Ils nous
empoisonnent
Commerce
toxique de pesticides…
Depuis
2018, l’UE interdit sur son sol
l’usage de trois néonicotinoïdes (l’imidaclopride, le thiaméthoxame et la
clothianidine), considérés comme des tueurs d’abeilles. En France, interdits
par un vote du Parlement en 2016, ils sont à nouveau autorisés depuis nov.
2020, à titre dérogatoire, jusqu’au
1er juillet 2023, pour « sauver les producteurs de betteraves sucrières » ! Pour
parfaire l’hypocrisie, le
gouvernement vient de publier un plan pour « freiner l’effondrement des pollinisateurs » : à partir du
1er janvier, en période de floraison, les agriculteurs ne pourront
épandre des pesticides que dans les 2
heures qui précèdent le coucher du soleil et dans les 3 heures qui le suivent.
Toutefois, si une maladie imposait un traitement fongicide, les horaires
l’épandage seraient élargis. D’autres dérogations permettent de les épandre en pleine
journée si la température est « suffisamment basse »... Il va falloir
doter les abeilles de montres qui sonnent la fin de la journée de travail et l’obligation
de rentrer à la ruche… et surtout, recruter des vigiles qui verbaliseront les
agriculteurs ayant tendance à oublier l’heure…
Pourtant,
sonnent les alertes pour préserver la biodiversité car une espèce d’abeille
sauvage sur dix est aujourd’hui menacée d’extinction en Europe et le taux de mortalité
observé au sein des ruches françaises est passé de 10 % à 30 %. Par ailleurs,
les papillons de nuit et autres insectes pollinisateurs disparaissent sans un battement d’ailes. Les apiculteurs et défenseurs de la
biodiversité ne pèsent rien face à l’agrochimie
Scandale
absolu : si l’UE interdit
l’usage sur son sol, elle continue à
produire et à exporter ces pesticides ultra-toxiques (1). Entre sept. et
déc. 2020, environ 4 000 tonnes de pesticides, contenant plus de 700
tonnes des 3 substances actives citées ci-dessus, ont été épandus sur 20
millions d’hectares de cultures, tuant des centaines de millions d’abeilles.
Seule obligation : les fabricants de pesticides doivent transmettre à
l’agence européenne des produits chimiques les quantités de néonicotinoïdes
interdits qu’ils veulent exporter hors de l’UE. Neuf pays de l’UE pratiquent ce
« commerce toxique » dont Belgique, France, Allemagne et Espagne. 65
pays sont destinataires de ces produits.
Les
producteurs sont : Syngenta, ex-firme suisse aujourd’hui
sous pavillon chinois ChemChina (plus des ¾ des volumes exportés) ;
elle produit dans ses usines en Belgique, France, Espagne, Grèce, Autriche et
Hongrie. Le Brésil, son meilleur client, épand ces substances sur ses
gigantesques plantations de soja. L’allemand Bayer exporte dans une quarantaine de pays et produit en Allemagne,
France et Espagne. D’autres sociétés participent à ce commerce, dont l’allemand
BASF, l’américain FMC, l’australien Nufarm, le japonais Sumitomo ou encore
l’indien UPL.
Ce
commerce ne devrait plus être possible à partir du sol français, à compter de
2022, suite à la loi sur l’alimentation d’octobre 2018, interdisant la production,
le stockage et la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des
substances actives non autorisées en Europe... Le lobbying agrochimique fonctionne
à plein tube pour lever ces restrictions… à suivre.
OM,
le 8.12.2021
(1)
Enquête d’Unearthed,
de la cellule investigation de Greenpeace britannique et de l’assoc. suisse
Public Eye, publiée le 18.11.2021
Chasse
à l’or blanc au Nevada
Des
activistes campent dans la caldeira de Thacker Pass protestant contre un projet
de mine d’extraction et de production de l’or blanc : le lithium. Cette cuvette désertique n’intéressait personne, sauf
quelques ranchers et leurs vaches grignotant les plantes, jusqu’au jour où l’on
y découvrit le plus grand gisement de lithium l’Amérique du Nord, ce métal
alcalin indispensable pour fabriquer éoliennes, panneaux solaires, batteries de
portables et de véhicules électriques.
La demande mondiale pourrait être multipliée par 40 dans les 20 prochaines
années. De quoi redonner de l’intérêt à cette région désertique du
Nevada ! L’entreprise canadienne Lithium Americas a un projet géant :
une mine à ciel ouvert de 520 hectares, une usine de production d’acide
sulfurique, un héliport, un site de déchets toxiques et un puits de 110m de
profondeur, nécessitant 10 millions de litres d’eau/jour et 41 000 l.de
diesel. Trump a saisi cet enjeu pour les Etats-Unis, jusqu’ici producteur
insignifiant de lithium face à l’Australie, la Chine, le Chili et l’Argentine
et a raccourci les délais des études d’impact, peu soucieux des conséquences
environnementales désastreuses : le lithium est séparé de l’argile avec une
solution de 5 800 tonnes/jour d’acide sulfurique (transporté par camions) ;
les rejets de cet acide seront ensevelis sur place, là où vivent des espères
rares comme le tétras des armoises et le lapin pygmée ; compte tenu des
besoin énormes (12 000 l/minute), l’eau devra être pompée dans la nappe
phréatique et tant pis pour la protection des tombes amérindiennes sur ce site.
Les quelques ranchers présents ont peu de poids pour s’opposer, même s’ils ont
déposé, avec trois associations locales de défense de l’environnement, une
plainte pour détournement d’eau. Ces militants ne sont guère optimistes
d’autant que les habitants y voient une chance de développement (recettes
fiscales, emplois). Le gouverneur démocrate voit déjà le Nevada devenir pour
l’énergie ce que Wall Street est à la finance ou la Silicon Valley à la
technologie. Pour les écologistes, Thacker Pass est l’emblème d’une réalité
complexe : les solutions pour une énergie propre requièrent des métaux
dont l’extraction est sale. « On
fait croire aux gens qu’on va sauver la planète grâce aux voitures électriques »
mais « si les humains continuent à détruire la biodiversité, les voitures,
mêmes propres, ne leur seront pas d’un grand secours ».
La conquête de l’or blanc est lancée. En
Serbie, l’australien Rio Tinto projette
de construire la plus grande usine de lithium d’Europe pour fournir plus de 1
million de voitures électriques à l’industrie automobile européenne. En France, le groupe minier Eramet mise
sur le lithium présent dans le sous-sol de Soultz-les-Forêts (Bas Rhin), en
prélevant l’eau très chaude et salée à 5 000 m sous terre. L’eau puisée
serait restituée au sous-sol avec un bilan carbone « proche de zéro ».
Tous ces conquérants promettent que leurs procédés sont à faible empreinte
environnementale…
Après
l’or noir, l’or blanc. Pour répondre à quels besoins ?
OM,
extrait d’articles du Monde