Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 31 mai 2021

 

Macron, une fin de mandat calamiteuse ?

 

Il est peut-être un peu tôt pour faire le bilan du mandat de celui qui est parvenu à l’Elysée par effraction. On ne sait pas encore si on peut l’appeler Brutus, celui qui a assassiné symboliquement Hollande, l’empêchant de se présenter, ou Rastignac (de Balzac) épaulé par les milliardaires (Bernard Arnault, Xavier Niel, Patrick Drahi…) ou encore Bel Ami (de Maupassant), Madame Trogneux lui faisant la courte échelle, rodant sa théâtralité et sa rhétorique creuse. Formé à la banque d’affaires Rothschild, sponsorisé par Attali dans la Commission ad hoc des privatisations tous azimuts, son mentor l’avait programmé pour 2027, voulant certainement préserver l’alternance gauche-droite qui n’avait plus aucune signification. Revêtant les habits de Madame Thatcher, se voulant le bon élève de Mme Merkel,  il n’avait qu’un but : libérer les entreprises en flexibilisant et précarisant le travail. La route électorale dégagée, pour lui, il fallait rattraper le retard de la France rétive jusqu’ici au néolibéralisme et aux privatisations en faveur du capital qui en résulterait. Tout autour de lui-même, après s’être comparé à Jeanne d’Arc, en présence du très droitier Devilliers, il fit savoir qu’il était une espèce de « Jupiter », « maître des horloges ». Sa France serait au plus vite une start-up nation à l’image de la Silicon Valley. Sa vision prométhéenne était des plus simplistes : le monde se divisait en deux, d’un côté « ceux qui réussissent », de l’autre « ceux qui ne sont rien », c’est-à-dire des « bons à rien » qui rechignaient à traverser la rue pour trouver du boulot… Son utopie réactionnaire reposait sur les « premiers de cordée » en capacité de faire régner, ici-bas, des entreprises sans usines où la finance et les nouvelles technologies tiendraient le haut du pavé, et assujettiraient les derniers de corvée.

 

Les contre-réformes néolibérales

 

Au grand dam des socio-macroniens qui l’avaient rejoint, sur ses déclamations « progressistes », il choisit un 1er ministre de droite (LR) pour mieux diviser le camp dont il voulait occuper la place. Puis, et avant tout, il gratifia généreusement ses parrains milliardaires. L’ISF fut supprimé, d’autres largesses furent octroyées sans faire trop grincer des dents, les soliveaux ne pipant mot.

 

Lui qui avait initié la loi El-Khomri de démantèlement des protections des travailleurs, en remit une couche ; il s’attaqua également à la privatisation de la SNCF, transformée en SA, et mit fin au statut des cheminots. Il n’eut cure de la mobilisation sociale importante qui le défiait, mit au rancard le mauvais Berger de la CFDT, qui en fut tout vexé.

 

Mais les ennuis commencèrent avec son protégé Benalla dont la mission était de former, auprès de lui, une garde privée hors de tout contrôle… Cet individu, en effet, s’entraîna à la bastonnade rue de la Contrescarpe, à l’occasion du 1er mai 2018. Les photos prises à cette occasion firent désordre mais la flagrance des images ne suscita aucune comparution immédiate. On assista plutôt à l’immédiateté de sa protection haut placée, l’autorisant même à se justifier dans les cénacles de la représentativité nationale. Mieux, muni de passeports diplomatiques, il fut envoyé en tournée jusque dans les terres africaines du Tchad, auprès de l’ami dictateur Idriss Deby. Le fringant président eut bien du mal à renvoyer ce garde du corps, d’autant que les critiques fusaient de toutes parts. En colère, à la maison de l’Amérique latine où il avait réuni ses sbires, il lâcha : « le seul responsable, c’est moi, qu’ils viennent me chercher ! ». Mais ça se gâta beaucoup plus sérieusement avec son projet de contre-réforme des retraites à prétention universaliste. Pourtant, l’affaire avait été préparée bien en amont avec un rapport Delevoye cousu de fine main et une CFDT qui ânonnait. Les manifestations se firent massives et la répression s’amplifia, d’autant qu’étaient concoctées des régressions cacophoniques sur l’assurance chômage. Mais le coup de grâce fut envoyé par les Gilets Jaunes suite au projet de taxe sur l’essence. Des campagnes et des banlieues, monta une irrépressible volonté d’en découdre.

 

Elan bloqué

 

La sauvagerie de la répression (cf encart) ne suffisant pas, la taxe fut retoquée. Et le mouvement des Gilets Jaunes s’amplifia, se consolida avec des revendications portant sur la justice sociale, fiscale et environnementale. Macron, qui s’était fait fort de convaincre les « Gaulois réfractaires », s’en trouvait tout penaud d’autant que les Gilets Jaunes l’avaient pris au mot et voulaient aller le chercher à l’Elysée.

 

Il changea de ministre : Darmanin à l’Intérieur épaulé par le préfet Lallement devaient faire régner l’ordre. Plus d’un fut sidéré, ce préfet n’était-il pas un nazillon, aux dires de Juppé, qui n’en n’avait pas voulu dans ses terres girondines ! La brutalité policière ne suffisant pas à rassurer, il fallait, en même temps, tenter de retourner l’opinion en sa faveur, tout en laissant en plan les fameuses réformes programmées et ce fut le grand débat de bla-bla télévisés dans les provinces, auprès de gens « raisonnables » et de notables effarés : la révolte populaire issue, pour partie, des provinces, bénéficiait des faveurs de l’opinion publique !

 

Bref, quand les ennuis volent, c’est en escadrille (disait Chirac), ça ne s’arrête plus. Lui qui voulait phagocyter les Verts encaissa la démission de Hulot et nomma la falote Pompili. Décidément, faire éclater la Gauche et ringardiser la Droite, pour mener une politique néolibérale que ces deux camps défendaient, ne suffisait point. Et en mars 2020, la claque des municipales démontra, s’il en était besoin, que les petits marquis qui prétendaient à quelques fiefs, étaient bien ridicules (LRM obtint, pour tous ces candidats, 2.2 % des voix). En toute démagogie, voulant paraître comme inspiré par la démocratie citoyenne, il nomma une convention désignée par tirage au sort, sur le climat, jurant qu’il reprendrait « sans filtre » toutes les propositions émises. Il pensait avoir bien préparé son coup avec des encadrants « experts » conseillant ces « gens de peu ». L’intelligence collective produite par ce cénacle le laissa tout marri. Sans le dire, l’essentiel des propositions furent mises au rencart et à tous ces blocages, s’ajouta l’inattendu Covid 19. Entre-temps, les divisions au sein de LREM lui firent perdre la majorité absolue à l’Assemblée et le Sénat droitier rechignait à la mise au pas programmée. Alors, il tomba le masque en toute opportunité.

 

C’est la guerre. Un comité secret-Défense fut concocté, une poignée d’experts requis pour tenter d’occulter la pénurie des premières armes : masques, tests. On encensa les hospitaliers surmenés sans rien céder à leurs revendications. La « plèbe » aux balcons, suivit, angoissée, pour leur donner du baume au cœur. Mais cette unanimité travaillée par la peur ne dura pas. Le cafouillage, la discordance des voix autorisées, la gestion catastrophique de l’épidémie obligèrent le petit Président à s’instituer, seul, épidémiologiste en chef. Il chargea son second, le 1er ministre Castex, de crachoter, en toute responsabilité, la parole présidentielle. Son 2ème larron, Véran, livra, quant à lui, les oracles, toujours à venir, de la délivrance prochaine.

 

La lepénisation des macroniens

 

A l’occasion de l’assassinat de Georges Floyd aux Etats-Unis, on vit surgir, en France, des manifestations contre le racisme et les discriminations qui s’invitèrent dans le mouvement social, avec le Comité Adama. Les délaissés des quartiers populaires poussaient à la convergence des luttes contre toutes les oppressions sexistes, raciales, sociales. La peur s’empara de nouveau de l’Elysée et des pieds nickelés de l’entourage du président. Les barons du régime, envoyés pour pérorer dans les écrans télévisuels, à l’aide d’éléments de langage dont ils étaient munis, ne parvenaient pas à rassurer l’opinion. Face au « désordre », il fallait de toute urgence voter des lois liberticides et construire l’ennemi intérieur, avec la loi sur le séparatisme. Sans vergogne, d’un côté, répandre la peur et l’angoisse du Covid et, de l’autre, museler les mouvements sociaux. En brandissant l’islamo-gauchisme, en prétendant, comme Darmanin, que décidément la Le Pen était trop « molle » vis-à-vis des musulmans, il s’agissait déjà de clore le mandat pour se préparer à la nouvelle échéance présidentielle.

 

Entre-temps, des privatisations programmées avaient été repoussées (Aéroports de Paris, projet Hercule-EDF). Néanmoins, la contre-réforme des indemnités-chômage en plein Covid mit dans la rue et dans les lieux culturels, les intermittents et autres intérimaires, et ils nous invitèrent à « Danser encore » (1).

 

Cette surenchère droitière dont l’Assemblée nationale se fit aussi l’écho, se doubla de l’apparition de l’appel d’un « quarteron de généraux », suivi de militaires d’active puis de policiers factieux, s’instituant en recours d’un régime en difficultés. Piteusement, dans toute la classe politique, sauf les Insoumis et l’extrême gauche, on fit profil bas, pire, les leaders de la droite, du centre, de la gauche de droite et des verts, s’invitèrent à la manifestation des policiers du 19 mai, le ministre Darmanin en tête. Allaient-ils, comme à la veille du coup d’Etat de 1958, donner tous pouvoirs à l’armée comme le fit Guy Mollet en Algérie ? Certes, nous n’en sommes pas là mais le fond de l’air est brun.

 

Reste néanmoins, le cirque électoral des départementales, régionales puis présidentielles. Les barons, sans programme, veulent conserver leurs postes et les macroniens s’immiscer dans les listes des Républicains : cafouillages et dissensions pour s’approcher de la mangeoire. Entre les socialo-macro-compatibles, les macroniens lepénisés, le fossé est étroit entre eux et la Le Pen macronisée.

 

Que va-t-il advenir ?

 

Dans ce pays, où l’on ne fabrique plus de téléviseurs, de téléphones, de rails, d’appareils électroménagers… où la classe politicienne, presque toutes sensibilités confondues, se fait le bouffon répétant « l’Europe, l’Europe », tout est possible. Car l’après-Covid risque d’être calamiteux.

 

Rabaissant sa morgue, mais en petit seigneur sûr de son fait, Macron prépare sa tournée des provinces. Assuré qu’il parviendra à être accompagné d’une nuée de journalistes et de reporters complaisants, il entend s’afficher sur tous les écrans TV pour décerveler l’opinion. L’insoumis Mélenchon, parti dans la course avant lui, pourrait bien lui tailler quelques croupières et la Le Pen prétendre que le label de la « sécurité » répressive et la lutte contre l’islamisme est sa propriété depuis des lustres. Il a enjoint, toutefois, ses troupes les plus radicalisées, de ne pas aller trop loin pour tenir la distance nécessaire avec la Le Pen. Le duo du 2ème tour doit être celui du combat à fleuret moucheté, entre lui et la Le Pen dédiabolisée. En tout état de cause, le risque, pour la classe dominante, c’est de ne plus avoir la main, face à une assemblée nationale où probablement s’écharperont, pour la galerie, l’extrême droite, l’extrême centre et la gauche compatible. Si tel est le cas, cette ingouvernementalité  pourrait ouvrir la voie au recours à toutes les extrémités : dissolution de l’assemblée nationale, intervention de l’armée…

 

N’en demeure pas moins que dans la dernière période, est apparu l’impensé généralisé de la nature de l’Etat capitaliste : l’appareil d’Etat est une machine à dominer, à réprimer. Le terreau de la colère et de la résistance pourra-t-il créer un rapport de forces suffisant pour faire reculer le racisme islamophobe et consolider, de manière offensive, la convergence des luttes nécessaire pour éviter le pire ?

 

Ce qui est sûr, à part pour les classes moyennes supérieures, c’est que la caste politique est bien ringardisée. Pour autant, les classes ouvrières et populaires ne se sont pas dotées d’organisations, munies d’une perspective de transformation sociale. Quoiqu’il en soit, malgré la longueur de la nuit, et ses soubresauts cauchemardesques, l’aube finit toujours par se lever.

 

Gérard Deneux, le 19.05.2021

 

(1)   chanson de HK et les Saltimbanks

 

Encarts

 

Gilets Jaunes.

Bilan des violences :

1 mort, 24 éborgnés, 5 mains arrachées, 315 blessés à la tête

(sources : David Dufresne, Allô place Beauvau)

Bilan des interpellations et condamnations (de novembre 2018 à juin 2019) :

-        Plus de 10 000 gardes à vue

-        5 300 poursuites judiciaires 

-        Plus de 3 100 condamnés dont 1 000 avec de la prison ferme (1 mois à 3 ans), dont 400 avec incarcération immédiate

-        1 240 peines avec sursis

800 seraient toujours en prison et aucun politicien pour demander une amnistie.

 

Seules les révoltes dans les quartiers populaires de 2005 ont fait l’objet de plus d’incarcérations : 763 personnes écrouées sur 4 402 gardes à vue.

source : Ministère de la justice, le Monde, 8.11.2019 

 

 

 

Pendant la pandémie :

 plus de 51 milliards d’euros pour les actionnaires du CAC 40

+ 22 % par rapport à 2020

Les grands gagnants : Bettencourt, Arnault, Pinault, etc.. et les fonds d’investissement : Black Rock, Vanguard et Amundi…

51 milliards, cela équivaut :

-        aux dépenses annuelles de 960 000 personnels des hôpitaux publics

-        à la construction de 1 300 lycées d’un millier de places

-        à 1 millier de fois le montant de l’aide au secteur culturel

Source : Observatoire des multinationales

 

 

 

Aides publiques aux entreprises

Avant la crise 2007-2008 = 65 milliards€/an

en 2019 = 150 Milliards, soit + 230 %

C’est l’équivalent de :

-        2 fois le budget de l’Education nationale

-        5 fois le montant de l’impôt sur les sociétés

 

 

 

Recettes de l’Etat en baisse de 3 milliards !

entre Impôt de Solidarité sur la Fortune et Impôt sur la Fortune Immobilière

ISF 2016 = 5 milliards (351 000 assujettis)

ISF 2017 = 5 milliards (358 000 assujettis)

IFI 2018 = 1.9 milliard (120 000 assujettis)

IFI 2019 = 2.1 milliards (126 000 assujettis)

 

Source : ministère de l’Action et des comptes publics 

 

 

 

Rémunération des amis de Macron

B. Arnault = 62 milliards€/an, soit 5.16 milliards/mois

F. Bettencourt = 21 milliards, soit 1.75 milliards/mois

P. Drahi = 7 milliards, soit 0.58 milliard/mois

une aide-soignante = 1 250€/mois

8 millions de personnes ont recours à l’aide alimentaire

 

 

 

Plainte contre les violences policières à l’encontre des personnes exilées

 

Raphaël Kempf, avocat, annonce le dépôt de plainte collective (une trentaine de personnes, élus, migrants, militants associatifs, journalistes) contre le préfet de police de Paris, Didier Lallement suite à l’évacuation des personnes exilées d’un campement à Saint Denis le 17 novembre 2020 et de la place de la République le 23 novembre.

La plainte porte sur

-        violences policières (avec préméditation) à l’endroit des personnes exilées et de militants associatifs, lors des évacuations de 500 à 600 personnes devenues sans abri

-        vol en bande organisée (de matériels, tentes n’appartenant pas à l’Etat),

-        destruction et dégradation de ces matériels.

Les seuls objectifs du préfet Lallement étaient de se débarrasser des migrants et de réprimer les militants venus les soutenir.

Certes, cela va déplaire mais le Collectif est déterminé à poursuivre. à suivre…