Rouges de colère !
Toujours plus en moins !
Moins
d’Etat,
moins de protection sociale, moins de droits syndicaux, moins de règles pour les entreprises, moins de contrôle public… Avec Hollande
et ses sbires, c’est Toujours plus
en moins pour « ceux d’en bas ».
Si ! C’est la « Gauche » qui est au pouvoir. D’ailleurs Le Foll,
tel M. Coué, le confirme(1) : « Nous
sommes la Gauche », « Dans
la Gauche, il faut porter des valeurs », « Est-ce qu’on a remis
en cause le modèle social ? Est-ce qu’on a pris des mesures
d’austérité ?». Hollande a un programme « Il y a ceux qui n’attendent plus rien… je fais en sorte de leur
apporter ce qu’ils attendent »(2).Jusqu’à quand allons-nous tout
avaler ?
Macron
- acte 1
- le « chéri » des patrons, des banquiers, « connaît l’entreprise, l’économie, la
mondialisation et il est pragmatique. Cela donne de l’espoir pour la France »
(Gattaz). « Sa » loi est adoptée en août 2015 « pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances
économiques » = libéralisation du transport de passagers par
autocar, travail du dimanche pour les commerces, déréglementation des
professions réglementées… Il trépigne, le temps presse, il faut s’attaquer aux
35h, aux heures supplémentaires « trop payées », aux procédures de
licenciement trop compliquées. A l’université du Medef, il déclare « la Gauche a pu croire, il y a longtemps, que
la France pouvait aller mieux en travaillant moins. Tout cela est désormais
derrière nous » et à Davos : il y a « nécessité d’accélérer et d’amplifier les
réformes en France ». Hollande tempère la fougue dangereuse (pour lui)
de ce jeune ministre et fait appel au vieux Badinter, l’abolisseur de la peine
de mort qui prépare l’abolition des droits du travail. Les « principes
essentiels » développés dans son rapport renvoient presque tout à la loi
pour «protéger les salariés tout en permettant aux entreprises d’affronter la révolution numérique et l’irrésistible mondialisation des échanges ». Gattaz, ravi (tu
m’étonnes !) approuve ce rapport « pour remettre le code du travail au service de l’emploi ». Parce
que, vous les 6 millions de chômeurs, si vous ne trouvez pas de boulot, c’est
parce qu’il « faut lever la peur d’embaucher des patrons » !
Acte
2 – Mme El Khomry
(toute fraîche dans son poste), à peine l’encre du rapport Badinter est-elle
sèche, nous pond un avant-projet de loi « visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections
pour les entreprises et les actifs », à soumettre au Conseil des
ministres le 9 mars, puis aux assemblées parlementaires en avril. C’est t’y pas
efficace, ça ? Sitôt fuité, cet avant-projet a donné les premiers frissons
aux frondeurs et autres élus « socialistes ». C’est qu’elle a du
« charisme » la dame : si ça
risque de ne pas passer, elle menace, déjà, d’un passage en force avec le 49.3 par lequel le
1er ministre peut engager la responsabilité du gouvernement ! Serait-ce le
nouveau modèle de démocratie à la « socialiste » ?
De l’avis du NPA (3), « le
premier inventaire est terrifiant ». Voyons donc.
En
matière de temps de travail : la durée hebdomadaire maxi pourrait aller
jusqu’à 60h (au lieu de 48h) sur 16 semaines (au lieu de 12), le temps de repos
minimum descendre sous les 11h, le temps de travail maxi journalier passer à
12h (10h actuellement) et les astreintes prises sur le temps de repos ;
les apprentis pourraient travailler jusqu’à 10h/ jour ( au lieu de 8h) et 40h/
semaine (au lieu de 35h), le forfait-jour serait applicable dans les
entreprises de moins de 50 salariés sans accord d‘entreprise. Il serait
possible de diminuer la rémunération des HS jusqu’à 10% (au lieu de 25%) et
pour en neutraliser le déclenchement, l’annualisation ça ne suffit pas, le
temps de travail pourrait être tri-annualisé (calculé sur 3 ans) ! Adieu
les 35 H !
Les
accords d’entreprise. Pour faciliter la dilapidation les droits du
travail et écarter les syndicats combatifs, le projet prévoit des accords par
entreprise, la modification des règles de la négociation collective et d’accord
majoritaire : 50 % des suffrages exprimés des organisations
représentatives (au lieu de 30%), excluant les suffrages des autres syndicats,
et la suppression du droit d’opposition.
En cas de blocage, le référendum auprès des salariés est institué :
des consultations posant l’alternative entre fermeture d’un site ou acceptation
d’un certain nombre de reculs sont des faux-semblants de démocratie. Ainsi, un accord d’entreprise pourrait être
validé même si les syndicats représentant 70% des salariés s’y opposaient. Les « accords de développement de
l’emploi » pourraient permettre
l’augmentation du temps de travail des salariés sans contrepartie (même
en l’absence totale de difficultés économiques de l’entreprise), des
licenciements et une baisse des rémunérations en cas de reconnaissance des
difficultés économiques temporaires de l’entreprise : une baisse de
commandes sur plusieurs trimestres deviendrait suffisante pour motiver des
licenciements économiques. En conséquence, un salarié refusant la modification
de son contrat de travail serait licencié pour motif personnel, sans
possibilité d’en contester la cause réelle.
Conseils
des Prud’hommes. Pour
l’heure, ils ne sont pas supprimés mais, ils semblent être dans le collimateur ;
ils dysfonctionnent, dit-on, les délais des jugements sont
« irraisonnables » : cette réalité est due aux décisions de
l’Etat ayant consisté à diminuer leurs nombres et leurs moyens(4). On voudrait
les faire disparaître que l’on ne s’y prendrait pas autrement. D’ailleurs, ces juridictions
spécifiques, paritaires, composées d’employeurs et de salariés élus, n’existent
pas dans le rapport Badinter, l’art. 59 évoque : « les litiges en matière de travail sont
portés devant une juridiction composée de juges qualifiés dans le domaine du
droit du travail ». Et le projet El Khomri leur retire déjà leurs prérogatives
d’appréciation de la réalité du préjudice subi, puisqu’il plafonnerait les
indemnités dues à des salariés licenciés
abusivement, en fonction de l’ancienneté dans l’entreprise, allant de 3 mois de salaire si le salarié était employé
depuis moins de 2 ans jusqu’à 15 mois de
salaire pour une ancienneté de plus de 20 ans. Ces montants seraient nettement
inférieurs à la moyenne obtenue dans les tribunaux actuellement.
Il
ne peut être question de laisser passer un tel projet de régression
des droits du travail. Cette fois, c’est une attaque globale entreprise par
Hollande/Valls. Le dernier exemple de régression en la matière (Sarkozy, 2008)
concerne la rupture conventionnelle pour soi-disant « fluidifier les relations sociales », « gérer la situation de manière adulte »(5).
Loi régressive fut saluée par la CFDT, son n° 2, Mme Descaq : « Avant, il fallait procéder à des transactions sources de contentieux ou
alors les patrons exerçaient des pressions sur les salariés, parfois même du harcèlement
moral ! ». Aujourd’hui, c’est plus simple et efficace(6) et ça
permet aux patrons de « dédramatiser
la rupture du contrat de travail » (5)
Une seule riposte unitaire, rapide, regroupant
partis, syndicats, associations, citoyens, celle du monde du travail doit être
à la hauteur : dans la rue et par la grève (3). Du côté des syndicats, si FO s’indigne et parle de « tsunami libéral » qu’il faut
combattre, si la CGT dénonce un retour au « 19ème siècle » inacceptable, et si Solidaires
s’indigne de voir le code du travail passé à « la broyeuse », la CFDT, adepte des compromissions, annonce « ne pas être d’accord » mais qu’il ne faut pas « crier au loup sur toutes les dispositions… ».
C’est Berger qui le dit, espérons qu’il ne nous prenne pas pour des
moutons ! Sur une action collective « la
CFDT n’est pour autant pas opposée à agir avec d’autres ». Difficile
de voir là un appel franc et massif à descendre dans la rue
immédiatement !
Alors,
serons-nous des grenouilles ? A l’image de cette grenouille placée
dans un bain d’eau froide sous lequel le feu couve, qui se laisse cuire
insensiblement ou de celle jetée dans une bassine d’eau bouillante qui s’en
extrait d’un bond ?
Odile Mangeot, le 19.02.2016
(1) Grand
rendez-vous Europe 1, le Monde, I-Télé du 31.01.2016
(2) Grand prix
2015 du Presse Club, Humour et Politique,
attribué à Hollande pour ses « hollanderies »
(3) communiqué du
NPA du 18.02.2016
(4) Créés le 18
mars 1806 (Napoléon 1er), remaniés sous la 2ème
République (27 mai 1848) avec l’institution du paritarisme (employeurs et
salariés rendant ensemble des décisions juridiques), généralisés par la loi
Boulin en 1979, on en comptait 271 en 2008, 61 ont été supprimés suite à la
mise en œuvre de la réforme de la carte judiciaire (Sarko/Dati en 2008).
(5) Propos des
patrons et du Medef
(6)
Cf article l’urgence
sociale à agir dans ce numéro, précisant qu’au 3ème trimestre
2014, les ruptures conventionnelles ont représenté 17.9% des fins de CDI pour
licenciement, rupture conventionnelle ou démission (sur un total annuel de
920 000) (chiffres de la Dares)