Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


mercredi 23 décembre 2015

il ne se passe rien
le dimanche

à part
quelques bombes qui tombent
sur des têtes innocentes
mais jamais sur les maisons
de ceux qui les fabriquent les promeuvent les vendent

à part
quelques morts ayant cédé à la faim
qui engraisse ceux qui paissent
sur les friches industrielles
miraculeusement profitables

à part
quelques cris désespérés
de tous ces bons travailleurs
honteux de ne pas avoir assez fait
pour continuer de mériter de se faire exploiter

à part
quelques sanglots déplacés
de ces braves gens qui ne sachant pas positiver
s’adonnent aux joies du malheur
seul lot que leur laisse le bonheur de ceux qui savent s’y prendre

à part
quelques érections de sublimes barrières
dont jouissent ceux qui aimant à faire peur
aux pauvres nigauds hantés par leur fantasme identitaire
agitent le fantôme de l’invasion des plus pauvres que soi

à part
ces quelques broutilles
et toutes les autres
que votre fertile pensée pourra enfanter
sans trop pâtir des douleurs de la mise-bas intellectuelle

à part
tout cela
c’est une évidence
il ne se passe rien
le dimanche

mais un jour
et c’est une autre évidence
dimanche ou pas dimanche
quelque chose se passera
que quelques-uns regretteront

mais ils seront si peu nombreux
que peut-être plus tard
comme une évidence on dira
que rien ne s’est passé ce jour-là

Pedro Vianna
Picherande, 23.VIII.2015 
in Docilités

Pour un regard

Le con s’attache aux boulets de la peine
Il se gave et se nourrit des fruits de la haine
Tout en développant les racines de l’indifférence
Et il reste seul accroupi dans le refuge sombre de ses peurs
Ne sachant à qui faire réellement confiance
Il ne fait plus la distinction entre violence et douceur
Aveuglé, il développe les racines de l’indifférence
Figé dans ses propos brutaux qui poussent à la souffrance
N’oublie jamais, regarde toujours du bon côté
La culture et le savoir sont une chance.

Hassen


Assignez-moi !
Lettre ouverte à envoyer à

Monsieur le Ministre de l’Intérieur,

Je demande mon assignation à résidence, dans les meilleurs délais.
Il se trouve en effet que je partage l’essentiel des convictions de nombre de militants écologistes, altermondialistes et autres squatteurs qui ont fait tout récemment, par dizaines, l’objet de cette mesure administrative, dans le cadre de l’état d’urgence mis en place à l’issue des attentats du 13 novembre 2015 :

     Je suis l’adversaire déclaré des aventures militaires néocoloniales actuellement conduites au nom de la France et d’un « droit de légitime défense » parfaitement nébuleux.
     Je trouve abject votre projet d’inscrire dans la Constitution de notre pays la possibilité de déchoir de leur nationalité des binationaux présumés coupables, mesure distinctement inspirée par le Front National auquel, au demeurant, vous prétendez « faire barrage ».
     Je trouve odieux que des musulmans fassent l’objet d’une assignation à résidence du simple fait qu’ils tiennent une sandwicherie halal ou fréquentent une mosquée estampillée comme suspecte – ou du simple fait qu’ils sont musulmans ou étiquetés comme tels.
     Je me refuse à me désolidariser des réfugiés (aujourd’hui par vous assimilés à des terroristes) avec lesquels je me bats pour qu’ils-elles puissent vivre là où bon leur semble.
     Je ne renoncerai pas à manifester auprès des collectifs des quartiers populaires qui, de Saint-Denis à Moellenbeek, n’ont pas attendu le 13 novembre pour vivre en état d’urgence (et, depuis des décennies, pour  pleurer leurs morts des suites de « bavures policières »).
     Je m’oppose formellement au projet de construction d’un nouvel aéroport dans la région de Nantes et, pour cette raison, me déclare solidaire des Zadistes qui occupent la zone contestée.
     Je suis scandalisé-e par le fait que l’enquête concernant la mort de Rémi Fraisse, tué par un gendarme, ait été confiée à la gendarmerie.
     Je me suis délibérément abstenu-e de pavoiser au jour dit, ceci au mépris des consignes expressément dispensées aux citoyens par les services de l’Etat.
     Je considère que l’état d’urgence rendant possible, dans les conditions expéditives que vous savez, ma propre assignation à résidence (comme celle de tant d’autres) constitue une atteinte caractérisée aux droits des citoyens et aux libertés publiques – à commencer par l’interdiction de manifester. J’y vois l’ébauche d’un régime policier du plus mauvais aloi. Ce simple fait devrait suffire amplement à justifier l’exécution de la mesure susmentionnée.

Je ne doute pas un instant que vos services sauront utilement compléter ce tableau attestant ma dangerosité et rendant nécessaire mon assignation à résidence – ceci que mon nom figure ou non parmi ceux des suspects enregistrés sou la lettre »S ».

Si ces messieurs-dames de la police pouvaient, simplement, lorsqu’ils viendront me notifier cette mesure de salubrité publique, se dispenser de faire voler en éclats ma porte (que je suis tout-e disposé-e à leur ouvrir dès le premier coup de sonnette, à toute heure du jour ou de la nuit) et de dévaster mon logement dans lequel les livres, les ustensiles de cuisine et les kits de jardinage comptent en plus grand nombre que les armes de guerre, je leur (et vous) en vouerais une reconnaissance durable.

Dans l’espoir que ma démarche saura retenir votre attention, je vous prie, Monsieur le Ministre, etc., etc.

Lettre ouverte à monsieur le ministre de l’Intérieur. Liste des premiers signataires
Olivier Le Cour Grandmaison, Alain Brossat, Sidi Mohamed Barkat, Philippe Bazin, Jean-Claude Amara, Jean-Cyril Vadi, Michèle Sibony, Laurent Cauwet, Sylvie Tissot, Catherine Samary, Isabelle Bettinger-Théaud, Farid Bennaï, M’hamed Kaki, André Rosevègue, Saïd Bouamama, Jacques et Françoise Salles, Orgest Azizaj, Michelle Chadeisson, François Gèze, Sandrine Amy, Christiane Passevant, Norman Ajari, Gilbert Achcar…


Au sommaire du PES n° 19

Edito : Psychose de guerre, régime d'exception et FHaine

Articles :

Syrie, Irak, Afghanistan...
 vers l'extension du domaine de la guerre ?(2ème partie)

Etat d'urgence ou état d'exception permanent ?

COP21 - qui décide vraiment ?

Inde, quel réveil ?

Assignez-moi !

De la construction européenne au TAFTA

En France comme en Israël

et nos rubriques :
Ils, elles luttent (voir ci-dessous)

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Syrie. Irak. Afghanistan…
Vers l’extension du domaine de la guerre ?
2ème partie

L’article qui suit (comme celui paru sur le même thème dans PES n° 18) a été rédigé le 8 novembre 2015. Les évènements qui se sont produits depuis, confirment bien que nous sommes dans une séquence d’extension du domaine de la guerre. Ils n’infirment pas non plus la pérennité des deux coalitions (russe et états-unienne) qui ont contribué et favorisé la perpétuation des conflits dans cette région du monde.

En effet, malgré les tentatives de Hollande/Le Drian, la grande alliance contre l’Etat Islamique, ennemi principal, semble un mirage. D’ailleurs, la reconduction des sanctions contre la Russie tend à le prouver. Il n’en demeure pas moins que l’objectif affiché par les Etats-Unis, de fracturer l’appareil d’Etat syrien, pourrait ouvrir une brèche dans l’aléatoire possibilité de sortir de la guerre menée contre le régime de Bachar Al Assad. Cette issue semble, pour l’heure, inatteignable. En outre, dans cette perspective, des groupes islamistes » pourraient rejoindre les rangs de l’EI.

Les attentats meurtriers au Liban, au Sinaï, à Paris et les réponses liberticides apportées, surtout en France, démontrent que le piège de Daech fonctionne : diviser les populations occidentales selon leurs confessions, répandre la peur, le racisme et la haine, acculer les puissances occidentales à intervenir militairement encore plus massivement contre le califat en espérant rallier ainsi d’autres populations sunnites dans le monde, y compris en Asie. D’ailleurs, la situation est à cet égard des plus préoccupantes en Malaisie. Au demeurant, c’est d’abord l’extension de l’EI en Libye et en Afrique qui inquiète les puissances occidentales, leurs alliés et leurs subordonnés.

En outre, la pénétration unilatérale de l’armée turque en Irak, aux côtés des Kurdes irakiens et ce, sans  autorisation du gouvernement irakien, démontre bien que la coalition occidentale hétérogène risque à tout moment d’éclater tout en aggravant les contradictions entre l’Iran et la Turquie, et au sein même de l’OTAN dont fait partie la Turquie.

Enfin, au Yémen, la guerre meurtrière, menée par l’Arabie Saoudite qui a envahi ce pays et formé à cet effet une coalition avec les pays du Golfe, connaît un tournant dramatique : des hôpitaux bombardés, une concurrence mortifère entre Al Qaïda et les partisans de l’EI aboutissant à des attentats contre les membres de la clique qui prétend revenir au pouvoir. Quant aux Houthistes et d’autres, ils résistent toujours… Tant est si bien que les Emirats Arabes Unis ont décidé de se désengager militairement de ce bourbier, obligeant les Saoudiens à recourir à des mercenaires venus de nombreux pays. Bref, de recourir à la diplomatie guerrière du carnet de chèques…

Sans qu’il faille réviser en quoi que ce soit l’analyse qui suit, et comme souligné par les discussions qui ont eu lieu au sein du comité de réalisation à ce sujet, il conviendrait de revenir sur l’origine, la nature et l’exacerbation du conflit à caractère confessionnel, entre chiites et sunnites, et sur les possibilités de faire émerger un régime syrien sans Bachar Al Assad, même si cette hypothèse n’est, pour l’heure, qu’un leurre.


La stratégie des Etats-Unis après les « missions » guerrières dévastatrices

En Somalie, en Afghanistan et en Irak, elle a consisté à « pivoter » vers l’Asie et à se confronter avec la Chine. C’est le sens qu’il convient de donner à l’exploitation du pétrole et du gaz de schiste pour ne plus dépendre de son allié encombrant qu’est l’Arabie Saoudite, suivie des Etats du Golfe. Il en est de même des négociations poursuivies avec succès du Traité Trans-Pacifique. Pour autant, la surpuissance américaine ne pouvait pas totalement se désintéresser du sort chaotique du Moyen Orient : tout en se tenant à distance du charnier syrien, Washington entendit affaiblir suffisamment le régime de Bachar Al-Assad pour imposer un pouvoir d’obédience sunnite avec l’accord d’une fraction de l’appareil d’Etat syrien. Il s’agissait dans cette hypothèse de ménager les intérêts de l’Arabie Saoudite et de la Turquie, tout en affirmant la rhétorique des  « lignes rouges », l’utilisation des armes chimiques. La reculade sur les bombardements au gaz asphyxiant fut rendue acceptable avec l’accord du démantèlement des armes chimiques proposé et organisé par les Russes. Pour Obama, il n’était pas question d’envahir la Syrie avec des GIs, mais de continuer à utiliser les différentes fractions rebelles comme chair à canons pour affaiblir Assad. La même stratégie prévalait en Irak contre l’EI. A l’automne 2011,  Obama, contre Hillary Clinton, la CIA et le Pentagone avait, en effet, imposé cette ligne dans son refus d’apporter un soutien militaire direct à la rébellion. Les Saoudiens, les Turcs devaient s’en charger. La détérioration de la situation militaire, suite à la progression de l’Etat Islamique, la détermination des Kurdes syriens et surtout l’intervention russe allaient modifier quelque peu cette orientation, tout comme l’accord nucléaire avec l’Iran. L’Armée Syrienne Libre fut dotée d’armes antitanks mais toujours privée de missiles sol-air contre les avions et hélicoptères syriens. Ce pari cynique repose à la fois sur la certitude supposée que les Russes vont s’embourber en Syrie et qu’en définitive, l’économie russe en récession ne pourra pas supporter l’effort militaire qui lui est imposé.  Cette vision à plus ou moins long terme qui espère la déstabilisation interne, tant de la Russie que de l’Iran, semble négliger plusieurs facteurs. L’état de guerre renforce pour l’heure les pouvoirs de Poutine et des mollahs. Il sous-estime la virulence des affrontements qui renforce les forces de l’Etat Islamique qui déstabilise tous les régimes d’obédience sunnite, soutenus vaille que vaille par les USA. La récente prise de Kunduz par les Talibans, la réaction démesurée de l’aviation américaine en sont la preuve (cf encart Kunduz). La décision de renoncer le 15 octobre au retrait des troupes US d’Afghanistan, prévu pour janvier 2017, augure-t-elle un changement de stratégie ? A quoi servent les 9 800 GIs présents s’ils se voient interdire de patrouiller, si 5 500 d’entre eux restent cantonnés sur quatre bases : Bagram, Kaboul, Kandahar, Jalalabad ?

Le soft Power semble avoir atteint ses limites d’autant que l’engagement russe risque de lui tailler des croupières. D’où la deuxième décision d’engager, outre les 3 000 conseillers US en Irak, des troupes spéciales sur le terrain. La voie de la confrontation-concurrence-arrangement avec l’impérialisme russe est ouverte. Pouvait-il en être autrement alors même que la coalition hétéroclite dirigée par les Etats-Unis contre l’EI ne permet aucun résultat tangible et ce, malgré 7 000 « frappes » qui n’ont permis aucune victoire sur le terrain. Les millions de dollars engloutis ont suscité la corruption généralisée du régime irakien et permis l’entrée en force des Iraniens encadrant des milices chiites. Il est désormais probable, dans l’hypothèse d’une montée en puissance des Russes et des Iraniens dans cette région, que les faucons US reprennent langue au Pentagone et ce, avant même la présidentielle américaine prévue le 20 janvier 2017.


Les alliés encombrants d’Obama


Des voix s’élèvent, en Occident, pour affirmer que l’Iran serait, de fait, une force stabilisatrice dans la région du Golfe et, qu’en définitive, il conviendrait de transférer la responsabilité du chaos sur l’Arabie Saoudite. Cette « petite musique » qu’accompagnent les visites de députés français à Damas, prêts à pactiser avec le tyran, la visite à Moscou du vibrionnant Sarkozy, annoncent-elles un basculement géostratégique ? Pas si sûr. En fait, cette agitation révèle plutôt la déception occidentale vis-à-vis du « grand frère » américain, incapable de maîtriser la situation chaotique que son pays a provoquée au Moyen-Orient. C’est plutôt un sauve-qui-peut impuissant face à la vague des migrants qui fuient les guerres et aux menaces d’attentats djihadistes en Europe. Ceci n’empêche nullement les dirigeants européens, France et Allemagne en premier lieu, de vendre des armes à l’Arabie Saoudite, à l’Egypte… Quant à Hollande et Cie, depuis qu’il s’est transformé en pleureuse du « lâchage américain un samedi soir de la fin août 2013 », alors qu’il espérait monter à l’assaut de la Libye, il semble en retard d’une guerre. « Ni l’EI, ni Bachar », c’est dépassé. C’est avec Bachar contre l’EI qui a le vent en poupe. Ceci dit, Obama comme l’OTAN ont des alliés bien encombrants. Mises à part l’Union Européenne inexistante, l’Allemagne sur la réserve, la France, plus ou moins sur la touche, entend toujours être de la partie.


La France de Hollande et autres Valls, Fabius, Le Drian

Tout semble indiquer que la politique suivie prône le retour des faucons à la Maison Blanche et mise sur la perpétuation de la guerre au Moyen-Orient pour faire des affaires, tous azimuts. Hollande, le frustré d’une guerre, celle qu’il s’apprêtait à faire en Syrie, s’est précipité pour reconnaître la peu fiable «coalition nationale syrienne » comme « seul interlocuteur légitime » anticipant ainsi l’effondrement rapide du régime de Bachar Al-Assad. Peine perdue ! Lorsque l’Arabie Saoudite a envahi le Yémen, Hollande s’est ingénié à renforcer l’armement de ses amis les wahhabites, ceux qui exportent la vision la plus régressive de l’islam et sont les coproducteurs involontaires des terroristes de l’EI : 30 patrouilleurs pour 600 millions d’euros, des missiles de courte portée, 4 satellites espions, pour 3 milliards, plus des matériels militaires qui seront livrés à l’armée libanaise. Ce va-t-en-guerre pour l’industrie de l’armement française en fut chaleureusement remercié. Il fut le seul chef d’Etat occidental à participer au Conseil de Coopération du Golfe, cette coalition qui met à feu et à sang le Yémen (5 000 morts dont la moitié de civils, 25 000 blessés, des hôpitaux bombardés). Ce nouveau Guy Mollet reste aveugle face aux exactions perpétrées par ce régime : les tortures pratiquées, l’oppression de la minorité chiite, les peines de mort précédées de flagellations et pratiquées par décapitation et crucifixion en place publique, ne l’affligent pas. En représentant de l’impérialisme français, il prétend tirer les marrons du feu de ces guerres meurtrières. Les sanctions contre l’Iran à peine levées, en bon VRP, il s’est précipité, avec sa suite, afin d’y faire du business. Les volte-face incohérentes ne le perturbent pas : en première ligne derrière les USA pour bombarder l’EI en Irak, affirmant « ni l’EI ni ASSAD » et puis prétendant à la « légitime défense » pour frapper en Syrie, il perturbe « l’ami américain » qui entend bien marginaliser ce prétendant à un nouveau partage d’influence au Moyen-Orient.

L’Arabie Saoudite

Le royaume wahhabite a pu espérer affaiblir l’Iran, le Hezbollah libanais et se débarrasser de Bachar El-Assad. La fourniture d’armes aux « rebelles » syriens et leur unification partielle dans « l’armée de la reconquête » pouvait lui assurer le proche effondrement du régime syrien. L’intervention russe change la donne, tout comme leur enlisement au Yémen. La perte d’influence sur les populations sunnites est indéniable. En Irak d’abord, où elles furent marginalisées par les chiites sectaires au pouvoir et ensuite par la domination de l’EI sur toute une partie de ce territoire. Après la répression des Frères musulmans en Egypte, les tentatives de réconciliation avec le Qatar n’ont pas refermé les plaies. La Turquie conteste également cette hégémonie « religieuse » pour y substituer une vision ottomane plus « moderne ». Plus fondamentalement, le pouvoir wahhabite est affaibli. Le prix bas du baril de pétrole pour concurrencer le pétrole de schiste américain fut non seulement une impasse mais a surtout provoqué des difficultés économiques que l’on pensait hier improbables. Le pouvoir qui, pour la première fois de son histoire, accuse un déficit budgétaire a dû rapatrier 70 milliards de dollars placés à l’étranger. Qui plus est, des divisions internes entre princes saoudiens fragilisent ce pouvoir despotique aux abois. La corruption de la famille des Saoud laisse augurer des luttes de clans fratricides. Le cri d’alarme du petit-fils du fondateur du régime est à cet égard significatif : « nous approchons de plus en plus de l’effondrement de l’Etat et de la perte du pouvoir ». Comme signes d’Allah,  l’effondrement d’une grue sur la mosquée de la Mecque (plus de 100 morts) puis la tragédie sur les lieux saints à l’occasion du ramadan (1 849 morts) semblent donner raison à Téhéran comme à tous les djihadistes d’Al Qaida à l’EI, le régime saoudien a failli face aux mécréants.

Comment réagir à l’intervention russe qui vise surtout « l’armée de la reconquête » et l’Armée syrienne libre ? S’incliner c’est nourrir la légitimité de l’EI, s’en accommoder en espérant que la Russie diluera l’influence de l’Iran en Syrie est un pari douteux, justifiant les attentats en Arabie Saoudite et c’est se heurter aux religieux qui prêchent le djihad au sein même du royaume. Et les pétrodollars ne peuvent pas tout. A preuve le retournement d’Al Sissi l’Egyptien, malgré les 3 milliards de dollars fournis pour payer les commandes de matériels militaires russes et l’acquisition des navires Mistral dont la France s’est débarrassée. Reste le deal alléchant proposé à Poutine : la commande de 950 véhicules de combat d’infanterie, la promesse d’investir 10 milliards en Russie pour affaiblir les sanctions européennes contre le relèvement du prix du baril de pétrole et un droit de regard sur les livraisons d’armes à l’Iran. Ce jeu de poker menteur révèle surtout la fébrilité du roi Salman, traité par certains de ses proches « d’incapable ». Plus généralement, ce sont toutes les monarchies du Golfe qui sont désormais sur la sellette de l’Histoire.

La Turquie d’Erdogan

Sa stratégie initiale a volé en éclats. Se présentant comme l’influence substitutive à l’Arabie Saoudite pour incarner l’aile à la fois conservatrice et moderniste de l’islam sunnite, la Turquie a pu apparaître comme la puissance s’opposant à la fois aux Etats-Unis et à Israël. Défenseur des Palestiniens et des Frères Musulmans, la conjoncture dite du printemps arabe lui fut dans un premier temps favorable. A cet égard, l’utilisation cynique du conflit syrien a mis  le régime syrien en difficulté, tout comme les Etats-Unis. D’un côté Erdogan et les pétro-monarques s’entendaient pour aider les rebelles syriens, de l’autre, Erdogan laissait l’Etat islamique recruter des djihadistes en Turquie et refusait aux Etats-Unis la possibilité d’utiliser la base militaire installée dans son pays pour les bombarder. Ce double jeu visait à anéantir au plus vite le régime de Bachar Al-Assad et à stopper l’influence grandissante des Kurdes de Syrie.

C’était sous-estimer Bachar al-Assad et ses alliés iraniens et russes. La guerre se prolongeant, l’accueil de 2.2 millions de réfugiés, la résistance des Kurdes à Kobané ont mis Erdogan en difficulté alors même que l’économie turque et les rêves de grandeur autocratique indisposaient de plus en plus nombre de Turcs. La révolte de la jeunesse à Ankara sur la place Ghezi allait faire basculer le régime dans la répression. Les élections qui devaient confirmer la volonté de présidentialisation du régime furent un fiasco. Dès lors, dévoilant sa véritable nature, le régime despotique de l’AKP lança ses troupes à l’assaut des permanences du Parti légal kurde et jeta son pays dans la guerre civile. Se présentant comme le seul rempart de l’unité de la Turquie, la guerre contre le PKK assimilé aux terroristes de l’EI reprit de plus belle. Si les nouvelles élections provoquées par le refus d’Erdogan de partager le pouvoir lui furent apparemment favorables, son dessein de présidentialisation automatique n’est pas atteint. Entretemps, la fourberie d’Erdogan s’est retournée contre lui. Les partisans du califat islamique ont provoqué des attentats meurtriers en Turquie même, à Ankara (plus de 100 morts), à Diyarbakir (4 morts), à Suruc… Ils sont bien décidés à se venger de l’autorisation donnée aux forces US d’utiliser la base américaine et de son retournement contre les cellules dormantes installées en Turquie. La police turque s’attaque désormais aux 3 000 djihadistes qu’elle a laissé s’installer, à cette « autoroute djihadiste » qu’était devenue la Turquie. Un autre danger de démembrement de la Turquie apparaît. Outre la sécession kurde à l’Est, le territoire situé de part et d’autre de la frontière avec la Syrie fait resurgir la vieille revendication d’autonomie du Sandja d’Alexandrette. En 1939, la Turquie a incorporé unilatéralement ce territoire, avec l’accord de la France coloniale occupant par mandat de la SDN la Syrie.

Eradiquer les forces kurdes en Syrie semble désormais hors de portée d’autant que les dernières violations de l’espace aérien turc par des avions de combat russes sonnent comme un avertissement. Qui plus est, si, comme c’est possible, Alep tombait aux mains de l’armée syrienne avec l’appui des Russes et des Iraniens, ce serait, comme l’estiment certains experts, 2 à 3 millions de réfugiés qui s’achemineraient notamment vers la Turquie. « L’acteur le plus cynique et le plus manipulateur » comme le désigne le journaliste Olivier Zajec(1), peut compter sur la pusillanimité des Européens affolés. L’UE, Merkel en tête, lui a proposé 1 milliard d’euros pour contenir les exilés contre des visas pour les travailleurs turcs. Elle semble toute disposée à fermer les yeux sur les exactions du régime, sa presse muselée, sa justice aux ordres et sa police répressive. Quant aux Russes, ils détiennent une arme redoutable : la dépendance énergétique de ce pays vis-à-vis du gaz russe (60% de son approvisionnement). Déjà les projets de gazoduc et de construction d’une centrale nucléaire ont été repoussés.

Bref, l’autocratie turque vacille et ce, malgré les succès de l’AKP aux dernières élections. La vision de reconquête ottomane n’est plus de mise. Quelle va être l’attitude d’Obama vis-à-vis de ce membre de l’OTAN alors que Russes et Américains sont en concurrence afin d’aider les Kurdes syriens à combattre l’Etat islamique pour des motifs différents ?

… et de quelques autres : Israël, Egypte, les Kurdes, l’OTAN…

Netanyahou semble tétanisé par l’effacement régional des USA et l’apparente convergence Washington-Téhéran. Tous ses efforts pour contrecarrer l’accord sur le nucléaire iranien ont été vains. Qui plus est, la poursuite de la colonisation de la Palestine, les provocations sur les lieux saints de Jérusalem, qui sont sous administration jordanienne, ont suscité la révolte palestinienne ; elles ont aiguisé les contradictions avec le roi de Jordanie. La dérive extrémiste et religieuse (Etat juif) semble de plus en plus incontrôlable et ne peut que renforcer la déterminations des rebelles salafistes et djihadistes dans le Golan occupé. L’intervention russe provoque une grande fébrilité d’autant que l’aviation israélienne a continué de bombarder clandestinement les convois d’armement destinés au Hezbollah au Liban et que la Russie entend livrer avant la fin de l’année ses missiles S300 à l’Iran. Le 21 septembre, Netanyahou s’est en effet précipité à Moscou pour tenter de négocier avec Poutine « le futur ordre régional » dans cette région. Si la Russie souhaite certainement éviter un clash avec Israël, elle n’est pas maître de la situation explosive du Liban et de la capacité du Hezbollah à s’imposer au Liban Sud, voire de menacer Israël en cas d’incursions.

Quant à l’Egypte d’Al Sissi, au grand dam de l’Arabie Saoudite, elle a applaudi l’intervention russe en Syrie, tout comme les Emirats Arabes Unis et la Jordanie. Tous ces régimes fragiles sont en effet menacés par l’hydre islamiste de l’EI qui conteste leur légitimité. Al Sissi a fort à faire au Sinaï et à la frontière égypto-libyenne. Un appui des Russes serait… bienvenu.

Bref, toutes ces dictatures et tous ces pouvoirs réactionnaires rendent la coalition sous l’égide des Etats-Unis de plus en plus équivoque.

Restent les Kurdes syriens, « jaloux » de leur autonomie, efficaces dans le combat contre l’EI, que les USA soutiennent par des frappes aériennes contre leurs ennemis et par la livraison d’armes (50 tonnes de matériels auraient été livrés par parachutage). Le PYD, ce parti considéré comme une branche du PKK, est courtisé également par les Russes qui prétendent le protéger de la vindicte d’Erdogan. Une délégation du PYD a d’ailleurs été reçue dernièrement à Moscou.

Il semble donc que les USA ne contrôlent plus grand-chose, même pas le gouvernement irakien qui s’est tourné vers l’Iran, pas même les Kurdes irakiens dont les divisions et la corruption freinent toute offensive au sol contre l’Etat Islamique et l’Irak, explosée en trois partie distinctes, Kurdes au Nord, gouvernement chiite au centre et au Sud-ouest, l’EI). Pour Obama, sortir de ce guêpier est un dilemne sans solution !

Il semble même impensable de réitérer une opération du type de celle mise en œuvre en Syrie où l’OTAN est intervenue en alliance avec l’aviation du Qatar pour le résultat que l’on connaît : deux gouvernements qui s’affrontent, un troisième nommé par le représentant de l’ONU et l’apparition de l’EI sur toute une bande côtière…

Au quartier général de l’OTAN on a d’autres chats à fouetter ou plutôt à caresser. Ne pas accroître les divisions de l’Europe, rassurer les pays de l’Est, en particulier la Hongrie et la Slovaquie effrayées par l’ours russe et la partition de fait de l’Ukraine. De surcroît, la Turquie, membre de l’OTAN, imprévisible tout comme la Russie poutinienne, inquiètent le quarteron des généraux qui phosphorent sur ces nouvelles « guerres hybrides ».

<<<>>> 

Tout ce qui précède tend à démontrer que l’extension du domaine de la guerre dans les pays voisins de la Syrie, n’est pas à exclure. Le maillon le plus faible qui pourrait céder, c’est le Liban. Encore que d’autres affrontements en Turquie, en Jordanie, dans le Golfe persique, sont potentiellement possibles. L’EI est ses « métastases » sont loin d’avoir été vaincues. La Turquie, qui désormais entend bloquer l’autoroute du recrutement de djihadistes qu’elle a laissé perdurer, est en passe de connaître, outre la guérilla kurde, des attentats de représailles des « fous d’Allah ». La délégitimation d’Erdogan prendra du temps mais le processus est en marche.

Pour conserver son avantage, Poutine, comme il l’a fait en Tchétchénie, pourrait à la fois faire preuve de la plus grande brutalité guerrière, provoquant encore plus d’exilés fragilisant ainsi la Turquie et les Etats de l’Union Européenne et, par ailleurs, exercer une diplomatie qui le place en arbitre de la situation. N’a-t-il pas déclaré que « le règlement politique en Syrie ne peut se faire qu’avec la participation de toutes les forces politiques ethniques et religieuses » excepté les terroristes qu’ils soient « modérés » ou apocalyptiques.

En d’autres termes, la pétaudière du Moyen-Orient qui ne ravit que les marchands de canons est encore loin d’aboutir au grand marchandage à venir. Certes, de grandes manœuvres souterraines sont déjà à l’œuvre, comme le lâchage d’Assad contre le Donbass ukrainien qu’évoquent certains commentateurs. Restent deux inconnues de taille. D’une part, la réaction des Etats-Unis qui ne peuvent rester l’arme au pied, et, d’autre part, une absence de taille pour l’heure, celle d’une nouvelle irruption des peuples, à l’instar de celle des printemps arabes, qui bouleverserait les plans des puissants.


Gérard Deneux, le 8 novembre 2015    

Ils, Elles luttent

Les forestiers occupent leur campus

Les forestiers du SNUPFEN Solidaires (syndicat majoritaire)(1) ont lancé Le 24 novembre l’occupation du centre de formation de l’ONF(2), dont le DG a annoncé la vente en septembre dernier. Au-delà de la question du centre de formation, se pose la question du devenir de l’ONF et de la gestion des forêts publiques à travers le projet de contrat qui doit lier l’Etat et l’ONF pour les années 2016-2020.
Avec la COP 21, les français et le monde entier auront droit d’entendre des discours vertueux sur le climat. La forêt française, qui joue pourtant un rôle important pour la fixation du carbone, la protection des sols et la filtration de l’eau semblent absentes des débats. Autre contradiction, l’absence de  moyens mis en œuvre pour protéger la forêt française (bien commun) et soutenir l’ONF, gestionnaire des forêts publiques.
Les salariés-es en lutte demandent au gouvernement de prendre la mesure des enjeux et d’apporter de réelles perspectives pour le monde forestier.
Lors de l’AG du 4 décembre, 200 forestiers présents ont voté pour que l’occupation dure au moins jusqu'au 12, date de la fin de la COP 21. Si ces travailleurs-ses ont le moral pour continuer l’occupation, ils/les ont besoin de solidarité, le campus n’est pas situé sur la place publique au regard de la population – et quand bien même – mais en pleine nature. Pour les rencontrer, il faut aller sur place. D’ores et déjà les occupant(e)s sont soutenu(e)s par le mouvement Ensemble, le Parti de Gauche 54, La chorale des sans nom, Solidaires et Sud Education, Alternatiba, Stop Bure, Ruth Stegacy(3), etc.
Pour tout contact et visite du campus occupé : zadcampus@gmail.com

(1) Syndicat National Unifié des Personnels des Forêts et de l'Espace Naturel – affilié à Solidaires.
(2) Le Centre National de Formation Forestière – Campus ONF - est le seul centre de formation de l’ONF. A Velaisnes-en-Haye, proche de Nancy, il a formé des générations de forestiers qui voient à travers sa fermeture annoncée, une perte programmée de leur technicité.
(3) R. Stegacy, journaliste et productrice à France Culture émission Terre à terre, le samedi de 7 à 8 heures.


Victoire des Chibanis de la SNCF… suite…

Dans PES n° 17, nous annoncions la victoire des 842 Chibanis de la SNCF, à qui, après 10 ans de combat judiciaire, le Conseil des Prud’hommes de Paris rendait justice, condamnait la SNCF pour discrimination selon l’origine sur l’évolution de carrière et sur les droits à la retraite. Aucun préjudice moral attribué. Pas de modification du montant de la retraite de misère. L’indemnisation allouée ne porte que jusqu’à l’âge de 72 ans. Malgré ses « bémols », que la victoire était bonne ! Il en coûterait plus de 150 millions d’euros. C’était le 21 septembre 2015. Guillaume Pepy, président de la SNCF, a attendu le dernier jour, le 23 novembre, pour faire appel de la décision… au moment où l’état d’urgence n’autorise pas les manifestations publiques. Cynisme et pratique discriminatoire réitérée : il bafoue non seulement le code du travail mais aussi le droit international du travail et la convention européenne des droits de l’Homme… en notre nom puisque la SNCF est une entreprise publique. Pour tout soutien : Association Droit à la Différence associationdroitaladifference@gmx.fr  

Soutien aux grévistes de la Poste à Neuilly

La réorganisation, à la Poste se poursuit dans le cadre de la privatisation. Ce n’est pas sans heurts et mouvements de résistance des postiers. Ceux de Neuilly sont en grève depuis 7 semaines pour le maintien de l’emploi et la défense du service public postal.. Ils refusent les réorganisations envisagées, alourdissant la charge de travail, ainsi que le nouveau régime d’heures supplémentaires sous-payées, pour combler les sous-effectifs. La direction ne veut pas céder et cherche à isoler les postiers de Neuilly, à les décourager en refusant la négociation, en comptant sur de futures paies séchées au maximum (à 0 euro !) en périodes de fêtes. Les grévistes s’organisent pour tenir, rencontrent leurs collègues des bureaux de poste du 92 pour élargir le mouvement. Ils étaient 250 grévistes du 92 le 12 novembre. Ils prévoient une grève le 17 décembre prochain et préparent une mobilisation large début 2016.

C’est bien cette solidarité qui commence à inquiéter la direction : les postiers du 92 ont obtenu, par ex, suite à cette mobilisation le paiement de la distribution par les facteurs des professions de foi électorales pour les régionales. Eh oui ! tout travail mérite salaire ! Pas à la Poste où ce travail n’est pas rémunéré, ce qui a fait déposer des préavis de grève de la CGT, FO et SUD dans le 75 et le 78, la Basse Normandie. A Lisieux, la direction a même décidé de « désigner » des grévistes pour les obliger à distribuer les professions de foi au nom de « l’intérêt général » et sous peine de sanctions !  
Pour aider les Postiers à tenir, il faut alimenter la caisse de grève au plus vite.
Une caisse de grève en ligne vient d’être créée. C’est plus rapide que les chèques. Soutenez-les
et pour celles et ceux qui ne peuvent pas payer en ligne ou qui préfèrent le faire par chèque : envoyer les chèques à l’ordre de SUD Poste 92, au 51 rue Jean Bonal 92250 La Garenne-Colombes avec mention Solidarité grévistes au dos du chèque.

Ardelaine ou relocaliser l’industrie textile locale

De la tonte en passant par le cardage, le filage, le tissage, c’est toute une filière laine que la coopérative Ardelaine, fondée en 1982, a patiemment remontée, à Saint-Pierreville, en Haute-Ardèche. Literie, pulls, robes, chaussettes… sont fabriqués dans cette coopérative où l’on expérimente depuis plus de 30 ans d’autres manières de travailler et de faire vivre l’économie sur un territoire. En 1975, avec l’effondrement de l’ancienne filature du village, les bergers du coin pensent que c’est fini, ils ne trouvent plus de tondeurs dans ces montagnes. L’industrie textile se délocalise de plus en plus loin, en Asie.
Quelques amis décident de reconstruire la filature, l’idée fondamentale étant de monter une activité économique alternative, écologique, critique du capitalisme, du salariat, de l’industrie… et de redonner un débouché pour les éleveurs de moutons et de la vie au village.
Aujourd’hui, Ardelaine emploie une cinquantaine de personnes, principalement à Saint-Pierreville, mais aussi dans une ZUP de Valence où se fait la conception des vêtements avec des associations locales et des jardins partagés. Ardelaine est une SCOP avec ce que cela implique : partage des éventuels bénéfices en priorité par les salariés : 45% pour les employés, 45% en réserve pour les investissements et 10% pour la rémunération du capital, c’est-à-dire les coopérateurs.  « On est partis sur un pied d’égalité dès le début. Et ça n’a jamais été remis en question » Tout le monde est au Smic, à part ceux qui sont légalement reconnus comme cadres et qui gagnent un peu plus, pour compenser les cotisations salariales supérieures.
Ardelaine se développe à son rythme, ne recevant d’aides publiques qu’à hauteur de 10% lors des grands travaux de construction. C’est un projet social, une autre répartition des richesses et du travail.


lundi 9 novembre 2015


Le n° 18 de PES est paru.
Voici l'édito
(le sommaire est en fin d'article)
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Décomposition avant putréfaction ?

L’odeur des effluves nauséabondes du FN agite toute la caste politique à l’approche des régionales. Les immenses fiefs pour grands féodaux républicanistes en font baver plus d’un. Et la présidentielle n’est pas loin. Tous sont en campagne et c’est la foire d’empoigne. Tous fébriles et Valls « hypertendu » depuis que Macron lui fait de l’ombre. Quant aux Français, sondés en permanence, ils restent dans leur immense majorité désabusés face à cet embrouillaminis de com’  qui les saoule. Le premier à entrer en chasse fut François Hollande.
Ce fut d’abord la drague aux « chasseurs français ». Interviewé par les adeptes de la chevrotine et de la bécasse, il s’en est pris aux loups et aux sangliers qui pullulent afin de caresser dans le sens du poil ceux qui, pour ¼ d’entre eux, votent FN. Puis il est allé voir Vesoul pour labourer la ruralité, puis à la Courneuve dans ce quartier déshérité pour vanter son « potentiel économique ». Au Mont-St-Michel constatant qu’il est toujours ensablé dans les sondages et que les « sans-dents » lui en veulent, il s’est fait inviter « spontanément » chez la très chouette Lucette. Cette infirmière retraitée, dans son HLM à Vandoeuvre-les-Nancy a craché le morceau, tout comme Stephane Hablot, le maire socialiste : ce dernier, hâbleur, a déclaré à la presse qu’il était le décorateur en chef de cette mise en scène, faisant nettoyer l’appart, apportant fleurs et chaises et même le thermos de café ; pour le reste, les dialogues, c’était « les gars de l’Elysée », les chats de Lucette enfermés, l’interdiction de fumer tout comme de parler des migrants et des SDF… Bref, Hollande s’est fait gauler, chez Lucette Brochet, ce qui ne l’a pas empêché, ce comédien, de plastronner successivement en chef de guerre, en diplomate écolo, en défenseur des industriels, des enseignants, des toubibs. A défaut de redresser la courbe du chômage, c’est celle de la com’ qui s’est envolée : de 13.5 millions votés on en est déjà à 17.4 dépensés. Quant à la baisse des impôts annoncés, le couac de l’addition fiscale des petits retraités fait mauvais effet, en toute hâte, il faut les rembourser, 3.5 milliards. Tout ça, c’est la faute à Sarko, on n’avait rien vu ! Après ça, il fallait bien prendre un bol d’air… pollué en Chine.
Dans le propre camp des socialos, c’est la consternation, Hollande c’est un vrai cabri « il saute sur tout ce qui bouge et ne fait que mettre en scène sa propre impopularité » et Valls s’y met. A la vue de son tour de France, Aubry l’a interdit sur ses terres, elle ne valsera pas avec lui. Quant à Le Drian, prudent, il se retranche en Bretagne et sur ses affiches électorales, oublie le logo du PS…
A Droite, c’est pas mieux. Sarko soigne sa droite poutinienne, Fillon tape sur Copé des « petits pains au chocolat », sur Juppé « l’inadapté du 21ème siècle » et sur Sarko l’échec programmé. Quant à Guaino, la plume de Sarko, il s’en prend aux juges « pervers et psychopathes » et se déclare prêt à aider Maréchal/Le Pen car il trouve Gilbert Collard très sympathique. Il n’a pas dû se rendre compte qu’au FN, ça flingue. Philippot s’en prend à la petite Maréchal qui a osé déjeuner avec pépère Jean-Marie. Tata Marine empêtrée dans ces tricheries au parlement européen ne bronche pas car il paraît que Schultz, le social-démo de droite, s’est promis de « saquer » « la barbare blonde » qui s’est fait coincer par les caméras de surveillance : absente, elle a fait voter un sbire à sa place.
Dans ce marigot a-t-on entendu la voix de Rachida Dati s’indigner « des petits arrangements locaux et des combines d’arrière-boutique » qui la lèsent en Ile-de-France, ou les lamentos de Rama Yade qui, s’en prenant aux élections frauduleuses au Parti Radical, déclare que, décidément, la République est en état de « délabrement » avancé, à l’image - mais ce n’est pas elle qui le dit - de l’immense bidonville de 6 000 personnes à Calais… sans chiottes, sans collecte des ordures. Les juges, n’en déplaise à Guaino, ont condamné l’Etat qui laisse entre autres, des centaines de mineurs en situation de détresse.

Décomposition avancée, vous dit-on, de cette France dite des Droits de l’Homme où le pire semble avoir un avenir. 


Au sommaire du n° 18

- Syrie. Irak. Aghanistan... Vers l'extension du domaine de la guerre ?
- Le FN. Parti d'extrême droite ou parti fasciste ?
- Aéroport de Toulouse-Blagnac. Les dessous d'un rocambolesque bradage
- Air France-KLM. Malfaisante dérégulation et saine colère !
- COP 21. Vrais engagements ou fausses promesses ?
- Ils, elles luttent
- Démolir le droit du travail, c'est CAPITAL !
- Nous avons lu


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AIR France KLM. Malfaisante dérégulation et saine colère !

La colère, plus que justifiée des personnels de la compagnie nationale Air France-KLM, qui a explosé le 5 octobre, est toujours là. Elle est la réponse à la violence exercée par les dirigeants, en connivence avec l’Etat français, actionnaire à hauteur de 16%). Le PdG d’Air France annonçait le 5 octobre un résultat d’exploitation très positif, « supérieur à 123 millions d’euros », et la nécessité de poursuivre « les efforts », en sortant 14 avions Long Courrier de la flotte, en fermant 5 lignes (surtout vers l’Est), en réduisant les fréquences sur les Longs Courriers… Il déclarait que cette baisse d’activités allait générer du sureffectif : 1 700 salariés pour le Personnel au Sol (PAN), 900 PNC (contact, hôtesse de l’air, steward) et 300 pilotes ! Annonce d’un nouveau plan Perform 2020, de suppression de 2900 emplois, s’ajoutant aux 8 000 supprimés précédemment dans les plans comme Transform 2015. Ce que révèle l’explosion sociale ce sont les conséquences du modèle économique européen et du choix  politique de dérégulation et d’ouverture à la concurrence totale du marché des transports. Benjamin Coriat (comité d’animation des Economistes atterrés) l’explique dans un article récent, Air France : derrière la crise, le pactole d’Aéroport de Paris, dont nous reprenons des extraits.

« Air France est pris en tenaille entre les compagnies Low cost (Easy jet et Ryanair pour l’essentiel) qui saturent les lignes européennes, et les compagnies du Golfe pour les longs courriers. Dans les deux cas les dés sont pipés. Car les conditions de concurrence « saines et non faussées » ne sont nullement établies. Nombre de Low cost jouent avec les limites du droit social... Le champion du contournement est sans doute Ryanair, spécialisée dans le recrutement des pilotes « autoentrepreneurs » sur lesquels elle ne paie pas de « charges ». De plus, elle est devenue experte dans la collecte de subventions et fonds régionaux, en posant ces versements comme conditions pour implanter ses dessertes… quelquefois en toute illégalité… Elle a d’ailleurs été condamnée à une amende de 10 millions par la commission européenne, toujours non recouvrés… Quant à Easy Jet, les montages financiers lui permettent… de ne pas payer de TVA et « d’optimiser » l’impôt sur les sociétés…
Les compagnies du Golfe, quant à elles, « sont assises sur la rente pétrolière étatique de leurs pays d’origine, elles peuvent se permette » (encore) « des investissements de long terme », modèle, pour l’heure qu’elles sont seules à l’utiliser (déréglementation des transports en Europe oblige) qui fait des ravages sur les parts de marché des concurrents… ».

Par ailleurs, les compagnies du Golfe ont vu s’ajouter au soutien de leurs Etats, le concours de … l’Etat français ! En effet, « pour favoriser la vente du Rafale (produit d’une  compagnie 100% privée…), l’Etat français n’a rien trouvé de mieux à faire que de lever le moratoire qu’il avait prononcé sur la cession de lignes aux compagnies du Golfe… » Il annonçait triomphalement la vente des premiers Rafales de Dassault et, sans le claironner cédait deux lignes supplémentaires aux compagnies du Golfe… « Les salariés d’Air France ont bien malgré eux, contribué à la vente des Rafales, en payant sur leurs salaires présents et futurs, la cession de parts de marché à des compagnies rivales et concurrentes directes d’Air France ».

Enfin, l’on assiste, de la part de l’Etat, à « un arbitrage systématiquement favorable à Aéroport de Paris (ADP) contre Air France… Le « contrat économique de régulation » autorise ADP à prélever chaque année une taxe élevée sur les billets d’avion…  De même, ADP est autorisée à prélever pour son bénéfice exclusif une taxe sur l’installation et les ventes des boutiques de l’aéroport quand la quasi-totalité des clients y sont acheminés par les transporteurs, dont le principal pour ADP est Air France… « Il se susurre que l’Etat actionnaire d’ADP à hauteur de 40% veille à ses dividendes ! Par contrat, ADP est tenu de verser 60% de ses revenus aux actionnaires »… « Mais, surtout, tout se met en place pour privatiser ADP après Toulouse et Nice. Il faut donc doter la future mariée. Et tant pis si la dote est largement payée par le transporteur Air France… qui demande à ses salariés de remplir la corbeille de la mariée… alors même que ceux-ci estiment avoir largement contribué à la restauration des équilibres puisqu’un retour aux bénéfices est annoncé pour cette année et que la dette du groupe a été abaissée d’un milliard d’euros ».

C’est donc bien le modèle économique qu’il faut remettre en cause en soutenant la lutte des salariés d’Air France. Les patrons d’air France-KLM ont compté sur la division des personnels, mais ça ne marche pas ! Les salariés, toutes catégories confondues, sont prêts à poursuivre leur mouvement, malgré les intimidations. CGT, FO et SUD aérien ont lancé un appel commun à la grève jusqu’au 6 novembre exigeant l’abandon des sanctions contre 18 salariés « pris par hasard et condamnés par avance » et menacent d’un conflit sans précédent » si la direction venait à licencier les salariés visés. OM
Quand Berger singe Sarko


La collaboration de classe permet d’être choyé. En récompense pour services rendus…, Alexandre de Juniac, PdG d’Air France, a eu le bon goût d’offrir au leader de la CFDT, le sieur Berger, un voyage en Nouvelle-Calédonie. Non pas en classe économique à 2 800€ aller-retour, avec le tout-venant. Un homme bien en cour se doit d’être transporté avec la dignité qu’impose son rang, voyons ! Le tout s’est conclu lors d’une table ronde de « dialogue social » sur le thème « Peut-on réformer la France ? ». Et donc, le Berger des moutons de panurge bénéficiera d’une première classe « CAC 40 » à 12 000 euros, dotée, excusez du peu, d’un salon réservé et d’un gigantesque fauteuil-lit. Selon la pub de la compagnie, les riches voyageurs dans son cas connaîtront en outre « une expérience gastronomique inoubliable »… à faire vomir les cédétistes de base qui, à Air France, tentent de négocier la réduction des 2 900 suppressions d’emplois programmées… On pourrait susurrer à ce félon de rencontrer Bolloré pour qu’il lui octroie, comme à Sarko, une croisière sur son superbe yacht… Pa sûr que les salariés apprécient ces faveurs ! GD le 5.11.2015 

La place du pauvre (extrait)

rappeler encore et toujours
qu’après les somptueuses déceptions
on viendra martialement claironner
que c’est fort triste
on viendra magnanimement seriner
une petite larme faisant trembloter
la voix de son maître
que c’est plus que dommage
mais que la nature humaine
est ainsi faite
qu’elle soit le fait
de dieu du diable du singe
du destin du hasard du karma
ou d’un autre blabla
et que de fait
c’est un fait accompli
que rien n’y fait
que donc
il n’y a rien à faire
sauf laisser faire
ceux qui savent y faire
si fait si fait
le veau sera bœuf car la nature bovine…
le goret est un porc car la nature porcine…
la grenouille fut têtard car la nature entêtée…
la larve devient papillon car la nature papillonne…

mais non mais non mais non
il faut au contraire

rappeler encore et toujours
que l’homme devient homme parce que la nature humaine
n’est point
parce que l’homme pense
et donc il est
à chaque instant différent
dans sa nature pensante
mouvante
comme les sables du désert
le désert de sable
pas le désert mental


Paris, mars-août 2014, in La place du pauvre