Macron : ses pactes et ses plans
Avec
Macron, la politique est affaire de pactes, de contrats, pour tout. L’Etat pose
ses conditions d’économies à faire en matière de santé, de retraite, de
chômage, de pauvreté. Ça ne permet pas de sortir les chômeurs du chômage ou les
pauvres de la pauvreté. Ça permet seulement d’évacuer le concept de solidarité
qui prévaut, encore, dans les politiques sociales et de l’emploi. Ce qui se
prépare pour 2019 ne laisse augurer rien de réjouissant pour les travailleurs
privés d’emploi, les familles ou les retraités…
Pour
ceux qui ont pu croire que Macron incarnait le président capable de ramener le
déficit français à zéro et la dette publique en-dessous de 90 % de la richesse
nationale, qu’il suffisait de remettre de l’ordre et de mettre au travail les
« fainéants » ou encore de pister les « profiteurs du
RSA », le rêve se transforme en mirage face aux chiffres 2018 qui s’annoncent
: une croissance à 1.7% du PIB, plus faible que prévue et un déficit public à
2,6 % du PIB, plus lourd que prévu. Quant à la dette publique, elle augmente et
atteint 99 % du PIB, soit 2 300 milliards d’euros. Les évangélistes du modèle économique libéral ne quittent pas la
boussole européenne des yeux (déficit, dette…) et Macron, le petit
« surdoué » de la classe européenne n’est pas bon du tout ! Il
est tenu de rabattre son arrogance et sa popularité est en train de chuter. Il doit
calmer les velléités de ses ministres : pas question de réformer les
droits de succession, il faut « arrêter
d’emmerder les retraités ». On en rit… jaune, car ceux qui vont
trinquer sont ceux qui ont besoin, pour vivre, du modèle social de solidarité :
les retraités, les familles et les classes moyennes. Il faut bien trouver des
économies ! Qui de mieux que les classes moyennes quand les riches sont
intouchables et que les pauvres n’ont
droit qu’à la survie ! Nous
développerons ce qui nous attend dans quelques secteurs clés (chômage,
santé, retraite, etc…). Pour l’heure, la consigne de Macron à ses ministres est
« de mettre davantage l’accent sur
les mesures positives ».
Le projet de
loi de finances 2019 en dit déjà beaucoup
Les
orientations ne changent pas. Si certains projets sont provisoirement
abandonnés ou décalés dans le temps, comme la réforme constitutionnelle et la
« cure d’amaigrissement de l’Etat » imaginée par le Comité Action
Publique 2022 (CAP 22), pour l’heure, il s’agit de rétablir les équilibres des
finances publiques en pratiquant une cure d’austérité sévère sur les dépenses,
en annonçant la suppression de 50 000 postes de la fonction publique
d’Etat d’ici à 2022 + 70 000 dans les collectivités locales, en signant
des « pactes Etat-collectivités territoriales » par lesquelles 230
d’entre elles (sur la liste des 322 collectivités établie) s’engagent à maîtriser
l’augmentation de leurs dépenses de fonctionnement à hauteur de 1,2 %
(inflation comprise), ce qui signifie que le gouvernement livre, à terme, les
services publics au privé (1).
Le
projet de Loi de Finances 2019, présenté le 24 septembre, affiche les priorités
gouvernementales. Les fonctions régaliennes sont préservées : la Défense
voit ses crédits progresser de 1,7 milliard € pour atteindre 35,89
milliards ; le budget de la Justice augmente de 4,4 % (7,29 milliards)
avec 1 300 emplois créés essentiellement dans l’administration
pénitentiaire ; l’Intérieur passe à 13,54 milliards (+ 1.65 %) avec
2 500 emplois créés, incluant les effectifs de la « mission
immigration » de l’Office français de l’immigration et de l’intégration et
ceux de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ; il
s’agit d’accélérer les procédures d’examen des demandes d’asile et de créer des
places dans les centres de rétention administrative pour les étrangers en situation
irrégulière, en totale cohérence avec la loi « immigration » votée au
printemps visant à accélérer les procédures de rejet et d’expulsion des exilés.
Parmi
les secteurs perdants : l’emploi. Les crédits du ministère du travail
diminuent, passant à 12.23 milliards, les effectifs de Pôle Emploi et de l’Agence
pour la formation des adultes chutent (- 1 618 emplois) ; la culture
et les sports sont délaissés. L’Education nationale perdra 1 800 postes
mais c’est le ministère des Finances qui subit la plus grosse purge dans ses
effectifs (- 2 283) : la Direction des Finances Publiques aura perdu
30 000 emplois en plus de 10 ans. Raison évoquée par Darmanin et Le Maire :
numérisation et modernisation, prélèvement à la source, suppression de la taxe
d’habitation, mise en place envisagée du compte financier unique des
collectivités locales qui, du fait de la séparation de l’ordonnateur et du
comptable élaborent deux comptes (2) : ce ne serait plus le cas ; de
même, le paiement en liquide serait supprimé.
Il
s’agit de renforcer les pouvoirs de l’Etat dans les secteurs de la police et du
contrôle social et de trouver des économies dans les secteurs jugés « moins
prioritaires » qui, soit relèvent de la responsabilité des collectivités
territoriales soit vont s’ouvrir à la concurrence, c’est-à-dire seront
privatisés. On peut imaginer ce dernier scénario pour les services de l’emploi
que l’Etat vide de ses moyens humains alors même que le 1er ministre
affirme haut et fort : « nous
faisons le choix du travail ». Le « travailler plus pour gagner plus » sauce Macron, c’est le 1er
ministre annonçant que dès le 1er septembre 2019, les
cotisations salariales seront supprimées pour tous les salariés dans le privé
comme dans le public. Pour l’heure, elles sont supprimées sur les heures
supplémentaires, une manière de donner du pouvoir d’achat aux salariés… en
creusant le trou de l’Unedic et de la Sécu.
Mis
à l’épreuve par la réalité du déficit et de la dette qui augmente, Macron veut
une communication positive sur les « réformes » envisagées. Sitôt
dit, sitôt fait : ses propagandistes annoncent 6 milliards de baisse
d’impôts pour les ménages ; ils y incluent le dégrèvement de la taxe
d’habitation pour 80 % des ménages et la bascule entre baisse des cotisations
(chômage et maladie) et hausse de la CSG. Ils ne tiennent pas compte du manque
à gagner de la non–indexation des allocations familiales, aides au logement et
des retraites (+ 0.3 % alors que l’inflation est à 1,7 %), ce qui ramènerait le
« gain » pour les Français à 3,5 milliards (selon l’OFCE).
Restent
de nombreuses questions sur ces mesures qui « allègent » les impôts
des citoyens. Que va-t-il se passer pour les services publics financés par les
collectivités territoriales, privées de la recette de la taxe
d’habitation ? Comment permettre à tous d’accéder à une formation si,
parallèlement, les moyens ne sont pas donnés aux services qui en sont
chargés ?
On
peut avoir l’impression que le gouvernement navigue à vue mais il semble plus
juste de penser qu’il est déterminé à trouver des économies ailleurs, et
notamment dans les services publics et les protections sociales de solidarité
dont Macron et Cie veulent se débarrasser ou contrôler.
Cible
principale : le modèle social de solidarité
Droit au travail ou chasse aux privés
d’emploi ?
Surprise !
Le 9 juillet dernier, devant le Congrès à Versailles, Macron annonce une
nouvelle période de négociation entre le gouvernement et les « partenaires
sociaux » pour mettre en œuvre, dès le printemps 2019, la nouvelle
convention d’assurance chômage. Objectif : réduire le taux de chômage par
le retour à l’emploi.
Depuis
les années 1990, l’équilibre entre droits et devoirs des demandeurs d’emploi
penche vers une logique répressive. Sarkozy en 2008 crée Pôle Emploi avec
compétence de radiation des chômeurs. Plus discrètement, Hollande institue un
corps spécifique de contrôleurs à Pôle Emploi (mission autrefois dévolue aux
services du ministère du travail, la Direccte). Avec Macron, les contrôleurs
seraient multipliés par 5 d’ici à 2020 et une nouvelle échelle de sanctions
verrait le jour.
Mieux
licencier pour mieux recruter, ça n’a pas marché ! La loi Travail Penicaud
a permis de rassurer les employeurs quand
ils recrutent en allégeant les règles de licenciement et en instituant une
échelle des indemnisations, ce qui leur permet de savoir combien il leur en
coûtera s’ils licencient. Pour l’heure, ça n’a pas permis de diminuer le taux
de chômage. Conclusion des néolibéraux riches et repus : ces
« fainéants » ne veulent pas travailler, ils sont trop
« assistés » ! La preuve ? Ils ne répondent pas aux offres
d’emplois. Le Medef annonce 500 000 offres non pourvues, Pôle Emploi en
annonce 150 000 précisant que de nombreuses propositions se font hors Pôle
Emploi. Il est vrai que depuis 2015, Pôle Emploi externalise, en signant des
contrats avec des sociétés privées et, de fait, ne contrôle plus les offres et
n’en garantit plus la cohérence, la légalité ou la sincérité. La CGT a
récemment réalisé une étude sur 1 700 offres et dénonce plus de 50 % d’annonces
fictives et frauduleuses, voire même des chômeurs qui paient pour être
embauchés et ne le sont pas (3). Le démantèlement du service public de l’emploi
est à l’œuvre depuis quelques années déjà et sa privatisation progressive a
complètement transformé la mission d’origine de l’ANPE.
Le
projet 2019 de réforme de l’assurance-chômage va encore accentuer le contrôle
pour débusquer les « faux chômeurs », ceux qui « ne traversent
pas la rue » pour trouver un travail. Les contrôles sont désormais réalisés sur la base informatique qui enregistre
toutes les recherches du demandeur, ce qui oblige celui-ci à utiliser cet outil
même s’il sait que ça ne sert pas à grand-chose. « Ceux qui se feront prendre seront ceux qui souffrent déjà de la
dématérialisation » ; celle-ci va s’accentuer puisqu’il est
question de créer un « journal de
bord numérique » que le demandeur devra remplir tous les mois. Ces
objectifs de « résultat » vont accentuer l’angoisse des privés
d’emploi qui souffrent déjà de la peur d’être radiés, d’être obligés d’aller à
une formation inutile qui va leur coûter cher…
Bref,
inutile de chercher autre chose qu’une logique comptable dans l’acte III de la
« rénovation de notre modèle social » et qu’une reprise en main
par l’Etat. Seul compte le retour à l’équilibre des comptes de l’Unedic, dont la
dette s’élève à 35 milliards fin 2018. Cette situation ne va pas s’améliorer
suite à la loi travail, annulant les cotisations chômage (et maladie) prélevées
sur les salaires, pour les remplacer par l’augmentation de l’impôt CSG, étendant, par ailleurs, l’assurance
chômage aux démissionnaires. Pour autant, le gouvernement attend une économie
de 1 à 1,3 milliard par an qui s’ajoutent aux 800 millions par an prévus par la
convention Unedic 2017.
Avec
quels moyens ? L’augmentation des cotisations n’est pas à l’ordre du jour.
D’une part, l’Etat veut imposer sa marche en avant de réduction des dépenses
publiques, d’autre part, il entend se mêler de la gestion de cette caisse,
gérée paritairement, car il y contribue par le biais de l’impôt (CSG). Au final,
il s’agit de passer d’un système assurantiel de solidarité à un système de
solidarité par l’impôt.
Pour
la convention Unedic en discussion, le plan d’action des négociations avec les
« partenaires sociaux » portera, notamment, sur plusieurs points qui
concernent l’indemnisation chômage des plus précaires. Il est question de
réglementer la permittence, à savoir le passage d’emplois courts à
l’indemnisation chômage qui, au goût de certains, n’encouragerait pas à
retravailler. La part des personnes qui cumulent depuis plus de 2 ans, une
allocation chômage et un faible salaire, certes, ne cesse de progresser : de
9 % en 2014, elle est passée à 15 % en 2017. Faut-il s’en étonner quand on
remplace les CDI par des contrats de mission et que se multiplient les contrats
très courts (pour lesquels l’Etat s’est refusé à proposer un bonus-malus
pénalisant les entreprises en abusant) ? Par contre, il est question de
refondre le système appliqué aux personnes ayant plusieurs patrons (ex. les
nounous) qui permet, actuellement, au salarié de percevoir une allocation en
cas de perte d’un employeur. En matière d’économies à réaliser, la ministre
propose également de s’intéresser au « rechargement » des droits à
une allocation, à savoir, lorsqu’une personne au chômage retrouve un nouvel
emploi, les allocations encore dues ne sont pas perdues mais reportées et
peuvent être perçues, augmentées de nouveaux droits éventuels, lorsque la personne
se retrouve à nouveau sans travail. Enfin, le Medef notamment appelle à
instaurer des allocations dégressives pour favoriser le retour à
l’emploi ! « Salauds de
pauvres ! Au boulot ! »
La
lettre de cadrage est adressée aux « partenaires sociaux » pour
aboutir à un accord Unedic en janvier 2019 ? Comment les syndicats
peuvent-ils sortir de cette prison, ce cadrage ? Quelles marges de
manœuvre ?
Travail et assurance-maladie
Avant
l’été, il fut question de faire payer par les entreprises les indemnités
journalières liées aux arrêts de travail de moins de 8 jours. Face à la levée
de bouclier des PME notamment, Macron a reculé. Néanmoins, cette question des
arrêts-maladie risque de refaire surface dans le projet de loi sur la santé au
travail (mi-2019) : il s’agirait d’aligner le public sur le privé, en faisant
passer les jours de carence du secteur public à 3 jours (au lieu de 1 jour) et
d’aller au-delà de 3 jours pour tous.
Relativisons
tout de même : les Indemnités journalières pour arrêts inférieurs à 8
jours représentent 4% de la dépense totale des Indemnités, soit 284 millions
d’euros sur 10.3 milliards pour l’ensemble des arrêts (maladie « classique
71%, le reste concerne les accidents du travail et les maladies
professionnelles).
Là
encore, la logique de recherche des réductions de dépenses prévaut alors qu’il
y aurait à s’interroger sur les causes de l’augmentation des arrêts-maladie et
notamment, celles dues au recul de l’âge de la retraite et au vieillissement
des travailleurs ainsi que celles relatives aux conditions de travail de plus
en plus difficiles.
Travail et droit à la retraite
Parmi
les grands chantiers de « grand chambardement » prévus par Macron,
resurgit celui de la « réforme des retraites ». Pendant sa campagne
présidentielle, il avait annoncé : « Nous créerons un système universel de retraites où un euro cotisé donne
les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé, quel que soit le
statut de celui qui a cotisé » en unifiant les 37 régimes existants.
Pour l’heure, il en a retardé le lancement. L’enjeu est considérable, à la fois
pour les salariés et pour le gouvernement car, derrière l’affirmation de
Macron, drapée d’égalitarisme, se cachent des intentions autrement
pernicieuses : la volonté d’assurer la gestion de toutes les retraites
directement par l’Etat, dans le but de garantir auprès des autorités
européennes la baisse des niveaux de pensions, mais aussi le remplacement de la
solidarité au sein des régimes par des mesures d’assistance par la puissance
publique réduites a minima. Il s’agirait en effet de faire table rase du
système de retraite de la Sécurité Sociale, progressivement construit depuis
1945, de remettre en cause les mécanismes de redistribution et de solidarité.
Ce sont donc les plus précaires qui y perdront le plus car ils cotisent moins.
L’actuel
système de retraite, par répartition, basé sur les trimestres cotisés, permet
que les cotisations de tous les actifs de l’année N collectées et globalisées
financent toutes les pensions de l’année N. La démarche est collective et ouvre
des possibilités d’aménagement de solidarités dans la distribution des pensions.
Elle disparaîtrait au profit de la retraite par capitalisation (par point). Le « capital »
constitué est transformé en rente mensuelle. La démarche est individuelle ;
le niveau des pensions est alors soumis aux aléas du marché boursier et à l’âge
de départ en retraite.
Remplacer
les régimes par répartition, construits sur la redistribution et la solidarité,
par un régime unique par points dégraderait le niveau des pensions de tous les
retraités, notamment les plus défavorisés, dont les femmes. Les Suédois le
vivent : avec la réforme des régimes de retraite, le taux de remplacement
est passé de 80 % à 62 % (4).
Jean-Paul
Delevoye, nommé Haut-Commissaire aux retraites en septembre 2017 a évoqué un
projet de loi présenté en conseil des ministres début 2019 avec adoption prévue
avant l’été. Macron, poussé par les instances européennes est retenu par
l’enjeu de cette réforme, et le mouvement de contestation qu’elle ne manquerait
pas de déclencher. Ce pourrait être la « réforme » de trop, mais
qu’importe pour l’ex-banquier de Rothschild qui, s’il devait y perdre la
présidence, aurait satisfait l’avidité des vautours des fonds de pension.
Pour
l’heure, il se refait une vertu en annonçant son plan Pauvreté.
Plan pauvreté
Quand
le président des riches se lance dans un plan Pauvreté, on se méfie !
Certes, il lui faut calmer « l’aile sociale » des LRM mais, que ce
cache-t-il derrière cette intention ? C’est son « tournant social » car il veut « lutter contre le déterminisme social »,
« inventer l’Etat Providence du
XXIème siècle » ! ça craint vraiment quand il l’annonce comme la
1ère étape d’une série de chantiers : hôpital, retraites,
dépendance, assurance-chômage, santé…
2
milliards par an… sur 4 ans pour le plan pauvreté dont une partie correspond à
des redéploiements budgétaires. C’est à mettre en regard de la réduction
fiscale 2018 de 7 milliards d’euros pour les plus riches !
Qu’en
est-il ? Création de crèches dans les quartiers
« prioritaires », des petits déjeuners dans les écoles primaires et
tarifs sociaux dans les cantines, de la garantie-jeunes prolongée… bref !
Que des vieilles recettes, pour son « monde nouveau », qui ont déjà
démontré qu’elles n’ont pas fait sortir la masse des pauvres de leur situation
précaire : elles leur ont maintenu la tête hors de l’eau.
Son
« monde nouveau », par contre, se cache dans la mesure
principale : le RUA – revenu universel d’activité - qui n’a rien d’universel ! Le RUA (n’a
rien à voir avec le revenu universel d’Hamon) a vocation à regrouper des
«prestations de solidarité » dans une seule allocation. Lesquelles ?
On ne sait pas encore. Il serait question du RSA, des Allocations logement, de
l’Allocation Sociale de Solidarité, de la prime d’activité, de l’Allocation
d’Adulte handicapé, de l’Aide Sociale pour les personnes âgées… Il promet, pour
les pauvres, des droits supplémentaires comme l’accompagnement renforcé avec un
service public de l’insertion, là encore rien de bien nouveau, sauf qu’il faut mettre
les moyens adéquats. Ne serait-ce pas plutôt un contrôle renforcé ? Car
les allocataires de ce RUA (ceux qui sont en-dessous d’un certain seuil de
revenu) auraient des devoirs supplémentaires : signer un contrat
d’engagement dans un parcours d’insertion et privés du RUA s’ils refusent deux
empois « raisonnables » : « Tu acceptes un boulot même des plus précaires ou t’as plus rien » !
C’est la méthode Macron pour lutter « contre le déterminisme
social » ! Le RUA est déjà mis en œuvre au Royaume-Uni et cela a eu
pour conséquence la réduction des revenus des plus précaires.
La
prime d’activité, quant à elle, est dans le collimateur de Lemaire et Darmanin.
Cette prime attribuée aux travailleurs à faibles ressources concerne 2.67
millions de ménages. Et voilà qu’elle augmente de + 7.5% en un an, soit 6
milliards en 2018 contre 5 milliards en 2017. C’est que les contrats courts ou
les p’tits boulots mal payés ça fait augmenter la prime d’activité ! Solution proposée
: baisser le seuil d’accès à cette prime (actuellement, 1.3 smic pour une personne
seule).
Plan
Pauvreté = poudre aux yeux ! Personne n’y croit, même ceux qui l’ont
concocté. Si Macron veut vraiment lutter contre le déterminisme social, il doit
augmenter les minima sociaux et rétablir l’impôt sur la fortune, supprimer les
niches fiscales… « La fraude fiscale est estimée à 100
milliards d’euros en France, de quoi financer 12 plans Pauvreté à la sauce
Macron » le Canard Enchaîné.
Nous
ne sommes pas tombés de la dernière pluie pour ne pas comprendre ce qui se
cache derrière les mots du néolibéral autoritaire Macron. Mais ça ne suffit
pas. Nous avons à faire comprendre, le plus largement possible, au-delà des
rangs des militants, que les « réformes » qu’il nous promet relèvent
de la même logique ultralibérale, livrant tous les secteurs de la vie aux
marchands, fonds de pension, acteurs privés, pour faire de l’argent. Nous avons
à expliquer la logique des « réformes » qui n’ont rien à voir avec
l’Etat-providence du 21ème siècle mais à nous tenir soumis et
prisonniers d’un système livré aux vautours et aux prédateurs. Nous ne voulons
pas signer de pacte avec le diable ! Il y a urgence à s’organiser, avec et
au-delà des syndicats, pour stopper ces plans et ces pactes-là et ceux qu’il a
encore dans ses tiroirs (plan Santé, loi d’orientation sur les mobilités, loi
sur l’agriculture et l’alimentation, le Pacte sur la croissance qui annonce les
privatisations à venir, etc.). « Les
fonds d’investissement n’ont jamais autant convoité les affaires publiques. Ils
sont très bien représentés dans le Comité Cap 2022 (cf encart) mis en place par Macron pour réfléchir à la
« réforme de l’Etat ». Ces mastodontes du privé y poussent leurs
pions, privilégiant leurs intérêts au détriment de ceux du service public »
(5).
Odile
Mangeot, le 26.09.2018
(1)
Au 30 juin 2018,
230 collectivités ont signé un pacte. En Bourgogne Franche-Comté : la
Région, des départements du Doubs, de Haute-Saône, du Jura, la communauté
d’agglo du Grand Besançon, celle du pays de Montbéliard, la ville de Besançon,
Dijon… (voir liste_signataires_contrats-etat.pdf). La loi de programmation des
Finances publiques 2018-2022 a prévu 13 milliards d’économies sur leurs
dépenses de fonctionnement d’ici 2022. Les contrats de 3 ans font l’objet de
bilans qui entraînent des bonus pour les collectivités « vertueuses »
et des pénalités pour les « dépensières » !
(2)
Ce principe
fondamental de droit administratif garantit le contrôle par le comptable
(trésor public) de la régularité et de la probité des dépenses et recettes
ordonnées par le maire/président du
département et de la région. Seul le comptable est chargé du maniement des
fonds. Darmanin a annoncé lever ce principe pour cause de
« doublon »
(3)
La lettre
d’information du Front Social n° 160 du 9.9.2018 « Les arnaques des
officines privées soi-disant fournisseurs d’emplois » (interview du Comité
CGT des travailleurs privés d’emploi et précaires
(4)
Sources : la
CGT Contact
(5)
Politis 17 mai
2018
Encart Le privé en embuscade
Le
co-président de CAP 2022, Ross McInnes, président de Safran, entreprise qui
travaille avec l’Etat pour la sécurité intérieure et l’aéronautique, s’est
rapproché d’Airbus pour bénéficier d’une privatisation d’Ariane 6. Quelle
« modernisation » de l’Etat défend-il, au moment où l’industrie spatiale
privée est en plein boom ? Quelles seront les préconisations du même Ross
McInnes pour réaliser des économies dans la fonction publique hospitalière,
alors qu’il siège au conseil de surveillance du premier groupe de cliniques
privées en France, Générale de Santé ? Quel sera l’agenda de J.F Cirelli,
président pour la France du fonds BlackRock, présent au capital de 172 des 525
sociétés françaises cotées en Bourse, dont Vinci, Eiffage et Veolia ? Le
président de la branche française de Macquarie Capital défend-il l’intérêt
général au sein du Cap 2022, alors que son fonds possède 49 % des autoroutes
Paris-Rhin-Rhône et figure parmi les candidats au rachat d’Aéroports de Paris….
Politis du 17 mai 2018