Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


mercredi 24 avril 2013


Sortir du nucléaire Nord Franche-Comté, Europe Ecologie Les Verts, NPA,
et les Amis de l’émancipation sociale vous proposent une conférence-débat sur

Fukushima,
la catastrophe est toujours en cours

avec Roland Desbordes
Président de la CRIIRAD

  Vendredi 3 mai 2013
20h30 à BELFORT Maison du peuple - entrée libre

Les leçons de Tchernobyl (26.04.1986) n’ont pas été tirées et n’ont pas empêché qu’un autre accident nucléaire majeur se produise à Fukushima (11.03.2011). L’imprévisible et les erreurs humaines font que la sûreté absolue n’existe pas. Les promoteurs du nucléaire veulent nous faire croire qu’avec la haute technologie, un accident est maîtrisable, mais ni les gouvernements ukrainien, russe et biélorusse, ni le gouvernement japonais et la société Tepco ne sont parvenus à protéger les populations de la radioactivité. Suite aux accidents nucléaires, les éléments radioactifs rejetés dans l’atmosphère et répandus dans les sols provoquent par irradiation et contamination des cancers de tous types, des maladies cardiovasculaires, une augmentation de la mortalité périnatale et infantile, des anomalies génétiques, etc. sur plusieurs générations. En ce jour anniversaire, nous saluons le courage de ces femmes et ces hommes appelés liquidateurs qui ont limité l’ampleur de la catastrophe. Et nous n’oublions pas toutes les victimes du nucléaire qu’il serait temps de reconnaître. L’Organisation Mondiale de la Santé, liée par un accord avec l’Agence Internationale de l’Energie Atomique, ne remplit pas sa mission concernant la radioprotection.                                                                                             www.sortirdunucleaire-belfort.fr

 

samedi 13 avril 2013


A découvert

Nous devons reprendre le droit,
Stopper cette crise de foi.
Aujourd'hui, c’est le peuple qui doit faire la loi.
Nous n’avons pas le choix.
Seuls, vous-mêmes, ne pouvez vous protéger
Du sort habile qui nous a été jeté.
C’est une action provoquée
Tout comme le malaise provient du ciel enchanté.
Le pauvre n’et pas à l’abri des difficultés
Ils sont toujours en train de nous enfoncer
Dans le panier de la souffrance et de la pauvreté.
Sortons du pouvoir de ces sorciers,
De cette politique de condamnés.
Ils sont les colons réincarnés.
Politique de menteur,
Politique de la peur
Politique de tueur.

Hassen







Les politiciens et autres parlementaires et ministres au pouvoir ou l’ayant été ne renieraient pas cette citation de Henry Ford, parue dans le bi-mensuel
Article 11 de mars-avril 2013  


« Il est appréciable
que le peuple de cette nation
 ne comprenne rien
au système bancaire et monétaire.
Car si tel était le cas,
 je pense que nous serions
confrontés à une révolution
avant demain matin ».

Sauf que le peuple a compris…



De chocs en couacs.

A peine avait-il annoncé, avec la grandiloquence qui s’imposait, que nous allions connaître un choc de simplification de la paperasse administrative censé libérer un nouvel essor des énergies patronales, qu’Hollande apprit qu’il était essoré. Les révélations de Médiapart, il n’avait pas voulu y croire persuadé que cette affaire comme tant d’autres s’évanouirait dans les secrets bien gardés des banquiers suisses. C’était sans compter sur la perspicacité de certains juges.

Ce fut un choc qui valait bien de jouer les vierges effarouchées d’autant que l’homme Cahuzac avait bénéficié, face à son honneur outragé, de la confiance réitérée de parlementaires, ministres et même les yeux dans les yeux du Président. Encensé qu’il avait été, ce compétent de la rigueur, lui qui avait le courage de faire les poches des gens de peu en taillant dans les dépenses publiques, il apparaissait, en toute lumière, tel qu’en lui-même, un fraudeur ayant été à  bonne école qui chassait les fraudeurs. Et tous les sociaux-libéraux qui, tous, connaissaient son train de vie de s’exclamer,  nous ne savions pas ! Cocasse ou pitoyable, ce repiqueur de cheveux, ce rabatteur de crânes chauves, cet aigrefin de la Sécu, entretenant de troubles relations lucratives avec l’industrie pharmaceutique, avec ses amis du GUD/FN qui s’ingéniaient à mettre à l’ombre des paradis fiscaux ses revenus illicites.

Face à ce choc suivi d’un affolement, il fallait frapper l’opinion effarée, d’autant que la popularité du Président et de son gouvernement était en berne, l’option gouvernementale d’un remaniement (de cohabitation avec Bayrou, le chevalier blanc) après les municipales semblait s’évanouir. Et, au sortir d’un conseil des ministres, Hollande par un prêche convenu, en tirades saccadées, promit de s’attaquer à la « finance avec visage », aux prévaricateurs et paradis fiscaux ! Diantre ! Tous les ministres, parlementaires, hauts fonctionnaires devaient tous se déculotter, montrer leur patrimoine afin de prouver au tout venant qu’ils étaient tous plus blancs que blancs. Chiche ? Et couac ! Certains cuistres s’indignèrent de tant de populisme. M’enfin ! La fraude fiscale, ces 40 à 80 milliards n’allaient-ils pas être récupérés ! On ne pouvait qu’applaudir tout en sachant que le bricoleur de l’Elysée possédait une «boîte à outils» déficiente : fonctionnaires du Trésor et juges insuffisants, et couac ! Les louables promesses subirent un vent de critiques. Dans cette atmosphère délétère, il y eut pire. Le trésorier de la campagne présidentielle possédant deux sociétés aux îles Caïman n’était-il pas expert en filouterie ? La barre lucrative du bateau de la Marine n’était-elle pas tenue par sieur Peningue, expert en dissimulation de revenus illicites et courtier de Cahuzac ? De quoi éclabousser toute la caste politicienne y compris le fonds de commerce du FN, prétendument au service de petits franchouillards. L’UMP des Copé et consorts donna de la voix contre ce gouvernement irresponsable !

Et de nouveau, un couac avec se ministres dissidents, les Montebourg, Hamon, Duflot, voulant changer de cap, abandonner les eaux de l’austérité, la barque du PS risquant de sombrer. Vent debout, Ayrault accusa le choc, rappelant que le débat entre godillots n’était pas de mise, il en allait de la santé des créanciers qu’il ne fallait pas fâcher sous peine d’une hausse des intérêts, des remontrances de Bruxelles. Pas d’autre ligne de flottaison que celle consistant à rembourser les près de 1 900 milliards d’euros de dettes.

Quant à un audit de la dette, à la socialisation des banques qui grenouillent dans les paradis fiscaux par filiales interposées, il n’en fut pas question, la fureur sur-jouée contre la finance s’arrête aux portes dorées des BNP Paribas et autre Crédit Agricole.

Face aux gens de pouvoir, il n’y a que le pouvoir que les gens du peuple se donneront pour nettoyer les écuries d’Augias du capitalisme financiarisé.   

Gérard D
Le 12.04.2013 

jeudi 11 avril 2013


C’est toujours la même histoire

Ces politiques de vautours
Nous tournent tout autour.
Ce sont les champions des aveugles et des sourds,
Comme des fous ils courent toujours,
S’efforçant d’être les vainqueurs du tour
Ils ne prennent pas la peine de regarder autour.
Comme des fous ils pédalent toujours
Ils ne savent pas s’arrêter.
C’est reparti pour la misère d’un tour.
Idolâtres de la richesse des sourds
Vous êtes condamnés pour toujours
A moins qu’il n’y ait un beau jour
Quelqu’un qui puisse répondre à nos appels au secours 
Il faut vivre et mourir avec amour
Comme à la naissance du premier jour
C’est reparti pour une révolution de velours

Hassen

Le pouvoir de la finance et des transnationales

Si le capitalisme fait système c’est qu’il résulte dans ses superstructures d’une organisation souple assurant la suprématie de son fonctionnement et les tentatives toujours renouvelées d’en résoudre les contradictions. A la différence de ce qui existait avant la 2ème guerre mondiale, et encore plus avec la fin de la parenthèse keynésienne fordiste, le pouvoir du capital dispose désormais d’une énorme bureaucratie pyramidale, horizontale et sectorielle. A sa tête cette «aristocratie» mondialisée est constituée de grandes sociétés, de banques multinationales et de fonds spéculatifs. Ce pouvoir des gérants des multinationales est organisé au sein de lieux de rencontres et de multiples organes où sont définis les stratégies à mettre en œuvre et les conflits à résoudre. On voudrait ici rappeler la fonction des plus emblématiques afin de suggérer que la rupture avec ce système, compte tenu de sa puissance et de ses moyens de rétorsion, ne peut s’opérer dans un seul pays et, à tout le moins, que les politiciens de droite et de gauche, intégrés dans ce système, sont autant de leurres pour que rien ne change.

Le forum de Davos, sponsorisé par plus de 1 000 grandes entreprises multinationales, est surtout un lieu de rencontres entre super-riches et gouvernants qui, entourés d’une piétaille de journaleux de connivences, orchestrent les grandes orientations de l’économie globalisée. Malgré les craquements du système on y glose sur la moralisation des excès, sur la «nécessaire croissance forte, soutenable et équilibrée» et, par voie de conséquence…. sur la réduction des impôts des plus riches et des dépenses publiques. Mais, derrière les gesticulations d’autocongratulation, cette grand’messe de la valeur actionnariale, s’esquisse, se conclut en catimini de juteuses alliances. Pour ceux qui se prétendent les «maîtres du monde», ce forum est essentiellement un lieu de socialisation des grands capitaines de l’industrie et de la finance.

Le G 8 et le G 20 sont aussi des lieux informels mais beaucoup plus opérationnels. Ces rencontres de chefs d’Etat les plus puissants qui doivent désormais compter avec les pays émergents (G20) tentent de résoudre, de calmer le jeu des affrontements entre puissances tout en assumant toujours la suprématie de la triade (USA/Europe/Japon) quoique avec de plus en plus de difficultés.

L’Organisation Mondiale du Commerce possède un pouvoir d’influence et de nuisance réel. Dirigée par Pascal Lamy (ex-dirigeant du PS), elle est chargée de libéraliser tous les échanges en incitant les pays à réduire leurs tarifs douaniers. Elle met ainsi les pays les plus fragiles sous la dépendance des pays dominants et des transnationales. Elle possède son bureau des règlements des différends qui peut imposer des amendes, des sanctions à la demande des Etats (exemples : les bananes antillaises protégées, le roquefort…).

Le FMI et la Banque Mondiale sont spécialisés dans les prêts dits «sous conditionnalités». Lorsque les Etats endettés comme ce fut le cas pour les pays du Sud et désormais pour l’Europe, ils appliquent des mesures «d’ajustement structurel». Pour le dire en langage clair : on vous prête à condition que vous prouviez que vous privatisez, réduisez les dépenses publiques pour être en capacité de rembourser les créanciers privés. Bref, on vous endette à des taux moindres que ceux que vous pourriez trouver sur le marché, et ce, en plusieurs fois parce qu’à chaque étape on veut mesurer la politique coercitive que vous menez. Ces politiques asphyxient par conséquent la souveraineté des Etats, organisent le pillage des biens publics ce qui permet aux multinationales d’y faire leur marché.

Le Club de Londres. Il s’agit d’un cartel de créditeurs constitué de grandes banques internationales. En étroite relation avec le FMI, elles s’entendent pour rééchelonner les dettes des Etats tout en s’assurant qu’à terme, leurs créances augmentées de leurs intérêts, leur reviennent.

L’ONU avec le poids déterminant des USA, de l’UE et du Japon (triade) et l’organisation du pouvoir que lui confère le Conseil de Sécurité (droit de veto et ce, malgré les tentatives de réformes qui dans leur dimension démocratique ont toutes avorté) fait désormais partie de la domination de l’ordre capitaliste à maintenir. Toutefois, comme l’ont prouvé le démembrement de la Yougoslavie et les guerres dites préventives (Irak, Afghanistan), l’OTAN constitue le bras armé de la puissance du maintien du système dans ses finalités néolibérales. Les fauteurs de troubles dans la marche des affaires ne doivent pas être «exagérément»  troublés. Les contradictions entre Etats, le déclin relatif des USA peuvent conduire également à des coalitions plus restreintes ou à des actions dites unilatérales pour autant comme l’a indiqué Obama que les Etats-Unis puissent les «diriger de l’arrière» (Libye, Mali).

Il y a bien encore d’autres organismes (Table ronde, groupe Bildenberg) (1) qui ont pour fonction de déterminer les orientations, les recommandations, exercer les pressions nécessaires au maintien et au développement du capitalisme financiarisé.

De fait, tous les dirigeants de ces organismes, à des degrés divers, sont les grands prêtres de l’ordre mondial réellement existant. Ils disposent non seulement des moyens du complexe militaro-industriel (1) mais surtout d’une armée de bureaucrates parasitaires, d’une armada de hauts fonctionnaires internationaux, régionaux, nationaux, de traders, de think tanks ( 3 465 à l’échelle de la planète), de faiseurs d’opinion (médias), voire d’ONG et de chercheurs serviles. Formatés dans les mêmes écoles, chantres du néo-libéralisme, sans aucune légitimité populaire, ils sont en quelque sorte les organisateurs de l’hégémonie de l’oligarchie capitaliste mondiale, les dispensateurs d’un prêt-à-penser qu’on ne saurait remettre en cause. Ils furent et sont toujours les acteurs de la formidable expansion des dérivés de crédits de ladite innovation financière, de l’effet levier… qui a conduit à la crise financière du système.

Ce pouvoir opaque de la «mondialisation financière» est une organisation en réseaux transnationaux et trans-sectoriels, ce qui ne signifie pas qu’elle ne soit pas traversée par des contradictions.

Gérard Deneux, le 3.04.2013

(1)  «Europe INC. Comment les multinationales construisent l’Europe et l’économie mondial » Collectif – éditions Agone

Pour en savoir plus :
-         «Le nouveau gouvernement du monde» de Georges Corm – éd. la Découverte
-         «Le G8 illégitime» ATTAC – éd. Mille et une nuits
-         «Au mépris du monde. G8, G20, peuples en lutte» ATTAC – éd. les liens qui libèrent
-         «OMC. Le pouvoir invisible» Agnès Bertrand – éd. Fayard
-          
Et l’article du Monde Diplomatique (avril 2013) «Les Nations Unies sous le charme du privé» de Chloé Maurel   




Les maux du Mali : Françafrique et néolibéralisme


Dans l’article précédent (paru dans le n° 242 mars 2013), j’ai traité des enjeux économiques qui, pour partie, rendent compte des raisons de l’intervention militaire française au Mali. Toutefois, ces fondements structurels ne sont pas suffisants ; il faut encore évoquer l’histoire du Mali et le contexte conjoncturel, éléments décisifs pour saisir la spécificité du processus décisionnel qui a prévalu sur tout autre, en particulier celui qui aurait dû amener les forces de l’ONU à prendre l’initiative de s’interposer entre les forces maliennes et les «rebelles terroristes».

De l’indépendance à l’Etat déliquescent

En 1962, face à l’ampleur du mouvement de décolonisation, l’indépendance est «accordée» à l’ancien Soudan français. C’est le temps où les indépendantistes rêvent d’une grande union panafricaine. Modibo Keïta, Président du Conseil du Soudan (ex français) est de ceux-là. Il va connaître plusieurs échecs et se replier successivement sur la fédération Sénégal/Mali puis sur le Mali. C’est également l’époque où les concessions gaulliennes n’ont pour objectif que de conserver la suprématie sur des Etats clients, manipulés par les réseaux Foccart. Toutefois, Modibo Keïta est loin d’être un pantin. Non seulement il mène des réformes sociales et économiques, mais soutenant le FLN algérien par ses prises de position, il participe à l’échec du projet gaullien de grand Sahara français. Tout va donc être tenté pour le déstabiliser et insérer le Mali dans la Françafrique néocoloniale. Il est renversé en 1968 par un coup d’Etat soutenu par Paris. Moussa Traoré prend le pouvoir et instaure une dictature.

La volonté d’unir les différentes ethnies composant le Mali, les projets de développement en particulier au Nord Mali au bénéfice des Touaregs notamment, sont abandonnés. Si le clan militaire au pouvoir se maintient face à la décomposition de la société malienne et sa paupérisation, il est confronté à des rebellions sporadiques qu’il réprime. La corruption généralisée devient un mode de gouvernement reposant sur le clientélisme.

En mars 1991, un puissant mouvement de révolte, suivi d’évènements sanglants, de soulèvements aboutissent à l’éviction du président-dictateur. L’heure est à la «transition démocratique» et au recours aux élections confisquées par les différents clans enrichis, ayant gravité autour du pouvoir. A Paris, sous la présidence de Moussa Traoré, on célèbre la «démocratie réussie», d’autant que l’heure est à la mondialisation libérale et que l’Etat malien endetté doit rembourser ses créanciers. De fait, ladite démocratie électorale n’est que le paravent des affaires prédatrices où la corruption, l’achat de voix, la captation de l’aide au développement assurent la «démocratie des milliardaires» aux ordres du FMI, de la Banque mondiale et de la France tutrice.  

Les plans d’ajustement structurel imposés dès la fin des années 1980 pour «résorber» la dette malienne s’accélèrent en 1997. Les entreprises publiques sont bradées quand elles ne sont pas liquidées, des terres agricoles sont vendues, la monoculture du coton imposée. C’est toute une machinerie à broyer les économies locales qui impose une régression sociale et économique sans précédent, conduisant à dresser les ethnies les unes contre les autres. Ce modèle de lumpen-développement est de fait une recolonisation conduite sous l’égide des politiques néolibérales. L’Etat se délite, les trafics en tous genres prospèrent, y compris celui de la cocaïne. C’est dans ce contexte de désespérance sociale que se développent l’émigration et l’implantation de l’islam réactionnaire au détriment de l’islam malékite historiquement implanté (Bamako). Dès les années 1990, financés par les Etats du Golfe, apparaissent des prêcheurs afghans, pakistanais, algériens. Si malgré tout la société malienne se maintient c’est surtout grâce à l’envoi d’argent des Maliens expatriés. 8 000, rien qu’à Montreuil, à comparer aux 6000 ressortissants français au Mali, travaillant pour l’essentiel pour des firmes hexagonales.

La démocratie décrédibilisée devient une farce, la participation électorale ne dépasse pas 15% des électeurs, elle permet néanmoins d’assurer un semblant de légitimité internationale à une caste de privilégiés pour laquelle règne l’impunité. Toutefois, la «société civile», les forces progressistes ne sont pas anéanties pour autant. Pour preuve, le Forum Social Malien de 2002 où sont dénoncés la démocratie formelle, l’Etat déliquescent, les détournements de biens publics. A côté des revendications altermondialistes sont prônées les aspirations des Touaregs jamais prises en considération par le pouvoir. Cette initiative sera d’ailleurs relayée par un documentaire remarquable, sorti en 2006 «Bamako». Malgré ce sursaut, la situation se dégrade…

Du coup d’Etat à l’intervention militaire française

En 2011, le Mali est en passe de devenir un narco-Etat maffieux. Sous la présidence d’ATT -Amadou Toumani Touré, 230 millions d’euros ont été détournés sans compter les sommes résultant du blanchiment de l’argent de la drogue, des commissions prélevées par les généraux-négociateurs sur les rançons versées lors d’enlèvements d’otages. Pour le gouvernement Sarkozy, ATT est devenu infréquentable, décision est prise de l’affaiblir, de soutenir la rébellion touareg du MNLA (1) pour mieux combattre AQMI (1) et autres terroristes se réclamant de l’islamisme le plus archaïque. L’ancien 1er ministre, Modibo Sidibé est le candidat de la France… ATT annonce des élections pour le 29 avril 2012 et son intention de céder le pouvoir à «un homme que la France voudrait bien installer» ainsi qu’une nouvelle constitution renforçant (encore !) les pouvoirs du Président. Ce scénario va capoter. La «rébellion» va prendre l’initiative.

Les groupes «rebelles» comprennent pour l’essentiel trois composantes : le MNLA, coalition d’anciens Touaregs indépendantistes, des militaires touaregs maliens ralliés qui ont joué les mercenaires en Libye. Ils revendiquent un Etat scissionniste du Mali ou, pour le moins, une large autonomie de l’Azawad, soit un territoire au Nord Mali plus grand que la France. Et puis, il y a Ansar Dine, beaucoup plus dangereux pour la société malienne. Ce groupe armé, plus puissant que le MNLA, veut imposer la charia dans un Mali uni. Il est dirigé par un ancien chef rebelle touareg, Iyad Ag Ghali qui fut conseiller de la présidence malienne et, à ce titre, négocia en 2003 la libération d’otages détenus par le GSPC (2) (ancêtre algérien de l’AQMI). Nommé conseiller au consulat d’Arabie Saoudite, salafiste intransigeant, il est de retour au Mali en janvier 2011 pour négocier la libération de trois otages d’AREVA enlevés au Niger. Il en tirera de généreuses commissions avant de prendre la tête d’Ansar Dine. De cet imbroglio les médias français se focaliseront sur l’AQMI et se garderont d’évoquer les relations troubles que ces groupes entretiennent avec des pays limitrophes (Mauritanie, Burkina Faso, Niger, Algérie, Côte d’Ivoire…) sans parler du Qatar et de l’Arabie Saoudite.

Le 17 janvier 2012, l’attaque du camp militaire malien de Ménaka par le MNLA change en effet la donne (3). Rejoint par Ansar Dine, ils poursuivent leur offensive vers le Sud. En représailles, l’armée malienne cible, à l’aide d’hélicoptères un camp de civils touaregs et ce, le 23 février. Juppé «débarque» à Bamako le 27 février et en appelle au dialogue avec la rébellion. Il est hué lors de manifestations hostiles, d’autant que nombre de civils qui fuient les combats, déferlent déjà vers le Sud (4).

Humiliée, frustrée, une fraction de l’armée malienne, dirigée par le colonel Sanogo, chasse ATT et prend le pouvoir. Dès lors, l’on va assister à un imbroglio que l’intervention militaire française n’a pu, à ce jour, dénouer.

Les alliés de la France-Afrique, par l’intermédiaire de la CEDEAO (5) vont tenter de faire rentrer dans le rang le colonel putschiste, sans y parvenir. Sous la houlette de Blaise Compaoré, l’embargo et des sanctions visent à le faire céder. Un ultimatum est lancé et exécuté le 2 avril : non seulement, les ambassadeurs sont rappelés, les frontières fermées, les avoirs maliens gelés, les banques non approvisionnées, mais surtout, il est procédé au blocage d’une livraison d’armes achetées par l’Etat malien.

Les pompiers pyromanes accentuent encore l’état de déliquescence de l’armée malienne, incapable de faire face à la rébellion. Ils réussissent toutefois à imposer, pour 40 jours ( !) Dioncounda Traoré comme Président intérimaire et comme 1er Ministre, Modibo Diarra, ami de l’ex-dictateur Moussa Traoré et de Compaoré. Cet accord cadre du 6 avril fait coexister deux autorités, la junte militaire et des marionnettes dépendantes de soutiens étrangers. Quant aux tentatives de contre coup d’Etat, elles avortèrent (22 morts et des exécutions sommaires). Qui plus est, le 21 mai, des manifestants occupèrent le bureau du Président intérimaire qui, blessé, va être évacué vers... Paris, pour y être soigné.

Pendant ce temps… et dès le 27 juin, Gao et Tombouctou tombaient, le MNLA marginalisé après des combats meurtriers, la place était libre pour les exactions (destruction des mausolées ou saints musulmans, imposition de la charia wahhabite).

L’armée française n’était pas restée l’arme au pied. Dès le 10 janvier, des troupes d’élite sont acheminées par avion C-160 et appuyées par des hélicoptères, elles prennent position sur l’aéroport Servaré, menacé par l’offensive des Salafistes. Le 23 janvier, une note confidentielle est transmise à la présidence française pour une opération de reconquête, à charge pour les politiciens d’orchestrer un semblant de légalité.

Pas simple ! Entre l’ONU réticente qui n’envisage d’intervenir qu’en septembre 2013 à l’aide d’armées africaines sous équipées et pour le moins indisciplinées, entre la prudence intéressée des USA qui, en concurrence avec l’armée française, a installé une base au Nord Niger, entre l’Europe réticente et tous les autres espérant tirer avantage, après le chaos, d’un Sahelistan débarrassé des djihadistes. Il reste à la France l’option de s’enliser dans le bourbier malien.

Après quelques hésitations, le nouveau pouvoir social libéral, poussé dans ses retranchements et sous la pression de l’armée va amener pépère Hollande à enfiler les bottes de son prédécesseur Sarko. Il en va des intérêts de l’impérialisme français et de la sécurité de «nos» ressortissants, sans parler des otages toujours prisonniers malgré les sommes versées. D’abord, rassurer les dictateurs hier vilipendés, et en premier lieu le tchadien Idriss Déby, dont les troupes aguerries sont nécessaires. Ensuite, envoyer Fabius rencontrer Bouteflika l’Algérien, puis le propulser au Niger, au Burkina Faso, enfin le laisser déclarer à New York que le gouvernement illégitime du Mali réclame l’aide urgente de la France.

Entretemps, les velléités d’ingérence et d’influence du sinistre Compaoré auront été calmées. Par son secrétaire général, l’ONU lui reprochera d’avoir, comme médiateur de la CEDEAO, essayé d’intégrer le Qatar dans la «négociation» et d’écarter l’Algérie.

Le terrain diplomatique ayant été quelque peu déblayé (à quel prix ?), l’opération Serval, dûment programmée, est déclenchée. On connaît la suite mais non le terme de cette aventure. Sinon qu’en décembre 2012, à l’issue incertaine de cette nouvelle forme de guerre, les terroristes sont en apparence refoulés, 355 000 personnes sont des exilés dans leur propre pays et les bombardements français auraient fait plusieurs centaines de morts. Quant au sort des prisonniers, y compris des enfants soldats, peu de commentaires et à peine quelques images, comme pour l’ensemble de cette guerre.

Certes, Hollande fut accueilli en libérateur, mais malgré les promesses initiales, 1 000 soldats français demeureront sur place en attendant que… l’Etat failli se reconstruise. La messe n’est pas dite, la junte militaire toujours en place, la misère sociale encore plus profonde, l’intégrisme religieux et la corruption pourront y recruter de nouveaux adeptes dans un Mali sous protectorat international. Dans ces conditions extrêmement défavorables, le Mali peut-il retrouver l’héritage socialisant de Modibo Keïta. A court terme, rien n’est moins sûr : les ravages cumulés de la France-Afrique puis du  néolibéralisme ont sévi.

Gérard Deneux, le 9 avril 2013 

(1)  MNLA = Mouvement National de Libération de l’Azawad ; AQMI  Al-Qaïda au Maghreb Islamique
(2)  GSPC = Groupe salafiste pour la prédication et le combat
(3)  Contrairement à ce que laissent penser les médias, le Nord Mali n’est pas composé que de Touaregs et, eux-mêmes sont opposés à l’islam wahhabite
(4)  Le 24 janvier, 80 militaires maliens sont exécutés
(5)  CEDEAO = Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest