Compétitivité, flexibilité à
l’ère « hollandiste »
Ce que l’on veut
nous faire croire, en brandissant le manque de compétitivité dont souffrirait
l’économie française face à ses concurrents, consiste à faire admettre le
besoin d’allègement massif des « charges » sociales que subirait le
patronat ainsi que la nécessaire suppression des contraintes réglementaires qui
l’empêcheraient de s’adapter à la concurrence : la flexibilité des
salariés serait donc requise pour mieux s’ajuster à la demande. Derrière cette
novlangue il y a la réalité d’une stratégie
dite de croissance partagée par les
gouvernants. De Sarko à Hollande rien de changé fondamentalement. Quand l’un
jurait qu’il allait « chercher la croissance avec les dents » le
suivant promet qu’il « va redonner des chances à la croissance ».
Tous les deux brandissent les mêmes recettes : réduction des dépenses de l’Etat,
donc des services publics et diminution des charges et contraintes qui
pèseraient sur le capital. Sauf que la majorité dite de gauche entend aller
plus loin et taper plus fort que Sarko sous la pression de Merkel, de la Troïka
et la menace des marchés. Pour démontrer la supercherie de cette construction rhétorique,
il convient d’abord de saisir la réalité qui réside derrière les mots compétitivité, flexibilité afin d’en
souligner la logique antisociale.
Compétitivité : de quoi
parle-t-on ?
Restons d’abord
dans la logique du système capitaliste : il y a lieu de différencier la
compétitivité « coût », de la compétitivité « hors prix ».
Si l’on envisage le
premier terme (le coût), faire
baisser le prix des produits signifie : baisse des coûts des matières
premières, des revenus distribués aux actionnaires, dont on ne parle pas,
pour insister sur la seule variable qui reste la baisse de la masse salariale, en allégeant massivement les
cotisations sociales patronales afin d’en transférer le coût sur la TVA et (ou)
sur la CSG. Les contribuables salariés sont donc mobilisés pour accroître la
compétitivité.
La compétitivité « hors prix » renvoie à la nature des stratégies patronales qui misent (ou non) sur les
innovations techniques et sur la qualité des produits qu’elles entendent mettre
sur le marché. Or, force est de constater qu’en France, secteurs privé et
public confondus, la Recherche et Développement ne représente que 2.1% du PIB
alors qu’elle est de 2.8% en Allemagne. Si l’on s’en tient au secteur privé, l’écart est encore plus significatif : 15
milliards à comparer aux 31 milliards allemands. La différence ne réside pas
seulement dans le choix de la rente pour le capitalisme français (dividendes
aux actionnaires) mais également sur la politique d’externalisation des grandes
firmes du CAC 40 qui sous-traitent aux PME françaises. Les donneurs d’ordre les
pressurent par la concurrence, entre sous-traitants, pour accroître leurs
profits et les localiser dans des pays à faible fiscalité, voire dans les
paradis fiscaux. En Allemagne, la sous-traitance est internationale (pays de
l’Est surtout) pour la production, l’assemblage se réalise en Allemagne. En outre
la précarisation, et donc la baisse de la masse salariale, est beaucoup plus
avancée depuis les contre-réformes du « socialiste » Schroeder (voir
annexe).
Une autre dimension
de la compétitivité (en fait, la supériorité concurrentielle) n’est guère
évoquée : l’euro, de 2002 à
2008, s’est réévalué de 78% par rapport
au dollar, freinant les exportations hors de l’Europe, sauf pour les
produits haut de gamme. La Banque Centrale Européenne –BCE- (bien que
prétendument indépendante !), n’envisage
pas de se heurter, dans une guerre commerciale, aux Etats-Unis, de se
confronter à cette puissance par une dévaluation de l’euro.
Plus
fondamentalement, le choix a été fait dès la fin des années 70, de pratiquer
une politique de désindustrialisation
qui s’est accélérée à partir des
années 80 : la part de la « valeur ajoutée » (de la richesse
sociale produite) de l’industrie a fortement chuté de 19.2 à 15.5% dans la zone
euro, de 17 à 13% en France. D’après la Direction du Trésor, les salariés dans
l’industrie française représentaient 5.3 millions d’emplois en 1980 et
seulement 3.4 millions en 2007 (de 24 à 13% du total). Deux phénomènes
expliquent cette baisse : d’une part, l’externalisation
de certaines tâches exécutées auparavant par les usines (transport, logistique,
informatique) a permis de transférer ces emplois (moins bien rémunérés) dans
des entreprises dites de service. D’autre part, la délocalisation des secteurs productifs est censée procurer un
avantage compétitif par recours à une main d’œuvre à bas coût (Allemagne dans
les PECO : la Logan en Roumanie...).
Reste, pour finir,
la partie immergée de l’iceberg du capitalisme financiarisé : l’utilisation de sociétés, de filiales d’un même groupe et la pratique de « prix transferts »
(commerce intra-groupes) qui permet de localiser les « bénéfices »
dans un pays à fiscalité avantageuse, voire dans les paradis fiscaux (dont on
ne parle plus !!!).
Tous ces éléments
sont évidemment absents du débat public. Et pour cause, le choc de
compétitivité ou le pacte « hollandiste » vise à faire supporter le
« manque » de compétitivité aux salariés.
Toujours les mêmes solutions
Avant même
l’élection de Hollande et la mise en place de sa politique, celle de son
prédécesseur concernant les exonérations
et allègements de cotisations patronales dégressives jusqu’à 1.6 SMIC n’ont
pas été remises en cause. Elles représentent, pour 2012, 30.6 milliards d’euros
soit 12.5% des cotisations, et par conséquent 3% de la masse salariale dont ne
s’acquitte pas le patronat. L’Etat, donc les contribuables, compense avec
retard, et encore ( !), à 95 %. Or, les
cotisations sociales, qu’elles soient ouvrières ou patronales, constituent
le salaire socialisé qui sert à
payer les retraites, la protection sociale et le chômage. Cette baisse de la
part socialisée du salaire transférée sur les ménages (fiscalité, TVA ou CSG)
non seulement met en danger la Sécurité Sociale mais, plus fondamentalement,
consiste à faire payer aux salariés et aux ménages le « manque de
compétitivité » des entreprises. Quant à enrichir la croissance en emplois
(par des « facilités » d’embauche), ce n’est que propagande.
D’ailleurs, la Cour des Comptes dans son rapport de 2009, avec son langage euphémisé
ne s’y est pas trompée : c’est une politique « à l’efficacité
incertaine » dont il faut « reconsidérer l’ampleur voire la
pérennité ». Tout au plus peut-on convenir qu’elle a procuré un effet
d’aubaine : se débarrasser des mieux payés pour embaucher à un salaire
inférieur à 1.6 fois le SMIC. La composition de la file des chômeurs en a
peut-être été altérée, mais non son ampleur.
De même, Hollande n’a nullement remis en cause
les crédits « recherche »
octroyés qui profitent essentiellement aux grandes entreprises, bien que l’UMP
(par Gilbert Carraz) ait déclaré en son temps que « ce n’est pas efficace
et (de plus) très coûteux… », 1.5 milliard en 2008, 4 milliards en 2009.
Encore faut-il préciser que, pendant cette période, les crédits dépensés par le
secteur privé en matière de recherche et développement n’ont progressé que de
200 millions !!! Il est avéré que ces « cadeaux », sur lesquels
aucun contrôle n’est effectué, sont utilisés comme outil d’optimisation
fiscale.
Malgré ses
promesses de campagne, le
contorsionniste matois en reniements a abandonné ses velléités de réforme
de l’impôt sur les sociétés,
parfaitement injuste : 28% sur les petites entreprises, 13% sur les
grandes et pour les firmes du CAC 40, de 8 à 0% comme Total !
Mais, là où il fait fort et mieux que Sarko,
tout en continuant la baisse des effectifs dans les services publics (sauf pour
l’école, la police et la justice), c’est ce qu’il appelle les crédits d’impôt sur cotisations sociales qui représentent un
cadeau de 20 milliards sur 3 ans (!). Comme il s’interdit (et tous les
plumitifs socialos avec lui ?) tout droit de regard sur leur
utilisation « compétitive », il s’agit là d’un chèque en blanc.
Il y a fort à parier que les contribuables salariés ne verront guère danser les étiquettes des
produits à la baisse, encore moins diminuer la rémunération des actionnaires.
En revanche, pour financer ces largesses,
ils constateront l’augmentation des taux de TVA (10 milliards) et la baisse des
dépenses publiques (10 milliards).
Cette généreuse politique qui nous fait les poches entend être approuvée (par
consensus participatif !) par les syndicats dont certains membres
intégreront les comités d’entreprises et Conseils de surveillance… S’ils
élevaient trop la voix en dehors de ces cénacles fermés, Hollande pourrait leur
rappeler qu’au seul cri des pigeons, il a cédé 800 millions d’euros.
Et encore plus
La flexibilité du travail, réclamée à cors et à cris par le MEDEF, ce que Sarko n’a pu accomplir,
lui qui vantait le modèle allemand, Hollande peut-il le faire avec l’appui de
certaines centrales syndicales ? Pour faire passer la pilule, avec
Ayrault, il faut désormais parler de flexisécurité.
De quoi s’agit-il ? Patrons, ouvriers unis pour affronter la
compétitivité ! C’est, de fait, l’accentuation d’une politique de
rentabilisation à outrance de l’exploitation
du travail qui doit suivre les fluctuations du marché, la variation de la
demande, la conquête ou la perte des parts de marchés face aux concurrents.
Dans la langue de bois néolibérale on appelle cela le nouveau management : zéro stock, juste à temps, pour le
client, qui s’accompagnent d’un « contrôle par objectif ». Les
rapports au travail en sont « modifiés » : chasse aux temps
morts, suppression des pauses, annualisation du temps de travail, travail en
équipes pour rentabilisation des équipements avant obsolescence, recours au
travail de nuit, le dimanche… Toutes ces méthodes consistant à adapter les
heures travaillées au niveau d’activité des entreprises concurrentes provoquent
stress, mobilité forcée et se conjuguent avec la remise en cause des statuts et
des conventions collectives. Le recours à l’intérim, aux CDD, aux contrats
« aidés », précaires, ne suffit pas.
L’enjeu de la Conférence
Sociale Paritaire prochaine vise toujours et encore à faire baisser la masse
salariale en brandissant la menace des suppressions d’emplois. Déjà, le coût
des licenciements économiques a été réduit par la possibilité (trompeuse) pour
les salariés de négocier (préventivement, dit-on !) leur départ (rupture
conventionnelle du contrat de travail). Reste
le rempart des conventions collectives par branches à faire sauter, pour
permettre ainsi, sous la férule d’une menace, des « négociations »
par entreprise avec diminution et des salaires et de la durée du travail. Dans
les petites et moyennes entreprises, là où les syndicats sont faibles, celles
qui sont tout particulièrement pressurées par les donneurs d’ordre, il sera dès
lors aisé de faire varier la masse salariale en fonction des résultats de
l’entreprise, quand bien même celles-ci ne seraient que des (quasi) filiales de
l’entreprise mère. Il s’agit, ni plus ni moins, de casser les droits sociaux
collectifs et les identités de métiers. Mutations, reclassements ou stages
bidons s’opèreront sans tenir compte des qualifications acquises (comme à
France Télécom) car seule comptera l’employabilité requise (pour ne pas dire
sujétion).
Dans la novlangue
néolibérale, il ne s’agira en définitive que d’imposer aux syndicats des
« clauses (dites) d’ouverture » » par lesquelles ils
accepteraient, pour sauver l’emploi ( !) des modifications de la durée du
travail, de « travailler plus pour le même salaire », de
« travailler autant pour un salaire inférieur » ou des périodes de
chômage (dit) technique.
Une politique mortifère
Dans le cadre dit
de libre échange, cette stratégie repose sur la croyance que la « croissance » ne peut venir que des exportations,
sur le gain de parts de marchés à conquérir au détriment des concurrents, sur
la recherche du profit pour seul critère. La seule variable d’ajustement est,
par conséquent, dans cette logique, de comprimer la masse salariale ce qui
revient à réduire le pouvoir d’achat et donc la demande interne. La régression sociale qui s’en suit,
aggravée par la diminution des dépenses publiques visant essentiellement à
rassurer les créanciers de l’Etat, conduit inéluctablement à la récession et au
chômage de masse. Restent, pour soutenir la consommation intérieure,
l’incitation au crédit et, par conséquent, les dépenses de publicité.
L’apparition de bulles d’endettement privé est dés lors inéluctable comme ce
fut le cas en Espagne, notamment. Cette guerre
économique entre Etats et groupes capitalistes, provoque l’endettement et
la sujétion des pays les plus faibles, l’élimination des entreprises les moins
« compétitives » et donc, la concentration-restructuration des
secteurs les plus rentables. La croissance des uns c’est la dépendance ou
l’élimination des autres. La « fameuse » croissance prônée ne peut
qu’être inégalitaire et chaotique.
De cette logique
mortifère, il faut sortir pour faire
prévaloir la coopération et la complémentarité entre les productions des
différents pays européens, tout en harmonisant par le haut les systèmes
sociaux. Cette évidence, nullement partagée par les forces politiques
dominantes doit d’autant plus s’imposer que la « croissance », telle qu’elle résulte du système
capitaliste en crise, est derrière nous.
Et ce, pour plusieurs raisons :
-
L’endettement de la plupart des pays européens, qui
résulte de la baisse des impôts en faveur des plus riches et du sauvetage des
banquiers et des spéculateurs, est intenable. Tout comme le sont
l’accroissement des inégalités, du chômage de masse, le ralentissement du niveau éducatif, la réduction des périmètres
des services publics en voie de délabrement. La reproduction de la force de
travail peut, dans ces conditions, être compromise ; on parle déjà, en ce
qui concerne les jeunes, de « génération sacrifiée » (sur l’autel du
capital transnational).
-
Quant aux salariés soumis à la logique de la
compétitivité, la précarisation généralisée les guette. Le nouveau management
compétitif incite à « l’intensification » du travail, à la
concurrence « interne » entre les chômeurs, les précaires et les
travailleurs à statuts et à la concurrence « externe » avec les
ouvriers et employés d’autres pays. Cette guerre entre tous est intenable. La
multiplication des suicides, dépressions, accidents du travail, la dégradation
de la santé, les troubles musculo-squelettiques, en sont les principaux symptômes, tout comme
le délabrement moral d’une grande partie de la jeunesse sans perspectives.
-
Le rebond du système capitaliste en l’absence
d’innovations majeures dans les pays occidentaux est des plus aléatoires à
moins de considérer la guerre entre tous comme une « destruction
créatrice » permettant un nouveau sursaut. En effet, pour l’heure, aucune
« révolution technologique » majeure, tel le passage successif de
l’industrie charbonnière à l’industrie pétrolière n’est envisageable. La course
à la « compétitivité », à l’octroi d’avantages dits
« comparatifs » implique une marche forcée vers la folie énergétique. L’extraction
forcenée du gaz de schiste aux USA, provoquant des dégâts irréversibles, en est
le dernier exemple en date.
-
Plus fondamentalement, la raréfaction des ressources
naturelles non renouvelables annonce de véritables pénuries si la logique
mortifère de la compétitivité est poursuivie. La hausse tendancielle du prix
des matières premières ne ferait qu’exacerber la guerre économique. Pour ne
citer que quelques exemples moins connus que ceux du pétrole et du gaz,
signalons que les gisements de plomb, utilisé notamment pour les batteries,
seront épuisés vers 2030. A un coût admissible donc exploitable, il en est de même
pour l’argent (entre 2021 et 2027), pour le cuivre (2040) et pour le nickel
(2050).
Il apparaît donc
évident, outre la nécessité de réduire les émanations de CO2 et de gaz à effet
de serre, que les innovations doivent être fondées sur la sobriété énergétique
et la durabilité des produits et non leur obsolescence sur laquelle repose le
productivisme capitaliste.
Un cul de sac et quelques
pistes
La politique menée
depuis des années par l’OMC, incitant notamment à la réduction voire à la suppression des droits de douanes, et
par conséquent au libre échangisme
généralisé, a accéléré l’exacerbation
de la concurrence mondiale. Il pourrait paraître légitime de ré-instituer
des protections douanières vis-à-vis des produits importés, tout
particulièrement ceux provenant de pays à bas salaires ou aux comportements
sociaux et écologiques suscitant la réprobation. Ces mesures, outre qu’elles
pénaliseraient certaines transnationales françaises ou européennes qui ont
délocalisé en partie ou en totalité leur production, auraient immédiatement des
effets d’enchaînement ; des mesures de rétorsion seraient prises par
les Etats prétendument lésés dans leur commerce extérieur, les grands groupes
et les banques « cosmopolites » s’y opposeraient et, par réflexe, l’exaltation nationaliste s’en
suivrait. Cette voie sans issue, prônée par l’Extrême Droite, de protection du
capitalisme national opèrerait donc le passage de la guerre économique à la
guerre comportementale, xénophobe contre l’étranger. Au sein des pays européens
qui réalisent leurs échanges à 60/70% entre eux, elle n’est qu’un cul de sac si
l’on ne modifie pas, pour le moins, le modèle économique qui y prévaut.
Pour en sortir, la socialisation des banques interdites de spéculation, débarrassées de leurs filiales résidant dans
les paradis fiscaux, soumises aux financements de projets utiles à la
collectivité fondés sur leurs qualités sociales et environnementales, serait la
première mesure phare permettant d’instituer une autre politique. Elle pose
immédiatement la question de la nature
du pouvoir politique qui, dans un ou plusieurs pays, oserait rompre avec la logique du capitalisme financiarisé. La
planification démocratique que suppose cette rupture, implique l’émergence
d’une ou de forces politiques reposant sur une mobilisation sociale d’ampleur.
Il n’est pas d’autres pistes possibles
pour le bien être des peuples que celles visant, en Europe au moins, la
relocalisation d’activités et de productions de proximité, l’harmonisation par
le haut des systèmes sociaux différents
et l’instauration, par conséquent, de la démocratie sociale supposant
l’irruption politique des peuples sur la scène politique et ramenant à la
portion congrue les oligarchies qui nous dominent.
Malgré les
obstacles à surmonter pour faire advenir une telle perspective, depuis 1995 les
lignes ont bougé. De la défensive, les peuples passent de l’indignation à la révolte.
En France, tout particulièrement, le parti dominant à Droite se déchire, le parti
Solférino fait la démonstration jour après jour que les reniements sont inscrits dans ses gênes. Un espace politique
est en train de s’ouvrir. Encore faut-il élargir la brèche en suscitant la
confiance, l’espoir dans les regroupements favorisant l’émancipation sociale et
les unions pour faire vivre, ici et maintenant, l’union pour la démocratie
sociale.
Gérard Deneux
Le 6.12.2012
Annexe
Le modèle allemand de
régression sociale
Celui-ci, tant
vanté par Sarko, a certes pris de l’avance sur celui de la France. Il a été mis
en place par la « Gauche » de 2003 à 2005, sous le gouvernement
Schroeder. Ce sont tout particulièrement les lois Hartz, du nom du DRH de Volkswagen qui les a élaborées. Elles
ont produit les effets les plus « compétitifs » donc les plus
dévastateurs pour nombre de salariés allemands. Elles s’inscrivent dans une
particularité qu’il faut avoir en tête : il n’existe pas de salaire
minimum réglementaire (SMIC) dans ce pays. Les mesures appliquées peuvent se
résumer comme suit :
-
Les chômeurs doivent accepter et s’adapter (flexibilité
et « employabilité » l’exigent) à n’importe quel emploi proposé, même
si le salaire est inférieur à leur indemnité chômage. En cas de refus, les
indemnités chômage sont supprimées
-
La durée d’indemnisation est limitée à un an pour les
travailleurs âgés
-
Les allocations de longue durée ont été fusionnées avec
l’aide sociale et plafonnées à 345€ par mois
-
L’âge légal de la retraite est reculé pour atteindre
progressivement 67 ans en 2017
-
Des mini-jobs payés 400€ ont été institués, ils sont
exemptés de cotisations sociales donc sans aucune assurance sociale pour les
« mini » salariés qui « bénéficient » ( !) de ces
mesures
-
Des jobs à 1€ de l’heure, pour l’essentiel des travaux
d’intérêt public, sont instaurés
-
Les conventions collectives ont été abrogées dans nombre d’entreprises
dites « en difficulté ». Celles qui demeurent ne concernent plus que
40% des entreprises. La dégradation a été rapide. 76% des salariés en 2002
bénéficiaient de conventions collectives. Ils n’étaient plus que 62% en 2012.
Cohabitent désormais deux sortes de salariés : ceux des industries
exportatrices et les autres, ceux qui travaillent dans les services, les
précaires, les retraités pauvres… Il en a résulté une baisse globale du pouvoir
d’achat avec des différences inégalitaires notables. Par rapport à l’inflation,
de 2003 à 2010, les mieux payés ont perdu 4%, les salaires les plus bas 12%…
23% des salariés gagnent moins de 9.15€ de l’heure.
Le taux de chômage
officiel (6.1% en juillet 2011) est trompeur. Des millions de chômeurs et
précaires radiés, dépendant de l’aide sociale ne sont pas pris en compte… tout
comme la montée du travail précaire qui concerne près de 2 millions d’actifs
(CDD, mini-jobs, temps partiels, intérim…), dont 40% sont des femmes. La
comparaison entre le nombre de chômeurs indemnisés en 1995 et en 2008 est plus
que significative. Ils étaient 80%, ils
ne sont plus que 35% ; ceux qui ne le sont plus dépendent de l’aide
sociale dérisoire (345€/mois).
Ce pays, vanté,
connaît une quasi stagnation de la demande de son marché intérieur, sa
population vieillissante régresse : 82 millions en 2003, 81.8 en 2011.
Le coût du capital en France
Dans les sociétés
non financières donc dans l’industrie et les services, les revenus distribués
par rapport à la valeur ajoutée (la richesse produite) ont connu une très nette
progression. Ils représentaient 5.6% en
1999 et 9% en 2012. Le capital rentier se porte de mieux en mieux…