Le mouvement
anti-pass. Qu’en penser ?
Pour
caractériser ce mouvement, il convient de le comparer avec ce qu’il n’est pas, tout particulièrement avec les Gilets Jaunes
qui ont vu se dresser salariés, retraités, « petites gens », à la
périphérie des grandes villes, refusant l’augmentation du prix de l’essence.
Au-delà de cette revendication sociale et de la volonté de s’en prendre à
Macron, les débats qui ont animé ce mouvement et sa détermination ont permis
une politisation des participants et leur organisation dans l’Assemblée des
Assemblées.
Les
mots d’ordre principaux, lors de l’apogée de ce mouvement, réclamaient la
justice sociale, fiscale et environnementale.
Manifester sans autorisation dans les « beaux » quartiers,
faire la jonction avec ceux qui demandaient l’abolition de la loi Travail puis
avec ceux qui dénonçaient le racisme, tendent à prouver que ce mouvement avait
un caractère antisystème prononcé.
Si
le mouvement anti-passe est également spontané, il se caractérise, surtout, par
le rejet des mesures autoritaristes du gouvernement. C’est le pass de trop après la gestion catastrophique de la
pandémie, les mensonges et contradictions des gouvernants.
Cette
mobilisation, en plein été, dotée d’une dynamique inédite, est le signe de
l’entrée en mouvement de nouvelles couches sociales, de primo-manifestants. Il
reste toutefois très hétérogène :
on trouve parmi eux des salariés du secteur hospitalier, des pompiers, des
commerçants, des Gilets Jaunes, des membres de la Gauche radicale et surtout une
infiltration de groupes d’extrême-droite. Elle est rendue possible par le mot
d’ordre dominant : « liberté, liberté » et la quasi-absence
d’autres revendications, Pour l’essentiel, ce mouvement reste indifférent aux
lois liberticides à caractère collectif,
mise à part la suspension des contrats de travail pour cause de non
vaccination.
La
petite classe moyenne qui s’est mis en mouvement refuse des contraintes qui
restreignent sa liberté, c’est : « je
fais ce que je veux, quand je veux, où je veux » et ce, indépendamment
de la gravité de la pandémie qu’ils tendent à nier.
C’est
donc la liberté individualiste
qu’ils réclament, effarouchés de ne plus pouvoir aller au cinéma, au
restaurant. La colère anti-Macron est dévoyée. Une vision négationniste semble
l’emporter : le Covid 19, une « grippette » comme le disait
Bolsonaro, les vaccins seraient pires dans leurs effets supposés à venir…
D’autres
caractéristiques sont inquiétantes : les agressions contre les militants
de la Gauche radicale, l’appel à fraterniser avec la police. Il n’est pas
étonnant que les Patriotes de
Philippot, les Civitas, l’Action
française, les nationalistes xénophobes, la Ligue du Midi, Egalité et Réconciliation, Bon
Sens, trouvent matière à se déployer au sein du mouvement.
Les
manifestations qui ont lieu en Europe sont encore plus nettement caractérisées
par le poids de l’extrême-droite. En Italie, c’est No Vax et Forza Nuova qui
sont à la manœuvre. En Allemagne, les libres penseurs fascisants brandissent
des références positives au nazisme et l’AFD relaie leurs appels. Au Royaume
Uni, c’est « un rassemblement mondial pour la liberté » qui alimente
des thèses complotistes et traite le système de santé publique de bastion nazi…
La
crise organique du système provoque et provoquera encore, des révoltes, mais il
apparaît sans conteste que « tout ce qui bouge n’est pas rouge »
et que « l’ennemi de mon ennemi
n’est pas forcément mon ami ». La
confusion risque de durer comme une répétition de l’histoire la plus noire. Il
suffit d’évoquer 1934 où les ligues factieuses s’en sont pris à l’assemblée
nationale, la « gueuse ». Revisiter le passé n’est pas anodin. Le
fascisme s’est toujours présenté comme un mouvement national et social,
cherchant des boucs émissaires, suscitant la chasse aux « rouges » et
le complot des étrangers. L’histoire balbutie. Le combat idéologique est
d’autant plus important dans la période et l’on peut regretter l’isolement de
la Gauche radicale et l’absence de volonté des confédérations syndicales après
bien des tergiversations, d’appeler à rejoindre le mouvement, pour faire
prévaloir les libertés collectives qui sont bafouées.
Gérard
Deneux, le 22.09.2021
SUD Solidaires 54, dans un communiqué, a dénoncé la censure dont il a
été l’objet, lors de la manifestation du 11 septembre à Nancy. Ce syndicat s’en
prenait aux restrictions des libertés, à la réforme de l’assurance chômage et
des retraites. Sa liberté d’opinion a été bafouée, catalogués qu’ils furent
d’être favorables à la vaccination. Néanmoins, autorisés à prendre la parole,
ils furent interrompus par des huées dès la première phrase : « Nous faisons face à une épidémie mondiale »
et ne purent poursuivre. Drôle de conception de la liberté !
Nous faisons nôtre le contenu de la prise de paroles
qu’ils ont diffusée dans leurs réseaux.
Nous faisons face à une épidémie
mondiale avec les différents variants du coronavirus. La vaccination est un
élément clé pour stopper ou limiter les dégâts de l’épidémie à l’échelle de la
planète, pas d’un Etat. A l’heure où les pays riches ont un taux de vaccination
majoritaire dans la population et où l’on parle d’une troisième dose, les trois
quart de l’humanité restent démunis pour lutter contre l‘épidémie et certains
pays n’ont vacciné que moins de 10 % de leur population.
C’est pourquoi les brevets doivent être levés sur les vaccins et les futurs
traitements : assurer l’accès universel au vaccin et aux soins devient un
enjeu mondial.
Pourtant, après sa gestion calamiteuse
et désordonnée de la pandémie, après avoir poursuivi le démantèlement de notre
système de soin, après avoir refusé de donner des moyens supplémentaires aux
services publics et à la protection sociale, le gouvernement s’enferme dans un
débat franco-français et impose par la
contrainte et de manière déguisée l’obligation vaccinale. Parce qu’il n’a
pas su convaincre et qu’il n’est plus crédible, le gouvernement suscite la
méfiance là où il aurait dû entraîner l’adhésion.
Avec le pass sanitaire, l’Etat :
-
recrute des vigiles
plutôt que des soignants,
-
restreint les libertés d’une partie de la population,
la plus jeune et la plus précaire ; l’empêche d’accéder à des services publics
essentiels, comme se faire soigner,
-
menace des milliers de travailleurs-euses d’être
privé-es de salaire,
-
étend le contrôle
et le fichage de la population, au mépris du secret médical,
-
ouvre un boulevard à l’extrême droite, aux thèses
complotistes, racistes et antisémites, dans un mesquin calcul électoraliste.
Pendant ce temps, le capitalisme continue sa course folle : les profits du CAC40
explosent sur le dos des salariés et de l’environnement, le gouvernement
s’apprête à faire appliquer la réforme de l’assurance chômage qui fera basculer
dans la précarité des milliers de travailleurs-euses privé-es d’emploi, ainsi
qu’à remettre sur la table l’injuste réforme des retraites voulant nous faire
travailler jusqu’à 64 ans voire plus, quand les entreprises ne recrutent plus
où se débarrassent des salariés de plus de 50 ans.
En
conséquence, SUD-Solidaires 54 appelle à la construction d’une mobilisation
sociale d’ampleur, pour le progrès social, contre toutes les régressions. Nous
appelons à participer massivement à la mobilisation nationale et intersyndicale
du 5 octobre et à construire ses suites. le 11.09.2021