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Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


dimanche 29 août 2021

 

AFGHANISTAN

Le cimetière des empires

 

L’Afghanistan se trouve en Asie Centrale. Ce pays un peu plus grand que la France est peuplé d’environ 38 millions d’habitants. Il présente de nombreuses particularités intéressantes, surprenantes, étonnantes…

Il est extrêmement montagneux, une chaîne de montagne l’Hindu Kush le traverse d’Est en Ouest, le séparant en deux : la partie Nord, où l'on trouve quelques plaines cultivables et la partie Sud, plutôt désertique. L’Hindu Kush culmine à près de 8 000m, les cols permettant de relier les deux parties du pays se situent aux alentours de 4 000m. Depuis 1964, un tunnel construit par les Soviétiques facilite les échanges, ceux-ci restant tout de même extrêmement limités entre le Nord et le Sud. La vie des Afghans s’organise dans les vallées, le long des rivières, au bord desquelles quelques terres sont irriguées, entourées de montagnes désertiques. Les voisins de cet Etat ne laissent pas indifférent. Il a une frontière commune avec le Tadjikistan, le Turkménistan, l’Ouzbékistan, et surtout avec le Pakistan (2 430km) situé au Sud, avec l’Iran à l’Ouest (936km), et à l’Est avec la Chine. La frontière avec celle-ci se trouve au fond du corridor de Wakhan, une langue de terre de 200km de long sur environ 40km de large à 4 800m d’altitude.

 

La population est composée de différentes ethnies qui, de par la géographie du pays, ont longtemps vécu séparées les unes des autres. L’ethnie principale, ce sont les Pachtounes, le long de la frontière pakistanaise. Ils représentent 40% de la population et ont quasiment toujours dirigé le pays. Ils parlent le pachtou (37 millions de Pachtounes vivent également au Pakistan). Les Tadjiks se situent le long de la frontière du Tadjikistan (25%). Les Ouzbeks (10%), les Hazaras (10%) vivent au centre de l’Afghanistan. Toutes les ethnies sont sunnites, hormis les Hazaras qui sont chiites et qui, pour leur grand malheur, n’ont aucune frontière commune avec leurs frères Iraniens.

 

C’est un pays pauvre : 90% de la population vivent avec moins de 2$/jour, au classement IDH (Indice de Développement Humain) ils étaient 137ème en 1990 et 169ème en 2020. Pourtant c’est le pays qui a le taux de fécondité le plus élevé d’Asie. En 1990 ils étaient 12 millions, en 2020 38 millions. Si la France avait suivi la même trajectoire depuis 1990, nous serions plus de 170 millions d’habitants. L’Afghanistan possède peu de matières premières connues mais il semble qu’il détienne des réserves non exploitées de terres rares et de minerais convoités (lithium…). Les Etatsuniens, suite à des recherches, laissent entrevoir la présence de nombreuses ressources naturelles.

 

Au cours de l’Histoire,

 beaucoup de monde est passé par ce pays plutôt inhospitalier

 

Il est un point de passage quasi obligé entre l’Orient et l’Occident : Cyrus, Alexandre Le Grand, Gengis Khan passeront dans cette région, en route vers l’Inde ou la Chine. A ces époques, diverses royautés règnent sur la région de Kaboul et dans les différentes vallées. Des pouvoirs relativement autonomes sont en place. Une certaine unité apparaît à travers la religion, d’abord le bouddhisme au 3ème siècle puis l’islam à partir du 7ème siècle. L’islam se répand lentement dans les zones reculées, et n’apparaît dans certaines, qu’au 18ème siècle. On considère que l’Afghanistan devient une entité souveraine en 1947 (chute de l’empire perse afcharide). A cette époque, l'Afghanistan reste une société multi ethnique, multi clanique. Les conditions de vie sont plutôt difficiles mais les populations s’y sont plutôt bien adaptées puisque le nombre d’habitants a crû régulièrement. Les groupes ethniques différents dont beaucoup ne se connaissent pas ont des caractéristiques communes : un farouche désir de liberté, un grand plaisir à « se chicailler » avec les voisins, une culture de l’indépendance, de la force, du combat. Le sport national n’est ni la pétanque ni le foot mais le bouzakhi. Il oppose deux équipes de cavaliers pour s’approprier le cadavre d’une chèvre et le ramener dans son camp ; tous les coups sont permis et les cavaliers sont armés de fouets. Les Afghans sont avant tout des guerriers, les femmes afghanes, elles, sont reléguées aux tâches domestiques et familiales. Autre point commun à ces différentes ethnies : faire l’union sacrée face à toute intrusion extérieure.

 

Les Anglais, présents en Inde, en feront l’expérience puisqu’en 1839, pour contrer l’influence russe qui s’étend dans la région du Kirghizistan et de l’Ouzbékistan actuels, ils décident d’occuper la région de Kaboul pour faire de l’Afghanistan, un Etat servant leurs intérêts. Ils envoient 4 000 soldats et 10 000 civils à Kaboul, avec l’intention, à plus longue échéance, de contrôler le pays. Parmi eux se trouve un journaliste, Alexandre Burne, qui fait un portrait assez surprenant de la région de Kaboul : « L’Afghanistan est particulièrement réputé pour ses fruits qui sont exportés en grand nombre vers l’Inde. Ses vignobles sont si abondants que les grains sont donnés pendant 3 mois de l’année au bétail. Le vin de Kaboul a un parfum proche du Madère. Ghazni est célèbre pour ses prunes, Kandahar pour ses figues et Kaboul pour ses mûres. Les pays voisins absorbent la quasi-totalité de la production ».  Face à cette agression extérieure, les différentes tribus afghanes s’organisent et en 1842 attaquent les Anglais. En quelques jours ils  massacrent tous les soldats de cette armée considérée comme la meilleure du monde, mais également tous les civils présents à Kaboul. Il n’y eut que quelques survivants.  Alexandre Burne n’aura pas profité longtemps du vin afghan puisqu’ il sera un des premiers civils lynchés à Kaboul.

En 1880, les Anglais qui contrôlent les frontières extérieures de l’Afghanistan, s’imposent  dans sa politique extérieure mais pas dans sa politique intérieure. En 1919, les Afghans fatigués de cette tutelle attaquent les postes frontières. L’Angleterre « jette l’éponge » et accorde l’indépendance au pays. D’après les diplomates anglais, l’armée coloniale redoutait le fort nationalisme et les actes de guérillas qui pouvaient durer des années, coûter très cher financièrement et humainement pour « pacifier » le pays. Pour eux, se maintenir en Afghanistan était la quasi-certitude d’entrer dans un bourbier. Georges Bush n’a sans doute jamais lu ce rapport.

 

Afghanistan indépendant

 

A partir de cette date, le pays entre dans une ère nouvelle, alternant des périodes d’avancées sociales importantes et des reculs très brutaux. Cela commence plutôt bien puisqu’Amanullah Khan, d’abord émir puis roi d’Afghanistan lance des reformes progressistes : effort en matière d’éducation (en particulier pour les filles), de laïcisation… Le droit de vote des femmes est accordé en 1919 (25 ans avant la France !). Mais ces reformes touchent la population de Kaboul et des grandes villes ; dans les zones montagneuses, la tradition, les lois ancestrales demeurent et ces réformes heurtent les chefs locaux qui se rebellent contre le pouvoir du roi. En 1929, face à des rebellions de plus en plus nombreuses dans le pays, Amanullah Khan abdique puis s’exile. Les rebelles prennent Kaboul et le nouveau chef du pays est un Tadjik, chef rebelle illettré Bacha E Saqao. Il met un terme immédiat aux avancées sociétales et instaure un état islamique. Le régime mis en place par cet homme du peuple, fils de porteur d’eau, est aujourd’hui encore une source d’inspiration pour les talibans. Mais il n’est pas Pachtoune et ceux-ci, majoritaires dans le pays le renversent la même année. Ils installent au pouvoir Mohammad Nadir Shah qui fera exécuter Bacha E Saqao après lui avoir promis la vie sauve. Il sera lui-même assassiné cette même année et son fils Mohammad Zaher Shah lui succèdera et règnera jusqu’en 1976. Sous son règne, l’Afghanistan devient une monarchie constitutionnelle en 1964. Il remet en place les lois progressistes : scolarisation des filles… Avec l’aide des Russes, il améliore les infrastructures : il fera creuser le tunnel de Salang reliant le Nord et le Sud du pays. Pendant un voyage à l’étranger en 1973, il sera déposé par son ex premier ministre Mohammad Daoud Khan qui proclame la république et s’éloigne de Moscou. Il restera 5 ans au pouvoir et en 1978, renversé par un coup d’Etat. Mohammad Taraki le remplace et met en place un régime d’inspiration communiste. A cette époque, les filles sont scolarisées, les femmes ne portent pas le voile. A l’université de Kaboul, 60% des enseignants sont des femmes, 40% des médecins afghans sont des femmes… Mais comme dans les années 20, ce progressisme, surtout en œuvre dans les grandes villes, heurte les traditions, les coutumes et rend le régime impopulaire aux yeux de la population rurale.

 

Invasion soviétique

 

En 1979, une partie de l’armée se révolte, Taraki est assassiné, remplacé par Hafizullah Amin qui prend ses distances avec Moscou. Sentant le pays sortir de sa sphère d’influence, l’URSS envoie des soldats sur le sol afghan le 24 décembre 1979 et met au pouvoir Babrak Karmal. Les soldats soviétiques contrôlent rapidement Kaboul, les grandes villes et les grands axes de circulation mais jamais les zones rurales. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, les différentes ethnies entrent en résistance contre l’occupant extérieur. Sept groupes principaux de moudjahidines forment cette résistance. Parmi eux l’« Alliance du Nord » et les Tadjiks du commandant Massoud. L’Alliance du nord reçoit une aide internationale venant des USA pour contrecarrer l’action de l’URSS et également de pays musulmans, pour soutenir leurs frères face à une agression communiste. Aides financières, matérielles et aussi humaines. De nombreux mercenaires (algériens, égyptiens, bosniaques, …) vont venir les aider. De nombreux militaires de l’armée afghane déserteront et les rejoindront également. Un groupe de Pachtounes, étudiants en théologie, soutenu par le Pakistan et les Etats-Unis entre également en résistance. Il deviendra tristement célèbre puisqu’ il s’agit des Talibans.

Au début du conflit, le rapport de force est favorable aux Soviétiques car ils ont la maitrise des airs. Mais celui-ci va s’inverser progressivement, surtout quand les moudjahidines seront équipés par les USA de missiles Stinger, capables d’abattre depuis le sol des hélicoptères et  des avions de chasse. L’URSS perd alors son avantage militaire. De plus elle entre dans la période de Perestroïka et consacre moins de moyens en Afghanistan. Elle tentera de former une armée afghane pour remplacer progressivement ses soldats. Une fois formés, une grande partie des soldats désertent et rejoignent les Moudjahidines. Après 10 ans de présence, 50 000 morts, l’URSS retire ses troupes d’Afghanistan en 1989. Le régime de Mohammad Najibullah qui a remplacé Babrak Karmal se retrouve seul face aux rebelles, résiste quelque temps mais Kaboul tombe tout naturellement sous les assauts des Moudjahidines en avril 1992 (encart 1).

 

Guerre civile

 

Les Moudjahidines se répartissent le pouvoir, Massoud par exemple devient ministre de la défense. Mais dans la grande tradition afghane, dès que l’ennemi commun disparaît, les querelles entre Moudjahidines reprennent et les groupes rebelles, unis face aux soviétiques, se déchirent à nouveau et redeviennent en un temps record des ennemis. Chaque chef applique à nouveau ses propres lois sur la région qu’il contrôle et l’Afghanistan devient à nouveau un champ de bataille, cette fois, dans le cadre d’une guerre civile. Ces affrontements provoqueront la destruction d’une grande partie de Kaboul et plongeront à nouveau l’Afghanistan dans l’instabilité.

Durant cette période les Talibans, venus essentiellement du Pakistan commencent à contrôler certaines zones du pays. Ils y instaurent la charia, loi islamique très dure, en particulier pour les femmes. Mais cette loi permet de retrouver la stabilité dans ces zones. Les gens peuvent à nouveau échanger, travailler et ils les accueillent plutôt bien. La charia heurte moins les coutumes locales que les lois des gouvernements communistes. Plus les affrontements entre Moudjahidines se multiplient, plus la présence des talibans va être acceptée, voire réclamée par la population. Dès lors, ils s’implantent sur tout le territoire et Kaboul tombe entre leurs mains le 27 septembre 1996.

 

L’Afghanistan sous les talibans

 

Le mollah Omar devient chef du pays. Seule une région du Nord Est n’est pas sous la domination des Talibans : la vallée du Pandjchir, « vallée des 5 lions » contrôlée par les hommes du commandant Massoud. Dans le reste du pays, les Talibans instaurent la charia  plutôt acceptée dans les zones rurales, beaucoup moins dans les grandes villes, en particulier à Kaboul. Pour l’imposer, les talibans  n’hésitent pas à utiliser la violence, voire la terreur. C’est à cette époque que le stade de Kaboul sera le lieu de punition et d’exécutions publiques. L’adultère, par ex., est puni de mort, le chef taliban du quartier décidant s’il est avéré ou pas. Pas de tribunal, pas d’avocat. Un groupe ethnique va particulièrement souffrir dans cette période, ce sont les Hazaras. En 1998, 5 000 seront massacrés à Mazar I Sharif. Leur faute : être chiites et d’origine caucasienne.

 

En septembre 2001, deux évènements font basculer à nouveau le destin de l’Afghanistan. L’assassinat de Massoud mais surtout l’attentat contre les tours du Wall Street Center. Bush désigne un coupable : Ben Laden. Où se trouve Ben Laden à cette époque ? Certainement en Afghanistan…  Bush qui n’a pas lu le rapport des diplomates anglais de 1919 envoie alors des troupes américaines dans le pays. Objectifs : retrouver Ben Laden, détruire les bases d’al qu’Aïda et reconstruire le pays. En 2003, l’Otan prend le commandement de la FIAS (Force Internationale d’Assistance à la Sécurité) qui inclut 34 pays dont la France. Tout comme pour l’URSS en son temps, l’opération commence plutôt bien. Les forces de l’Otan contrôlent Kaboul, les grandes villes, les grands axes de circulations mais…. pas les zones rurales. Dans ces zones, les soldats de l’Otan se cloîtrent dans des campements hyper sécurisés, n’en sortent qu’en convois armés et n’ont que très peu de relation avec la population. Les enfants afghans sont sans doute plus terrorisés que rassurés quand ils voient apparaitre ces « extraterrestres ». Pour un peu plus d’efficacité, ils engagent des traducteurs - qui risquent de regretter leur aide dans quelques temps. Les Talibans reconquièrent progressivement le terrain perdu et la pression sur les forces de l’OTAN s’accentue, d’autant qu’elles ont des comportements quelque peu étranges. Par exemple, pour limiter la culture du pavot, elles bombardent les champs des agriculteurs. Gérard Chaliand, géo-stratège, affirmait que les forces de l’OTAN dans les campagnes passaient leur temps à faire de la gonflette, que les casques bleus italiens payaient les Talibans pour ne pas être attaqués. Les Etats-Unis, voyant que la situation n’évoluait pas et qu’ils étaient partis pour des dizaines d’années de présence dans le pays, tentèrent de former des militaires afghans pour qu’ils assurent eux-mêmes la défense de leur pays. Mais dans cette armée les supérieurs sont surtout intéressés par les soldes très conséquentes, payées par les étatsuniens et n’ont aucune envie de combattre réellement. Beaucoup d’observateurs rapportent que certains gradés revendaient les armes fournies par les occidentaux aux talibans. Les hommes de troupe, conscients de cet état de fait ne veulent pas risquer leurs vies pour des supérieurs et un gouvernement corrompus, d’autant qu’ils ont, face à eux, les talibans prêts à mourir pour leur cause. Constatant que les objectifs ne seront jamais atteints, les occidentaux quittent progressivement le pays, les Français, fin 2014, prétextant que l’armée afghane saura se défendre seule. Ce qui s’avère totalement faux. Les Etatsuniens restent jusqu’à ce que Trump annonce le retrait définitif de ses troupes. Les Talibans se préparent « tout naturellement » à reprendre le pays, d’autant plus facilement qu’ils sont mieux équipés, mieux encadrés, mieux organisés qu’en 1995, donc plus efficaces. Au fur et à mesure que les soldats étatsuniens quittent une base ou un aéroport, officiellement laissés aux mains de l’armée afghane, en quelques jours les talibans les occupent. Même chose pour les axes de circulation et les points de passage aux frontières extérieures. Dès qu’ils les contrôlent, ils instaurent des droits de passage, des péages pour les véhicules et pour les marchandises, s’assurant une manne financière conséquente. Quand, au début de l’été les américains ne contrôlent plus que Kaboul et ses aéroports, il est facile d’imaginer la suite, mais le reconnaître, c’est reconnaître l’échec de 20 ans de présence occidentale. C’est pourquoi il y a quelques semaines encore, le président afghan Ashraf Ghani affirmait que son armée était prête à combattre les Talibans. Il savait pertinemment que c’était faux et préparait sans doute déjà son départ. On pouvait espérer que Kaboul allait résister et ne pas tomber facilement dans le giron des Talibans. Mais la facilité avec laquelle les autres grandes villes ont été conquises ne laissait penser que le contraire. Kaboul est tombée, sans combattre, et beaucoup plus rapidement que prévu. Les services secrets américains avaient estimé à environ 12 mois le temps nécessaire aux talibans pour prendre la ville !

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Les 20 années de présence occidentale sont un gâchis phénoménal, un camouflet pour l’Occident et surtout les Etats-Unis. Ces derniers ont injecté 2 000 milliards de dollars, pour, finalement, revoir à la télévision les mêmes images de déroute qu’à Saigon en 1975. Personne n’oubliera les images de ces derniers jours d’hommes accrochés au train d’atterrissage d’avions militaires américains prêts à décoller, ou celles encore plus terribles de femmes afghanes tentant de donner leurs bébés aux soldats anglais en partance. Côté afghan, le bilan de ces années est terrible : 160 000 morts et un effondrement économique pour un pays qui était déjà très bas. Les habitants des campagnes ne sont pas sortis de la pauvreté ; seuls ceux des grandes villes ont pu vivre, libérés des archaïsmes religieux et de ses interdits et ont goûté à la « liberté ». Ce fiasco afghan, après celui de l’Irak et de la Libye… convaincra-t-il les Occidentaux, et plus particulièrement les Etats-Unis de ne plus intervenir militairement à l’étranger ? Si les malheurs du peuple afghan pouvaient servir à cela…

 

L’avenir de l’Afghanistan fait craindre le retour de la charia, même s’il semble que son application rigoriste soit plus difficile à mettre en oeuvre aujourd’hui. Economiquement, la nature ayant horreur du vide, la Chine et la Russie sont déjà sur les rangs pour fournir leurs services afin de valoriser les immenses ressources du pays. Le projet chinois est déjà ficelé : construire une route pour rejoindre l’Afghanistan, par le col de Wakhan (4 800 m d’altitude).

 

Le goût de la  « liberté » qu’ont connu les habitants des grandes villes pourra-t-il résister au régime taliban qui s’annonce ? Des manifestations ont lieu à Kaboul ; sont-elles le signe d’un nouvel Afghanistan dans lequel le peuple pourra décider de son avenir. Le chemin sera sans doute très long.  

 

Jean-Louis Lamboley, le 24 août 2021

 

Pour en savoir plus, voir « Nous avons lu » 

 

 

Des interrogations demeurent

Les guerres d’Afghanistan et la vision occidentale imposée par les médias dominants, tentent de minimiser la responsabilité de l’impérialisme US. De nombreuses zones d’ombre ou d’occultation demeurent. Ainsi, dès le « coup d’Etat » communiste en Afghanistan, les Etats-Unis, avec l’aide du Pakistan, n’auront de cesse d’armer, de soudoyer les chefs féodaux, ces seigneurs de guerre, présentés comme des « combattants de la liberté ». La fragilité et la division du parti communiste afghan entraîneront l’invasion « soviétique » et son enlisement dans ce bourbier. Après leur retrait, le pouvoir en place résistera pendant 3 ans, malgré l’aide massive fournie aux moudjahidines par les USA, l’Arabie saoudite et leurs mercenaires. Parmi eux, Ben Laden… Le régime communiste déchu se traduira par une guerre civile sanglante entre seigneurs de guerre, jusqu’à l’arrivée des talibans formés, aidés par les services secrets pakistanais et les dollars US. Dès leur prise de pouvoir, les Etats-Unis, bien avant les attentats du 11 septembre 2001, négocieront avec ce pouvoir archaïque, pour tenter d’imposer un pipeline drainant le pétrole de la mer Noire à travers l’Afghanistan et le Pakistan, vers la mer d’Oman. Les magnats du pétrole US (Unocal) étant trop gourmands aux yeux du gouvernement de Kaboul, les négociations échoueront malgré une subvention de 43 millions de dollars. La libération des femmes et les droits humanitaires sont le moindre souci de l’hyperpuissance US malgré leurs proclamations. Tout change après les attentats contre les tours jumelles. « Livrez-nous Ben Laden et l’on vous déroulera un pont d’or sinon ce sera le tapis de bombes ». On connaît la suite.

Des questions demeurent : Ben Laden, certainement l’inspirateur des attentats contre les Occidentaux mais le commanditaire et le maître d’œuvre ? Rien de certain. Sur les 19 membres du commando kamikaze, 15 étaient Saoudiens. Quel rapport avec les difficultés rencontrées par les Saoud, après avoir autorisé le stationnement des troupes US en terre d’islam, visant à attaquer, lors de la 1ère guerre du Golfe l’Irak de Saddam Hussein…

GD

 

Encart  (à la fin de l’article)

 

Daesh « s’invite » à Kaboul

Jeudi 26 Août, 2 kamikazes, revendiqués par Daech, se sont fait exploser au milieu de la foule à la porte de l’aéroport de Kaboul, zone tenue par les Talibans. Daech veut empêcher la “tentative de normalisation” des Talibans. Ces derniers sont, essentiellement, des nationalistes pachtounes ; ils ont été accueillis à Doha (Qatar) et veulent entretenir avec les Emirats Arabes Unis, voire l’Arabie Saoudite, de bonnes relations. Daech, issu principalement de la guerre d’Irak, a la volonté de construire un califat islamique mondial, opposé à tout nationalisme. Il prétend, en Afghanistan comme ailleurs, continuer la lutte contre les occidentaux,  y compris contre les talibans qui, d’après eux, ont trahi la cause en négociant. Les talibans, pour leur part, combattent depuis le début, avec leurs unités spéciales, l’état islamique en reconstitution chez eux.  Le cycle infernal des attentats va-t-il recommencer, en Afghanistan et ailleurs, d’autant qu’Al Qaïda est toujours protégé par les talibans ?