Ripolinage et gazage en même temps
Durant 1h30, le discours-bavardage de Macron
devant la cohorte de journalistes et de courtisans-ministres bien alignés, a
révélé l’état de fébrilité du pouvoir, obligé de multiplier les actes de
contrition. Pensez donc, Jupiter face aux coups de boutoir des Gilets Jaunes
« a beaucoup appris ». Il a
découvert l’injustice régnante, le sentiment d’abandon, l’existence de familles
monoparentales, les handicapés délaissés, les retraités modestes et même l’état
lamentable des EHPAD. Pour ripoliner la façade craquelée de ce pouvoir lézardé,
la pommade acide qu’il administre sur les plaies sociales consiste à mieux y
enfoncer les clous de l’austérité, en les enrobant de baumes démagogiques :
« je crois qu’il faut continuer
comme avant », tout en jetant pour les Gilets Jaunes des amuse-gueules
de proportionnelle à venir, de réduction du nombre de parlementaires,
d’initiatives référendaires bien encadrées et à parsemer de quelques citoyens,
tirés au sort, ce Conseil économique et social dont on n’entend guère la voix.
Il s’agit, en fait, de gagner du temps, en
espérant apaiser les déshérités de ce régime, pour mieux faire accepter les
souffrances à venir. On ne fermera plus d’écoles mais… des classes, plus
d’hôpitaux… mais des services. On supprimera l’énarchie pour la voir renaître
sous le sigle de l’ISF – Institut Supérieur de la Fonction Publique. On
répondra aux plaintes de la ruralité par de pauvres maisons de services publics
cantonaux… Les concessions de pure forme pour les retraités pauvres, notamment
via la ré-indexation des pensions, se mesureront à la décote qui va leur être
imposée, les obligeant à travailler au-delà de 62 ans.
Quant à l’écologie, elle vaut bien un comité Théodule,
un Conseil de la Défense ( !), pour affirmer qu’il est urgent d’attendre.
Pour tenter de reconquérir une popularité en
berne, il fallait bien quelques badigeons de baisses d’impôts sur le revenu, en
attendant l’augmentation des taxes. De même, flatter les maires s’imposait afin
que, demain, responsables, ils assument une nouvelle dose de décentralisation
qui s’annonce, sans fric. Quant au grisbi du profit, pas touche, à moins que, selon leur bon vouloir, les actionnaires
consentent à verser quelques primes dérisoires.
Tout ça, parce que le roitelet de l’Elysée
n’est que le serviteur zélé de la politique économique de Bruxelles, celle
définie par les traités européens et, désormais, depuis Sarko, fixée dans le
marbre de la Constitution, en son chapitre XV. Afin que l’on ingurgite la dose
de précarité maintenue, quelques placebos de « patriotisme » dit « inclusif »,
tout en agitant le spectre de l’islamisme dans les quartiers, devraient faire
l’affaire, du moins pour tenter de reléguer en deuxième position le lepénisme
aux prochaines élections.
Mais, ce 1er mai, les Gilets Jaunes
ont continué de chanter « On est
toujours là. Pour défendre les salariés, les retraités » et avec les
syndiqués. Et ce dont Macron a évité de parler, les violences policières, de
redoubler : charges et gazages n’épargnant aucun d’entre eux. Martinez exfiltré,
les manifestants se réfugiant dans l’hôpital de la Salpêtrière…Tous les
matraqués ne se satisferont pas de l’excuse de la présence des Black Blok. Il
en faudra plus... pour croire Macron qui prétend « mettre l’humain au centre » tout en contournant les
ronds-points.
Quant à la scène électorale, elle risque d’être
largement désertée. Certes, des strapontins peuvent être réservés pour ceux qui
vocifèrent contre les étrangers, les macroniens pur jus et ceux voulant faire
entendre une voix différente, s’époumoneront, impuissants dans ce Parlement
sans pouvoir réel, à faire croire que « Bouge l’Europe » serait possible, comme le préconisait Robert
Hue, de triste mémoire.
Reste que cette deuxième partie du quinquennat
risque d’être bien agitée. Le ripolinage et le gazage ont encore de l’avenir.
GD, le 3 mai 2019