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mardi 4 juillet 2023

 

Le nucléaire civil

 

L’état climatique actuel du monde, dû essentiellement à l’activité humaine, fait que la consommation d’énergie devra être impérativement décarbonée d’ici 2050, selon les accords de Paris (on n’en prend pas trop le chemin !).

En plus des nécessaires économies d’énergie (diminution du besoin, efficacité énergétique…) que certains chiffrent à 30 %, les énergies primaires utilisables seront d’origine :

-        terrestre (biomasse, géothermie, nucléaire…), avec certainement encore un tout petit peu d’hydrocarbure,

-        mais, essentiellement, solaire (photovoltaïsme, vent, hydraulique…).

Le vecteur qui permettra de les utiliser sera presque exclusivement l’électricité pour la chaleur (chauffage air, eau), la mobilité, l’agriculture, les processus industriels…

 

1 - Quelle part aura le nucléaire en 2050 dans cette production d’électricité ?

 

Au niveau mondial :

Actuellement, selon l’AIEA (Agence Internationale de l’Energie Atomique), 339 réacteurs à uranium enrichi (surtout à eau pressurisée et bouillante) sont en service dans le monde. C’est 100 de moins qu’en 2010, Fukushima est passé par là !

 

Chaque réacteur produisant annuellement aux alentours de 7 Twh (milliard de kilo watt heures) en pleine charge annuelle, la production mondiale d’électricité nucléaire est d’environ 2 400 Twh.

On estime (avec difficulté) la consommation d’énergie finale de toute l’humanité à peu près à 100 000 Twh.

 

Dans ces conditions, le nucléaire ne couvre pas 3 % des besoins et on voit mal comment il pourrait en couvrir une part significative en 2050 étant donné la technicité et les coûts faramineux d’investissement que cette technologie impose : la plupart des pays ne peuvent y avoir accès et il y aurait tout à craindre d’une telle prolifération.

 

Le nucléaire n’est en aucune façon une solution

 pour l’avenir énergétique du monde.

 

Mais est-ce vrai à d’autres échelles, en particulier d’un pays comme la France qui est un des plus nucléarisés par rapport à sa production d’électricité (70 %) ?

 

Au niveau français :

56 réacteurs, tous à eau pressurisée sont en activité, représentant une puissance d’une soixantaine de GW (giga watt, million de kilo watts), censés produire annuellement environ 400 Twh, soit 24 % du besoin de la consommation finale des Français de 1 650 Twh (1.7 % de la conso mondiale, alors que nous ne sommes que 1 % de la population mondiale : des nantis, vous dis-je). Le reste est couvert essentiellement par les hydrocarbures, le gaz et, pour 19 %, par les renouvelables en 2022 (hydraulique compris), en-dessous de notre objectif de 23 % : nous sommes les seuls dans l’UE à ne pas respecter nos propres engagements !

 

Ces machines ont actuellement un âge moyen de 38 ans (43 pour Bugey à 19 pour Civaux) et en 2022, elles n’ont produit que 285 Twh, soit seulement 17 % de nos besoins, moins que le renouvelable ! Il faut se souvenir qu’en septembre 2022, 32 de ces réacteurs étaient à l’arrêt. Ils étaient encore 17 en novembre, et, si la consommation hivernale a pu être satisfaite c’est parce que l’hiver a été doux, que les Français auraient fait attention (soi-disant 10 % d’économie), mais surtout parce qu’on a acheté beaucoup d’électricité à nos voisins allemands et espagnols ! Notre balance du commerce extérieur est passée à – 163 MM € contre environ – 70 les années précédentes.

 

Conscient de cette grande faiblesse, M. Macron a décidé de prolonger la durée de vie de ces réacteurs de 30 ans (durée de vie de conception, sur la base de laquelle EdF a amorti ces machines, 40 ans étant déjà admis), jusqu’à 60 ans, comme aux USA, ce qui nous mènerait en moyenne à 2045 ! Sachant que 10 ans de maintenance coûtent 1 MM€, visite décennale comprise, qu’il en faudrait 2 d’ici-là, la facture se monte à 112 MM€ au bas mot, sans tenir compte des retards actuels de visites décennales, ni du coût du cycle du combustible.

 

Malin, le même, lance 6 EPR2 (conception pas encore « bénie » par l’ASN, Autorité de Sûreté Nucléaire) pour 10 MM€ l’unité, d’ici 2035, et 8 autres un peu plus tard pour 2050 : « petit » programme de 140 MM€ supplémentaires.

Il faudra donc mettre sur la table 172 MM€ d’ici 2035 et 80 de plus pour atteindre 2050… tout ça pour avoir environ 300 Twh (si l’on est optimiste) en 2035, puis au maximum 140 Twh pour les 14 EPR2 vers 2050, les machines actuelles devant être arrêtées en moyenne vers 2045… Ce qui fait quand même une petite dizaine de milliards d’euros par an pour couvrir même pas 10 % de nos besoins énergétiques ! A pleurer !

 

De plus, l’Etat français, actionnaire à 100 % d’une EDF endettée à hauteur de 64 MM€, ne sait pas comment financer de tels investissements colossaux : démembrement d’EDF (projet Hercule), mobilisation du livret A, dette publique… ?

 

Pour simplifier la question, l’UE a décidé que les voitures devront être électrifiées en 2035. En France, le parc de 40 millions de véhicules consomme annuellement environ 250 Twh, c’est-à-dire quasiment la production du nucléaire : ou alors le renouvelable absorbera ou ce sera la fin de la voiture individuelle… mais pour l’instant, on y va…

 

A ces contraintes, on peut ajouter celles concernant le refroidissement des condenseurs de turbine ou des réacteurs à l’arrêt à chaud. Nos 56 tranches occupent 18 sites en France : 4 en bord de mer (12 réacteurs) et 14 le long des fleuves ou rivières. Sur les 44 tranches concernées, 30 prélèvent l’eau en amont pour la recracher plus chaude (maxi 28° en été et 30° en hiver) en aval. Les 14 autres sont équipées d’aéroréfrigérants (grandes tours de ventilation) qui nécessitent un apport important d’eau pour compenser la vapeur perdue dans le panache. Dans tous les cas, la diminution des débits de nos rivières et le réchauffement climatique provoqueront une limitation drastique du fonctionnement de nos centrales et risqueront fort d’en réduire l’usage.

 

Le nucléaire tel qu’annoncé par Macron

 n’est pas non plus une solution d’avenir pour la France.

 

2 - Quelques poncifs dont les Français feraient mieux de se débarrasser 

 

Nucléaire = indépendance énergétique. Nous importons l’intégralité du carburant (uranium 235) de l’étranger (Niger, Kazakhstan, Ouzbékistan, Australie… pour l’uranium à enrichir et, même, actuellement, de Russie pour l’uranium enrichi par Rosatom.

 

Electricité nucléaire, la moins chère de toutes. Le coût de revient du Mwh (méga watt heures = mille kilo watt heures) pour EdF est de 46€ (prix de vente au consommateur environ 200€) avec des réacteurs dont le coût est complètement amorti. Par contre, le coût de revient contractuel du même Mwh à Hinkley Point en Angleterre, produit par les EPR en cours de construction, est de 115€ le Mwh. Alors qu’on peut compter sur environ 55€ le Mwh photovoltaïque (chinois) et entre 70 et 85 € pour celui de l’éolien.

 

Nucléaire = technologie de pointe. Il est vrai que cette technologie fait appel à nombre de domaines pointus, mais à cause des lois de Carnot et de la basse température de la vapeur d’admission dans la turbine, le rendement des tranches nucléaires est seulement d’un peu moins de 30 %, ce qui n’est pas glorieux.

 

Nucléaire = énergie sûre. Depuis Fukushima, l’ASN n’écarte plus le risque d’accident nucléaire grave, même s’il est peu probable, espérons-le.

 

La question des déchets est résolue. Le stockage des déchets peu radioactifs à vie courte est énorme en volume, celui par enfouissement de haute activité à vie longue n’est probablement pas pérenne. En tout cas, c’est une pollution que l’on ne sait pas régler définitivement.

 

C’est une énergie nucléaire civile. Oui, mais chaque tranche de 1 000 w produit annuellement 200 kg de plutonium, utilisé dans les bombes atomiques, raison pour laquelle cette technologie à uranium naturel enrichi a été choisie, il y a 70 ans.

 

La technologie à eau pressurisée et uranium enrichi, en vigueur « chez nous », est le nec plus ultra. Il existe tout un tas d’autres solutions pour maîtriser la réaction en chaîne avec beaucoup moins d’inconvénients, comme les réacteurs à sel fondu, que certains pays sont en train de développer pour garder l’avantage de l’énorme densité d’énergie de la réaction nucléaire. Mais c’est une autre histoire nécessitant des décideurs ayant une autre vista !!

 

Conclusion

 

Le nucléaire, tel qu’on le connaît, comme source d’énergie électrique,

 n’est nulle part une solution pour l’avenir, n’en déplaise à JM Jancovici, aux lobbys du nucléaire et aux politiques qu’ils ne cessent d’influencer. Je ne sais plus qui a dit : le nucléaire, c’est la façon la plus dangereuse, et la plus onéreuse, de faire bouillir de l’eau !

 

Alors que le gouvernement dispose d’un Haut-Commissaire au Plan, d’une 1ère Ministre, coordinatrice de deux ministres chargés des planifications énergétique et écologique, aucune publicité n’est faite sur le résultat de ces plans, quant à l’évolution des sources d’énergies, forcément électriques d’ici 2050. A croire que rien n’a été fait, sauf à commencer à mettre en place la fausse solution du nucléaire.

 

Jean Restlé, le 8 juin 2023

ci-devant responsable de la qualité de turbines à vapeur Alsthom, ayant modestement participé à la construction de notre « cher » programme électronucléaire.