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Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


vendredi 3 novembre 2023

 

Gaza. L’enfer.

 

Le conflit israélo-palestinien semblait être en sommeil. Les Gazaouis survivaient dans cette prison à ciel ouvert, la Cisjordanie s’accommodait de la colonisation… Allait-on assister à l’avènement d’un nouveau Moyen-Orient ? D’autant qu’une guerre en chassant une autre, celle de l’Ukraine emplissait les écrans pour disparaître aussitôt depuis le 7 octobre avec l’opération Déluge Al-Aqsa. Le Hamas et sa brigade armée ont rappelé au monde que la cause palestinienne n’est pas morte. Les assassinats odieux qu’ils ont organisés le 7 octobre contre des civils israéliens sont inacceptables et condamnables. A peine perpétrés, voici qu’en France enflaient des polémiques sans fin, servant de calculs politiciens nauséabonds : acte terroriste ou crime de guerre, accusant ceux qui ne qualifient pas le Hamas de terroriste, d’être antisémites. La cause palestinienne ne risque-t-elle pas d’être ensevelie dans ce fracas ? Les Palestiniens pourront-ils, un jour, sortir de l’impasse qu’ils n’ont pas choisie, en 1948 puis en 1967 ? Telles sont les questions que nous nous posons au-delà des horreurs que subissent les familles israéliennes et palestiniennes, ces dernières étant prises au piège dans la bande de Gaza ou soumises aux violences perpétrées par les colons en Cisjordanie.  

 

1 - Comment en est-on arrivé là ?

 

Les images du 7 octobre des massacres de jeunes, de vieillards, d’hommes, de femmes, d’enfants, des otages violentés appellent à la condamnation sans ambiguïté de l’attaque menée par le Hamas. Pour nous Occidentaux, c’est facile. Pour les Palestiniens qui subissent quotidiennement l’occupation, c’est sans doute difficile.

 

Pour les Palestiniens, ce sont les violences des colons (armés par l’Etat d’Israël) organisant de véritables pogroms dans les villages de Cisjordanie (près de 200 morts depuis le 1er janvier) sous le regard protecteur de l’armée. Ce sont les humiliations quotidiennes aux checkpoints, les provocations répétées sur l’esplanade des Mosquées ; c’est l’enfermement dans la bande de Gaza de 2.3 millions de Gazaouis sur 365 km2 (40 kms de long sur entre 6 et 12 kms de large), soit plus de 6 000 hab/km2 (1), sous blocus depuis 17 ans ; c’est le maintien en prison de 4 900 prisonniers politiques. 11 millions de Palestiniens aspirent à l’autodétermination, dont une partie (5.8 millions) est en exil dans les camps de réfugiés au Proche-Orient et l’autre sous la domination d’une puissance occupante. C’est toute une jeunesse privée d’avenir. Pour les Palestiniens, la guerre n’a jamais cessé ni leur lutte pour que la Palestine ne disparaisse pas, encore plus aujourd’hui face au projet de « nouveau Moyen-Orient » de Netanyahou, dans lequel a disparu, en tant que territoire palestinien, la Cisjordanie et Gaza. Satisfait, il a présenté ce plan à l’ONU, fort d’avoir obtenu la reconnaissance de l’Etat d’Israël par des alliés de poids,  Emirats Arabes Unis, Bahreïn, Maroc, Soudan, tous signataires, en 2020 des accords d’Abraham, sous le patronage de Trump.  

 

Les Palestiniens n’oublient pas les luttes et les échecs : la 1ère intifada (1987) puis l’espoir des accords à Oslo en 1993, signés par Arafat et Rabin, affirmant le principe d’autonomie palestinienne, vite torpillés 2 ans plus tard par Oslo 2 divisant la Cisjordanie en trois zones à souveraineté partagée avec Israël. Ils n’oublient pas l’échec du sommet de Camp David en 2000 réunissant Clinton, Yasser Arafat et Ehoud Barak, suivi de la 2ème intifada (2000), après la visite provocatrice de Sharon sur l’esplanade des Mosquées, ni la construction du mur d’apartheid israélien. Les Gazaouis n’oublient pas les offensives successives à Gaza, « Plomb durci » en 2008 (plus de 1 400 Palestiniens dont 410 enfants tués, « Pilier de défense » en 2012 (160 morts palestiniens et 6 Israéliens), « Bordure protectrice » en 2014  (plus de 2 200 Palestiniens  (dont 73 % de civils) tués ainsi que 72 Israéliens. Ils n’oublient pas non plus la déclaration de Trump, le 6 décembre 2017, reconnaissant Jérusalem comme capitale d’Israël et prétendant y transférer l’ambassade US.

 

Aussitôt après l’attaque du Hamas, les images du déferlement des violences de l’armée israélienne nous sont parvenues : les bombes (dont certaines au phosphore blanc) larguées sur Gaza déciment les populations ; les hôpitaux sont bombardés ; électricité, eau sont coupées ; les médecins opèrent sans anesthésiant, à la lueur de leurs téléphones portables… L’enfer absolu ! Le corridor humanitaire n’est mis en place que 20 jours plus tard ne laissant passer les camions qu’au compte-gouttes par la porte de Rafah, environ 17 par jour alors qu’il en faudrait 10 fois plus.

 

« Nous avons le droit, et même le devoir », de comprendre, sans avoir à prouver que l’on n’est pas antisémites. Car la guerre actuelle n’est pas une guerre d’Israël contre le Hamas (comme on l’entend dans les médias). Le conflit d’aujourd’hui ne date pas de 1987 (création du Hamas). Il est la prolongation de la guerre de l’Etat d’Israël contre le peuple palestinien. Certains qualifient le 7 octobre de « 11 septembre israélien ». « Cela n’éclaire en rien les motivations des assaillants car le Hamas ne relève pas du djihadisme international comme Al Qaida ou Daech. C’est un mouvement à la fois nationaliste et islamiste, prêt à mener une politique du pire pour parvenir à « l’établissement d’un Etat palestinien souverain et indépendant dans les frontières de 1967 » comme stipulé dans sa charte modifiée en 2017 (2).

 

Le Hamas, issu des Frères musulmans jordaniens et égyptiens, est un mouvement politique émanant du désespoir de toute une population. Il arrive au pouvoir par des élections, sans majorité absolue car nombre de Gazaouis sont opposés à son projet politique. Mais s’il est arrivé là,  c’est essentiellement à cause de l‘occupant, Israël, qui a combattu les organisations laïques comme l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine), dans sa stratégie de maintenir l’état de guerre et de ne pas avoir de partenaires pour la paix. Le quotidien Haaretz rappelle une intervention de Netanyahou en ce sens, de mars 2019 à la Knesset « Quiconque veut empêcher l’établissement d’un Etat palestinien doit renforcer le soutien au Hamas et lui transférer de l’argent. C’est une partie de notre stratégie (3) ». La division entre les organisations palestiniennes, la corruption d’une partie des membres dirigeants de l’Autorité Palestinienne, devenue sous-traitante de la sécurité israélienne, laissent les mains libres au gouvernement d’extrême droite de Netanyahou. Son projet : faire disparaître la Palestine, en  annexant la Cisjordanie où vivent déjà 740 000 colons (ils étaient 115 000 en 1993) et en « expulsant » les Gazaouis au Sinaï. Certains évoquent une deuxième Nakba ?

 

Pour les Palestiniens, des lueurs d’espoir se sont éteintes aussi vite qu’apparues et les résolutions de l’ONU, pour une grande part jamais appliquées, n’ont jamais fait l’objet d’aucune sanction (de type blocus, embargo…), l’ami étatsunien y veille. Le 23 décembre 2016, le conseil de sécurité de l’ONU vote la résolution 2334 condamnant la colonisation dans les territoires occupés (pour une fois,  les USA n’ont pas fait usage de leur droit de veto). Un an plus tard, Trump est au pouvoir et tout bascule (4) : reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël, fermeture du consulat des Etats-Unis à Jérusalem Est, réduction drastique de l’aide étatsunienne de l’UNRWA (agence des Nations Unies chargée des réfugiés palestiniens au Proche-Orient). En janvier 2020, un plan de paix apparaît : « tout, tout de suite, pour les Israéliens et quelque chose, plus tard, peut-être, pour les Palestiniens ». La clé de voute est un plan de normalisation entre des Etats arabes et Israël. Les accords d’Abraham sont signés en août 2020 par les Emirats arabes unis, le Bahreïn,  le Maroc et le Soudan, l’Egypte a déjà signé un traité de paix en 1979 et la Jordanie en 1994. Restait à convaincre l’Arabie Saoudite… mais le 7 octobre risque de changer la donne.    

 

C’est dans ce contexte global qu’intervient l’attaque meurtrière du Hamas qu’Amnesty International qualifie de « crimes de guerre » mais que les médias qualifient  immédiatement de « terroristes ». Le traitement médiatique ne sera pas le même, le lendemain, lorsque des milliers de civils palestiniens subissent les représailles israéliennes qui exercent leur « droit à la défense ».

Pourquoi croit-on Amnesty international lorsqu’elle dit que le Hamas commet des crimes de guerre mais pas quand elle qualifie la société israélienne de régime d’apartheid et de crimes contre l’humanité, ce que l’Etat israélien fait subir quotidiennement aux Palestiniens ? (3).

 

2 - La cause palestinienne ne risque-elle pas d’être ensevelie ?

 

Jusqu’au 7 octobre, la marginalisation de la Palestine semblait avoir réussi ; les derniers pourparlers remontant aux négociations menées par John Kerry en 2014 et la dernière initiative du Conseil de sécurité de décembre 2016 étant restée, comme tant d’autres, sans effet et sans sanctions. Elle réaffirmait pourtant que « l’acquisition de territoires par la force est inadmissible », que « le statu quo n’est pas viable », que « la création de colonies par Israël constitue une violation flagrante du droit international » et « qu’Israël, puissance occupante, est tenue de respecter ses obligations découlant de la 4ème convention de Genève ».

 

Le 7 octobre, voilà que réapparaît la « question palestinienne » sur la scène internationale. Cela peut-il la servir ou la desservir ? Le Hamas a engagé Israël dans une fuite en avant dangereuse : piéger l’armée israélienne en la faisant entrer dans Gaza où les combattants du Hamas l’attendent, disséminés dans les tunnels, avec des otages en garantie d’échanges. Il tente de provoquer Israël afin que son armée commette des crimes de guerre d’une ampleur inédite, et ainsi, retourne l’opinion publique mondiale. En 20 jours, 12 000 tonnes de bombes ont été déversées sur Gaza, l’équivalent de la puissance explosive de la bombe atomique d’Hiroshima (5)! Au 28 octobre : plus de 8 000 morts dont 3 000 enfants tués, des milliers handicapés à vie, des centaines de milliers gravement traumatisés. Le ministre de la Défense israélien a osé le dire : « Nous combattons des animaux humains et nous agissons en conséquence ». Cela n’a pas ému Mme Braun-Pivet, présidente de l’assemblée nationale, ni MM. Ciotti et Meyer Habib, affirmant qu’Israël exerce son « droit à la défense ». Ces actes doivent-ils être nommés « terroristes », « crimes de guerre » ou « génocidaires » ? Peu nombreux sont ceux qui osent les dénoncer !

 

« La cause palestinienne risque d’être ensevelie pour longtemps sous les cendres d’actes effroyables » (4). Israël bénéficie du soutien international, conduit par les Etats-Unis, son fidèle allié stratégique, face au « monde arabe ». Depuis le retrait de l’Etat d’Israël de Gaza (2005), sa stratégie est l’endiguement, par le bi       ais du blocus (2007) ayant pour conséquence le renforcement du pouvoir du Hamas. 16 ans plus tard, selon Netanyahou, il faut écraser les Gazaouis ou les renvoyer en Egypte.

 

Les crimes de guerre sont en cours dans la bande de Gaza. Quelles réactions ?

 

Le président du Conseil européen, Charles Michel, a affirmé le « droit d’Israël à se défendre en conformité avec le droit international… » et l’on a pu voir Mme Von der Leyen (sans mandat) courir au secours de Netanyahou pour lui affirmer) le soutien de l’UE.  Les positions des Etats ont fait apparaître des lignes de fracture entre le bloc occidental (Etats-Unis et Union européenne) et les pays du Sud global (pour un grand nombre membres des BRICS). Les Occidentaux ont condamné le Hamas et soutenu les autorités israéliennes dans leur riposte : Etats-Unis, France, Allemagne, Royaume Uni et Italie ont publié un communiqué commun sur ce positionnement. Ce positionnement a ensuite été partagé par l’Inde, l’Argentine et les Emirats Arabes Unis. En revanche, l’Espagne de Sanchez vient d’annoncer son soutien à la Palestine. Occupant la présidence tournante de l’UE jusqu’à décembre, elle fait figure d’exception en exhortant la commission européenne à « ne pas se plier aux diktats d’Israël qui soumet le peuple palestinien à l’apartheid ».  Le Soudan soutient la Palestine et l’Afrique du Sud (compagnon de route de la Palestine) a déclaré que « cette nouvelle conflagration est la conséquence d’une occupation et d’une colonisation illégale continue de la Palestine » et a appelé à un cessez-le-feu immédiat, positionnement adopté par l’Union Africaine.  Pékin a usé de mille précautions, se disant préoccupé par l’escalade de la tension sans désigner de responsable tout en appelant « toutes les parties concernées à rester calmes et à faire preuve de retenue, à cesser immédiatement le feu et à protéger les civils ». Poutine va recevoir le Hamas prochainement puis un représentant d’Israël. Erdogan a, lui aussi, réagi en termes mesurés d’autant qu’il a rétabli les relations diplomatiques avec Israël en 2022. L’Egypte a fait de même, craignant, tout comme le Liban, un conflit régional. L’Iran ne veut pas d’escalade du conflit mais si l’armée israélienne entre dans Gaza pour détruire le Hamas, il se verrait contraint à réagir avec le Hezbollah libanais. Les pays arabes soutenant la Palestine se sont indignés et ont déclaré que « tout autre pays (qu’Israël) serait condamné « d’affamer délibérément une population entière, la privant de nourriture, d’eau et de produits de première nécessité ».

 

Pendant ce temps, le plus gros porte-avions US croise au large du Liban ainsi que l’USS Dwight Eisenhower, avec une escadre d’un croiseur, de 4 destroyers, de plusieurs sous-marins nucléaires, comme un message aux pays (Iran, Syrie) ou au Hezbollah qui seraient tentés d’ouvrir un nouveau front au  nord.

 

Le secrétaire général des Nations Unies s’est lancé dans un exercice d’équilibre « Rien ne peut justifier l’attaque condamnable du Hamas » et ajoutait « ces attaques odieuses ne peuvent en aucun cas justifier la punition collective du peuple palestinien ». Quand on sait le peu de poids de l’ONU…* Toutefois, le soutien à Israël n’est pas total et l’on peut espérer que la colère des populations qui s’est déjà manifestée contre Israël, en Tunisie, au Maroc, en Jordanie, en Egypte, au Liban et même en Iran et en Turquie, mais aussi aux Etats-Unis, en Cisjordanie, à Liverpool et à Londres, en Allemagne et en France, fasse craindre aux Etats un embrasement dans leurs pays respectifs, ce qu’ils redoutent depuis « les printemps arabes ».        

 

Macron, à peine « expulsé » de l’Afrique de l’ouest, revient sur le terrain du Proche-Orient. Pas fute-fute, Il propose d’élargir la coalition internationale contre Daech à la lutte contre le Hamas. Les pays arabes sont très mécontents : comparer le Hamas à des promoteurs du djihad international ! Encore une belle bourde… N’est pas diplomate qui veut ! Par contre, pas d’exigence de cessez-le-feu immédiat, Macron évoque une « trêve humanitaire »…Il soutient ouvertement le projet politique du gouvernement fasciste et suprématiste juif qui veut annexer la Cisjordanie et vider Gaza de sa population. Et pour que les mécontents ne manifestent pas dans la rue, il envoie son rottweiler Darmanin, tout frétillant d’interdire les manifestations dites « pro-palestiniennes », au prétexte qu’elles soutiennent une organisation terroriste et qu’elles sont antisémites !

 

Libérer la Palestine et permettre sa reconnaissance internationale. Est-ce encore possible ?   

 

3 - Sortir de l’impasse, est-ce possible ?

 

A court terme, Netanyahou est face à un dilemme : bombarder Gaza sacrifierait les otages. Entreprendre une offensive terrestre est hasardeux mais il prépare le terrain par des incursions de chars dans la bande de Gaza et cela semble imminent. Pourquoi l’Etat israélien ne continuerait-il pas sa politique coloniale puisque depuis 56 ans, il viole allègrement les résolutions de l’ONU sans aucune sanction à son encontre  et qu’il intensifie sa politique d’apartheid ? Cela va durer encore. L’attaque du Hamas peut-elle changer la donne ?

 

Il rêve d’anéantir le Hamas, qu’hier il a soutenu. Pas si simple car le Hamas n’est pas qu’une armée, il est le gouvernement de Gaza avec des milliers de personnes salariées vivant de salaires publics. Cette « mauvaise herbe » ne peut pas s’arracher comme ça.

 

Autre obstacle. Le conflit provoque déjà  de l’agitation sur les cours de l’or noir et du gaz. L’Iran produit 3 millions de barils/jour (malgré les sanctions US) dont une partie est destinée à la Chine. Si un 2ème front s’ouvre au nord, il y aura un impact majeur sur le marché pétrolier d’autant que les exportations iraniennes ont augmenté. Ces livraisons en hausse ont permis d’atténuer la baisse des quotas de l’Arabie Saoudite et de la Russie. Les barils iraniens ont donc fait les affaires… des USA. Par ailleurs, Israël a fermé provisoirement un champ gazier. Sur une vingtaine de milliards de m3 produits en 2022 Israël en a exporté la moitié vers l’Egypte et la Jordanie : moins de gaz vers ces pays signifie moins d’exportation de GNL d’Egypte, donc moins de GNL pour le reste du monde avec comme conséquence, l’augmentation des cours du gaz.

 

Netanyahou pensait avoir gagné la « sympathie » des pays arabes avec les accords d’Abraham, reconnaissant Israël et éliminant, de fait, la présence des Palestiniens en Cisjordanie. Mais ils ne sont pas des accords de paix, à la différence de ceux que Riyad avait proposés en 2022, à savoir une normalisation qui comprenait le retrait d’Israël des territoires palestiniens occupés, autrement dit l’application de la résolution 242 de l’ONU restée lettre morte depuis 1967. L’Arabie Saoudite qui envisageait de rejoindre cette « coalition de l’oubli » de la Palestine a suspendu les pourparlers après le 7 octobre. « On ne peut s’empêcher de le dire : ce qui aurait dû être imposé par un plan international c’est le Hamas qui l’a imposé » (3).

 

Quant à la solution à deux Etats, que répètent mécaniquement Macron et Biden, cela semble impossible si on laisse faire la colonisation. Aucun dirigeant palestinien ne saurait accepter encore plus de rétrécissement du territoire de la Palestine jusqu’à disparition totale.

 

Il ne peut y avoir extinction du conflit sans une solution respectueuse des droits des Palestiniens. Les grandes puissances peuvent-elles comprendre que la cause palestinienne ne se laissera pas oublier ? Il est probable qu’une crise politique salutaire s’ouvre en Israël. Mais changer les dirigeants politiques sans projet reconnaissant le droit des Palestiniens à l’autodétermination et à une véritable souveraineté politique, ne suffira pas. Il faudra mettre fin à la colonisation, en finir avec l’occupation. Il ne peut y avoir de paix sans justice.

 

Pour l’heure, on assiste à une escalade de la violence condamnant à mort tous les Gazaouis, pris au piège dans la nasse qu’est la bande de Gaza. Rien ne justifie les horreurs perpétrées par le Hamas qu’il faut dénoncer comme crimes de guerre mais il faut aussi dénoncer celles commises par l’armée israélienne (à l’heure où nous écrivons plus de 8 000 morts palestiniens).

 

La question de la Palestine ne peut être résolue sans le peuple de Palestine et les Israéliens doivent aussi s’interroger sur l’Etat dans lequel ils veulent vivre. Des voix pour la paix existent encore en Israël : B’Tselem, Standing together, Breaking the silence, les guerrières de la paix, etc.

 

Il faudrait aussi ouvrir les prisons pour que de nouveaux dirigeants palestiniens émergent. On pense à Marwan Barghouti, et bien d’autres, qui pourrissent dans les prisons israéliennes depuis des décennies. Ils sont, pour la plupart, emprisonnés sans jugement, toujours en détention administrative. L’espoir viendra de la jeunesse et de tous ceux qui pensent possible de vivre en paix en Palestine.

 

La Palestine ne cessera jamais de renaître. C’est ce que le père d’Elias Sanbar (intellectuel gazaoui) exprimait ainsi en 1967 : « N’aie pas peur, n’aie jamais  peur, nous sommes comme une arête dans la gorge du monde, personne n’arrivera jamais à nous avaler ». Espérons-le.

 

Odile Mangeot, le 28.10.2023

 

(1)   Haute-Saône : 43 hab/km2 (234 000 hab. pour 5 360 km2)

(2)   Denis Sieffert, Politis

(3)   Pierre Stambul, porte-parole de l’UJFP – Union Française Juive pour la Paix

(4)   Jean-Paul Chagnollaud, directeur de l’IReMMO (institut de recherches et d’études Méditerranée/Moyen-Orient)

(5)   MRAP

 

·       Après plusieurs tentatives, l’AG des Nations Unies a appelé à une « trêve humanitaire immédiate » le 27 octobre par un vote avec 120 voix pour, 14 contre et 45 abstentions)

 

sources : Manière de voir, le Monde Diplomatique n° 157 – mars 2018 - Palestine, un peuple, une colonisation, Politis, le Monde, UJFP, AFPS, Alencontre

 

Pour en savoir plus : dossier spécial Israël-Palestine : l’embrasement, et après ?, dans le Monde Diplomatique - novembre 2023