Union
Européenne
fragmentée
et assujettie
(éditorial PES n° 94)
Depuis le rejet, en 2005, du Traité constitutionnel européen, et ce malgré son approbation par le traité de Lisbonne en 2007, la France et l’Europe se manifestent par une absence de projet susceptible de favoriser l’émergence d’un continent indépendant des autres puissances mondiales.
Les mythes, sur lesquels s’est forgée l’Europe de la paix et du progrès, se
sont effondrés. Désormais, il apparaît clairement, avec les politiques
néolibérales, que l’UE est un continent marqué par les inégalités. En outre, les
guerres en Yougoslavie, en Ukraine, démontrent que cette union est un terrain de conflit au sein de cet
espace divisé.
Son extension avait déjà été marquée par la
volonté étatsunienne d’opposer la « vieille » Europe à la « nouvelle »
Europe, celle de l’Est. L’élargissement,
prévu ou évoqué, à l’Albanie, à la Bosnie, à la Moldavie, à l’Ukraine, à la
Serbie, voire à la Géorgie, prouve, s’il en est besoin, que les classes
dirigeantes, en s’en remettant au « tout marché », ont un
comportement irrationnel qui nie tout projet européen partagé.
Les révolutions « orange » suscitées par l’impérialisme américain ont accéléré
ce processus. Les révélations de Snowden ont dénoncé l’existence systématique
de surveillance, l’espionnage et le pillage de l’industrie européenne. Elles
n’ont guère provoqué d’opposition à la réalité de ce système.
Cet
effritement de l’Europe s’est même converti en assujettissement à
l’occasion de l’invasion russe de l’Ukraine. La militarisation des budgets
européens en fait foi. Et la surenchère de la
Grande-Bretagne va dans le même sens.
Qui plus est, la confrontation entre la Chine et
les Etats-Unis est révélatrice : ces derniers tentent désormais de casser
les relations économiques entre la Chine et l’UE. Borrel, vice-président de la
commission européenne, demande à l’Europe de patrouiller militairement dans le
détroit entre la Chine et Taïwan.
Cet assujettissement
à l’oligarchie américaine semble signer la dérive irrémédiable vers la fin de
la démocratie proclamée. Mais que peuvent promettre les USA qui voient leur
mortalité infantile s’accentuer alors que la Russie et la Chine bénéficient
d’une baisse de cet indicateur ? Que peuvent-ils prétendre alors que
l’espérance de vie se réduit dans les sociétés néolibérales ? Les Etats-Unis et le
Royaume Uni, décrochent, en effet, depuis 1981, période qui commence avec
l’avènement de Reagan, qui a permis la destruction de systèmes de santé et
l’augmentation massive de la pauvreté.
Bref, les Européens se soumettent au système étatsunien
qui ne sait plus lui-même où il va. La BCE, en suivant la FED, a de fait
détruit les finances publiques des Etats européens. Quant aux élites
européennes, elles se comportent tels des somnambules, ne sachant que faire
face aux divisions et aux colères qu’elles suscitent.
Leur seule porte de sortie semble être celle qui
consiste à s’appuyer sur les classes moyennes aisées et les médias complaisants
pour promouvoir le nationalisme et la
xénophobie.
Quant à la « Gauche », elle semble
impuissante face aux révoltes qui couvent et à la restriction des libertés qui
les accompagne. Certaines familles politiques en sont encore, comme les Verts, à prôner un fédéralisme
européen, vide de toute perspective.
GD, le 31.06.2023