbole de la continuité assurée. De Balladur en passant par Chirac,
Sarko, Hollande, avec Macron, la gangrène peut prospérer : commissions,
rétro-commissions occultes et autres corruptions riment toujours avec le sang
versé. Et qu’importe les alliés et ennemis d’hier et d’aujourd’hui. Des Exocet
pour couler des navires anglais aux Malouines, livrés au dictateur argentin,
les mêmes aux mains de Saddam Hussein contre les mollahs iraniens, toute
l’armada guerrière pour l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis, pour
bombarder au Yémen civils, écoles et hôpitaux…
Qu’importe la colère des ONG des
droits de l’Homme. Pour les cyniques qui nous gouvernent, ce ne sont là que glapissements
« hors contexte ». Qu’importe
ceux qui souffrent et croient encore aux promesses hollandaises puis
macroniennes comme en Guyane (plan d’urgence de 1 milliard et assurance de 2
milliards supplémentaires pour que
la Guyane décolle), puisqu’ils ne comprennent rien à la « pensée complexe » : Macron ne
peut pas être, « en même temps »
le « père Noël » des
soudards et celui des gueux.
Assurément, ces derniers doivent se
« sortir d’une relation perverse »
(sic) avec les sommets élyséens pour faire surgir par le bas des mouvements
anti-guerre et de transformation sociale qui balaieront toutes ces putrides
relations.
GD le 27.10.2017
Les expressions en italique et entre
guillemets sont extraites des propos récents de Macron lors de la visite d’Al
Sissi et en Guyane