Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


dimanche 19 janvier 2020


Hôpital. Y’a urgence

Macron, en son verbiage, annonce « sa réforme majeure » : le « Plan Santé 2022 » pour « mettre le patient au cœur du système », « développer la prévention et la qualité des soins », faire de « notre système de santé, le pilier de l’Etat providence du 21ème siècle » et bla-bla-bla et bla-bla-bla… Alors que la grève des urgences, déclenchée en mars 2019, s’est étendue à l’ensemble des services hospitaliers, constitués en Collectif inter-urgences pour revendiquer en priorité : augmentation des salaires, ouverture de lits et embauche de personnels, ainsi qu’un autre financement des hôpitaux, dénonçant la tarification à l’activité notamment, Macron-Buzin n’ont foi qu’en « l’hôpital-entreprise » : le soin est un objet de production au service de la marchandisation de la santé au détriment du service public. Tel le médecin malgré lui, Macron applique le remède de « l’austérité, vous dis-je, l’austérité ! ». C’est que le malade est coriace car, depuis plus de 40 ans de médications inadaptées, il survit grâce à ses soignants, ses usagers qui défendent l’hôpital public. Les docteurs Diafoirus se sont succédé jusqu’à Macron, pour appliquer les remèdes de la saignée…  jusqu’à la mort clinique ? Est-ce encore possible de sauver l’hôpital public, l’un des pivots du système de santé permettant à chacun d’accéder à des soins de qualité en toute égalité ?

Le moindre soin au meilleur coût !

Tel est le remède : maîtrise des dépenses publiques. Il a inspiré nombre de gouvernants depuis 1979 (Giscard/Barre), date à laquelle le ministre de la Santé fut autorisé à fermer des lits. Dès lors, se succèderont les contre-réformes hospitalières, créant de nouveaux outils pour la privatisation par la contrainte budgétaire. Ainsi la part de l’hôpital dans les dépenses d’assurance maladie est passée de 43 % en 1983 à 36 % en 2010, le service public de santé est ramené à ses missions d’assistance aux plus pauvres et à quelques missions non rentables, pour laisser la place au secteur privé là où il peut réaliser des profits.
En 1983, le gouvernement dit socialiste institue le « budget global », chaque établissement reçoit une enveloppe budgétaire fixée à l’avance en fonction d’un « taux directeur » et doit y faire entrer l’ensemble de ses dépenses. Il ouvre la brèche dans la gratuité des soins hospitaliers avec le « forfait journalier », contribution quotidienne non remboursée par l’assurance maladie dont le patient doit s’acquitter. En 1991, la loi Evin impose aux établissements publics l’élaboration d’un « projet d’établissement » et instaure les schémas régionaux d’organisation sanitaire (SROS) sur la base desquels les préfets pourront fermer des lits, restructurer les établissements, développer la « coopération public-privé ». En 1995, Juppé institue le vote annuel d’une enveloppe nationale fermée des dépenses hospitalières dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale : l’ONDAM – objectif national des dépenses d’assurance- maladie-hospitalier. Naissent les Agences régionales d’hospitalisation (ARH), bras armée de la « réforme » qui attribuent les budgets, les autorisations de fermeture, de regroupements et de privatisations. Jospin/Aubry (2000) ne changent pas de cap. Les 35 H à l’hôpital, sans embauches en compensation, contribuent à la dégradation des conditions de travail.
Chirac accélère le mouvement : le « plan Hôpital 2007 » attribue des crédits d’investissement aux établissements privés et publics qui acceptent restructurations et fusions. Notons que ces crédits servent également à rembourser les emprunts contractés par les établissements, exsangues, auprès de banques. Il crée la « tarification à l’activité - T2A » : chaque établissement public ou privé est financé en fonction de sa production d’actes de soins et de sa rentabilité. Produire plus avec moins ! Premières visées, les dépenses de personnel (70 à 80 % des dépenses hospitalières. Se met en place une sélection des malades et des pathologies soignées, une concurrence au moins-disant entre public et privé. L’hôpital-entreprise, pour financer ses investissements, soit  « dégage des marges », soit accroît la productivité du travail, soit s’endette. La dette des hôpitaux a triplé entre 2005 et 2015 et atteint 29 milliards € sur une masse budgétaire de 74 milliards. Et, pour la mise en œuvre, une « nouvelle gouvernance » est instituée, par pôles, pour organiser la polyvalence généralisée, et par là-même, la réduction des effectifs. Bachelot et sa loi « Hôpital, Patients, Santé, Territoires », en 2009 remplace les ARH par les ARS – Agences régionales de Santé - étendant leurs domaines de compétence à la médecine de ville libérale et au secteur médico-social. Elle crée les « communautés hospitalières de territoires », renforce les pouvoirs du directeur d’établissement, qui peut être relevé de ses fonctions par l’ARS.
Depuis 2012, les lois de financement de la Sécurité Sociale votées n’ont cessé de diminuer le budget de l’hôpital public, exigeant la « maîtrise de la masse salariale ». La loi Hollande/Touraine (2016) rend obligatoire le Groupement Hospitalier de Territoire, projet pour contraindre la coopération médicale entre établissements, assorti de sanctions pour les récalcitrants. Et, dans la continuité : le « plan Santé 2022 » de Macron/Buzin.

Au diable, les usagers ! L’hôpital-entreprise a des conséquences sur l’accès aux soins et sur leur qualité. Au diable les professionnels confrontés à des conditions de travail exténuantes et à risques. Priorité à la logique comptable : « un lit vide est un lit non rentable ». Au diable, les exigences de disponibilité de lits et de personnels pour faire face à l’imprévu ! L’heure est à la généralisation de la polyvalence et de l’intérim ! Le travail des soignants se réduit à la part purement technique, au détriment de toute dimension relationnelle et sociale. Les  soignants voient leur part d’activités administratives augmenter avec multiplication des procédures, des réglementations… Manques de personnels, horaires décalés, travail en 12 heures, suppression de repos, de congés, rappel illégal du personnel… Arrêts de courte durée, non pris en compte dans le remplacement… Personnels sous traitement, augmentation du burn-out et, en 2016, un nombre important de suicides ou de tentatives liés au travail.
Le mouvement actuel de contestation remonte de loin et ne s’éteindra pas si facilement. Il refuse le système de santé à plusieurs vitesses, qui contraint les plus pauvres à renoncer aux soins, entraînant la dégradation de l’état de santé d’une partie croissante de la population, avec des prises en charge plus onéreuses. Ainsi les méga-entreprises en santé, privées, vont continuer à faire profiter leurs actionnaires de la manne financière générée par cette dérégulation. Une sacrée aubaine ! Une sacrée colère des soignants et des usagers.

Un plan Santé 2022 d’austérité renforcée

Macron l’a affirmé : « Notre système ne souffre pas d’un manque de moyens mais d’une organisation inadaptée aux besoins d’une population vieillissante et aux évolutions technologiques ». Voici donc le plan « Du vent », adopté par le Parlement et promulgué le 24 juillet 2019. Il ne répond à aucune des revendications exprimées par un personnel soignant à bout de souffle. En voici quelques mesures-phares.

Fin du numerus clausus à la rentrée 2020. Institué en 1971, par ceux qui étaient convaincus que la limitation du nombre de médecins limiterait les dépenses de santé : il a divisé par deux le nombre de médecins (les médecins en place y étaient favorables), passant d’environ 8 000 à moins de 4 000 par an. Chaque année, est fixé le nombre d’étudiants admis en 2ème année de médecine ; pour exemple, en 2018, seuls 8 205 étudiants sur environ 60 000 ont été admis. Promis, dit Buzin, en 2020, le numerus clausus est abandonné… mais les effectifs d’étudiants seront fixés par les universités, en accord avec les ARS, selon les capacités et les besoins des territoires… sans que la liberté d’installation ne soit remise en cause… On peut douter de l’efficacité… Par contre, la mesure d’obligation de stages d’au moins 6 mois en cabinets de ville ou en maison de santé dans les zones manquant de professionnels pour les futurs médecins généralistes, celle-là risque d’être largement utilisée…

Et pour lutter contre les déserts médicaux ? A la manière forte d’une obligation d’installation, Macron préfère l’appel à « la responsabilité collective » des médecins libéraux. L’Etat mettra la main à la poche et financera 400 postes de médecins salariés pour les territoires critiques. Alors que 20 % de la population vivent en zone « sous-dense » ! Les médecins libéraux seront invités à assurer les soins de premiers secours, les urgences de jour…. à se regrouper au sein des maisons de santé et à  rejoindre les Communautés professionnelles Territoriales de Santé, pour trouver un médecin traitant, organiser l’accès à des consultations… et, pour inciter à cette organisation, Macron a souhaité l’extinction de la pratique de la médecine en cabinet isolé d’ici à 2022 ? Pour libérer du temps médical, des assistants médicaux auprès des médecins dans les zones en tension, seront recrutés. De même, la pratique avancée infirmière, permettra à des professionnels paramédicaux de se voir reconnaître des compétences relevant des médecins.

Les hôpitaux privés ou publics sont invités à « s’associer » à « coopérer ». Les hôpitaux de proximité seront labellisés, pour les soins de premier niveau, soins de suite pour les personnes âgées notamment…Les groupements hospitaliers de territoire (GHT) sont maintenus, le privé siégera désormais dans leurs instances, pour le partage de plateaux techniques, par exemple.

Le virage ambulatoire sera accéléré, donc… la poursuite de la suppression de lits !!

Et le numérique comblera les manques de médecins ! D’ici à 2022, tous les patients auront leur propre espace numérique de santé, pour accéder notamment à leur dossier médical partagé pour « fluidifier les échanges »… Ce qui est certain c’est que l’offre de soins s’éloigne encore des patients, dans un contexte de vieillissement de la population et de son appauvrissement.

Pas de révolution budgétaire pour les hôpitaux, la T2A n’est pas remise en cause. Pour la mise en œuvre du plan Santé, l’ONDAM sera relevé à 2.5 % en 2019 (au lieu de 2.1 %) : 3.4 milliards seront consacrés d’ici 2022.

De nouvelles brèches s’ouvrent dans le statut de la Fonction Publique Hospitalière, pour l’affaiblir : création d’un statut unique de praticien hospitalier, associé à la suppression du concours, pour « faciliter l’entrée dans la carrière, diversifier les parcours professionnels ». Un dispositif d’intéressement lié aux projets d’amélioration de la qualité de service est prévu ? Et pour « simplifier » le recours à l’emploi médical contractuel, un contrat unique est créé,  apportant « souplesse et réactivité » pour certains recrutements, renforçant les liens ville-hôpital. Rien pour les conditions de travail et la rémunération des 1 300 000 professionnels du secteur public et les plusieurs centaines de milliers du secteur privé, en grève et en mouvement depuis mars 2019.

Nous sommes parvenus, du fait des mesures successives de privatisation et de libéralisation, à une crise profonde du droit à la Santé. Alors qu’un généraliste sur 2 refuse de nouveaux patients car il en a déjà trop, les chiffres de la démographie médicale sont alarmants : - 13 % de patriciens seront en activité entre 2010 et 2025. Nous n’avons donc pas atteint le sommet de la crise. 

Urgences en grève

Il n’est pas si simple de mater les profondes colères. La contestation a commencé le 18 mars 2019, dans un service d’urgences parisien, où un patient a agressé un soignant : la goutte d’eau a fait déborder le vase. Une grève illimitée est proclamée par 4 autres hôpitaux. Le Collectif Inter-Urgences prend forme et compte, en octobre, 269 services en grève. Leurs revendications sont  simples : 10 000 emplois supplémentaires, réouverture de lits, revalorisation salariale de 300€net/mois – abandon de la T2A. Deux plans proposés par Mme Buzin en juin et en septembre n’ont pu stopper le mouvement qui s’est étendu à une grande partie de l’hôpital public, avec le Collectif Inter-hôpitaux, avec des médecins, des internes, des cadres, des usagers. Le 14 novembre, les soignants sont dans la rue. Le malaise qui couvait depuis des années, explose (plus de 900 lits sur 20 000 sont fermés dans les 39 établissements franciliens de l’AP-HP car 500 postes d’infirmiers sont vacants faute de candidats, etc…)

Buzin, pour résoudre le blocage propose, le 20 novembre, un certain nombre de mesures : rallonge budgétaire de 1,5 milliards sur 3 ans, reprise d’1/3 de la dette des hôpitaux publics (10 milliards) ; elle y ajoute des primes pour « renforcer l’attractivité des hôpitaux » : 100€ net/mois pour les aides-soignants auprès des personnes âgées, selon conditions, une prime annuelle de 800€ pour les 40 000 infirmiers de Paris et la petite Couronne percevant moins de 1900€/mois, une prime de 300€/an (25€/mois) distribuée par les hôpitaux, selon des critères spécifiques, remise à plat du statut de patricien hospitalier, etc.. Ça ne convainc toujours pas. L’ISNI – principal syndicat des internes – appele à une grève dure et illimitée à partir du 10 décembre. CGT Santé et autres syndicats ont appelé à mobilisation le 5 puis le 17 décembre. Le Collectif Inter hôpitaux a considéré que les primes annoncées sont dérisoires, honteuses et autant de manœuvres de division. Pourquoi ne pas augmenter le point d’indice pour tous ?  

Les « interdits de grève des soins », les médecins, ont alerté par d’autres moyens : une lettre ouverte de 660 praticiens, hospitaliers, chefs de service ou de pôles se sont dits prêts à démissionner collectivement de leur responsabilité si des négociations n’étaient pas ouvertes (le 15 décembre) ; ils ont alerté l’opinion sur les risques de dégradation de la qualité des soins. Par exemple, des pédiatres d’Ile de France, pour la première fois depuis 30 ans, ont dû transférer 25 nourrissons en réanimation à plus de 200 kms de Paris, faute de places ! Ils dénoncent le « point de rupture » proche. Le 14 janvier, 1120 médecins hospitaliers ont envoyé par mail à la Ministre, une démission collective des fonctions administratives…

Mi-décembre, surgit l’idée lumineuse de Mme Buzin : pour désengorger les urgences, créons le 113, un guichet unique répondant à toutes les questions (de l’envoi d’un SMUR s’il s’agit d’une urgence vitale, au rendez-vous avec un médecin généraliste ou la téléconsultation). Sapeurs- Pompiers et médecins libéraux s’insurgent : le 112 pour les urgences vitales et le 116 117 pour les rendez-vous non programmés fonctionnent : on ne veut pas de votre « usine à gaz » qui ne répond nullement aux vrais problèmes, à savoir le manque de médecins urgentistes et la fermeture, la nuit, des services d’urgence. La ministre suggère alors de créer des « antennes de service d’urgence », d’assouplir les règles d’ouverture 24H/24 et ouvrir seulement en journée, comme c’est déjà le cas dans nombre d’hôpitaux. Réponse : on ne veut pas de vos horaires d’ouverture de supermarché (8h30/20h30) !

La colère des personnels de la santé et de l’action sociale ne retombe pas. Elle s’amplifie quand ils découvrent, que le projet Macron sur les retraites abolit le principe de la catégorie active dans la fonction publique, faisant ainsi perdre la reconnaissance de la pénibilité pour l’ensemble des professions. Les aides-soignants, par exemple, vont devoir travailler 7 ans de plus pour prétendre à un départ en retraite à taux plein ; de même, les infirmiers devront travailler jusqu’à 64 ans minimum pour espérer une pension de retraite décente. Cette mesure, camouflée dans le projet global de contre-réforme des retraites est inadmissible au regard de leurs conditions de travail extrêmement dégradées. Les femmes en seront les grandes perdantes ! Face à la détermination des manifestants, la ministre de la solidarité et de la santé n’aura jamais aussi mal porté son titre. Incapable de prendre la mesure du problème, elle campe sur des positons « très patronales » : pas d’annonce de revalorisation des salaires, pas d’embauches, pas de moyens supplémentaires pour sauver l’hôpital. Arrogance et mépris.
Qui fait la politique de Santé ?

Que valent les « intentions » de la ministre de la Santé alors que Bercy a le dernier mot ? En fait, « la ministre envoie des leurres pendant que Bercy comprime l’offre publique de soins pour le plus grand profit des acteurs privés ». On voit d’ailleurs fleurir des services à côté des établissements hospitaliers, dans les grandes villes : les hospitels, hébergent les patients en ambulatoire non pris en charge par la Sécu, des salles d’opération de très haute technologie, sont fournies clés en main moyennant une redevance, etc. « Le système public de soin est totalement dépendant du capitalisme sanitaire » (1)

« A Chamonix, tous les ans, se réunit tout le gratin des décideurs politiques, administratifs et industriels de la santé, à l’occasion de la CHAM – Convention on Health Analysis and Management ». Ils se rencontrent, défendent « leurs » solutions pour résoudre la « crise du système de Santé ». Pas question du « trou de la Sécu ». Ici, la santé est un marché prometteur et même un atout industriel de la France ; Il s’agit que la médecine de France tienne son rang et surtout conquiert des marchés. Macron y était en 2016 (ministre de l’économie démissionnaire et futur candidat présidentiel) et il combla d’aise l’assistance : la France allait résoudre les problèmes chroniques de son système de soins avec  la télémédecine, le big data, l’intelligence artificielle, la médecine 3 P (prédictive, préventive, personnalisée)… Aujourd’hui, il s’agit de prendre le virage ambulatoire. Et, pour forcer à le prendre, resserrer encore les budgets, accentuer la concurrence entre établissements, avec la  T2A : aux hôpitaux publics, les soins très spécialisés, techniques et coûteux, les missions de service public et le reste, aux médecins libéraux, aux cliniques privées. Soyons sérieux ! En matière de santé, on fait du business et pas du service public. La T2A augmente la productivité des hospitaliers au prix de la dégradation du travail et de la qualité des soins. Les hôpitaux ont renoncé aux investissements et font appel au privé pour le plus grand bonheur des « innovants ».

Faute de médecins ou du fait d’honoraires libres trop élevés, ceux qui ne peuvent pas accéder au secteur privé pour être soignés, vont aux urgences. Les structures d’accueil des personnes vieillissantes sans médecins envoient aux urgences pour les soins qu’elles ne font plus, la psychiatrie n’a pas suffisamment de moyens, les malades… aux urgences, etc… Les vraies causes de la crise des urgences c’est l’absence d’un véritable service public de santé de proximité et la quasi défaillance du médico-social pour assurer le suivi.
 
Pour éviter que tout le monde aille aux urgences, il faut réorganiser les services, la médecine de ville et les hôpitaux. Mais, telle n’est pas l’intention de Buzin : « sa réforme » mêle belles intentions et effets d’annonce et les professionnels en grève l’ont bien compris : c’est « du vent ». Pour connaître la véritable teneur de la politique de Santé, il faut interroger Bercy et la politique européenne. Macron en bon élève de l’ordo libéralisme doit réduire la dépense publique. En matière de santé, il laisse la ministre envoyer ses leurres et Bercy comprime l’offre publique de soins, ouvrant ainsi les portes de l’hôpital du futur aux innovations privées.

Les mécontentements et les grèves des personnels concernés permettront-elles que ce système soit stoppé ?

Odile Mangeot, le 12.01.2020   

(1)   Ce paragraphe contient de larges extraits de l’article de Frédéric Pierru « D’où vient la crise des urgences ? Le cauchemar de l’hôpital du futur » dans le Monde Diplomatique octobre 2019

Sources : le Monde Diplomatique, CGT Santé, Inprecor.fr  


EHPAD. On brade chez Korian

Le Groupe français Korian – spécialiste en gestion de maisons de retraite médicalisées, cliniques et autres résidences pour seniors - n°1 en Europe - envisage la cession de 3 établissements dans le Val d’Oise, avec une reprise potentielle par la Société Mapad holding Executive. Cette-ci gère 3 EHPAD en Hauts-de-Seine et ce « groupe à taille humaine », affirme Korian, peut faire revenir à l’équilibre financier les établissements bradés… car Korian a omis de préciser son objectif : atteindre 14.5 % de marge d’excédent brut d’exploitation. Alors, évidemment : « Si un établissement n’est pas rentable, on le vend ». Pour les salariés, c’est : « Bossez, soyez rentables, faites-nous gagner des dividendes et des profits, sinon on vous vend ».
CGT Santé/Action sociale, le 3 janvier 2020

Naufrage suédois.
Le flambant neuf hôpital Krolinska, à Stockholm, inauguré en 2018, devait être le joyau du secteur suédois de la santé, de renommée mondiale, à la pointe de la recherche et de l’innovation ne  traitant que les maladies rares…
20 mois pluls tard, il est devenu le symbole des dérives d’une privatisation à outrance du domaine de la santé. « L’un des bâtiments les plus chers du monde » : construit par un consortium de BTP suédois et d’un fonds d’investissement britannique, son prix de départ à 14.5 milliards de couronnes (1.4 milliard d’euros) atteindra 22.8 milliards de couronnes. Les critiques des professionnels et des personnels sur les choix de construction sont ignorées, d’énormes dysfonctionnements dès l’ouverture sont réels : les fenêtres ne s’ouvrent pas dans les chambres, l’eau s’écoule dans le mauvais sens dans 156 salles de bains…. Le nouveau modèle de management conçu par la société de consultants Boston Consulting Group, vivement critiqué par les médecins, tourne à la catastrophe : files d’attente à l’entrée du bloc opératoire… opérations vitales trop tardives pour une soixantaine de patients gravement malades… En  2019, le déficit est à 1.6 milliard de couronnes… Fin novembre la direction annonce le licenciement de 250 médecins, 350 aides-soignants après avoir supprimé 550 postes dans l’administration. La Suède, modèle de réussite ? En privatisation à marche forcée de la Santé, oui !
Le Monde 11.01.2020