Carrière de
Ternuay, où en est-on ?
Le
Tribunal Administratif de Besançon, le 19 décembre 2017, suite à l’appel en
référé déposé par l’association de sauvegarde des 1 000 étangs, a ordonné
la suspension de l’arrêté du 7 juillet
2017 de la préfète Lecaillon, pour les raison principales suivantes
-
insuffisance de l’étude
d’impact qui omet de mentionner la présence à proximité du projet d’une
exploitation maraîchère
-
insuffisance des
garanties financières offertes par la Société des Carrières de Ternuay, le coût
des travaux de remise en état en fin d’exploitation étant supérieur au capital
social.
Tous
les travaux sur le site sont interdits. C’est une victoire, même s’il faut
attendre le jugement sur le fond, à savoir la contestation des trois décisions
préfectorales : l’autorisation de défrichement, la dérogation à
l’interdiction de destruction d’espèces protégées et l’autorisation
d’installations classées contraires à l’environnement. Mais cette (petite)
victoire renforce la détermination des opposants à ce grand projet, inutile aux
habitants de la vallée, à poursuivre la lutte. Pour l’heure, la vigilance est
de rigueur pour vérifier que les travaux de défrichage ne se poursuivent pas et
pour tenter de compléter le travail d’inventaire des espèces protégées, qui est
largement insuffisant.
La
société a fait appel en Conseil d’Etat.
Plusieurs
hypothèses judiciaires sont envisageables :
-
le Conseil d’Etat n’admet pas le pourvoi de la société au motif qu’il
n’existerait aucun moyen d’entraîner la cassation de l’ordonnance rendue
-
avant que le Conseil d’Etat ne se prononce sur l’admission au pourvoi, le
Tribunal administratif statue sur le fond, le pourvoi est alors sans objet
-
le pourvoir est admis, il faut un avocat plaidant au Conseil d’Etat
L’heure
est donc à constituer une réserve financière car les frais de justice sont très
élevés. Un appel à contribution est lancé par l’association des sauvegarde des
1 000 étangs
« Cesser de se battre, c’est être battu à coup
sûr !
Elle
propose d’ouvrir une souscription déposée sur un compte particulier,
restituable s’il n’y a pas la nécessité d’engager ce frais. Les dons sont à
adresser, par chèque libellé au nom de « Association de sauvegarde 1000
étangs » à Françoise Marlier, la Bergerie 70290 Belfahy.
L’information
des habitants, leur sensibilisation seront poursuivies. A suivre…
A qui
avons-nous à faire ?
La société
des carrières de Ternuay (SCT), qui est-elle ?
Créée
en 2004 à l’initiative de la SARL Valdenaire et STPI, dans la perspective
d’acquérir les terres (13,3 ha) et l’autorisation d’exploiter une carrière à
ciel ouvert (7,7 ha d’une profondeur de 80 m), située à
Ternuay-Melay-Saint-Hilaire lieudit « Outre l’Eau » et
« Fragramme » (zone Natura 2000). Elle s’est constituée sous la forme
de société par actions simplifiée (SAS), un cadre juridique offrant un
allègement des contraintes, notamment en matière de fonctionnement interne
défini essentiellement par les associés et non par la loi. Elle exerce ses
activités dans les domaines de gestion administrative et commerciale de production
sable et granulats. Présidée depuis 2013 par M. Laurent Delafond la SCT associe
trois entreprises. La société des Granulats
de Franche-Comté (GDFC), actionnaire majoritaire détenteur de 55% des
parts, la SARL Valdenaire Frères
détenteur de 22,5 % des parts et la Société
Générale des Entreprises (SGE, une holding regroupant les participations de
STPI, STPI ROUTE, SBI, EVI et en assurant l’unité de direction) détenteur de
22,5%. Ces deux dernières oeuvrent principalement dans le secteur des travaux
publics.
Une
telle structure actionnariale octroie la pleine gestion de la société à la GDFC
(propriétaire de plus de moitié) qui affirme appliquer sa politique globale ;
les associés quant à eux, ne disposant pas d’une minorité de blocage, ne
peuvent compter sur le bénéfice d’opposition. Une véritable dictature, un
modèle éprouvé pour la GDFC qui a ainsi noué plusieurs partenariats dans la
région. Il est donc nécessaire pour mieux connaître la SCT de s’intéresser
davantage à la GDFC.
La société
Granulats de Franche-Comté - GDFC
Créée
en 2005, c’est à Chenove, en Côte d’Or, qu’elle élut domicile. Elle entre au
capital de la SCT en 2010 à la suite d’une première demande d’exploitation
soldée par un refus. Le tribunal administratif de l’époque évoquait une
incapacité technique et financière, une aubaine pour la GDFC disposant alors
d’un capital de plusieurs millions d’euros. Elle compte aujourd’hui 14
établissements à son actif, exploite les sols de 12 carrières, toutes en Franche-Comté,
et place à sa tête ce même Laurent Delafond (qui de surcroît accentue les
décisions unilatérales au sein de la SCT).
La
société aux connotations locales dissimule en réalité des multinationales. La
première Eqiom, actionnaire
majoritaire propriétaire de 60% des parts est une filiale du groupe CRH (Cement Roadstone Holding) basé en Irlande.
L’un des leaders mondiaux des matériaux de construction, implanté dans 31 pays
sur 4 continents, coté aux bourses de Londres, Dublin et New York. La seconde Eurovia, propriétaire à 40%, implantée
dans 16 pays pour une moyenne de 40 000 chantiers par an est une filiale
du groupe Vinci. Vinci qui lui
laisse en mémoire ses deux prix Pinocchio (prix décerné aux entreprises les
plus fallacieuses de l’année) 2011 et 2012 pour causes environnementales et
sociétales.
En
bref, accepterons-nous que la SCT, vulgaire rouage, dernier maillon d’une
chaîne appartenant aux géants du secteur, dépouille de ses ressources un
patrimoine naturel de grand intérêt ?
Romain
Menigoz.