Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


mardi 27 juin 2017

Guyane en lutte

Revenir sur la mobilisation d’ampleur et la grève générale exemplaires qui ont marqué la Guyane de la mi-mars au 21 avril 2017, semble d’autant plus indispensable qu’elles ont été peu médiatisées, voire occultées. Qui plus est, ce mouvement populaire a été de fait méprisé, la proximité des élections présidentielles n’excusant en rien l’absence de solidarité syndicale et politique et encore moins le silence assourdissant de l’ex-ministre Taubira. Dans ce confetti de l’ex-empire colonial, grand comme le Portugal, les populations qui y vivent ont su surmonter les divisions racistes entretenues par des politiciens médiocres. Rejetés par une nouvelle génération allergique aux vieux crocodiles politiques et aux bureaucrates ainsi qu’à toute compromission, ils sont parvenus à arracher, par leur détermination une victoire éclatante contre les politiques austéritaires. C’est cette leçon qu’il faut retenir bien que la spécificité de la situation ne soit pas transposable. Plus qu’un mouvement gréviste, cette lutte s’est dressée contre le sous-développement néocolonial qui caractérise la Guyane cf encart 1 – spécificités néocoloniales de la Guyane).

L’histoire (cf encart 2 quelques repères historiques) de ce département dit français en atteste, tout comme l’ampleur de la pauvreté actuelle qui le caractérise. Cette crise sociale n’est pas intervenue dans un ciel serein, elle a d’ailleurs été précédée de coups de colère et de promesses non tenues qui ont fait surgir une détermination sans pareille (cf encart 3 une situation sociale intenable). Les tergiversations du pouvoir finissant Hollande/Cazeneuve, tout comme leurs manœuvres n’y ont rien changé. L’Etat néocolonial a dû céder. Reste à l’inepte Macron à mettre en œuvre et à honorer la signature de ses prédécesseurs, lui, l’énarque qui a prétendu que la Guyane était une île. Il avait pourtant, en 2015, lorsqu’il était ministre de l’économie, apporté son soutien aux multinationales canadienne (Columbus Gold) et russe (Nord Gold) pour exploiter l’or dans la forêt amazonienne.

Ce sont tous ces aspects largement méconnus que ce dossier souhaite éclairer en retraçant les moments incroyables de cette mobilisation et, à l’aide d’encarts, en évoquant la lamentable histoire coloniale et sociale de ce pays. Sources pour les articles qui suivent : le Monde, Politis, le quotidien de l’écologie http://reporterre.net

Le déroulement d’une mobilisation exemplaire, d’une unité populaire sans faille

Tout commence à bas bruit, dans les syndicats, les associations, les collectifs de citoyens. Quoique, le collectif des 500 frères cagoulés est déjà bien visible, constitué lors de l’assassinat de trop d’un habitant de Cayenne, tué par arme à feu pour avoir résisté à un voleur ; cette association de lutte contre la délinquance a déjà fait parler d’elle. Pacifistes, ils ont décidé de rompre avec les marches blanches à répétition. Hyper-organisés, ils défient les autorités qui, face au trafic de drogue (cocaïne), à la misère sociale et psychologique, ne réagissent pas. Le 16 mars, le mouvement est lancé ; le 20 mars, une énorme manifestation bloque le centre spatial de Kourou. Le lancement de deux satellites est reporté. Avec une grande désinvolture, le gouvernement consent à envoyer une équipe de hauts fonctionnaires qui débarquent le 24 mars. Ils n’apportent qu’une vague promesse de 600 millions d’euros pour redresser l’hôpital de Cayenne lourdement endetté. Le 27 mars, la grève générale est déclarée, des barrages routiers sont autant de lieux de rassemblement avec AG, prises de paroles, repas avec grillades, démonstrations d’artistes locaux. Toutes les administrations, entreprises, écoles, les ports de commerce, aéroports sont fermés, toutes les activités sont bloquées. 13 des 27 maires convoqués par les hauts fonctionnaires refusent de se rendre à cette concertation institutionnelle. Albert Darnal, l’un des leaders du mouvement, dirigeant de l’Union des Travailleurs Guyanais UTG-EDF, déclare : « Nous dénonçons les élus et nous leur disons aujourd’hui qu’ils doivent se mettre en arrière de la mobilisation ». Nous voulons des ministres pour que des décisions soient prises. De Paris, la ministre de de l’Outre-mer, Ericka Bareigts lui répond : « Ce n’est pas la place de la ministre d’aller sur place à chaud, faute d’identification des revendications ». De fait, le pouvoir prend peur, il veut éviter « la prise d’otage » à laquelle fut confronté Bayrou en 1996, venant présenter un plan de rattrapage scolaire qui ne vit jamais le jour, et la répression violente du mouvement qui s’en était suivie.

Cazeneuve commence néanmoins à prendre la mesure de l’immense colère sociale. Il promet que « plusieurs ministres se rendront en Guyane en fin de semaine »  mais pose des conditions. "Le  dialogue doit se faire sans cagoule, dans le respect de l’ordre républicain et il appelle au calme » les manifestations pacifiques, y compris dans les villages les plus reculés.

La ministre Bareigts supervisée par le ministre de l’intérieur Fekl, arrivés en Guyane, s’apprêtent à recevoir une délégation du Collectif.   

Le 28 mars, le jour où tout a basculé

La délégation d’une trentaine de membres, escortée par plus de 100 000 manifestants déterminés, est reçue. Immédiatement, elle demande que la presse puisse assister à la négociation. Refus de cette transparence. Suspension. La délégation revient avec une nouvelle proposition : la presse doit pouvoir rester 30 minutes pour entendre les déclarations du Collectif. Nouveau refus. Suspension. Le ton monte, les manifestants sont au contact des garde-mobiles. Matignon, par téléphone, donne son accord. L’une des déclarations met la pression : « Mme la ministre, le peuple guyanais vous demande de vous excuser (pour avoir tardé à venir). Nous pouvons comprendre la bêtise mais pas le mépris ». La ministre s’excuse devant la délégation. Ça ne suffit pas, elle est obligée de renouveler ses excuses au balcon de la préfecture, un mégaphone lui est prêté à cet effet. Il paraît que Cazeneuve, apprenant ce geste qui met en cause « l’autorité de l’Etat » ( !) fut « fou de rage », pour lui « ces excuses sont calamiteuses ». En tout état de cause, la délégation a bien remis à la Ministre le cahier de 400 pages de revendications, élaborées par l’ensemble des membres du Collectif et rendez-vous fut pris pour en discuter. Et la délégation de rejoindre les manifestants pour une grande marche dans Cayenne, les Amérindiens en tête du cortège. « Du jamais vu ».

Echec des manœuvres et des premières négociations

Le vendredi 31 mars, comme pour couper court à toute division et instrumentalisation institutionnelle du mouvement, élus, députés et sénateurs, conseillers territoriaux, maires, se rendent à la préfecture avec une corde symbolique au cou pour signifier qu’ils « remettent les clefs » de la négociation au seul Collectif.

Le 2 avril, le gouvernement, par l’intermédiaire des deux ministres, fait connaître son « plan d’urgence » chiffré à 1,085 milliard. Le collectif s’indigne, c’est insuffisant. Il exige 2,5 milliards de plus, « c’est pas négociable ». Il appelle à intensifier le mouvement, les barrages, y compris aux abords de la base spatiale. Au rond-point qui y donne accès est édifiée une immense sculpture : un poing levé. Quant aux ministres, ils repartent, penauds, à Paris.

Dans les jours qui suivent, la marche sur Kourou est emblématique de la situation néocoloniale : le centre spatial est occupé aux cris de « vos fusées décollent et la Guyane est au sol ». La radio associative qui relaie depuis le début les événements voit son audience exploser.

Le 6 avril, le Medef local, pour briser le mouvement, appelle à lever les barrages. Le président de l’Union des transporteurs lui répond : « Nous maintenons le barrage ». Le 7 avril, le Collectif se présente à la préfecture entouré d’une foule de manifestants. Le Préfet refuse de le recevoir. Colère… un commissaire et plusieurs policiers sont blessés mais les affrontements sont évités. Il faut ternir les barrages et bloquer Kourou. La grève s’installe malgré les pénuries, la solidarité tient.

Le 11 avril, des patrons qui travaillent à la base de Kourou tentent « de libérer la circulation ». L’UTG EDF ne cède pas « On est certainement proche du but, ce n’est pas le moment de capituler ». D’ailleurs on attend un « plan de convergence » annoncé dans le cadre de la loi sur l’égalité réelle ! Et puis « rien à foutre de la campagne présidentielle »… bien que l’on soit à 8 jours du 1er tour ! Cazeneuve qui a joué le pourrissement s’inquiète, les panneaux électoraux sont vides, le matériel électoral n’est pas acheminé… 

Le gouvernement aux abois, cède

Le 18 avril, alors que les barrages maintenus se durcissent encore, le Collectif précise « pour l’éducation, l’eau potable, la santé, nous exigeons 2,1 milliards de plus et l’abandon des poursuites entamées contre des manifestants » et appelle à une nouvelle journée villes mortes.

Alors que Cazeneuve avait jugé cette somme irréaliste, il cède. Le 21 avril, l’accord est signé pour un total d’engagements à hauteur de 3.185 milliards, avec la construction immédiate de 5 lycées, 10 collèges, d’une cité judiciaire, d’infrastructures routières et la cession gratuite de 400 000 hectares aux populations amérindiennes. Promesse est signée d’un examen prioritaire de dépenses de 2.1 milliards dans un « plan additionnel ». La rétrocession totale du foncier détenu par l’Etat à la collectivité territoriale de Guyane est renvoyée aux futurs Etats généraux de Guyane qui détermineront le statut d’autonomie de ce département français. La relation avec les pays voisins, tout particulièrement le Brésil, y serait discutée.

Davy Rimane, l’un des responsables du Collectif, n’est pas dupe : « le salut ne viendra pas des urnes, la mobilisation doit se maintenir, le travail ne fait que commencer » (cf encart 4 élections législatives en Guyane). L’unité populaire, malgré quelques réserves de fin de parcours des 500 frères, a été faite entre Créoles, Blancs, H’mongs, Haïtiens, Amérindiens et Noirs Marrons (anciens descendants d’esclaves en fuite) (cf encart 5 populations guyanaises. Elle n’est pas prête de se défaire. C’est ce à quoi Macron va être confronté dans les semaines et mois à venir d’autant qu’il a pris des engagements contraires sur l’exploitation aurifère sur le territoire des Amérindiens (cf encart 6 -  les engagements avec les multinationales).

Pour ne pas conclure

Les Guyanais ont pris au mot la loi abstraite de l’égalité réelle afin d’en concrétiser la dimension affichée. Le niveau de détermination dont ils ont fait preuve, l’unité des organisations qu’ils ont construite, l’état de préparation souterraine que cela a nécessité, démontrent que ce soulèvement n’avait rien de spontané. Certes, il s’est appuyé sur un ras-le-bol des promesses non tenues et sur une situation néocoloniale intenable. Mais, le cahier de revendications chiffrées qu’ils ont déposé, (tout comme les formes de luttes massives utilisées) indique un degré de maturité politique que l’on est loin  d’atteindre en métropole

Force est de constater que les organisations syndicales françaises n’ont (pour le moins) pas été à la hauteur : aucune déclaration de leaders syndicaux, aucun mouvement de solidarité. L’inexistence d’un internationalisme contre le néocolonialisme révèle un mépris de classe et de race pour ces… étrangers.

Ce constat vaut pour la Guadeloupe, pour l’ensemble des confettis de l’ex-empire colonial et pour les interventions militaires en Côte d’Ivoire, au Mali, en Centre Afrique. La libération sociale et politique des classes ouvrières et populaires, en France, ne peut se réaliser si elles dominent d’autres peuples. Cf encart 7 – Pour que la Guyane décolle

Gérard Deneux, le 11 juin 2017


Encart 1 - Spécificités néocoloniales de la Guyane

La loi de 1905 (séparation de l’Eglise et de l’Etat) ne s’applique pas. Ce pays est toujours régi par l’ordonnance royale datant de Charles X (1828) ! Le clergé catholique est salarié par l’Etat. Les autres religions ne bénéficient pas de ce régime (protestants, juifs, hindouistes, musulmans…) qui n’a toujours pas été aboli.

Département militarisé. 2 800 soldats dont la légion étrangère, le régiment d’infanterie de marine, une base aérienne, une base navale… et Kourou (enclave)

Carences de la justice et de la police sur fond de misère sociale :
-        Trafic illicite de cocaïne en provenance du Surinam. 9 policiers spécialisés y sont affectés…
-        Délinquance, vols, en 2016 : 42 homicides
-        Commissariat de Cayenne. En deux ans, les effectifs ont fondu de 66 à 45. Sur tout le territoire, vétusté des locaux, du matériel, des voitures en mauvais état…
-        2001 : la promesse d’un nouveau Palais de Justice et du renforcement des effectifs (magistrats…) est tombée dans les oubliettes. Délais de jugement très longs
-        Octobre 2016 : Cazeneuve promet 60 policiers de plus, dont… la moitié au rabais (adjoints de sécurité). 2017 : les Guyanais n’ont obtenu que 15 policiers supplémentaires ( !)
-        La Guyane comprend 22 communes subdivisées en villages
-        Les politiciens locaux, loyalistes, se répartissent en trois tendances : Républicains, le Parti Socialiste guyanais et Forces démocratiques de Guyane. Ils ont chacun pour leur part attisé les divisions raciales entre les « Guyanais de souche » (les créoles) et les étrangers. Ils se sont montrés particulièrement zélés pour appliquer les mesures d’austérité. Ils sont largement discrédités sur place, y compris Taubira.

Aberration : La Guyane se doit d’appliquer les réglementations de l’Union Européenne. Sa spécificité géographique n’est pas reconnue et lui interdit de fait de commercer avec ses voisins d’Amérique latine. Ainsi, elle ne peut importer de viande brésilienne, etc. tout doit provenir de la métropole. 


Encart 2 - Quelques repères historiques sur la Guyane

1643 – la France prend possession de Cayenne en vue d’en faire une colonie esclavagiste. Echec des premières implantations de colons
1794 – 1ère abolition de l’esclavage
1797 – La Guyane devient une colonie pénale. Un réseau de camps de travaux forcés est mis en place. Pour renforcer la colonisation agricole (canne à sucre, bananes, riz, manioc, maïs, tabac) des travailleurs européens sont « engagés » pour une durée de 56 mois et attachés par contrat à leur « maître ». Le quasi esclavagisme est un échec : manque de volontaires et fuite des « engagés ». Napoléon ayant rétabli l’esclavage, ils sont remplacés par des Noirs subissant la loi du « Code noir » (instauré en 1685). Des noirs « marrons » (des fuyards) se réfugient dans la forêt amazonienne. 
1848 – abolition définitive de l’esclavage
1855 – ruée vers l’or (10 000 chercheurs). Coup d’arrêt des activités agricoles. Second Empire : Napoléon III. Des opposants politiques, des intellectuels, des délinquants sont déportés à Cayenne
1894 – Affaire Dreyfus (déporté à perpétuité à l’île du Diable en Guyane)
1946 – La Guyane devient département français. A la suite des articles de dénonciation des bagnes par Albert Londres, ils furent définitivement fermés. 45 survivants furent rapatriés.
1965 – implantation du centre spatial à Kourou en remplacement de la base saharienne d’Algérie
1985 – Mitterrand « On ne lance pas des fusées sur fond de bidonvilles ». 32 ans plus tard, il y a toujours nombre de logements insalubres autour de Kourou
1992 – 1ère mobilisation de colère sociale
2008 – mouvement contre la vie chère. Des promesses, rien de significatif. Les prix sont dopés pour le plus grand profit du capital commercial. Des produits sont 10 fois plus chers qu’en métropole.
2013 – Hollande promet un « pacte d’avenir » et la mise en œuvre du plan de rattrapage scolaire promis antérieurement par Bayrou et qui n’a toujours pas été signé
19 janvier 2014 – loi sur « l’égalité réelle » pour l’Outre-mer. Des principes sans effets notoires…
2015 – mise en place d’une collectivité unique (CTG). Enfumage institutionnel…
2017 – sous le calme apparent, les syndicats préparent la mobilisation. Albert Darnal de l’Union des Travailleurs Guyanais est à la manœuvre, lui qui avait soutenu la lutte des Guadeloupéens, comme Elie Domota, pense que « les racines du mal.., c’est la domination coloniale ». Face à la délinquance et à l’absence de structures pour les jeunes, le mouvement des 500 frères se constitue fin février…

Encart 3 -  Une situation sociale intenable

-        Kourou, symbole du caractère colonial. Salariés français « détachés ». Accès aux services publics sur la base spatiale
-        Revenu moyen des habitants : inférieur de 40% à celui de la métropole
-        Une famille sur 2 sous le seuil de pauvreté (40% des enfants)
-        40% des jeunes sortent du système scolaire, sans diplôme. 5 000 enfants sont non scolarisés
-        50% des jeunes au chômage. Taux de 25% pour l’ensemble de la population active
-        15 000 familles en attente de logements. Coupures d’électricité à répétition, loyers inabordables. Logements insalubres. Difficulté d’accès à l’eau potable
-        Mortalité infantile : 551 pour 100 000 par an. Métropole : 152/100 000
-        47 médecins pour 100 000 habitants (2 fois moins qu’en France)
-        Projet de privatisation de l’hôpital de Kourou. Colère des habitants et du personnel soignant. Marisol Touraine retire son projet.
-        Délinquance : 14 fois plus qu’en métropole. Immigration importante en provenance du Brésil, du Surinam, d’Haïti
-        Infrastructures routières insuffisantes, vétustes ou précaires
-        12 000 hectares de forêts détériorés. Pollution au mercure. Exploitation sauvage des mines d’or.

Encart 4 - 1er tour des législatives en Guyane

Dans la 2ème circonscription : Davy Rimane – porte-parole du Collectif, secrétaire général de l’UTG – s’est présenté en candidat indépendant aux législatives : 20.3% des voix. Il sera présent au 2ème tour face à Lénaïck Adam – République en Marche – 36.4%

Dans la 1ère circonscription, le sortant PS Gabriel Serville (29.77%) est en ballotage avec Joelle Prévot Madère (LRM) 29.58%

Avec un taux d’abstention de 75.41% !!


Encart 5 - Populations guyanaises

La Guyane compte 250 000 habitants (30 000 en 1960). Le territoire équivaut à la superficie du Portugal. L’immense majorité des populations se répartit sur la côte et le long des estuaires et des fleuves

Les Créoles (40% de la population). Guyanais dont la langue se serait constituée au XVIIIème siècle (« mélange » de français, d’anglais, d’espagnol, de portugais et de langues amérindiennes). Ils sont les descendants métissés des colons français. Leurs représentants ont monopolisé le pouvoir politique institutionnel local. Mais le réel pouvoir est détenu par les « métros » (métropolitains) qui séjournent quelques années et détiennent le pouvoir administratif, militaire et les réseaux d’échanges commerciaux

Les Français métros (12% de la population). Ils détiennent les postes clés

Les Amérindiens (2.2%) se répartissent en différentes ethnies. 10 000 vivent dans la partie amazonienne. Le droit de propriété sur leurs terres n’est toujours pas reconnu. Ils parlent 6 à 7 langues différentes.

Les « noirs marrons » sont les descendants des anciens esclaves en fuite. Ils sont environ 4 000 et parlent 6 langues différentes

Les H’mongs. Indochinois des montagnes, ils ont été supplétifs des armées française et américaine. Déportés, ils sont arrivés en 1977 (2% de la population) 

Autres : Chinois, Libanais, Haïtiens…

Encart 6 - Macron et la méga-mine d’or industrielle

2011. L’Etat octroie 8 concessions de prospection à la multinationale canadienne Colombus Gold, alors même que des milliers d’orpailleurs clandestins pourrissent les eaux de la Guyane depuis des décennies.
Découverte de la « montagne d’or » dans l’ouest de la Guyane au sein de l’Amazonie

Septembre 2016. Bercy reçoit Igor Klimanov, directeur de Nord Gold pour l’exploitation du site. Il réclame des infrastructures routières et la pose d’une ligne électrique aérienne de 120 km, en capacité de transporter 20 000 mégawatts, soit l’équivalent de la consommation annuelle de Cayenne : coût estimé à 60 millions d’euros… à la charge du contribuable. En contrepartie, l’Etat prélèvera une taxe minière de 2%. Le projet est soutenu par Attali qui siège… au conseil consultatif de la Colombus Gold.

21 février 2017. Présentation du projet à Cayenne avec ( !) « étude d’impact et étude de faisabilité ». Hélène Sirder, Vice-Présidente de la collectivité territoriale de Guyane (CTG), déléguée au développement durable, soutient « la valorisation des ressources du sous-sol ». L’Etat prétend que 1 000 emplois seront créés en phase de construction et 800, ensuite, pour l’exploitation.

Juppé, en tournée en Guyane, déclare « on ne veut pas que les lobbies écologistes viennent contrecarrer un projet créateur d’emplois ». Effectivement, les Amis de la Terre, les Ingénieurs Sans Frontières et … la fondation Nicolas Hulot s’y opposent, sans compter les Amérindiens.

Le projet est démentiel, « c’est un tsunami affairiste » (Fabrice Nicolino). Outre la destruction de la forêt primaire dans la zone, et au-delà (pistes), il nécessite le creusement d’une fosse de 25 km de long, de 600 à 800 mètres de large, d’une profondeur de 250 mètres. Les futurs mineurs concasseront à cette profondeur et utiliseront des intrants chimiques notamment du mercure, et ce, sous les pluies souvent diluviennes, respireront des poussières nocives. Et il faudra entreposer des volumes colossaux de terres stériles… et éviter leur éboulement. Développement durable, vous dis-je !

Macron, qui s’est rendu sur le futur chantier, n’en doute pas. Il a  vanté « l’excellence du projet ». « Columbus Gold (qui n’exploitera pas) est l’un des fers de lance de la mine responsable ». Et puis, comme l’affirme l’un des représentants de cette entreprise « c’est loin dans la forêt, tout le monde s’en fout ». A voir !


Encart 7 - Pour que la Guyane décolle

Eléments les plus significatifs du « cahier de revendications » du mouvement qui concerne plus généralement l’éducation, la santé, des revenus décents, la lutte contre la délinquance… On peut citer :

-        La construction de 5 lycées, 10 collèges, 500 classes primaires
-        Le refus de la privatisation des centres de Santé et des hôpitaux
-        Des emplois et des revenus décents, pour tous, notamment pour les petits paysans ; déblocage des aides européennes les concernant, soutien aux filières locales de circuits courts.
-        Baisse du prix de l’essence (imposé par l’Etat via Total). Possibilité de s’approvisionner auprès des voisins (Venezuela…)
-        Recrutements sur les postes vacants pour l’électrification, la voirie et autres investissements.
-        Recrutement de travailleurs sociaux et éducateurs de rue. Création de structures dans l’ouest ; application des lois nationales pour protéger les enfants et la jeunesse
-        Le conseil des populations amérindiennes et noirs marrons demande la cession des terres communautaires, dénonce le projet de cession-accaparement de 200 000 hectares de forêt au profit de la  multinationale Nord Gold (extraction d’or)