Nous avons lu…
Là où est l’argent
Ce livre relate à la fois une histoire assez extraordinaire, celle de
l’auteur, espion bénévole, et la réalité des paradis fiscaux. Travaillant à
Jersey, puis au Luxembourg, ayant à connaître l’ingénierie financière organisée
telle des poupées russes, des comptes off-shore gérés en toute impunité pour
organiser l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent sale, les liquidations
frauduleuses, l’abus de biens sociaux… Par « patriotisme économique » et devant l’ampleur du dépeçage des
entreprises françaises auxquels se livrent les fonds d’investissement
spéculatif, Maxime Renahy contacte les services secrets français. Initié par
ceux qui se « considèrent comme un
rempart en cas d’effondrement de l’Etat », il apporte une suite de
révélations : par exemple, au-delà des prête-noms ce sont des avovats
d’affaires, des cabinets conseils qui gèrent des entités aux noms exotiques.
Ils organisent entre autres la dette fictive de telle entreprise pour
soustraire ses bénéfices à l’impôt et provoquer des licenciements. Toutes les
sommes maniées circulent à la vitesse de la lumière et se réfugient aux îles
Caïmans, Singapour, Hong Kong, dans l’Etat du Delaware aux USA, au
Lichtenstein, aux Bahamas. A la lecture de cet essai, on mesure l’hypocrisie
des gouvernements qui jurent de supprimer les paradis fiscaux, s’inquiètent de
l’ampleur du capital détourné et ne font presque rien pour les combattre.
« Selon la commission européenne,
l’Europe perd chaque année via la fraude et l’évasion fiscale, 1 000
milliards d’euros ». Découvrir ce monde opaque, c’est aller de
surprise en surprise : Axa l’assureur, Lactalis, la Légion du Christ,
filiales de banques gérées par des expatriés dans les paradis fiscaux
permet de jeter un regard impudique sur les financiers douteux bien installés,
y compris dans les hautes sphères des Etats. GD
Maxime Renahy. Préface d’Eva Joly, ed. Les Arènes, 2019, (20€)