Grèves
simultanées des travailleurs d’Amazon en Europe
Le 17 juillet 2018, 80 % des
travailleurs avec contrats fixes suivaient l’appel à la grève au dépôt d’Amazon
à San Fernando de Henares (aux environs de Madrid). Les unités antiémeutes
intervenaient aussitôt, faisant plusieurs blessés et deux arrestations. C’est
ainsi que s’est déroulé le Prime Day « épique » d’Amazon (période de
2 jours au cours desquels Amazon offre des réductions sur les commandes). Les
grévistes de Madrid ont été rejoints par des grèves dans sept centres
logistiques en Allemagne auxquels se sont ajoutées des actions en solidarité en
Pologne. Les protestations, internationalisées ont été amplifiées par leur écho
sur les réseaux sociaux : des milliers de personnes ont appelé au boycott
et condamné la répression policière. Les travailleurs ont réussi à gâcher la
fête du Prime Day de Jeff Bezos (le patron d’Amazon dont Forbes estime la
fortune à 151 milliards de dollars).
Cette multinationale du
commerce en ligne est la plus importantes au monde, avec 80 dépôts dans divers
pays. On peut y acheter de l’électroménager, des diamants, de la nourriture
pour chats, des accessoires pour moto ou des romans policiers… presque tout ce
qui est imaginable. Avec un stock constitué à grande échelle, la firme promet
une livraison rapide des commandes à n’importe quel point de la planète. Le
secret d’Amazon ne réside pas seulement dans son réseau logistique sans
précédent, mais aussi dans la précarisation énorme du statut de ses
travailleurs. Elle utilise cette structure globale pour limiter l’impact des
grèves. Lors de conflits du travail en Allemagne, l’entreprise peut rediriger
certaines commandes vers différents dépôts, surtout en Pologne ou en France.
Dans chaque centre, Amazon emploie une proportion importante de main-d’œuvre
temporaire pour diviser le personnel et rogner sur ses droits.
Pour mettre en échec un géant
comme Amazon les syndicats affirment avoir besoin d’une stratégie à l’échelle
de l’Europe pour aboutir à des actions syndicales unitaires. Harper, délégué
des Commissions ouvrières (CC.OO) à San Fernando affirme que les grèves
ont pour objectif l’unification de la classe laborieuse, nécessaire pour
dépasser la concurrence des uns contre les autres imposée par le capitalisme.
Les travailleurs ont en moyenne 24 ans, ils n’ont pas de conscience syndicale
enracinée mais ils comprennent la lutte et la nécessité de la solidarité. En
Allemagne Ver.di et à Madrid, la CGT vont dans le même sens « le
monde est toujours plus petit. Le capital franchit les frontières facilement.
Nous devons faire de même ! ». Adieu
au prolétariat ? Non, bienvenue classe ouvrière !
Paru sur le site de A l’Encontre alencontre.org
Sur les conditions de travail à
Amazon, lire En Amazonie de
Jean-Baptiste Malet, et l’article qu’il en a tiré pour le Monde Diplomatique
(novembre 2013)