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dimanche 30 août 2020

 

La pornographie. Du viol tarifé…

 

Au même titre que le système prostitueur, le système porno-criminel peut être considéré comme une arme d’asservissement, utilisée par les capitalistes contre les plus faibles, tant ce système légitime, encadre et perpétue des viols tarifés filmés et renforce le patriarcat.

 

Viols tarifés filmés

 

Pornographie signifie représentation,  graphê signifiant écriture, de femmes en situation de prostitution, pornê. Des sculptures aux peintures, en passant par la littérature et la chanson paillarde, elle a toujours réussi à jouer son rôle : proposer des modes opératoires aux agresseurs, donner des armes aux hommes et sidérer les femmes et les enfants confronté.es à cette violence érotisée. L’érotisation des violences masculines, commises par surprise, menace, contrainte et violence, amplifiées et diffusées par les pornographes et les voyeurs-violeurs par substitution, est un outil sûr et efficace pour maintenir le patriarcat.

 

L’association américaine Culture Reframed indique que 88% des scènes contenues dans les films pornographiques les plus regardés et téléchargés contiennent des violences masculines. L’ajout d’une caméra pour capter des scènes de violences sexuelles ne doit pas représenter  un argument validant la pornographie, mais bien une circonstance aggravante aux viols subis. Selon le Code Pénal, tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol.

 

La surprise : il suffit de rassembler des témoignages d’associations en contact avec des survivantes du système porno-criminel pour réaliser que ce n’est pas parce qu’elles signent un contrat avec les pornographes, contrat supposé réguler les violences durant les séances de viols collectifs, que les femmes et filles ne se voient pas imposer des actes non prévus par avance. Ici, certains des actes de pénétration sexuelle sont commis par surprise.

 

La menace : Intimidation, chantage, risque de subir une violence pire que la précédente ou de voir sa paie réduite et par conséquent subir une plus grande précarité, toutes ces stratégies d’agresseurs constituent des menaces qui peuvent obliger les femmes sous emprise à subir toujours plus de violence. Ici, certains des actes de pénétration sexuelle sont commis par menace.

 

La contrainte : Rappelons que la nécessité d’une caméra, d’un contrat et d’un scénario constitue structurellement des contraintes auxquelles les femmes ne peuvent se soustraire. Ensuite, être une victime de la pornographie n’est pas un métier, n’est pas une position souhaitable, désirable. Les femmes sont dans des contextes vulnérabilisants, lorsqu’elles sont en insécurité psychologique, physique ou financière, lorsqu’elles souffrent des conséquences de psycho-traumatismes antérieurs. Les raisons amenant à faire partie de ce système porno-criminel  sont la précarité, l’emprise, les mécanismes psycho-traumatiques. Ici, tous les actes de pénétration sexuelle sont commis par contrainte.

La violence : La porno-criminalité constitue un système d’impunité, de promotion et de déploiement des violences sexuelles, des hommes contre les femmes. L’étude de Bridges montre à quel point ces films contiennent et propagent des scènes de violences verbales et physiques contre les femmes (dans respectivement 48,7 et 88%). Ces violences sont aggravées par la présence d’une caméra sur les lieux des viols collectifs, la caméra étant extrêmement dissociante pour les femmes et les filles durant une situation sexualisante. Ces violences sont décuplées puisque non seulement commises par les violeurs-acteurs, mais également par tous les agresseurs impliqués sur le plateau, porno-voyeurs, sans oublier les violeurs par substitution derrière leurs écrans d’ordinateurs, ceux-ci étant à l’origine et responsables de la demande. Ici, tous les actes de pénétration sexuelle sont commis par violence.

 

Summum du capitalisme

 

Il est urgent de se positionner pour défendre les droits humains des personnes esclaves du système porno-criminel, et de s’interroger sur l’origine, la racine, des viols tarifés filmés : pourquoi ces violences existent-elles et à qui profitent-elles ?

 

L’érotisation des violences sexuelles masculines contribue par essence à une mise sous emprise globale des femmes et des filles, colonisées. Les porno-violeurs font la promotion des violences masculines, propagande donnant des armes à tous les autres agresseurs, notamment en empêchant femmes et filles de différencier excitation sexuelle issue d’un véritable désir libre et éclairé, et excitation génitale traumatique. Il nous faut aussi penser aux jeunes enfants exposé.es en moyenne dès 11 ans à la violence banalisée véhiculée par la pornographie. D’autant que ce système s’impose dans chaque recoin de nos vies quotidiennes (publicités, film, clip…), et représente près de 35% du contenu du web. Aux garçons apprenant que c’est cette violence qu’ils doivent aimer et réclamer. Aux filles, sidérées, forcées de considérer ces actes comme ceux d’une sexualité désirée. Il est impératif de décoloniser les imaginaires, de pouvoir s’écouter soi-même et de s’incarner pleinement en se libérant de tout regard extérieur rendu invasif. Et surtout, il faut penser aux femmes et filles directement victimes de ce système esclavagisantla torture des femmes rapporte...

 

28 000, c’est le nombre de personnes qui visitent un site à caractère pornographique toutes les secondes, un des 25 millions de sites présents sur la toile… En France, 8 utilisateurs d’Internet sur 10 visionnent ce genre de contenu. Aux Etats-Unis, pays producteur de 90% des contenus, les productions pornographiques rapportent 10 milliards de dollars annuellement. La France n’est pas en reste avec 200 millions d’Euros de revenus annuels. Cependant bien que cette ‘industrie’ continue d’être en pleine expansion, ces revenus ne bénéficient évidemment pas aux personnes contraintes sexuellement par celle-ci. Si certaines sources parlent d’une fourchette comprise entre 700 et 2500 euros par tournage (dont la durée varie de quelques heures à plusieurs jours), la réalité est drastiquement différente puisqu’une jeune femme témoigne d’un salaire mensuel d’à peine 500 euros pour les tournages, alors que les crimino-producteurs vont continuer à utiliser et tirer profit de son image 30 années durant.

 

Porno ‘féministe’ ?

 

Le porno ‘féministe’ est-il une solution pour lutter contre le système porno-criminel ? Le porno féministe serait une alternative aux films dominants (les ‘tubes’) et mettrait en avant le plaisir féminin et le ‘consentement’. Le but de ce format serait de briser les stéréotypes et les schémas habituels des vidéos issues des tubes (comprenant toujours les mêmes pratiques filmées dans le même ordre et centrées exclusivement sur le plaisir féminin). Le porno féministe permettrait également de représenter une diversité des corps et de la beauté, d’émanciper les femmes à travers la réappropriation du système pornographique et la mise en scène sexuelle de soi qui viendraient renverser la situation en se focalisant sur les femmes et le plaisir féminin.

 

Cette démarche peut sembler promouvoir l’égalité et l’émancipation des femmes. Les pornographes ‘féministes’ bénéficient d’une très large couverture médiatique. Tout est fait pour promouvoir un porno branché, libérateur et dans l’air du temps. Pourtant, même ses plus farouches partisanes se contredisent en mettant en évidence que le porno incite à la performance, à une course à la popularité (ou plutôt au profit ?). Elles reviennent sur le fait qu’il ne peut être vendeur que s’il est ‘mis en scène’ est donc tout sauf naturel. Toutes insistent sur le caractère indélébile de son image numérique qui, quoiqu’il arrive, laissera une trace sur le plan de la diffusion de l’intimité de la personne que sur le plan psycho-affectif. Cette ambivalence dans les discours pro-porno est révélatrice de l’arnaque que représente l’autonomisation des femmes par la représentation sexuelle de soi : la personne filmée répond de fait aux attentes des autres. De plus, son image est appropriée par des personnes tierces et par quiconque utilisant internet. La personne ‘consent’ à être photographiée ou filmée (afin de lutter contre une précarité financière et affective) mais elle n’est absolument pas dans une démarche de désir libre et éclairé. En quoi le fait de s’exposer sur Internet, donc au monde entier, est-il bon pour quoi que ce soit ? A qui profite alors le porno ‘féministe’ ? Aux proxénètes qui continuent de s’enrichir sur des actes sexuels non désirés ; aux agresseurs en demande d’images violentes. Le porno féministe étant vu essentiellement par des hommes. Même estampillé féministe, le système pornographique n’est qu’un des maillons de l’aliénation des femmes.

 

Imaginaires racistes

 

Sur la majorité des sites pornographiques, les porno-criminels classent les femmes dans des catégories profondément racistes et coloniales, et leurs attribuent des spécificités en fonction de leur origine ethnique, réelle ou supposée. Ils sexualisent les femmes sud-américaines, animalisent les femmes noires en les associant à la vie sauvage et considèrent les femmes dites ‘asiatiques’ dociles et soumises par nature. Les clichés sont ancrés dans le système pornographique, où les agresseurs réduisent les femmes à des sous-catégories censées satisfaire leur besoin, et réutilisent les codes du racisme pour les rabaisser encore plus. Les femmes maghrébines sont dénigrées, traitées de ‘beurettes’ et réduites à l’exotisme. On réalise à quel point les imaginaires racistes du quotidien sont non seulement présents mais exacerbés dans ce système, incitant les hommes à s’en servir et à les propager.

 

Croire qu’il n’y a aucune reproduction de ces schémas dans la vie réelle est un leurre, et on assiste ici à une imbrication de ces systèmes d’oppression, et donc à leur aggravation.

Mettre fin au système porno-criminel et prostitueur, c’est en finir avec des agresseurs qui se nourrissent des oppressions misogynes, racistes, classistes, et les perpétuent.

Stephanie Roussillon