Pour l'Emancipation Sociale
PES
n° 23 est sorti
Au sommaire :
- l'édito (ci-dessous) Obama au chevet de l'Europe malade
- Les terroristes de Tel Aviv
- Trump l'oeil
- Vers une ZADification du mouvement social ? (ci-dessous)
- Migrants : "Non bienvenue" ! (ci-dessous
- Notre-Dame-des-Landes : un caillou dans la chaussure de Valls/hollande (ci-dessous)
- Tchernobyl 1986, Fukushima 2011
- A l'encontre du capitalisme : les SCOP
- Longwy en deuil
- rubrique : ils, elles luttent
- rubrique Nous avons lu
pour terminer, un poème de Pedro Vianna
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à l'ordre de PES
Obama au chevet de l’Europe malade
Dans la tournée des adieux
qu’accomplit Obama en Europe, il y a du pathétique, celui d’une sortie ratée de
la scène historique. C’est comme un dernier effort pour ranimer ce grand corps
malade qu’est devenue l’Europe, malade d’excès de libéralisme financiarisé à
qui le docteur Dafoirus prétend injecter une nouvelle dose. Le Traité
Transatlantique, il y tient, pour tenter de sauver les Etats-Unis du déclin qui
les affecte, mais il ne trouve en Europe que des pays de plus en plus déchirés.
Que ce soit la « vieille » Europe dénigrée par Bush, son prédécesseur,
ou la « nouvelle » à l’Est qu’il encensait, tous ces pays ont la
fièvre. Certes, elle prend différentes formes : règles du libre-échange
dévastateur, montée des inégalités et de la précarisation, soubresauts
d’indépendantisme, de rupture, comme en Ecosse ou en Catalogne, mais, aussi,
plus inquiétant, foisonnement des égoïsmes nationaux, refus de la domination
allemande, de celle de l’eurocratie, identitaire, xénophobe, face à
« l’afflux » des migrants.
Et celui qui fut encensé, voire adulé
(l’Obamania), celui qui, en 2008, communiait avec la foule de 200 000
personnes réunies au Tiergarten, en est réduit, désormais, à se produire à la
foire de Hanovre. Là, devant un parterre bien plus réduit mais composé du
gratin de l’industrie mondiale, il a congratulé son « amie Angela »,
farouche partisane du Traité entre l’Europe et les Etats-Unis, tout en lui
faisant la leçon. Il faut investir vos excédents budgétaires et notamment dans
l’armement pour surmonter la crise et faire face à l’ours poutinien en
Ukraine ! C’était, certes, dit dans des termes plus diplomatiques
mais…
Las, ses vigoureux propos, comme ceux
précédemment tenus au Royaume-(dé)Uni, pour rassurer la City de Londres et
calmer les inquiétudes de l’ami Cameron, n’ont eu guère d’effets. Là-bas, ils
ont plutôt attisé les réactions nauséabondes, tout particulièrement de l’UKIP
de la droite extrême contre ce président à moitié kényan, voire chez les
conservateurs néocoloniaux nostalgiques de l’Empire britannique rétifs à la
domination états-unienne. Impact tout aussi dérisoire sur l’Autriche plaçant le
parti fascisant à la tête des présidentielles au 1er tour et
reléguant aux oubliettes les partis dominants de droite et de
« gauche » qui, depuis 1945, se sont succédé au pouvoir. Quant à la
vieille Europe, elle est gangrenée, soit par la peste brune, soit par un
cléricalisme conservateur et xénophobe. De la Hongrie à la Pologne, en passant
par la Serbie, se dressent des murs de la honte, des barbelés et des camps de
rétention aux frontières. Et l’accord de marchandisation d’êtres humains, ce
fameux accord d’externalisation, de sous-traitance, de tri des migrants, conclu
entre Merkel et le despote turc Erdogan, ne fait que renforcer, dans les têtes
malades, la validité du refoulement à caractère raciste.
Ce n’est pas seulement sur la scène
européenne que le rhéteur Obama risque le plus. Dans son propre pays, les mêmes
effets du néo-libéralisme et de la domination des 1% de nantis provoquent les
mêmes rejets : xénophobes chez Trump qui cajole les cols bleus paupérisés,
socialisants avec Bernie Sanders qui fait vivre l’espoir né d’Occupy Wall Street. Bref, l’histoire
bégaie face à la voie à prendre.
Le 30.04.2016
Migrants : non bienvenue !
Plus d’un million de migrants sont
arrivés en Europe en 2015. Des dizaines de bateaux ont accosté sur les plages
de Grèce, de Malte. 2015 sera l’année record du nombre de morts en Méditerranée.
La route des Balkans se ferme. Des murs se construisent au cœur de l’UE.
L’espace de Schengen est bien « mal en point ». Et comme si cela ne
suffisait pas à faire comprendre aux migrants qu’ils ne sont pas les bienvenus
en Europe, un deal signé entre l’UE et la Turquie permet aux Etats de se
« débarrasser de la question » en confiant à Erdogan (qui ne se fait
pas remarquer par son ouverture aux Droits de l’Homme), le tri des migrants.
Face à la catastrophe humaine dans les
camps qui se constituent, non seulement dans les pays limitrophes des pays en
guerre, faisant fuir hommes, femmes et enfants, à la recherche d’une terre
d’accueil, mais aussi en France à Calais notamment, que faire ? Car si la
solidarité avec les migrants est une réalité, la banalisation du refoulement de
ceux qui « n’ont qu’à rentrer chez eux », voire le rejet et le
racisme sont bien là aussi, prêts à être utilisés sans scrupules par ceux qui
veulent atteindre le perchoir en 2017. Ce qui est certain, c’est que la France
de Valls/Hollande ne mérite plus le label qu’elle cocoricotte dès qu’elle peut,
de » pays des Droits de l’Homme ».
Schengen et liberté de circulation ?
Politique européenne d’immigration = 0
La libre circulation des personnes
entre les Etats signataires de l’accord de Schengen, signé en 1985 entre la France,
la République Fédérale Allemande, la Belgique, les Pays Bas et le Luxembourg,
prévoyait l’abolition graduelle des frontières. Ce fut la 1ère étape
de la création de l’espace Schengen, imaginé non pas pour permettre la libre
circulation des hommes mais la fluidification des routes commerciales du
« marché commun ». En effet, en 1984, les douaniers français et
italiens, mécontents de l’intensification de leur travail, entreprirent une
grève du zèle, contrôlant avec circonspection les frontières, et provoquèrent
une crise que les Etats ne voulaient plus subir. Furent privilégiées, dans
cette Europe du commerce, les marchandises et non les Hommes. Les modalités
d’application ont été écrites dans la convention signée en 1995 et l’espace Schengen
fut institutionnalisé dans le Traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997. A ce jour,
26 Etats sont membres de l’espace Schengen (cf encart).
Et voilà que, paradoxalement, depuis
août 2015, Allemagne, Autriche, Hongrie, République tchèque, Slovaquie (dans
l’espace Schengen) ont rétabli des contrôles aux frontières. Cela ne fut pas pour
déplaire à Sarko « Schengen est mort »
et à le Pen « l’absence de
frontières nationales représente une folie criminelle » et même Valls,
qui juste après le 13 novembre 2015, entonna : « Si l’UE n’assume pas ses responsabilités c’est tout le système Schengen
qui est remis en cause ». Le contrôle aux frontières nous garantirait
donc contre le terrorisme ? En tout cas, les actes de terrorisme sont une
« occasion » pour que les politiciens « sécuritaristes », nationalistes
et xénophobes de tous poils prennent des dispositions pour se « protéger »
ou « s’enfermer » derrière leurs
frontières respectives. Et pourtant, sans revenir sur les causes des
assassinats terroristes de 2015 (1), c’est un leurre que de prétendre que seul
le contrôle aux frontières les arrêtera. D’ailleurs, l’UE depuis 25 ans, n’a
cessé de se doter de dispositifs de contrôle pour barrer la route à
l’immigration clandestine : partage d’une base de données communes entre
les polices européennes, dit système d’information Schengen, fichier
d’empreintes digitales, renforcement des moyens de l’agence Frontex chargée de
surveiller les frontières extérieures, avec hélicoptères, drones, navires
militaires, matériels sophistiqués pour détecter les battements de cœur, pour
voir la nuit….
La question principale est celle de
l’absence de politique européenne en matière d’immigration. Elle n’est que
l’addition des décisions de chaque Etat en fonction de sa situation économique,
de sa couleur politique ou de sa situation démographique.
Ce ne sont pas les fermetures dans
l’espace de Schengen, ni les contrôles ré-institués aux frontières sur la route
des Balkans qui empêcheront ceux qui dans un désespoir total veulent aller vivre
ailleurs où cela est encore possible. Les routes de l’exil s’adaptent aux
politiques d’ouverture ou de fermeture des Etats et les passeurs font
fructifier leurs affaires. A peine la route des Balkans devient impraticable,
déjà la route centrale par Albanie/Italie se rouvre, même si elle est beaucoup
plus dangereuse.
Alors, changer les règles de Dublin
qui obligent le demandeur d’asile à déposer son dossier dans le pays d’entrée
en Europe (Italie et Grèce principalement). La Haute Représentante pour les
affaires étrangères de l’UE, Mme Mogherini, le prône ; la commission a
proposé, avec le soutien de l’Allemagne, que l’UE se dote d’un système
permanent de répartition des candidats à l’asile entre les 28 membres, mais la
solidarité européenne a ses limites : Pologne, Hongrie et France y sont
opposées !
Faut-il bloquer l’immigration, si
tenté que cela soit réalisable ? Car, contrairement à ce que l’on veut
nous faire croire, l’accueil des étrangers extra-communautaires en UE est
faible. En 2013 : 1.5 million, ce qui représente, par rapport aux 508
millions d’habitants, 0.003%. Sur les 60 millions de réfugiés dans le monde,
11.5 millions sont Syriens et plus de la moitié sont déplacés à l’intérieur de
la Syrie. Le Liban accueille l’équivalent de 25% de la population de son pays
et l’UE seulement 0.2%(2) !
Quand on parle de migrants, doit-on
faire une distinction entre ceux qui fuient les persécutions, les
discriminations dans leurs pays dues à la guerre, à des régimes dictatoriaux ou
violents vis-à-vis « minorités », et ceux qui fuient la misère
accentuée par les politiques du capitalisme financiarisé, décidées par les
instances internationales non élues (FMI, BCE, Commission Européenne) et
exigeant leur mise en œuvre par les Etats « en crise ». Telles sont
les questions qui fonderaient une réelle base de réflexion sur la politique à
mettre en œuvre, au-delà de l’application des conventions internationales
rappelant que la protection est un droit fondamental de l’Homme.
Accueil des demandeurs d’asile = hypocrisie de la
France
En France également, on est loin de « l’invasion » des
demandeurs d’asile agitée par la droite et la droite extrême, voire le
gouvernement Valls/Hollande. Les demandeurs d’asile sont environ 60 000
par an (80 000 en 2015). Le statut de réfugié est en constante baisse depuis
des années : entre 15 et 20% l’obtiennent. Cette réalité est le nœud du
problème : les déboutés du droit d’asile, très nombreux, ne peuvent
repartir dans leurs pays. Ils n’ont plus de droits d’hébergement par l’Etat
dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) et sont dans les
hébergements d’urgence ou s’installent dans des camps improvisés. Les pressions
des services préfectoraux sont constantes pour les inviter puis les contraindre
à repartir. Si ça ne marche pas, c’est l’OQTF (obligation à quitter le
territoire français), puis l’assignation à résidence, le camp de rétention
jusqu’à tenter de faire monter dans les avions. Mais ça ne marche pas ! On
assiste donc à la répétition d’un cycle sans issue : OQTF/assignation à
résidence/expulsion/avion (le père seul, la mère seule, sans les enfants ou
avec)/retour dans la ville d’origine/porte fermée au CADA/rue/disparition du
champ visuel de l’Etat. Telle est la politique de refoulement pratiquée en
France par les Préfets aux ordres des Ministres. On rêve que des « Jean
Moulin » se lèvent et refusent ces refoulements… Ce qui est assuré, c’est
la multiplication des sans-statut/sans-papiers, à la rue, sans ressources, sans
autorisation de travailler, sans aides sociales (RSA, allocations familiales,
APL), la seule protection étant l’aide médicale de l’Etat (service minimum de
santé). Cette politique honteuse est dénoncée par les associations solidaires,
les voisins des camps, les personnes sensibles à la détresse mais, sur ce terrain,
prospère également le racisme.
L’Etat décharge sa responsabilité sur
la solidarité des bénévoles et associations qui trouvent des solutions de bric
et de broc pour les familles, expulsées des CADA. Leurs places sont
réattribuées à d’autres DA qui n’auront pas le statut, et se retrouveront à
nouveau en sursis. C’est sans fin. Ce n’est pas une politique d’accueil, c’est
une politique d’expulsion qui ne veut pas dire son nom !
« Nous ne vous voulons
pas », telle est la politique appliquée. Qu’est-ce qui empêche un pays de
66 millions d’habitants d’accueillir des immigrés (définitivement ou
temporairement), de leur donner une place dans la société ? Pourquoi
fermer les yeux sur le travail au noir des sans-papiers, les logements indignes,
comme celui, emblématique, de Calais ?
L’image d’Epinal de la France terre
d’asile est encore fortement imprimée dans les esprits. Cette page est bel et
bien tournée car le gouvernement Valls/Hollande, certes, ne prévoit pas de
construire un mur à la frontière, comme en Hongrie ou en Macédoine. Il institue
des barrières moins visibles. Il promet et ne fait pas. Hollande déclarait en septembre
2015 vouloir accueillir 24 000 Syriens et Irakiens
« relocalisés » en 2 ans (!). A ce jour, 300
relocalisations sont effectives. Il crée des frontières de procédures, en
refoulant ceux qu’il étiquette de « faux » demandeurs d’asile. Il
ferme les yeux sur la création de « camps invivables » : la
jungle de Calais en est l’emblème, le symptôme de la politique de refoulement
et d’exclusion menée par Hollande/Valls.
Calais. Le 21 octobre 2015, l’Appel de
Calais recueillait en 24 heures 800 signatures pour dénoncer ce bidonville. S’y
sont installés des lieux de rencontres, une « cabane juridique », des
commerces… Malgré les demandes de ne pas détruire ce que ces gens avaient
construit pour reconstituer un lieu de vie, Cazeneuve n’a rien entendu et a
décidé de fermer la zone sud de Calais pour le 25 février 2016. Où sont allés
les 3 450 réfugiés, les 438 mineurs isolés ? Les associations
militantes sur place, Médecins du Monde notamment, dénoncent l’échec du
démantèlement. Le 14 avril 2016 : 328 sont relogés sous les tentes de la
sécurité civile, 254 en Centre d’Accueil et d’orientation, 315 en Centre
d’Accueil provisoire (à 12 personnes dans les containeurs de 14 m2), ¼ sont
partis vers Paris ou des campements voisins : la moitié ont été déplacés
d’une centaine de mètres. Au 13 avril, l’Auberge des migrants décomptait
3 376 migrants (et non 1 639 chiffre de la préfecture) dans la jungle
+ ceux qui sont dans les conteneurs + les foyers de femmes et tentes sécurité
civile, soit au total 5 000 migrants(2).
La France viole la convention de
Genève et celle des droits de l’enfant en refusant un accueil digne aux
migrants, en empêchant une centaine de mineurs isolés de rejoindre leurs familles
au Royaume Uni, en expulsant des personnes dans des pays faussement sûrs, en
entravant le droit à la santé et le droit à l’asile. Et en promouvant la
signature de l’accord Turquie/UE du 18 mars, Hollande se lave les mains de cette question
embarrassante, en préconisant sa sous-traitance à la Turquie.
Le pacte de la honte : Union
Européenne/Turquie
Signé le 18 mars, l’accord a « de quoi donner la nausée aux défenseurs des
droits humains et la migraine aux juristes ». Il prévoit le renvoi en
Turquie de toute personne arrivée irrégulièrement après le 20 mars, y compris
les demandeurs d’asile syriens. En contrepartie, pour chaque Syrien renvoyé
hors UE, donc en Turquie, un autre doit être réinstallé dans un pays de l’UE,
dans un pays de l’UE dans la limite de… 72 000 places ! La Turquie
compte déjà 2.7 millions réfugiés syriens. Elle a donc « bien »
négocié cette sous-traitance : 6 milliards d’euros et la délivrance
facilitée de visas pour les Turcs vers l’UE.
L’opération est lancée. Le 4 avril
2016, 202 migrants ont embarqué de Grèce vers la Turquie, sous garde policière.
Le 8 avril, 124 autres ont été expulsés des îles grecques.
La Grèce, quant à elle, s’est engagée
à examiner en procédure accélérée les DA avant tout renvoi. Encore faut-il que
les migrants concernés aient eu le temps d’ne déposer une avant d’être enfermés
dans les centres d’enregistrement, devenus de fait des centres de rétention. Si
les pays de l’UE ont été prompts à fournir des renforts policiers à la Grèce,
celle-ci attend les 400 juristes et interprètes pour l’aider à examiner les
dossiers ! La France a promis d’envoyer 300 agents pour mettre en œuvre
l’accord (il en faudrait 4000). Par contre, il y a déjà 170 CRS français dans
les îles de Chios et Lesbos. Cazeneuve a aussi fait appel aux douaniers qui
seraient « préposés à l’escorte
d’étrangers en situation irrégulière au départ de la mer Egée vers la
Turquie », en précisant le profit du poste : pour poser
candidature, il faut ne pas rechigner à « exécuter des gestes professionnels coercitifs » comme « l’immobilisation » et le
« menotage ». La CGT-douanes,
en désaccord avec cette mission plus policière que douanière, a obtenu que
« le bâton télescopique de
protection » (en langage clair : la matraque) et « la bombe incapacitante » soient
retirées de la liste de l’équipement du « parfait » douanier en
partance pour la Grèce !
Comment se fait « le
tri » ? Qui contrôle la Turquie dans la mise en œuvre de cet
accord ?
Le 1er avril, Amnesty
International a déjà dénoncé l’expulsion par la police turque de plusieurs
milliers de Syriens vers leur pays en guerre ! Erdogan profite de
l’occasion, il prend un décret le 8 avril pour renvoyer les Pakistanais, étrangers
majoritaires en Turquie.
Les migrants, malgré tout, migreront.
C’est bien la crainte de l’UE qui
s’est empressée de proposer la prolongation de l’opération Sophia, lancée en 2015 : premier déploiement européen de
moyens militaires coordonnés pour résoudre un problème de sécurité intérieure.
24 des 28 membres de l’UE sont impliqués, fournissant 5 frégates (Italie et
Allemagne), 1 avion (France) et des moyens matériels et techniques nécessaires
pour patrouiller dans les eaux internationales, au sud de Lampedusa, pour
lutter contre les trafiquants. Elle souhaite étendre les patrouilles des
vaisseaux vers l’est de la Méditerranée, afin de prévenir les arrivées depuis
la Libye et approcher ses eaux territoriales ; mais dans ce pays en plein
chaos, difficile de signer un accord. L’époque de « l’ami » Kadhafi
est révolue, lui qui avait accepté de contenir les migrants sur le continent
africain, n’est plus, liquidé par les mêmes qui, aujourd’hui, dans le marasme
qu’ils ont contribué à former là-bas, sont bien embarrassés de la coexistence
de deux gouvernements.
A peine les frontières se fermaient
dans l’espace Schengen et en UE, que les passeurs réorganisaient leurs routes ;
délaissant la route des Balkans, ils se préparaient à rouvrir « leurs
bureaux » en Albanie et dans les Pouilles en Italie. Le marché est juteux.
Depuis 2000, le chiffre d’affaires des réseaux des passeurs est évalué à 16
milliards d’euros. Parallèlement, c’est 11 milliards d’euros que les Etats
membres de l’UE ont déboursé pour expulser les sans-papiers et 2 milliards pour
renforcer les 14 000 kms de frontières (3).
Bloquer les frontières, c’est engorger
les voies d’immigration, patrouiller dans les eaux territoriales et
internationales, c’est rendre les routes de l’immigration encore plus
dangereuses pour ceux qui, de toute façon, quittent leurs pays en guerre. Plus
on est répressif plus on aggrave la situation, il faut, au contraire, ouvrir
des voies sécurisées. Plus on ferme les frontières, plus les gens prennent des
risques. 3 700 morts en Méditerranée en 2015 ! Ce n’est pas
suffisant ? Des voix s’élèvent mais minoritaires. Pour la première fois, à
Hambourg, a eu lieu la 1ère conférence internationale citoyenne des
réfugiés et migrants, les 26/28 février 2016, 1 600 participants. Cet
évènement inédit, lancé par le groupe Lampedusa de Hambourg en collaboration
avec les migrants de Berlin, de Hanovre et de la CISPM (coalition
internationale des sans-papiers et migrants) pour organiser un réseau de réfugiés
et de migrants.
Ne cédons pas à la banalisation des
renvois musclés, des situations insoutenables pour les familles. A la veille
des présidentielles en France, les candidats vont rivaliser d’inventivité pour
« gagner des voix », les pires sentiments de racisme vont être
exacerbés. Rappelons par tous les moyens
-
que
nous ne sommes pas « envahis » par les migrants
-
que
les migrations font partie de notre histoire
-
que
les migrants sont un apport économique réel et démographique
-
que
nous devons respecter le droit international et humanitaire.
Odile
Mangeot, le 26 avril 2016
(1) Thème traité
dans nos numéros 10 (01/2015), 18(oct. 2015) et 19(déc. 2015)
(2) Politis 14.04.2016
(3) Le Monde Diplomatique, janvier 2016
« Haro sur Schengen »
Espace Schengen
26
Etats 420
millions d’habitants), dont :
-
22 Etats de
l’UE :
France, Espagne, Portugal, Belgique, Pays Bas, Luxembourg, Allemagne, Suède,
Danemark, Finlande, Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque,
Slovaquie, Hongrie, Grèce, Italie, Slovénie, Autriche, Malte
-
4 Etats hors
UE :
Islande, Norvège, Liechtenstein, Suisse
Chypre, Roumanie, Bulgarie,
Croatie : membres de l’UE sont candidats
à l’espace Schengen
Royaume Uni et Irlande : membres
de l’UE, pas dans l’espace Schengen