Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


mercredi 28 mars 2018


Dans le cadre du festival Diversité,
Les Amis de l’Emancipation Sociale, les Amis du Monde Diplomatique Nord Franche-Comté,
vous invitent

Vendredi 6 avril 2018
à 20h30  au cinéma Méliès à  LURE (5.90€)

L’amour et la révolution
Suivi d’un débat en présence de Yannis Youlountas – réalisateur-
Sur le thème 
 Les résistances du peuple grec face à l’austérité imposée

Les médias ne parlent plus de la Grèce, laissant croire que la crise d’austérité a réussi et que le calme est revenu. Non ! Rien n’est fini en Grèce. Yannis Youlountas, dans son 3ème film sur ce thème, nous prouve le contraire et nous fait vivre l’utopie mise en actes, comme en écho à la phrase de Victor Hugo : tenir bon, tenir tête, voilà l’exemple dont les peuples ont besoin et la lumière qui les électrise. Ce film est réalisé en soutien aux initiatives solidaires autogérées en Grèce. Venez voir et débattre.  
Contact : aesfc@orange.fr     03.84.30.35.73














PES n° 42 est paru
l'éditorial, ci-dessous

Un clic social d’ampleur
pour renvoyer Macron chez Rothschild ?

Les classes ouvrières et populaires face à « l’offensive générale » contre leurs conditions de vie se laisseront-elles, encore une fois, berner ? La stratégie du choc de Macron entend produire, avec ses réformes tous azimuts, un effet de sidération désorientant les plus imperméables à la novlangue. Pour le petit Jupiter qui n’est advenu que grâce au rejet des partis d’alternance, en l’emportant face à l’épouvantail lepéniste, tout serait possible. Après la SNCF privatisée, ce serait la Sécu démembrée, la fonction publique ratiboisée, le SMIC obsolète…

Mais la messe n’est pas dite. Il n’est pas écrit que nous allons connaître les paradis frelatés du Royaume Uni, de l’Italie, voire de l’Allemagne, et donc, de la paupérisation et de la précarisation croissantes.

Tous les ingrédients objectifs semblent en effet réunis : salariés du privé maltraités, licenciés à souhait, retraités ponctionnés, EHPAD compressés, hôpitaux à la dérive, étudiants entassés et sélectionnables, fonctionnaires laminés, paysans endettés et englués dans le productivisme et le glyphosate… La locomotive des cheminots peut-elle entraîner la convergence de tous ces mal-être, et sortir tous les wagons des fracassés du capitalisme financiarisé déchaîné qui ne connaît plus aucune limite ?

Les manifestations du 22 mars ont certes connu un succès relatif. Pour l’heure, la caste régnante reste sereine. Elle espère que la grève perlée qui s’annonce et les consultations bidon qu’elle promeut, étoufferont les manifs saute-moutons et instaureront définitivement, comme dans la botte italienne, l’inutilité voire l’insignifiance du syndicalisme. Reste qu’elle se doit de contenir les bévues de ses propres zélateurs, comme celle d’Elisabeth Borne laissant entendre que la privatisation de la SNCF s’accompagnerait de « plans (très !) sociaux » de licenciements. Elle ne comprend rien au social, s’est exclamé Matignon, aux politiques de la duperie du « en même temps », de droite et de gauche et inversement, à la magie des mots macroniens.

Il faut espérer que les salariés et toutes les victimes de ce système nuisible ne seront pas aveuglés par les discours théâtraux de Macron et de ses sbires. La mise en scène de la division et l’éructation contre les privilégiés du statut, afin de tirer tous ceux qui ne font pas partie de l’élite mondialisée vers le bas du moins-disant social, vont s’exacerber dans les semaines qui viennent. Il faut espérer qu’ils ne se laisseront pas amadouer par les directions syndicales, tout particulièrement celles qui cherchent à s’introniser « interlocutrices privilégiées du gouvernement ». N’en demeure pas moins que les mauvais Berger sont actuellement meurtris d’être mis sur la touche, jurant qu’il ne faudra pas venir les chercher quand il sera trop tard pour éteindre l’incendie social qu’ils redoutent.

La poussée de la base sera-t-elle suffisamment forte pour bousculer le jeu institutionnel et, dans la foulée, promouvoir un syndicalisme véritablement indépendant ? Quoiqu’on en dise, sur les 46 millions de recettes des syndicats, les 13.5 millions de cotisations pèsent peu, face aux subsides de l’Etat. N’en demeure pas moins que la combativité réelle, à l’exemple des Conti, des Good Year et de tant d’autres, pourrait bien cette fois changer la donne. Se rendre ingouvernable  vis-à-vis de ceux qui veulent nous imposer austérité, précarité, sous prétexte de flexibilité, tel est l’enjeu. Renvoyer Macron à ses missions de chargé d’affaires chez Rothschild ouvrirait la voie, pour l’heure bloquée, à une véritable alternative au capitalisme prédateur. Mais, pour ce faire, la parole doit être libérée !

GD le 25 .03.2018   


La course aux richesses

Elle cause inégalité,
Destruction et pauvreté
Elle dessine la souffrance du monde
C’est une maladie qui ronge
Les entrailles de la terre
Et recrache son lot de misères
Elle carbonise nos vies éphémères
Elle calcine la pensée originale
Pour bousculer la morale
Ce monde n’avance pas sur le bon rail
C’est la zizanie, la pagaille
Nous engraissons de gros chacals
Réagissons c’est vital
Dans un esprit global
Redonnons la main à notre terre natale
Celle d’un monde original

Hassen


Histoire du Liban. Des origines à  nos jours
Cet ouvrage de l’auteur qui a vécu 12 ans au Liban est une somme impressionnante. Il nous fait connaître ce pays qui fut traversé par de multiples civilisations avant de vivre sous la férule de l’empire ottoman. Coincé entre la Syrie au nord et Israël au sud, le Liban, malgré les secousses historiques et les conflits internes qui l’ont marqué, est le seul pays arabe à n’avoir pas connu de régime dictatorial. Il a malgré tout réussi à faire coexister ses communautés ethniques et ses religions différentes (sunnites, chiites, chrétiens...) et ce, malgré les ingérences étrangères et les occupations qu’il a subies.
Ce sont tous ces évènements que nous fait revivre le journaliste historien, et ce, de l’Antiquité jusqu’à la période actuelle. En les parcourant, vous revisiterez la colonisation mandataire française de 1922 à 1943, après le partage de l’empire ottoman et ce, jusqu’au départ des troupes françaises en 1946.
Puis l’organisation de la résistance palestinienne dès 1965, à partir des bases libanaises, l’instrumentalisation des milices chrétiennes par Israël et la Syrie, l’invasion du Liban nord en 1976 par la Syrie d’Assad père, l’occupation sioniste du Liban sud en 1978, le bombardement de Beyrouth en 1982, son occupation et les massacres des camps palestiniens de Sabra et Chatila, ainsi que la résistance du Hezbollah et le retrait israélien en 2000. Aujourd’hui, le régime fragile du Liban réussit toujours, malgré la présence de plus d’un million de réfugiés syriens et les multiples ingérences qu’il a subies, à maintenir son unité.
Pour tous ceux qui veulent mieux comprendre l’arrière-plan des enjeux conflictuels entre grandes et moyennes puissances dans cette région, ce livre agit, à la lecture, comme un révélateur. GD
Xavier Baron, ed. Taillandier, 2017, 24.90€


La bataille du rail aura-t-elle lieu ?

C’est au moment de la révolution industrielle, que la loi du 11 juin 1842 définit le régime de gestion du chemin de fer : l’Etat construit et les compagnies privées exploitent les lignes. Ce compromis public/privé a toutes les faveurs des compagnies, le monopole d’Etat limitant la concurrence, les garantissant en cas de déficit et prenant en charge une partie de la dette. Ce régime mixte dure jusqu’au décret-loi du 31.08.1937, créant la SNCF Société Nationale du Chemin de Fer, société anonyme au capital mixte dans laquelle l’Etat détient 51% ; elle durera, comme prévu, 45 ans, la totalité du capital passant alors à l’Etat. Le 1er janvier 1983, la SNCF devient un EPIC – Etablissement public à caractère industriel et commercial. Ce statut ne modifie pas profondément la gestion, ni le déficit chronique, l’Etat n’ayant jamais cherché à équilibrer, par la fiscalité, la concurrence entre le rail et la route. A compter de 1974, l’Etat décide de ne plus combler les déficits des entreprises publiques. La SNCF doit donc recourir à l’emprunt sur le marché financier, ce qui enclenche une spirale d’endettement (1). La logique d’ouverture à la concurrence va alors s’inscrire dans un temps long pour aboutir à la privatisation totale. A l’heure macronienne qui considère que le service public et les statuts de la fonction publique sont des systèmes « archaïques », des reliquats du « vieux monde », on ne peut qu’espérer, et tout faire pour, le rejet de privatisation du dernier « paquet » ferroviaire, et « en même temps » du statut de cheminot.
   
Du monopole au démantèlement du service public ferroviaire…

Le néo-libéralisme européen introduit et définit le contenu de la réforme ferroviaire de 1997, séparant les activités ferroviaires en deux : à Réseau Ferré de France (RFF) la gestion des infrastructures (voies ferrées…) et la commercialisation des « sillons », à la SNCF la gestion des services et l’entretien des infrastructures pour le compte de RFF, dans le cadre d’une convention de gestion, RFF rémunérant SNCF et SNCF payant des péages à RFF. Dans ce « jeu » à intérêts contradictoires, chacun tente d’équilibrer son compte d’exploitation au détriment de l’autre.

Le ver est dans le fruit. La politique néo-libérale européenne se met en œuvre inexorablement, lentement pour éviter de provoquer des réactions vives dans ce secteur professionnel combatif et dans ce service défendu par ses usagers. La transposition des directives européennes rend possible l’ouverture à la concurrence du 1er « paquet ferroviaire », le fret international (2003), puis le 2ème « paquet », le fret national (2006). Enfin, le 3ème « paquet » ouvre à la concurrence le transport international des voyageurs (2010). La volonté de privatiser s’appliquera sous des gouvernements de droite et de « gauche ». La dynamique introduite en 1997 accélère le démantèlement du système ferroviaire national, la SNCF segmentant ses « clientèles » et gérant « par activité » (grandes lignes, fret, TER, etc…). Les intérêts privés s’approprient les morceaux rentables du transport par rail, bénéficient des investissements passés et laissent à l’Etat la gestion des secteurs déficitaires, ce qui, au bout du compte, « autorise » la SNCF à les abandonner d’autant que la péréquation tarifaire est interdite.

Le tour de passe-passe de l’UE a été de convaincre que le monopole « naturel » d’un système ferroviaire le cantonnait à gérer les voies ferrées, séparant ainsi la gestion des services et des infrastructures. Cela permet à des trains d’entreprises distinctes de rouler sur les mêmes lignes. Pour le système capitaliste, il s’agit de s’approprier les parties rentables de la sphère publique. C’est ce même principe qui a prévalu dans la privatisation de la distribution du gaz ou de l’électricité, ou encore des télécommunications.

Depuis janvier 2015, le groupe est divisé en 3 EPIC (Etablissement public à caractère industriel et commercial) : SNCF réseau gère les infrastructures (notamment les voies ferrées et la circulation des rames), SNCF mobilités fait rouler les trains transportant voyageurs et marchandises et SNCF Holding chapeaute l’ensemble. Chacun crée ses propres filiales, au gré de sa stratégie de développement et du transfert d’une partie de ses activités à des sociétés privées. Keolis, Geodis, Ouigo, Ouibus, Voyages-sncf, Effia, Altameris, Arep, Systra… sont des filiales de la SNCF. De 187 en 2007, elles sont passées à 1 250 en 2017. Ainsi, la SNCF est présente dans 120 pays et réalise 1/3 de son chiffre d’affaires à l’international (2016). Mais les filiales agissent aussi en France dans des domaines d’activité très variés : travaux et maintenance des voies (Sferis), aménagement et administration des gares (Gares et connexions), gestion de 115 000 places de parking (Effia). Les deux mastodontes Keolis et Geodis emploient plus de 50 000 salariés chacune et possèdent à leur tour leurs propres filiales… Keolis exploite  240 km de métro, 660 km de tramways et 5 800 trains dans 16 pays. Elle possède 23 000 bus et investit dans le vélo, le covoiturage ou les navettes maritimes et fluviales. Avec 58 300 salariés, elle est une filiale géante détenue à 70% par la SNCF, avec une participation de la Caisse des Dépôts du… Québec, à hauteur de 30%.

Ce système met en concurrence la maison mère avec ses propres filiales et permet de contourner la réglementation du travail. Par ailleurs, la SNCF s’est délestée de ses actifs : les wagons, les machines ou l’immobilier sont basculés sur des sociétés privées. Autrement dit, pour la maison mère : les coûts de la dette (46.6 milliards d’euros) et la rémunération du personnel et pour les sociétés privées : la conquête des marchés et des bénéfices !   

L’ouverture totale à la concurrence, proche, va faire encore des « victimes ». Les prédateurs lorgnent sur le marché intérieur français de 400 millions de voyages annuels. Ils se nomment : Transdev, filiale française du groupe Caisse des dépôts, principal rival de la Deutsche Bahn, présente aussi en Suède ; Arriva, filiale de la Deutsche Bahn, présente en République tchèque, Pologne, Suède, Danemark et Pays-Bas. Autre candidat sérieux Trenitalia avec sa filiale Thello qui propose déjà des voyages internationaux vers Venise et Milan ; la néerlandaise Abellio, l’écossaise Groupe First et le chinois MTR, opérateur du métro de Hongkong qui pourrait concourir sur des appels d’offres des nouveaux métros du Grand Paris.

… Jusqu’à la privatisation totale

Voici venir le 4ème « paquet » : le transport des passagers nationaux et régionaux. Le parlement européen du 16 décembre 2016, a décidé que les LGV pourront être commercialisées par de nouveaux opérateurs en 2020, puis en 2023, ce seront les lignes TER et Intercités.

Au-delà de quelques obstacles techniques relatifs, par exemple, aux systèmes de sécurité embarqués, obligatoires sur les LGV qui ne sont plus fabriqués pour l’instant, d’autres freins à la privatisation totale subsistent encore, notamment les syndicats de luttes pour le maintien du statut. Macron/Philippe souhaitent les torpiller par ordonnances.  

Le rapport Spinetta du 16 février dernier est la base des décisions à venir sur la SNCF. Il pose un diagnostic essentiellement financier, relatant l’état lamentable des lignes, dû au sous-investissement massif depuis fin des années 1970 ; les LGV ont été favorisées au détriment des « petites » lignes représentant près de 45% du réseau pour moins de 2% de voyageurs alors que 90% des voyageurs se concentrent sur un tiers du réseau. Il souligne que l’entreprise publique ne peut continuer sur le même modèle économique, dans le contexte d’ouverture totale à la concurrence. Certes, le transport de 5 millions de voyageurs par jour, dont 3.5 millions sur les lignes surchargées d’Ile-de-France, peuvent aiguiser les convoitises des sociétés privées à la recherche de marchés nouveaux.

S’appuyant sur une partie de ce rapport, E. Philippe présente, le 14 mars en conseil des ministres, le « projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire », autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnances.  En premier lieu, il suggère « d’améliorer le fonctionnement du groupe public dans le contexte de l’achèvement de l’ouverture à la concurrence des services de transport ferroviaire » et de transformer la SNCF en société anonyme à capitaux 100% publics. Ce 1er article  prévoit la disparition du statut de cheminot pour les nouveaux embauchés. Pour parer le feu qui couve, il annonce qu’aucun changement n’est prévu pour les 130 000 statutaires (sur 147 000 agents). Les craintes sont toutefois réelles en ce qui concerne les conditions de transferts vers les nouveaux opérateurs si l’employeur public perd le marché ! L’autre grand volet du projet de loi organise l’ouverture à la concurrence du 4ème « paquet » ferroviaire, le transport des voyageurs nationaux et régionaux, d’ici la fin 2020 et 2023. Autrement dit, la privatisation totale du système ferroviaire. Prudent, pour calmer, cette fois, la colère des élus territoriaux, il précise que le projet n’envisage pas de fermeture de petites lignes (9 000 km existantes) avant que cette question ne soit évoquée avec les régions notamment, même si l’ouverture à la concurrence concerne  les lignes TER conventionnées et subventionnées par les régions.    

N’est pas évoqué, par le 1er ministre, l’endettement de la SNCF. Il faudra pourtant bien aborder certaines  questions. Comment transformer en SA, SNCF Réseau, lesté de 46 milliards de dettes ? La dette sera-t-elle reprise par l’Etat ? SNCF Réseau ne changerait-il pas de statut ? 
Déjà en 1997, l’endettement « abyssal » de la SNCF a servi d’argument à la division de la SNCF en trois EPIC. Peut-on parler de dette de la SNCF alors même que c’est l’Etat qui décida, notamment de la construction des lignes TGV, dont les investissements ont largement contribué à accroître la dette ? L’Allemagne avait repris la dette ferroviaire dans son budget. La France, en 1997, a imaginé un tour de passe-passe pour faire disparaître cette dette publique, en créant RFF et en lui transférant la dette (de 36 milliards à cette époque). Ni vu ni connu, la part principale de la dette n’apparaissait plus dans le calcul des critères de Maastricht ! Elle passait sous le tapis RFF. Mais, quand le 17 mars 2003 l’agence européenne des statistiques Eurostat décida que les dotations en capital de l’Etat à RFF étaient des dépenses publiques à comptabiliser, la dette ressortit de dessous le tapis ! Bilan ? Cette gestion à trois semble incongrue : la SNCF verse à RFF des péages pour utiliser les voies ferrées  (2.40 milliards en 2006) alors que RFF rembourse les emprunts à la même  hauteur ! Une usine à gaz qui a surtout servi à démanteler le service public, par activités au moyen de la création de multiples filiales.

Dans ces montages financiers, il n’est pas question de discuter de la politique du transport, du choix du rail ou de la route, de l’impact écologique, de la satisfaction des besoins des usagers, de la lutte contre la désertification des zones rurales mal desservies. Il faut rappeler que jusqu’en 1996, la SNCF recevait de l’Etat une contribution à ses charges d’infrastructure, pour compenser les distorsions de concurrence avec le mode routier qui ne paie ni l’entretien des routes,  ni l’éclairage public, alors que la SNCF doit payer l’entretien des voies, l’éclairage des quais, etc… Bref, s’il y a endettement, cela ne provient pas du statut de cheminot.

Le statut de cheminot, agité comme un épouvantail pour faire oublier l’essentiel

Pour rendre la privatisation populaire et « en même temps » se débarrasser de cet « avatar du vieux monde » qu’est le statut de cheminot, Macron n’hésite pas à faire dans le mode populiste, dressant le paysan contre le cheminot, ce « nanti » protégé par un statut.

Non, les cheminots ne sont pas payés quand ils font grève. Oui, certains cheminots touchent le SMIC. Non ils n’ont pas 48, 60 ou 70 jours de congés par an, mais 28 jours. Oui, les roulants sont des professionnels qui transportent 800 personnes derrière eux. Oui, les primes servent à garantir un service du 1er janvier au 31 décembre, week-end compris, jour et nuit, vacances scolaires et jours fériés. Oui les contrôleurs travaillent 3 week-end sur 4 et dorment régulièrement loin de chez eux. Non les cheminots ne partent pas tous en retraite à 50 ans. Ce régime spécifique subit depuis une dizaine d’années des coupes sévères : les roulants nés à partir de 1972 peuvent partir à 52 ans (et non plus à 50 ans) ; les sédentaires nés à partir de 1967 peuvent partir à 57 ans (et non plus à 55) ; la durée de cotisation pour toucher une retraite à taux plein est progressivement relevée pour atteindre 172 trimestres pour tous, à terme. D’ailleurs, la SNCF a toutes les difficultés à recruter. Pire, en 2016, il y a eu 614 démissions, 135 ruptures conventionnelles et 640 départs volontaires. La place est-elle si bonne ? Car, comme à la Poste, la dégradation du service rendu, du fait du non remplacement des départs, la polyvalence des tâches, les salariés à statuts différents, créent des conditions de travail difficiles. Les effectifs des statutaires n’ont cessé de baisser depuis 15 ans passant de 178 000 en 2003 à 130 000 en 2017. Les filiales emploient environ 115 000 salariés hors statut. Le recours à des emplois précaires d’intérimaires et CDD se généralise.


La bataille du rail, nous devons la mener… et la gagner

Les médias parlent peu des enjeux sinon pour affoler les usagers. Quant au gouvernement, voulant faire sauter les verrous du statut pour en finir avec cette « anomalie » dans sa politique néolibérale, il stigmatise les cheminots « qui coûtent trop cher » et se garde bien d’annoncer ce qui va toucher les usagers. Le rapport Spinetta prévoit, en effet, une hausse des tarifs, en supprimant le dispositif de régulation tarifaire de la SNCF, la suppression des lignes non rentables, la réduction des dessertes TGV. On est loin d’un grand maillage du territoire pris en charge par l’Etat en grande partie, ce sont les collectivités, au contraire, qui vont être en première ligne.

Quant à la concurrence qui permettrait de diminuer les coûts, il suffit d’ouvrir les yeux sur l’exemple du fret français et du transport de voyageurs britannique.

En France, le transport de marchandises ouvert au privé a un bilan catastrophique : alors qu’en 1947, 75% des marchandises transitaient par le rail, ce taux n’est plus que de 10% en 2014. De 1990 à 2015, le transport routier de marchandises a crû de 40% alors que le transport ferroviaire baissait de 34%. Pour la SNCF, selon la Cour des comptes, la concurrence a multiplié plus que par deux la dette imputable au fret entre 2008 et 2014.

Et il suffit de traverser la Manche pour faire un saut dans un futur plutôt moche : 20 ans de privatisation de British Rail = hausse incontrôlée du prix des billets, trains supprimés, accidents répétés, réduction du personnel conduisant près de deux Britanniques sur trois à souhaiter une renationalisation complète. Ils déboursent chaque mois six fois plus que les Français simplement pour se rendre sur leur lieu de travail (14% de leur revenu mensuel, très exactement, contre 2% pour les usagers de l’Hexagone.

Les 4 syndicats représentatifs de la SNCF, CGT, UNSA, SUD Rail, CFDT ont décidé d’un calendrier de deux jours de grève sur 5 à partir du 3 avril jusqu’à la fin juin. Il ne faudrait pas que cette unité lâche au profit d’une négociation interprofessionnelle sur les conditions de travail dans le ferroviaire, via un accord de branche qui s’appliquerait à toutes les entreprises privées du secteur du transport.

Ils ferment des lignes ! Ouvrons nos bouches ! Un collectif de salariés, de syndicalistes et d’usagers de la SNCF ont lancé un appel « Avant qu’il ne soit trop tard » pour un plan B écolo et social à la SNCF sur une base anti-productiviste, exigeant un grand débat public sur le devenir du chemin de fer, affirmant que le statut des cheminots, loin d’être un obstacle à la transition écologique est la condition du développement d’un grand service public ferroviaire.

Il n’est jamais trop tard… mais il va falloir mettre les bouchées doubles… à moins que le statut du cheminot ne soit la goutte qui fait déborder le vase… pour que tous disent : Macron, un an ça suffit !

Odile Mangeot, le 20.03.2018

Sources pour cet article : Attac, Politis, bastamag, le Monde, mediapart, Alternatives économiques          

(1)   Pour plus de détails sur l’histoire de la SNCF, voir article paru dans PES n° 36, juillet/août 2017 


Forum des Migrants
ITIN’ERRANCE
Samedi 7 avril 2018
FONTAINE-les-Luxeuil

EUROPE : fabrique à clandestins

10h : ouverture
12h : repas partagé

15h : conférence-débat sur
Le Droit d’asile bafoué
en présence de Philippe WANNESSON
Passeur d’hospitalité

19h : concert
CEUX D’LA MOUFF’
chansons rumba-rock

Animations tous publics
Jonglage - Des billes et des Balles
Jeux de rôles - Cimade

Organisé par Le Collectif
                                            d’Aide et de Défense des Migrants de Haute-Saône

en partenariat avec le Centre social de St Loup-sur-Semouse

Entrée gratuite -  imprimé par nos soins - ne pas jeter sur la voie publique



Afrin est tombée à cause de la traîtrise occidentale

Comme nous pouvions le craindre, Afrin est tombée ce dimanche matin du 18 mars. L’armée turque et ses mercenaires : l’armée syrienne libre (ASL), composée principalement de combattants djihadistes d’Al-Nosra, dAl-Qaïda et d’ex Daesh, occupent une ville dont la majorité de la population est kurde. Le président turc, Recep Tayyip Erdogan l’a annoncé en personne, se glorifiant, tel un coq, sa victoire, tout en insultant les combattants kurdes.
Notre crainte était justifiée, si les militant-e-s kurdes sont de vaillants-e-s guerrier-e-s, comme ils et elles l’ont prouvé en battant Daesh, leur capacité de combat n’a que peu de poids face aux bombardements des forces turques. L’YPG kurde (Unité de protection du peuple) ne possède ni blindés, encore moins une aviation. Afrin était assiégée depuis des semaines, l’eau commençait à manquer cruellement, et l’armement kurde s’épuise… Les Etats-Unis n’ont plus d’intérêt immédiat à leur en fournir maintenant que Daesh est presque anéanti.
« L’empereur » Erdogan ne lutte pas contre des terroristes comme il le prétend ; au point de s’étouffer, il a appelé tous les bons musulmans à faire le djihad contre les Kurdes. Si ce n’est pas un projet génocidaire, ça y ressemble. Les incessants bombardements de la ville d’Afrin résonnent médiatiquement très peu, comparés à ceux d’El-Assad sur la ville de la Ghouta orientale. Pourtant des centaines de civils sont morts sous les bombes et les obus, et l’hôpital a été bombardé, tout comme les écoles. Erdogan-El-Assad, barbares et totalitaires, c’est kif-kif ! La complicité à peine voilée de la France, de l’UE, de la Russie et des Etats-Unis avec le dictateur turc est une véritable traîtrise, alors que des promesses avaient été faites aux Kurdes Syriens qu’ils seraient protégés contre la haine d’Erdogan. Une fois de plus, ces chancelleries retournent leur veste… En faisant le jeu d’Erdogan, Macron notamment, l’autorise à se venger des diverses minorités vivant en Turquie – comme il l’avait insidieusement promis (voir les PES n° 29 & 30). Or, ses combines permettent justement à Daesh, ou autres criminels déguisés en croyants, de se maintenir dans la région et même de se reconsolider. Pratique, tout ça : entretenir indirectement des djihadistes, entretenir des fachos au Moyen Orient, entretenir l’insécurité ici en France contre des terroristes toujours en fonction… Mais, les affaires sont les affaires…
Cependant, les combattants kurdes n’ont pas dit leur dernier mot ; l’armée turque est en effet entrée dans la ville d’Afrin, pratiquement vidée de tous ses habitants et de ses résistants. Les YPG, plutôt que de subir des bombardements massifs meurtriers, ont fait évacuer la population et les combattants, refusant l’affrontement inégal et préférant recourir à la guérilla… à suivre. JC 19/3.


Après les élections, l’Italie encore plus sinistrée

La longue détérioration de la situation économique et sociale de l’Italie, accentuée par le « fardeau de la crise migratoire » qu’elle supporte pratiquement seule face aux égoïsmes nationaux des autres pays européens, fait de cette péninsule le bateau ivre de la mondialisation financière. La crise de 2007-2008 et les politiques austéritaires visant à sauver les banques, à rembourser une dette publique astronomique et, par conséquent, à accroître le taux d’exploitation des travailleurs, tout en réduisant les dépenses sociales, sont autant de facteurs la livrant aux pires démagogues. Cette déliquescence est le fruit amer des politiques européennes, y compris s’agissant de l’accueil des migrants. Les politiques madrés qui se sont agités sur la scène électorale sont prêts à toutes les roueries. Si aucune majorité ne s’est dessinée parmi ce marigot de coalitions en apparence improbables, les margoulins tentés par la combinazione et le « transformisme » pourraient rejoindre soit la droite extrême, soit les 5 Etoiles recentrées. Dans l’immédiat, la crise institutionnelle va durer, même si les néolibéraux européens de Bruxelles vont vouloir rapidement y mettre un terme. Reste que, plus qu’hier, l’Italie semble vouée à être dirigée par les plus retors ou les plus roués et livrée à l’accentuation de la haine vis-à-vis des étrangers.

1 – Déliquescence économique et sociale

L’Italie, l’un des pays fondateurs de l’Union européenne, en est la 3ème économie. Sa situation actuelle ne sera pas sans conséquence sur le délitement de l’Europe. Elle a été particulièrement affectée par la crise économique mondiale de 2007-2008 et la cure d’austérité imposée par la Troïka européenne, sous la férule de Mario Monti, après l’éjection de Berlusconi par Sarko et Merkel. Le chantage au recours au FMI et la terrible récession de juillet 2011 à juin 2014 ont permis, pour l’essentiel, le sauvetage des banques, par l’injection de crédits d’Etat. Résultat : la dette publique a bondi à 2 300 milliards d’euros, soit 130% du PIB. Pour tenter de la réduire, les politiques d’austérité ont été draconiennes, sans susciter de mobilisations salariales massives : la contre-réforme des retraites, particulièrement douloureuse, (1) est emblématique à cet égard. Elle ne fut suivie que d’une grève de 2 heures, Mario Monti se vanta dans une récente interview qu’il n’y ait eu aucune concertation avec les syndicats, sauf une réunion de 1h30 ! L’union sacrée prévalant entre tous les partis, sauf la Ligue du Nord, était assumée par les directions syndicales. Résultat : la récession fut suivie par la stagnation économique et le marasme social. Précarité, Job Act et chômage massif consécutif à la désindustrialisation. Chômage à 11%, à 34% pour les jeunes de 18 à 25 ans, à 17% pour les moins de 35 ans, encore qu’il faille introduire dans ces moyennes la fracture Nord-Sud. En Calabre, au sud de la péninsule, le taux de chômage est de 33%. Qui plus est, en 2016, plus de 50 000 Italiens ont émigré dans un autre pays européen.

Reste que le système bancaire est loin d’être sauvé. Sur les 900 milliards de créances douteuses, 1/3 d’entre elles est toujours présent dans les banques, particulièrement dans les petites qui représentent 15 à 20% du réseau. Il est envisagé de les fusionner avec des licenciements à la clé. A titre d’exemple, la grosse banque UNI-Crédit a supprimé 14 000 emplois et 682 agences.

S’ajoutent à ce marasme régressif, l’afflux des migrants et l’indifférence des pays européens (voir plus loin). Malgré tout, l’Italie dans un premier temps, a créé 180 000 places d’accueil pour les exilés dont ¼ est géré par les mairies, le reste est sous contrôle des préfectures. Elles ont externalisé cette mission, par des contrats privés lucratifs, à des sociétés privées. D’où le scandale romain dénoncé comme un business de migrants. Et le problème ne fait que s’intensifier : en 2017, 120 000 exilés ont échoué en Italie sauf les 2 873 qui ont péri en mer. Depuis le début d’année, 50 000 sont encore arrivés.

De fait, ce pays, touché par 30 ans de politiques néo-libérales et l’accélération austéritaire, n’a pas connu de contestation significative et supporte l’essentiel des flux migratoires.

2 – L’Italie face à ceux qui fuient la guerre et la misère

La politique européenne se caractérise par le refus d’aider les pays en première ligne pour faire face aux flux migratoires. Vis-à-vis de la Grèce, la solution trouvée fut l’instauration de murs et l’octroi à Erdogan de deux fois 3 milliards d’euros pour contenir et parquer les exilés syriens, irakiens, afghans…
Dans la péninsule italienne, l’abandon de l’Italie est une histoire effroyable encore plus ancienne. Dès les années 1990, ce sont de jeunes hommes qui viennent d’Afrique du nord, puis en 1991, des dizaines de milliers d’Albanais ruinés par la pyramide de Ponzi (2) et la kleptocratie maffieuse qui y règne. Enfin, à partir de l’an 2000, ce sont des hommes seuls, pour la plupart, qui accostent dans des conditions dramatiques. Les accords conclus entre les gouvernements européens avec les Etats africains provoquent la criminalisation des passeurs ; en 2008, le gouvernement italien verse 5 milliards d’euros à Kadhafi qui s’engage à empêcher les départs à partir des côtes de la Libye. En 2011, suite aux printemps arabes, les armées française, anglaise soutenues par les Etats-Unis, interviennent en Libye ; le dictateur mégalomane est lynché, le chaos s’installe, des armes se dispersent dans tout le Sahel. Les trafiquants d’êtres humains prospèrent, les migrants fuient par la mer, beaucoup se noient dans le cimetière marin qu’est devenue la Méditerranée.

2012, l’opération Mare Nostra porte secours, en moins d’un an, à plus de 100 000 migrants. Aux suppliques de l’Italie, l’Union européenne répond par la suppression de ce secours humanitaire trop généreux à son goût, lui substituant l’opération Triton. Elle est coordonnée par Frontex, pour tenter de dissuader le flot des réfugiés qui ne faiblit pas : 150 000 en 2015, 181 000 en 2016. Des navires affrétés par des ONG sont accusés de faciliter le « travail » des trafiquants. On apprend qu’en Libye, les milices et le gouvernement fantoche de Tripoli, avec lesquels le ministre de l’intérieur italien a conclu des accords, en livrant notamment des vedettes maritimes, pratiquent le travail forcé et l’esclavage des candidats à l’exil. Fin 2013, l’Italie est piégée. La France et l’Autriche rétablissent des contrôles à leurs frontières et expulsent sans ménagement, y compris des mineurs. Les structures d’accueil italiennes sont engorgées. A Rome, des « coopératives d’accueil» ( !), gérées par la maffia, développent un business lucratif avec cette main d’œuvre corvéable. 2014, l’Union européenne impose des cartes d’enregistrement des migrants en Sicile et au sud de l’Italie, c’est l’application concrète du refoulement administratif suite au règlement Dublin 3.

Actuellement, 300 000 à 700 000 exilés sont bloqués en Libye, dans des conditions effroyables. L’ONU vient de déclarer que, depuis 2014, 135 000 d’entre eux ont trouvé la mort en Méditerranée, ce décompte ne prenant pas en compte… ceux dont on n’a pas retrouvé la trace. Le scandale continue. La caste politicienne italienne surfe désormais sur la xénophobie répandue par les médias qui ignorent les raisons profondes pour lesquelles les candidats à l’exil fuient la guerre et la misère.

3 - La sinistrose politicienne

La caste politicienne qui a dirigé l’Italie depuis des décennies est particulièrement corrompue, toujours prête à vendre son âme sournoise pour conserver sa pérennité. Avant la survenue de la crise de 2007-2008, elle était à la fois acquise au néolibéralisme, tout en étant réticente à le mettre en œuvre. Ce fut d’abord, à l’époque de la prétendue mondialisation heureuse, la flamboyance de Berlusconi, ce satrape milliardaire des médias bling-bling, suscitant un engouement transgressif pour l’enrichissement sans cause. A l’autre pôle de l’alternance, la gauche factice avait fait le deuil de ses valeurs. Les ex-communistes convertis au capitalisme débridé, s’acoquinèrent avec les débris d’un parti socialiste corrompu jusqu’à l’os, ainsi qu’avec des démocrates chrétiens à la façade sociale. Ce nouveau Parti Démocrate (PD) sentit son heure venue après les déconfitures successives de Berlusconi, puis du commissaire européen Mario Monti qui lui succéda, sous les auspices de la Troïka. L’Italie ne devait pas sombrer comme la Grèce, l’Espagne, le Portugal, sous la férule des eurocrates et du FMI. Mario Monti fit l’affaire comme chef d’un gouvernement d’union nationale. Cette grande coalition sombra et le fringuant Matteo Renzi du PD fut proclamé par tous les philistins socio-modernisateurs européens. Il allait sortir l’Italie du marasme, ce fut pire. Effrayé par les sondages qui lui promettaient pire que pendre, il tenta une dernière carambouille en modifiant le scrutin électoral : subtil dosage de choix uninominal et de proportionnelle qui pourrait lui sauver la mise.

Entre temps, la récession, l’envolée du chômage, la crise migratoire, avaient provoqué le surgissement d’un mouvement hybride autant que baroque, Mouvement 5 Etoiles. Beppe Grillo, le clown antisystème pestait contre le « vol de l’avenir des Italiens », recrutait par internet et désignait des candidats sans autre vision politique que celle de l’indignation. Le clic sur internet valait réseau démocratique, sans programme ni stratégie, sinon celle de se substituer à la classe régnante. A la droite de la droite, la Ligue du Nord, devenue nationale, surfait sur la haine xénophobe et parvenait à remettre en selle, pour la circonstance, le corrompu Berlusconi qui, après ses ravalements de façade, se voyait déjà rajeuni pour revenir sur la scène politique. Ce théâtre grotesque où démagogues et imposteurs rivalisaient, allait caractériser les élections de 2018.

S’affrontaient, d’un côté, la droite extrême composée de Forza Italia de Berlusconi, alliée à la Ligue de Salvini (fédérée au FN au Parlement européen), le tout flanqué d’une part de Fratelli Italia qui encensait le nationaliste hongrois Orban et d’autre part, de Casa Pound se réclamant ouvertement du fascisme mussolinien.

A gauche de cette droite, le PD de Renzi jouait sa survie. Il était accompagné de dissidents « Libres et égaux » et de la « gauche ensemble », tout aussi discrédités par leur gestion avec le PD, notamment dans les régions.

Venus de nulle part, les 5 Etoiles de Beppe Grillo et de Luigi di Maio, l’un de ses jeunes apôtres, prétendaient au pouvoir. Leur antisystème s’accordait du système capitaliste…

La Gauche de transformation sociale, éparpillée, laminée après le mai rampant et les années de plomb marquées par le terrorisme d’extrême droite puis d’extrême gauche, survivait dans les marges en s’étrillant copieusement (Pouvoir du peuple, Parti communiste dogmatique, gauche anticapitaliste…).

Quant aux grandes confédérations syndicales, leurs appareils avaient sombré corps et bien dans la collaboration de classe.

La campagne électorale fut donc, dans cette conjoncture, marquée par un déferlement de haine raciste et xénophobe, suscitant la peur, flattant les mauvais instincts de la crédulité publique, tout en avançant des promesses plus ou moins mirifiques : « les bateaux des migrants bloqués », « l’invasion stoppée » pour la droite extrême. Et Berlusconi d’en rajouter : « L’immigration, c’est le chaos, la rage ( !), les vols et le trafic de drogue ». Le 5 Etoiles ajoutait un couplet : « zéro débarquement ». Renzi n’était pas en reste, tout en promettant : « l’exonération fiscale des retraités ayant besoin d’aide sociale à domicile ». Dans le même sens de surenchère, Beppe Grillo assurait « le salaire universel pour tous » ; la majorité des « sudistes » le crut.

Le 4 mars, les résultats sont tombés. 27% d’abstention. Défaite du PD de Matteo Renzi, 18% ; le 5 Etoiles à 32% et 229 sièges apparaît comme le grand gagnant, surtout au sud (plus de 50% à Naples). La droite extrême totalise moins de 40% et 267 sièges (Forza Italia avec 14% et, devant, 17.39% pour la Ligue de Salvini).

Ces élections révèlent deux rejets : celui des politiques néolibérales suivies depuis 15 ans et celui des migrants. Par ailleurs, elles accentuent la fracture entre le Nord et le Sud. Désarroi, détresse, misère au Sud, chômage au Nord et manque de perspectives, sont sources de toutes les dérives possibles. Fascistes et antifascistes s’affrontent, les crimes et attaques racistes peuvent se multiplier.

Une Italie sans issue à court terme

La crise institutionnelle va s’installer. Aucune majorité ne se dégage. La formation d’un nouveau gouvernement va se faire attendre. Le record de la Belgique sera-t-il battu ? Peut-être pas. Le patronat et l’Union européenne ont déjà envoyé leurs émissaires auprès de chaque parti, tout en brandissant la possibilité d’une attaque des marchés financiers, faisant monter les intérêts des prêts. La déconstruction de l’Europe austéritaire va se poursuivre, n’en déplaise à Macron, le chantre d’un fédéralisme tombé en désuétude. La répression et le refoulement des exilés risquent de s’intensifier, le Heimat allemand l’annonce. Reste la tradition de la combinazione italienne et ce qui s’appelle, dans ce pays, le « transformisme ». Les 5 Etoiles lorgnent déjà sur les orphelins du PD en quête de repositionnement, d’autant que ce mouvement hétéroclite a opéré un recentrage européen. Ce parti virtuel y survivra-t-il ? La Droite extrême est prête à tous les coups fourrés pour accroître la tension et la répression policière. Renzi, l’ancêtre de Macron, en son temps encensé, va disparaître. L’Union européenne, comme elle l’a fait avec Berlusconi, va-t-elle pouvoir imposer un gouvernement technique, dans l’attente de nouvelles élections ? Si les castes politiciennes désunies ne peuvent plus gouverner comme avant, ceux d’en bas semblent prêts à promouvoir toutes les aventures. Charlatans et démagogues de tous poils ont un boulevard devant eux. Les classes ouvrières et populaires, désunies, désabusées, n’ont, pour l‘heure, guère les moyens de les repousser.

Gérard Deneux, le 19.03.2018  
(1)    Age de la retraite : 67 ans ; mode de calcul des pensions organisant leur baisse ; droit du travail modifié : les licenciements abusifs ne donnent plus droit à réintégration, les emplois y compris publics sont précarisés et les « salaires étranglés »
(2)    Pyramide de Ponzi : arnaque consistant à proposer des actions à des rendements mirobolants (40, 50%). Les premiers souscripteurs sont servis en fonction de l’argent déposé par les suivants. Lorsque, faute de nouveaux souscripteurs, la confiance s’écroule, les placements fondent comme neige au soleil. De 1995 à 1997, le système bancaire albanais était une énorme pyramide de Ponzi. Sur 3.5 millions d’habitants, 2 millions furent escroqués, provoquant la misère et l’exode. Pour plus d’explications, voire le n° 28 PES, novembre 2016

jeudi 15 mars 2018


Dans le cadre du festival Diversité,
Les Amis de l’Emancipation Sociale, les Amis du Monde Diplomatique Nord Franche-Comté,
les Créatures  vous invitent au ciné-débat

Mardi 27 mars 2018
à 20h30  au Bar Atteint, 25 rue de la Savoureuse à BELFORT

I am not your negro
Film-documentaire de Raoul Peck
Suivi d’un débat avec les Amis de l’Emancipation Sociale sur
Histoire des luttes des Afro-américains, leur écho, aujourd’hui, là-bas et ici

« Je ne suis pas un nègre. Je suis un homme ». A travers les propos et les écrits de l’écrivain noir américain James Baldwin, Raoul Peck  revisite les luttes sociales et politiques des Afro-américains au cours de ces dernières décennies : une réflexion sur la société américaine qui n’est pas sans rappeler la réalité française. Venez voir et débattre.  

               Accueil à partir de 19h. Il est possible de manger sur place à 19h15 (10€ à 12€),
réservation au Bar Atteint : 09.83.91.84.99. Le bar est ouvert toute la soirée.
Contact : aesfc@orange.fr     03.84.30.35.73   http://www.les-creatures.org/













Dans le cadre du festival Diversité,
les Amis de l’Emancipation Sociale, les Amis du Monde Diplomatique Nord Franche-Comté
 et les Amis du cinéma de Vesoul  vous invitent  

Jeudi 22 mars 2018
à 20h  au cinéma Majestic à VESOUL
 diffusion du documentaire du réalisateur syrien Ziad Kalthoum
Taste of cement
 Suivi d’un débat
 La tragédie syrienne. Jusqu’à quand ?
en présence de  Logospher, association interculturelle franco-syrienne
et des  Amis de l’Emancipation Sociale

Chaque jour, des travailleurs syriens, exilés, reconstruisent des gratte-ciel dans le ciel de Beyrouth. Chaque nuit, un couvre-feu leur impose de s’enfoncer dans leurs entrailles de ciment. Avec poésie et pudeur, Ziad Kalthoum traite de l’exil de ces constructeurs syriens, leur solitude, leur inexistence. Les silences sont aussi vertigineux, assourdissants, que le vide qui remplit l’espace de ces bâtiments fantômes. Par contraste,  le bruit des engins et des outils utilisés pour le chantier ne se font entendre que pour faire écho à ceux des machines de guerre, renvoyant ainsi au chaos là-bas, « l’odeur du ciment » rappelant sans cesse la destruction de la Syrie qu’ils constatent chaque soir sur leurs écrans portables. Taste of cement est une oeuvre lente, à la mesure du temps suspendu : celui de l’exil, de la guerre, des journées qui se répètent à l’infini pour ces ouvriers syriens.  Venez voir et débattre.
Contact : aesfc@orange.fr  03.84.30.35.73