Edito du PES
n° 55
Macron
peut-il durer ?
Si
la fraction la plus néolibérale de la
classe dominante a cru trouver, face à la décrépitude des leaders de droite et
de « gauche », son Rastignac, elle doute. Celui qu’elle a couvé dans
les bureaux de la banque Rothschild, lui qui, sans vergogne, a évincé le « mollasson »
Hollande, lui se présentant comme le « maître des horloges » imposant
les régressions sociales jugées indispensables aux flibustiers de la finance,
dut, précipitamment descendre des cieux jupitériens pour mater la révolte d’en
bas des Gilets Jaunes.
Il
faut considérer qu’il a, momentanément, gagné la bataille de la rue et des
ronds-points : la furie de la caste régnante, déployant sa horde
policière, a démontré, à ceux qui n’osent y croire, de quoi elle est capable
lorsque l’on se dresse contre ses intérêts et ses privilèges.
Cette
campagne d’annihilation de la mobilisation populaire a pris la forme d’un
déchaînement disproportionné de violences policières. Partout, l’ordre doit
régner, y compris pour faire cesser la musique à coups de gaz lacrymogènes et
de bastons, et ce, dans un lieu dépourvu de riverains et au bord de la Loire.
Steeve en est mort, noyé. De même, les 45 décrocheurs de portrait du président
(ce cadre à 8€ pièce) sont effarés. Eux qui entendaient protester contre
l’imposture écologique de Macron, eux perquisitionnés, poursuivis, sont sidérés
d’être traduits devant la 16ème chambre du TGI de Paris, chargée des
affaires de terrorisme (1). Tout comme Marion Esnault, ils risquent jusqu’à 5
ans de prison et 75 000 € d’amende. Les sbires de Macron, ces parquetiers,
disposent d’un arsenal juridique à la hauteur de leurs propres fantasmes
répressifs. De cette violence policière et institutionnelle, les fêtards, tout
comme les vaillants écolos, s’en souviendront.
Macron
sait que s’il veut durer, il lui faut non seulement garder son frêle électorat
mais également neutraliser, voire gagner les
cœurs révulsés. Les hypocrites homélies, les effets de manches du grand
débat vont se répéter pour tenter de prouver qu’il agit contre le peuple pour
son bien (CETA, casse du droit du travail, privatisations, RUA, restriction des
droits des chômeurs…). Tous les « éléments de langage », les arguties
seront fournis à ses serviteurs à gages. Il pourra compter sur les éditocrates,
ces bonimenteurs du néolibéralisme. Toutes ces mises en scène démagogiques ne
sont pas suffisantes pour assurer une assise territoriale au macronisme
hors-sol. Dans la perspective des élections municipales de mars 2020, les
débauchages, les fripouilleries politiciennes à l’aide de stratagèmes et
d’intrigues mesquines, prennent déjà un tour croquignolesque de lutte des
places.
Macron,
son fossile ministériel extrait des rangs juppéistes, E. Philippe, son
spadassin sans épaulettes qui hystérise le pays, Castaner, savent qu’il leur
faut traquer l’opinion capable de
coups de sang impromptus. D’où la mission de recruter une armée de mouchards
(11 000) pour suppléer les Renseignements Territoriaux jugés défaillants.
A ce prix, il espère durer en agitant le spectre du lepénisme, en comptant sur
l’abstention réprobatrice ou résignée, sur le désaveu persistant des appareils
de « gauche » et de droite. Il compte sur le sacre électoral de
nombre de ses godillots pour légitimement pouvoir, demain, opposer le pays
légal au pays réel et soumettre les mécontents, désobéissants, révoltés,
insoumis…
Pour qu’il n’en soit pas ainsi, les travailleurs, les retraités, les Gilets jaunes…
doivent prouver par leur organisation méthodique à la base, leurs explications
sur la nature des régressions imposées, leurs actions, que le macronisme n’est
qu’une chimère des plus illusoires. Les syndicalistes, les associations ne
doivent plus se prêter à la comédie de la conciliation des classes, aux
pseudo-concertations. Ces méthodes deviennent, à force de se répéter, soit
répugnantes, soit désespérantes.
Ce
dont le pays a besoin, c’est de démocratie surgie d’en bas, et non de trompeuses
compétitions électoralistes de gens bien en cour, démontrant ainsi que la forme
parlementaire du régime capitaliste n’est que l’appendice de l’exécutif, ce
sacro-saint pouvoir d’Etat aux mains des classes dominantes.
A
l’heure où la guerre commerciale s’envenime entre les Etats-Unis et la Chine,
au moment même où le néolibéralisme fait faillite ouvrant la voie, dans cette
Europe fracturée, à la récession économique, dans cette conjoncture où se produisent
les révoltes des peuples, à l’époque du système capitaliste prédateur et
productiviste mettant en péril l’avenir des hommes sur la planète, il est urgent
d’agir, d’ouvrir d’autres perspectives que celles de la lutte de tous contre
tous, de la haine entre les peuples. Faire démissionner Macron, comme le proclamaient
les Gilets Jaunes, ouvrirait une première brèche salutaire permettant de faire
advenir d’autres possibles démocratiques, égalitaires et écologiques.
GD
le 11.08.2019
(1)
Denis Robert, le Media