Israël. Apartheid
Ce
qui se passe en Palestine-Israël n’est que l’image déformée, jusqu’à la
caricature, de l’évolution de notre monde : l’articulation chaotique
semble mêler soulèvements face à l’oppression et répressions, comme un retour
du refoulé autocratique. La rage et la résistance des « Lions » en
cage se heurtent à l’immonde qui côtoie l’ignoble.
Un nazi juif
pour conforter Netanyahou, le voyou
La
colonisation israélienne semble ne pouvoir se maintenir qu’au prix de l’appui
d’une force génocidaire contre les Palestiniens. Ben Gvir et son parti ont
obtenu 10 % des voix lors des dernières élections, permettant ainsi à
Netanyahou de maintenir au pouvoir un gouvernement de droite extrême. Ce
corrompu peut ainsi être blanchi avec la peste brune. Exagéré ?
Qui
est donc Ben Gvir, cet homme adulé par les colons ? Ce suprémaciste juif,
violent, homophobe, antidémocrate, est à la tête de la 3ème force
politique israélienne. Pour lui, n’existe que la loi divine, celle de la Torah,
du peuple élu de Dieu de retour en Judée-Samarie, une terre sans peuple (arabe)
qui doit être réoccupée entièrement par ceux de confession judaïque. Il croit à
la loi du talion, à la vengeance contre les Arabes et les non-Juifs qui violent
la terre sacrée (on se croirait en Arabie Saoudite à l’entendre !). Ce juif,
originaire du Kurdistan irakien, qui a côtoyé la Ligue de la Défense Juive, classée terroriste par les Etats-Unis, a
déjà nombre de faits d’armes à son actif. Lors de l’assassinat d’Yitzhak Rabin
signataire des accords d’Oslo (qui de fait n’ont été qu’un leurre), il s’écrie
« Nous l’avons eu ! ». Lui, ce fier à bras, qui s’est
fait dispenser du service militaire, épaulé de ses sbires, multiplie à Hébron
les provocations brutales contre les Palestiniens, l’armée israélienne toujours
à proximité pour le protéger. Considéré comme le « héros des colons »,
avec le groupe Lehava, il mène la
chasse aux couples mixtes, en Cisjordanie, à Jérusalem. Il est, en effet, un
adepte affirmé de la « guerre raciale », promoteur de l’expansion de
la « Terre sainte » et de l’expulsion des Palestiniens. Pas d’état
d’âme, aucunement, pour défendre en tant qu’avocat « les jeunes colons des
collines », ces deux adolescents fanatiques, accusés d’avoir brûlé vif un
couple palestinien et leur bébé (!).
Son
projet immédiat, s’il obtient comme il l’exige les postes de ministres de la
sécurité publique et de la Défense, est d’écraser les Palestiniens, les
soumettre pour les expulser… Pour ce réactionnaire, les LGBT doivent se cacher, plus strictement encore
que les femmes qui, elles, doivent éviter la sphère publique. Ces postures
n’empêchent pas ce nazi d’apparaître débonnaire dans des émissions de
télévision pour faire la promotion de la cuisine juive. Le vrai visage de
l’apartheid est masqué par une façade de bonhommie comme ceux des nazis
allemands qui se présentaient en tant que bons pères de famille…
Depuis
janvier, 170 Palestiniens ont été tués par les forces d’occupation. Malgré les
harcèlements, les agressions, les assassinats ciblés, les soulèvements
succèdent aux périodes d’abattement des humiliés. Que les colons et l’armée
s’en prennent aux paysans palestiniens et aux volontaires israéliens et
étrangers qui viennent les aider lors de la récolte des olives, que les
incursions militaires traquent les résistants dans les camps de réfugiés, que
l’aviation bombarde Gaza en août (48 morts dont 17 enfants), la révolte,
prétendument étouffée, resurgit. On assiste d’ailleurs, en Cisjordanie, à une intifada larvée.
Les
« Lions » se sont levés. Même si ce jeune mouvement de
résistance armé a été momentanément partiellement brisé, il a suscité une
effervescence populaire qui n’est pas prête de retomber. Cette volonté d’œuvrer
à l’union de toutes les factions palestiniennes indépendamment de leurs
directions politiques sclérosées, leur réseau clandestin s’appuyant sur
180 000 abonnés sur telegram, tout cela nourrit la colère du désespoir.
Tout
a commencé en novembre 2021, lorsqu’un commando de la police israélienne,
infiltré incognito, a procédé, à Naplouse, à 3 assassinats ciblés de jeunes
militants se réclamant des Lions ;
ce commando a agi au sein même de la zone administrée par l’Autorité
Palestinienne (selon les accords d’Oslo) en toute impunité et sans protestation
de la part de Mahmoud Abbas ! De mars à mai, les Lions ont riposté : 18 morts en Israël.
Depuis,
la répression sioniste est féroce : raids militaires contre la population civile
en Cisjordanie, ratissage dans le camp de Jénine pendant 4 jours, là où vivent
60 000 Palestiniens ; du 4 au 12 octobre, blocus de Naplouse
(200 000 habitants), surveillance par drones armés… Les Lions ont appelé à
la solidarité, à la grève, puis l’autorité palestinienne de collaboration a
arrêté un combattant à Naplouse. Les « Lions ont rugi »
affrontant à balles réelles les forces de sécurité agissant au profit d’Israël.
Dénonçant cette chasse au mouvement de résistance, ils ont appelé à monter, la
nuit, sur les toits pour chanter leur soutien aux Lions. Ces mots d’ordre ont été largement suivis de Jérusalem à
Ramallah, de Jéricho à Bethléem.
Lorsque
le leader Wadih AliHouh et ses 4 camarades ont été tués par les forces
d’occupation, des milliers de Palestiniens leur ont rendu hommage. Malgré le vol noir des corbeaux sur la plaine
du Jourdain, d’autres Lions sortiront
de l’ombre.
Et
si ce n’est déjà le cas, l’Autorité Palestinienne apparaîtra pour ce qu’elle
est réellement, une « putain respectueuse » (1) qui fait tout pour
sauver l’assassin sioniste et finit par condamner le peuple palestinien. Le ver
était dans le fruit depuis les accords d’Oslo qui devaient prétendument
garantir la coexistence de deux Etats. En fait, depuis l’origine, le sionisme,
même dit de gauche, était à l’image de l’Union Générale des Israélites de
France qui a facilité les basses œuvres des nazis et de la police de Vichy (2).
Exagération que cette comparaison ? Mieux vaudrait-il s’en tenir aux
propos d’Elie Barnavi. Mais que dit ce Juif, né à Bucarest en Roumanie en 1966,
émigré en Israël en 1976, ancien ambassadeur à Paris : « Nous allons vers l’abîme de l’apartheid et
la guerre civile ethnique et religieuse, vers des lois de plus en plus
liberticides ». « Nous nous
sommes laissé contaminer par le messianisme irrationnel ». (3)
Y a-t-il une
issue pour sortir de ce cauchemar ?
Ce
qui se passe en Israël est de fait, vécu, pour ce qui reste de la gauche
israélienne, comme un péril existentiel. Il y a les nostalgiques des kibboutz. Ils sont âgés et leurs enfants
dépolitisés, individualistes, ne rêvent que de réussite financière dans la
High-tech. Le parti travailliste,
marginalisé, néolibéral, centriste, ne compte que 4 députés sur les 120 de la
Knesset. Le Meretz, fondé en 1992, est ce qui reste, à l’état marginal de
la gauche laïque. Quant aux partis arabes israéliens, malgré
l’importance de leur électorat (20 % de la population), ils sont divisés. Il
semble néanmoins que, face à la droite extrême, aiguillonnée par les suprémacistes
d’extrême droite, ces partis marginaux aient décidé de se rencontrer pour
contrer la menace d’un apartheid encore plus prononcé.
Reste
le fossé des divisions à franchir : reconnaître qu’il n’y a pas de
différences entre les colonies bâties durant les premières années du sionisme,
lors de la guerre d’expulsion de 1948 (la Nakba), et celles nées après la
guerre de 1967, semble pour l’heure insurmontable, non seulement pour les
forces palestiniennes de résistance mais également pour les partis arabes. En
outre, les Palestiniens eux-mêmes, dans leur lutte contre
l’occupation-colonisation, sont encore loin d’avoir rejeté l’Autorité
Palestinienne et les idéologies religieuses qui les entravent. Pourtant, à
l’origine de l’Organisation de la Libération de la Palestine (OLP), l’objectif
n’était-il pas la création d’une Palestine laïque et démocratique, regroupant
les Palestiniens et les populations se réclamant du judaïsme ?
La
sortie du cauchemar dépend, de fait, non seulement de la conjoncture interne
(inflation, vie chère, inégalités…) mais surtout de l’évolution des rapports de
forces mondiaux. Si l’Iran des mollahs est affaibli, voire renversé, le
bellicisme de « l’Etat juif » ne peut plus s’exercer de la même
manière. De même, le rapprochement de l’Etat sioniste avec les pays du Golfe,
Emirats Arabes Unis aujourd’hui, demain avec l’Arabie Saoudite, réduit à la
portion congrue le recours au sunnisme afin de « justifier » la lutte
contre l’occupation…
Ces
bouleversements positifs sont en apparence encore loin de pouvoir se
matérialiser mais… les soubresauts historiques peuvent toujours nous
surprendre.
Gérard
Deneux, le 30.11.2022
(1)
La putain respectueuse est une pièce de théâtre de Jean-Paul Sartre. On
pourrait qualifier l’Union européenne de la même manière, elle qui jette un
voile pudique sur les exactions sionistes… tout en (re)finançant les
destructions-reconstructions perpétrées lors de bombardements par l’armée
israélienne, en particulier dans la bande de Gaza
(2)
voir dans la
rubrique Nous avons lu : Des Juifs dans la collaboration de
Maurice Rajsfus
(3)
lire à ce sujet
les livres de Shlomo Sand, en particulier Comment
le peuple juif fut inventé (Fayard), Comment
la terre d’Israël fut inventée. De la Terre Sainte à la mère patrie
(Flammarion)
Pour
en savoir plus,
-
sur la « société »
palestinienne, les inégalités et la caste bourgeoise entretenue Ramallah Dream de Benjamin Barthe (la
Découverte),
-
sur l’histoire du
peuple palestinien, A la recherche de la Palestine. Au-delà du mirage d’Oslo, de Julien
Salingue (Cygne)