2017. Année de tous les dangers… de toutes les
espérances ?
L’élection de Trump à peine scellée,
on a assisté à une farce tragique comme pour conjurer le sort funeste qui
semble surgir de la boîte de Pandore. La résolution du Conseil de Sécurité de
l’ONU, avec l’abstention de la défunte administration Obama, condamnant la
colonisation israélienne, tout comme la conférence de Paris qui s’en est suivie,
ne sont pas autre chose. Que des chefs d’Etat réaffirment, après l’avoir de
fait niée, la nécessité d’un Etat palestinien, apparaît comme la tentative de
protéger contre lui-même l’Etat colonial d’Israël. Tous ces personnages
semblent effrayés par la possible montée de la rage, du désespoir, de son
éventuelle contamination par l’islamisme terroriste qu’ils ont peu ou prou
provoqué, voire encouragé.
La fin de l’ère Obama, sur le plan
international comme sur celui de la politique intérieure, résonne comme un
échec.
Celui, d’abord, d’avoir voulu « diriger le monde de l’arrière » en
utilisant la chair à canons arabe, les drones des assassinats prétendument
ciblés qui, de fait, ont entraîné l’extension de la guerre (Syrie, Pakistan,
Somalie, Yémen) (1). Comme un boomerang, le ressentiment haineux contre
l’Occident a nourri et grossi les rangs djihadistes. Quant à « pivoter vers l’Asie » et contenir
la Chine, la plus grande puissance militaire du monde n’a pu que constater le
délitement de sa domination (Corée du Sud, Japon). Au Moyen-Orient, les
puissances fragiles mais dictatoriales, la Russie, l’Iran, la Turquie dament le
pion à l’aigle impérial. Trump entend y remédier. Son isolationnisme n’est que la réaffirmation brutale des seuls
intérêts états-uniens, y compris militaires. Les tapis de bombes pourraient
succéder aux drones et conseillers militaires. Les loups de Wall Street et les
militaristes qui composent son gouvernement ne sont pas herbivores. Les
démagogues électoralistes vont vite révéler leur caractère carnassier.
Dans la continuité obamanesque, les
requins de la finance, les 1%, vont continuer de se nourrir des petits
poissons. Certes, les Etats-Unis sont déjà le pays où, proportionnellement à sa
population, l’on incarcère le plus, celui où le racisme gangrène une société
malade de sa désindustrialisation. Mais, si Trump entend faire souffrir encore
plus ce grand corps malade, au bord d’une guerre civile froide, il se heurte
déjà aux Afro-américains, aux femmes, aux écologistes, à tous ceux qui avaient
espéré en Sanders. Le mouvement de contestation s’est levé, les tensions ne
peuvent que s’accroître… Il en est de même dans le reste du monde pour le pire
et le meilleur.
Les poussées nationalistes et la
xénophobie dans le monde dévoilent en creux désarroi, confusion, rancoeurs,
mauvaise foi, qui lorgnent sur un hypothétique homme providentiel, un sauveur
suprême. Ces passions tristes se heurtent aux passions joyeuses, celles de
l’engagement collectif qui, pour que le monde change, clament : « La caste politicienne ne nous représente
pas, leur démocratie n’est pas la nôtre ».
Les plaques tectoniques se sont mises
à bouger tant sur le plan géopolitique qu’au sein des formations sociales. Nous
sommes de nouveau en train de changer d’époque mais nous ne savons pas encore
ce qu’elle nous réserve. L’ancien tarde à mourir, le nouveau ne parvient pas à
naître. Dans cet entre-deux, les monstres surgissent. (le 26.01.2017)
(1) Lire à ce
sujet Dirty wars : le nouvel art de la guerre (sous-titre Une armée secrète, une mission sans frontière,
une guerre sans fin) de Jeremy Scahill, 2014, édition Lux