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Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 2 mai 2016

L’égalité, c’est bon pour la santé

Pourquoi l’égalité est meilleure pour tous (Edition les petits matins), cet ouvrage d’épidémiologistes anglais de renom (dans leur pays) est à plus d’un titre instructif. Que disent après moult recherches, notamment statistiques, Richard Wilkinson et Kate Pickett ? On ne peut ici évoquer que leurs conclusions ; elles sont éclairantes.

La réduction des inégalités peut générer des améliorations sanitaires rapides. En effet, la question de la santé n’est pas liée, contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire, aux dépenses de santé. Ainsi, les Etats-Uniens dépensent 3 fois plus que les Finlandais pour vivre… moins longtemps. L’augmentation de la richesse (PIB) ne se traduit (dans les pays considérés comme riches) par aucun gain supplémentaire en matière d’espérance de vie. En fait, plus les pays sont inégalitaires, plus les difficultés apparaissent.

A l’aide de telles statistiques, les auteurs démontrent que, dans « les sociétés les plus inégalitaires, les gens ont 5 fois plus de risques d’être emprisonnés, 6 fois plus de risques d’être obèses et le ratio des homicides est encore plus élevé, tout comme celui des maladies mentales ».

Avec le développement des inégalités engendrées par le capitalisme financiarisé, on assiste à la montée de l’anxiété sociale, des taux de dépression et donc, celle de la consommation d’anxiolytiques. De même, l’augmentation du stress chronique suscite des troubles de la mémoire, des perturbations du sommeil, de l’hypertension artérielle, voire au niveau « du thymus une détérioration de la réponse immunitaire ».

Plus généralement, la croissance des inégalités suscite des phénomènes psycho-sociaux : la montée du narcissisme, une estime de soi fallacieuse d’auto-valorisation défensive que traduit un mal-être, celui de la peur du déclassement, du jugement des autres. Autrement dit, dans les pays inégalitaires, la confiance dans les autres s’amenuise, la défiance l’emporte. En fabriquant des dissemblables, le système diminue la capacité d’empathie.

Contre l’idéologie dominante qui prétend que l’inégalité, la concurrence favorisent le goût du risque et, par conséquent, la créativité, les chercheurs à l’aide de statistiques sur les brevets contredisent cette affirmation. La Norvège, la Suède, la Finlande, pays les plus égalitaires, produisent plus de brevets par million d’habitants que les Etats-Unis ou Singapour qui apparaissent en queue de liste. « La créativité, l’innovation ne sont pas motivées par l’argent. C’est une vue fausse, un contre-sens produit par l’époque. Les données le prouvent ».

A contrario, la modestie est victime de l’inégalité : parmi ceux qui sont situés à l’échelon le plus élevé de la structure sociale, le doute de soi est faible, l’arrogance et le mépris des « sans dents » prévalent ; la véritable estime de soi, la confiance qu’elle inspire, résident toujours, d’après les auteurs, dans la capacité à se faire des amis sur une base égalitaire et la capacité à accepter la critique, ce qui n’est manifestement pas le cas de ceux qui restent persuadés de leur propre supériorité, reflet le plus souvent de leur place dans la hiérarchie sociale.

Et Richard Wilkinson, dans une interview, de déclarer : « Notre regard sur les riches doit changer. Il faut en finir avec l’admiration ou la déférence… (il faut) les considérer comme des égoïstes, des antisociaux, les mépriser et qu’ils le sachent », et de poursuivre : « Il n’y a pas lieu de dissocier les problèmes sanitaires des problèmes sociaux », « L’émancipation humaine, c’est d’apporter la démocratie sur les lieux de travail ».

Ces notes de lecture peuvent-être mises en regard de nombre de faits sociaux inacceptables, du local au global : des conditions de travail et de sous-effectifs au CHRU de Besançon, notamment en chirurgie cardiaque, à la rémunération annuelle (2015) de Bernard Arnault de LVMH (17 milliards d’euros) sans compter son énorme patrimoine, ou aux révélations des paradis fiscaux (Panama papers », etc…

Tout ça pour insister sur le rapport de forces à créer par la convergence des luttes sociales afin « d’éclairer » les conditions et les perspectives d’instauration d’un régime véritablement démocratique, d’égalité des conditions réelles, impliquant, entre autres, la mise en œuvre « d’un service public sanitaire de proximité ».


Gérard Deneux, le 16.04.2016