Soudan, Algérie… Révoltes des peuples
Assiste-t-on
à la naissance d’une deuxième séquence des révoltes arabes, au vu des
mobilisations populaires monstres qui affectent les régimes en place en Algérie
et au Soudan ? Mis à part en Tunisie, où tout avait démarré en 2011 (ce
que les médias ont appelé les printemps arabes), les pays concernés ont été
l’objet, soit d’une restauration dictatoriale (Egypte, Bahreïn), soit ont
basculé dans des guerres civiles attisées par les interventions étrangères
(Syrie, Yémen, Libye). Au-delà des mouvements anti-Béchir et anti-Bouteflika,
l’aspiration à la liberté et à la démocratie traverse le Proche-Orient et
l’Afrique du Nord avant, demain, de se répandre sur tout le continent africain ?
Depuis une soixantaine d’années, les indépendances accaparées ou octroyées
n’ont permis que l’installation de systèmes de prédation, d’économies rentières
et d’Etats militaro-policiers gangrenés par la corruption. Les révoltes n’ont
pas manqué, sauf dans les pétromonarchies gorgées de pétrole qui sont, jusqu’à
présent, à l’abri des secousses telluriques déstabilisant les tyrannies.
Partout, le feu couve sous la braise, même dans les régions dont on ne parle
pas (Rif marocain, Bassora dans le sud de l’Irak). En s’attardant plus sur la
situation au Soudan, on voudrait ci-après montrer que les convulsions présentes
ne sont qu’un avant-goût des révoltes à venir, scandées par des répressions et
des interventions étrangères pour maintenir ou restaurer l’ordre tyrannique qui,
en dernière instance, satisfont les grandes puissances et les sous-impérialismes
régionaux.
1 - Soudain,
le Soudan
Tout
a commencé, en apparence et à bas bruit médiatique, le 19 décembre 2018, après
une longue impatience du peuple : les classes moyennes sont, depuis 8 ans,
laminées par une crise économique qui a débouché sur une hyper inflation
(officiellement 70 %). Le régime d’oppression et de surveillance d’Omar El
Bachir reposant et imposant une vision rétrograde de l’islam au moyen d’une
armée et de milices omniprésentes, ne peut, dans un premier temps, se maintenir
à flot qu’avec l’aide des pétromonarchies qui le renflouent, en se payant sur
la spoliation de terres agricoles et en chair à canon pour la guerre au Yémen,
menée par l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis contre la rébellion houthiste.
Mais, désormais, malgré tous les artifices, les caisses de l’Etat sont
pratiquement vides, les banques n’ont plus de liquidités, les distributeurs
automatiques sont vides.
Suite
à l’appel lancé par la « déclaration
pour la liberté et le changement », le peuple est dans la rue et
prétend imposer, pacifiquement, la fin du régime. Avant d’examiner les
caractéristiques de ce mouvement populaire massif, une rétrospective s’impose.
Du
colonialisme à l’indépendance marquée par des guerres internes
Il
y a plus de 130 ans, les forces anglo-égyptiennes interviennent pour mater la
révolte du Mahdi (le sauveur) qui entend se débarrasser de l’oppression
ottomane. Le Royaume Uni, qui prétend que ses intérêts ( !) sont menacés,
prend Khartoum, avant de subir, après un siège d’une année (1884-1885), une
défaite cinglante. La deuxième intervention anglo-égyptienne prend la forme
d’une vengeance sanglante contre les troupes du Mahdi, lui-même est décapité en
place publique.
Colonie
britannique dès 1896, l’indépendance du Soudan est octroyée en 1953. Le pays
est marqué à la fois par le tiers-mondisme de Nasser et surtout par l’influence
de l’islam. En fait, ce sont des cliques militaires qui vont se succéder
jusqu’au coup d’Etat d’Omar El Bachir qui ravit le pouvoir à l’occasion du mouvement
populaire de 1985 et de l’influence de son mentor, le cheikh prêcheur Tourabi,
prônant un islam rétrograde antioccidental. La junte militaire islamiste qui
s’installe en 1989, non seulement va héberger des terroristes, Carlos et
Oussama Ben Laden, et pour ce dernier jusqu’au moment de son départ en
Afghanistan (1996), mais surtout, va mener des guerres impitoyables contre son
propre peuple. Dès 2003, ses milices janjawids opèrent au Darfour (est du Soudan) un véritable génocide (300 000 morts), puis c’est la région la plus pauvre,
la plus abandonnée de Kordofan au sud du Nil, puis la guerre contre le Soudan du sud qui parvient, au prix
d’effroyables souffrances et de divisions ethniques, à obtenir son indépendance
en 2013. Dans la même période, se succèdent les répressions contre les révoltes
populaires en 1995, 2011, 2013. Ce qui vaut, surtout pour le nettoyage ethnique
au Darfour, au dirigeant El Bachir, d’être accusé de crimes de guerre et de
crimes contre l’humanité, sans pour autant être déféré devant la Cour Pénale
Internationale, malgré les méthodes employées : « tuer, brûler, violer, piller, mutiler,
affamer et recommencer ».
Toutefois,
la décennie 1999-2011 s’apparente à une période de paix relative et de
prospérité. Le boom pétrolier rapporte des devises, le pouvoir semble changer
de cap, il s’aligne de fait sur le néolibéralisme. Il obtient ainsi la levée
des sanctions américaines et des fonds de sociétés étrangères. Les entreprises
publiques sont privatisées et cédées à des proches du pouvoir, incompétents et
corrompus. Sous couvert d’un discours islamiste, c’est une politique
ultralibérale qui est menée. Les obligés du pouvoir d’El Bachir s’enrichissent
par spoliation. Le secteur minier de
l’or passe sous le contrôle des services de renseignements et des milices.
Bien que ce pays soit le 3ème producteur mondial derrière l’Afrique
du Sud et le Ghana, le peuple n’en bénéfice pas. Qui plus est, l’exploitation
de ce minerai a un impact environnemental catastrophique, tout particulièrement
dans les zones agricoles où il pollue les eaux du Nil. La classe moyenne est
spectatrice de ce gâchis et de ce pillage. Quant aux plus pauvres, ils en
subissent les conséquences. La donne change avec la sécession du Soudan du sud où s’effectuent les ¾ de la production pétrolière. Les
compensations, prévues lors de l’indépendance de ce nouveau pays, ne seront
jamais versées et pour cause, la guérilla se scinde en deux fractions qui se
livrent une guerre meurtrière, résultant pour partie des divisons ethniques qu’avait
instrumentalisées Khartoum. C’est à l’issue de cette période que date la prise
de conscience du peuple sur la nature des guerres menées par le pouvoir :
« Nous sommes en train de récupérer
notre histoire ».
La révolte
populaire, son organisation, sa nature et sa détermination
Contrairement
à ce qui se passe en Algérie, la révolte semble organisée. Le triplement du
prix du pain fut l’occasion saisie par la coalition, que semble diriger le
syndicat alternatif Association des
professionnels soudanais (SPA), pour lancer son appel à manifester le 18
décembre 2018. Outre le syndicat, cette structure regroupe ce qui reste des
groupes armés du Darfour, du Kordofan, de l’Etat du Nil bleu et même des Frères
musulmans. Les têtes de la contestation, dont certains sont en prison depuis 4
mois, sont dans la clandestinité.
Le
programme de ce regroupement, outre la paix, veut instaurer un gouvernement
provisoire de techniciens ( ?) pendant 4 ans, dont la tâche serait
d’instaurer une économie de transition, de rallier une partie au moins de l’armée
et de mettre fin à la corruption. Les consignes de la SPA semblent suivies avec
la constitution des comités de quartier, de rassemblement dans des lieux
différents, donnés en dernier moment, et de fusion des manifestants. En tout
état de cause, depuis décembre 2018, le
peuple n’a cessé de descendre dans la rue. Face à cette déferlante qui
touche toutes les villes du Soudan, le pouvoir semble pris au dépourvu, divisé
sur les mesures à prendre. Ce n’est que le 22 février qu’El Bachir décrète
l’état d’urgence, sans d’ailleurs que cela ait un impact sur la détermination
des manifestants. Au contraire, leur nombre ne cesse de s’accroître. Les 6 et 7
avril, des centaines de milliers convergent vers le quartier général de l’armée
de l’air et de la marine et appellent à la fraternisation. Rien ne les arrête
malgré les ponts bloqués, les violences, les tirs. Et tout commence à
basculer : les forces dites de sécurité ont tenté d’attaquer les manifestants
mais les militaires ont pris parti pour les manifestants et ont ouvert le feu
sur les forces répressives. La Force de réaction rapide du colonel
Daglo Hemetti se trouve face à l’armée. Le 9 avril, c’est une foule immense qui
se retrouve de nouveau devant le quartier général de l’armée comme pour fêter
une première victoire après plus de 60 morts. La dualité entre les forces
armées permet de rendre compte de cette première brèche : fraternisation
avec les simples soldats et officiers de rangs intermédiaires face aux armées
bis d’Omar El Bachir de 30 000 hommes, mieux dotées mais elles-mêmes
divisées et réparties sur tout le territoire, y compris aux frontières pour
empêcher l’émigration. En effet, nombre de milices et de Janjawids ont été, avec les deniers de l’Europe, reconvertis en
garde-frontières quand ils ne sont pas allés, comme chiens de guerre, combattre
au Yémen.
Coup
de théâtre en deux temps le 11 avril. Le fusible El Bachir est débarqué… en prison.
L’instauration d’un conseil militaire dit
de transition semble être un coup d’Etat dans l’Etat. Il interdit d’être
dans les rues de 22 heures à 4 heures du matin. Les manifestants
n’obtempèrent pas. Le quarteron de 10 officiers et généraux, ayant à sa
tête Ibn Auf, ministre de la défense
depuis 2015, celui qui a attisé une guerre fratricide au sud, armé des groupes
de pillards qui ont commis des atrocités contre la population, ainsi que le
général Salah Gosh, chef du service
de renseignement, entendent mener une transition pour que rien ne change afin de préserver leurs intérêts. Le second
semble avoir le soutien de l’Egypte, des USA, de l’Arabie Saoudite et d’une
partie des pétromonarchies. Malgré la décision prise de libérer les prisonniers
politiques, les manifestants continuent d’exiger la chute du régime.
Entre
compromis, restauration et libération ?
Pour
l’heure, un compromis entre les aspirations du peuple et le replâtrage du
régime semble impossible, compte tenu,
surtout, de la nature du mouvement et celle des forces répressives. Ceux qui
manifestent pacifiquement ne peuvent oublier la répression qui s’est abattue
sur eux de décembre à février. Des centaines, puis des milliers d’arrestations
ont rempli les prisons où la torture est parfois pratiquée jusqu’à la mort (60
décès comptabilisés au 6 avril) et toutes les mains brisées à coups de crosse
ou de tuyau. Ils ne peuvent « pardonner » les coups de fouet, de
bâton, les tirs de kalachnikovs. Car « ce
n’est pas juste la peur qui s’en est allée, c’est le droit de vivre qui nous
est revenu ». Plus fondamentalement, outre la misère effrayante, c’est
la composition des manifestations qui est significative : les femmes sont les plus nombreuses.
Elles en ont marre du régime islamiste et des interdictions qui les
brident : les vérifications de la « décence » de leurs tenues,
l’interdiction du pantalon, la vérification de ceux qui les accompagnent,
surtout en voiture, et cet article 152
du code pénal qui permet de les arrêter, de les condamner à être fouettées et
de se voir infliger de lourdes amendes. Et comme dit l’une d’entre elles
« la liberté vaut la peine d’aller
mourir dans la rue » », et ce, à l’instar d’Alaa Salah, cette icône du mouvement. Elle n’hésite pas, le 8
avril, depuis le toit d’une voiture à haranguer la foule et à entonner des chansons
à la gloire de la « révolution » en cours. Autre particularité du
même ordre, dans les universités, les femmes représentent 76 % des étudiants. La
contestation, de fait, est partie des classes moyennes éduquées avant
d’entraîner le grande masse du peuple, surtout dans les villes. Et comme dit la
sœur d’Alaa « on ne veut pas changer
de dictateur, on veut changer le monde, la façon dont nous vivons ».
Face
à ces aspirations, l’appareil d’Etat, quoique divisé, est intact. A sa tête
demeurent les responsables des exactions et de l’incurie du régime. Leur
plan : sauver les intérêts de la caste, y compris le haut commandement de
l’armée. Ils trouveront, à coup sûr, le soutien des dictateurs et des pétro-monarques
qui veulent à tout prix éviter la propagation dans leurs pays de cette
insurrection iconoclaste, à leurs yeux. Tout est possible mais rien n’est
encore joué. La coalition autour de l’Association des Professionnels parviendra-t-elle
à entraîner une partie de l’armée, à organiser la prise de pouvoir et nettoyer
les écuries d’Augias ? Cette interrogation traverse de nombreux pays du
Moyen Orient et du Maghreb. Jusqu’ici la restauration, y compris par la guerre
civile, a permis aux prédateurs de conserver le pouvoir. La voie
révolutionnaire est souvent étroite et le pire est toujours possible.
2 – De
l’Algérie en passant par la Libye, le Yémen et l’Afghanistan
On
ne peut, ici, qu’évoquer les situations différentes de ces pays, sans souligner
la mise en garde des Egyptiens solidaires du peuple soudanais : « Ne laissez pas l’armée confisquer les fruits
de votre combat » (Gamel Eid). Cette sentence vaut notamment pour
les Algériens.
Le
mouvement populaire de grande ampleur qui secoue leur pays, tous les vendredis,
a commencé par le refus de la candidature de Bouteflika pour un 5ème
mandat, sur fond de ras-le-bol d’une situation sociale douloureuse, marquée
entre autres par le chômage abyssal de la jeunesse. Le mort-vivant qui
n’apparaissait plus qu’en photo dans son cadre fut l’humiliation de trop. La
détermination du peuple, malgré les exactions policières, le 12 avril, a
contraint la clique au pouvoir de se débarrasser de cette figure conspuée. Mais
ce qui s’est mis en place, à savoir la continuité des « 3 B » d’un côté, et de l’autre le
général de l’armée Gaïd Salah,
démontre les tiraillements qui secouent l’appareil d’Etat. Ce dernier en se démarquant
de la police à l’égard des manifestants le 12 avril, réaffirme qu’en dernière
instance (et ce, depuis, de fait, 1962), c’est l’armée qui dirige. Quant aux
obligés de Bouteflika, Belaiz, le
président du conseil constitutionnel, Bensalah,
le président par intérim ou Bedoui,
le 1er ministre, ils sont renvoyés à leur rôle de marionnettes
transitoires. Pour le pouvoir maffieux, qui vit de l’accaparement de la rente
pétrolière depuis des décennies, il s’agit de sauver l’essentiel, leurs
intérêts, quitte à exfiltrer quelques têtes. Face à l’exigence populaire
« Qu’ils partent tous », le
général, ex-bras droit de Bouteflika l’a assuré : « Il serait déraisonnable de gérer la période
de transition sans les institutions qui organisent cette opération ».
Autrement dit, les organisateurs de la fraude électorale pourraient toujours sévir,
d’autant que les candidats de la campagne électorale et son financement
remettraient, sur le devant de la scène, les mêmes… Pas si simple, « ce piège à cons » doit être mis en
œuvre pour le 4 juillet prochain,
date fixée pour l’échéance électorale. En effet, nombre de maires ont refusé
d’organiser cette consultation… Le mouvement peut-il prendre de l’ampleur, les
manifestations monstres se poursuivre ? En tout état de cause, il semble
que le général Gaïd Salah anticipe un arrêt de la mobilisation. A la différence de la situation
soudanaise, le mouvement spontané algérien ne semble pas en état, pour l’heure,
de se doter d’une organisation d’opposition.
En Libye, ce pays qui a sombré dans la guerre civile, après l’intervention franco-anglaise
appuyée par les USA, ne semble pas prêt d’en sortir. Deux gouvernements se font
face. L’un, reconnu initialement par ladite communauté internationale, siège à
Tripoli. A sa tête, un dénommé Sarraj, débarqué pour réaliser une union
nationale des différentes milices. L’autre, qui s’est imposé en Cyrénaïque (Est
libyen), a obtenu le soutien et l’aide militaire de l’Egypte d’Al Sissi, de
l’Arabie Saoudite et des Emirats Arabes Unis. Aux commandes de ce gouvernement
autoproclamé, le général Haftar, ancien cacique de Kadhafi, récupéré par la CIA,
puis résident aux Etats-Unis avant de reprendre du service. Il est parvenu à
occuper les champs pétroliers au sud et menace
désormais Tripoli. L’attaque surprise, le 4 avril, vers Tripoli, a fait
plus de 200 morts, 800 blessés et provoqué le déplacement de 25 000 personnes.
Macron soutient de fait cet « homme
providentiel » et, au grand dam de l’Italie, prétend avoir sa part de
gâteau sur les ressources pétrolières. Quant aux migrants, piégés, ils seraient
810 000 dont nombre d’entre eux pourrissent dans des camps. L’un d’entre eux
aurait été pris par les troupes d’Haftar et leurs « résidents »,
enrôlés de force. Les soutiens d’Haftar n’ont qu’un souhait, évacuer le fief de
Benghazi, de ces miliciens « révolutionnaires » sous influence des
Frères musulmans et étouffer toute velléité d’aspirations démocratiques. Elles
étaient fragiles dans ce pays, malgré la volonté manifeste en son temps, de se
débarrasser du dictateur Kadhafi. Les subsides distribués par la manne
pétrolière, cette « merde du diable », comme disent certains Africains,
ainsi que le recours à de la main d’œuvre étrangère, avaient dissipé les
faibles lueurs démocratiques sous le poids des grilles de lecture religieuses.
Il
en est de même, sous d’autres formes, au Yémen et en Afghanistan.
Le
Yémen est coupé en deux suite à
l’intervention militaire de l’Arabie Saoudite et des Emirats Arabes Unis et de
la rébellion houthiste qui ont étouffé les aspirations démocratiques, les
transformant en guerre civile alimentée notamment par les terroristes et
milices islamistes. Inconcevable pour les pétromonarchies wahhabites que les
Houthistes prennent le dessus : ceux qui se réfèrent à une religion s’apparentant
au chiisme iranien. D’où le blocus du port d’Hodeïda, visant à affamer la
population. Quant à la France, elle
est à la manoeuvre : les Mirage 2000, les blindés Leclerc, l’artillerie Caesar (42 km de portée) et autres
hélicoptères, frégates et corvettes, sans compter les armes US, prouvent s’il
en est besoin que l’industrie de la mort tourne à plein régime. Hollande puis Macron
ont en effet décidé de continuer de livrer du matériel militaire à l’Arabie
Saoudite et aux EAU. Que des journalistes français viennent révéler qu’il en
est bien ainsi, est considéré comme un « crime » leur valant les
foudres de la DGSE qui leur intente un procès pour violation du secret-défense.
Ainsi va ce pays à la dérive. Contre toute attente, malgré les 24 000
bombardements, les Houthistes résistent. Il n’empêche, force est de constater
que l’intervention étrangère n’est guère source de progrès, au contraire.
Pour
s’en convaincre, si nécessaire, il n’est que de se référer à l’Afghanistan. Les successives
interventions militaires de l’URSS, puis des USA, y compris l’ingérence du
Pakistan, n’ont guère permis d’avancer vers la paix. A moins que, de guerre
lasse, Trump ne retire ses troupes, comme il l’a annoncé, suite aux
négociations plus ou moins secrètes avec les talibans. En tout état de cause,
la Cour Pénale Internationale, sous pression états-unienne, vient d’annoncer
qu’elle renonce à enquêter sur les crimes de guerre commis par les Etats-Uniens,
les talibans et le gouvernement de Kaboul. Que l’on ne parle plus à Trump des
tortures à Abou Graib, à Guantanamo, ni dans les prisons secrètes de la CIA en
Pologne, en Roumanie, en Lituanie ou en Egypte… La justice des vainqueurs ne le
permet pas.
Tout
ceci pour constater que la longue marche des peuples pour la liberté et
l’égalité se trouve entravée par les interventions étrangères, les appareils
d’Etat oppressifs et les grilles de lecture archaïques de leur propre
oppression et exploitation. Il n’en demeure pas moins qu’en Afrique et au
Moyen-Orient, l’importance de la jeunesse, y compris celle qui s’exile, porte
les combats à venir. Elle se laissera de moins en moins manipuler.
Gérard
Deneux, le 27 avril 2019