Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


dimanche 26 avril 2020


Vérités et mensonges. Quelques brèves

Comment l’Etat a laissé tomber la production de masques

De l’usine, en Côtes-d’Armor, qui produisait les masques, il ne reste que les murs : tout a été détruit.  Avec 200 millions de masques FFP2 par an, destinés à l’Etat, « on était le plus gros producteur d’Europe ». En 2020, la France est totalement dépendante des aléas du marché mondial en crise (et notamment de la Chine), Macron, agacé par les critiques,  prétexte qu’on ne peut pas demander aux gens d’avoir prévu cette crise sanitaire sauf que… Il y a 15 ans, l’Etat l’avait prévu.

Face au Sras (2003, en Asie), puis virus H5N1 (2005), le ministère de la Santé préconise une industrie française du masque. L’Etat signe, en 2005, avec Bacou-Dalloz, un protocole pour 5 ans et installe sur le territoire national des ateliers de production de masques FFP2, à prix fixe (35 centimes), constituant ainsi des stocks d’équipement nécessaires à la protection des personnes.

En 2012, changement de majorité, avec le gouvernement Ayrault et Touraine, à la Santé, les stocks s’érodent, malgré la préconisation du Haut Conseil à la Santé Publique de continuer de stocker des FFP2. Toute la séquence que nous vivons depuis janvier, de pénurie, avait donc été anticipée. De l’avis d’un membre de l’équipe de X.Bertrand : « Quand on est partis en 2012, il y avait 1.4 milliard de masques, dont 600 millions de FFP2. Huit ans plus tard : le plan grippal censé être mis à jour tous les deux ans est toujours le même et il n’y a que 145 millions de masques chirurgicaux et aucun FFP2 ! » ;  « la question devra se régler devant une commission d’enquête parlementaire ». Mais Olivier Véran réfute la responsabilité de Touraine, (ex-socialiste devenue macroniste). Il est vrai qu’il fut au cabinet de la ministre Touraine, tout comme d’autres, aujourd’hui autour de Macron : B. Griveaux, G. Attal, B. Vallet (DG de la Santé en 2013 aujourd’hui en mission Covid-19), ou encore J. Salomon, actuel DG de la Santé, était en 2013 conseiller de Touraine, chargé de la sécurité sanitaire… La décision de Touraine, dès 2013, ne permet plus une gestion prévisionnelle des besoins et de l’approvisionnement en masques : le stock des FFP2  est placé sous la responsabilité des employeurs et des soignants mais personne ne vérifie les stocks.

A partir de là, sans commandes, l’usine de Plaintel chute. Honeywell bull la rachète et licencie, dès 2011, imposant une politique du zéro stock. La stratégie du « flux tendu » fait perdre des clients à l’usine, les plans sociaux s’enchaînent alors que le groupe fait des bénéfices et profite des aides de l’Etat français, comme le CICE. En tout état de cause, l’abandon des commandes de l’Etat contraint  l’usine à fermer  ses portes en 2018. Les machines de fabrication des masques, dont certaines étaient quasi neuves, sont vendues au prix de la ferraille, puis détruites. Plus cynique encore : à l’heure de la pandémie du Covid-19, le groupe Honeywell rouvre une usine à Rhode-Island pour subvenir aux besoins américains….

Extraits de l’article de Nadia Sweeny dans Politis du 14 avril 2020 (sur bastamag.net)

PS : depuis le début de la crise sanitaire, la réouverture de l’usine de masques de Plaintel fait débat. Région, département et agglo de Saint-Brieuc, sont prêts à soutenir le projet. Le Gouvernement, pas vraiment…

(1)   Xavier Bertrand ministre de la Santé en 2005-2007 (gouvernement Villepin sous Chirac). Il y est revenu à la fin du quinquennat Sarkozy (gouvernement Fillon) en 2010-2012. Roselyne Bachelot entretemps a été ministre en 2007-2010

L’abandon de la prévention au nom de l’austérité
Les médias dominants, toujours complaisants vis-à-vis des élites au pouvoir, n’insistent guère sur les décisions politiques qui ont conduit au dramatique manque de matériels de protection contre la pandémie.

Retour sur l’histoire d’un abandon criminel en notre nom. En mars 2007, suite à des alertes de scientifiques, une proposition de loi relative à la protection du système de Santé est adoptée. Un établissement public (EPRUS – établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires) est créé dont la mission consiste à acquérir, fabriquer, stocker des masques chirurgicaux, des appareils respiratoires, des vaccins, etc. La petite équipe qui dirige cette structure parvient très rapidement à stocker 285 millions de masques. Elle est financée par l’Etat et l’assurance maladie. Son budget de 281 millions € en 2007 va s’effondrer à 25.8 millions en 2015 et l’EPRUS disparaît en 2016.

L’abandon de la prévention a, de fait, été précédé d’un formidable battage médiatique, orchestré par le sommet de l’Etat après l’épidémie de grippe aviaire H5N1. Haro sur Roselyne Bachelot ! La Cour des Comptes crie au gaspillage : 450 millions€, c’est trop ! Le déficit de la Sécu ne le permet pas. En 2011, l’Etat se désengage et confie au secteur privé (qui saura mieux gérer !) la mission d’acquérir entre autres, des masques, ainsi qu’aux hôpitaux désargentés de se procurer en plus des appareils respiratoires. Rassurants, début 2019, ces experts de santé publique, commandités par le gouvernement, déclarent dans leur rapport : iI n’y a « pas de menaces virales », « les stocks antiviraux sont suffisants ». Et quand fut venu le coronavirus, l’on fut bien dépourvu ! 

Pour commenter ce lamentable épisode d’imprévoyance austéritaire, il faudrait, dans cette affaire, souligner que la Gauche a montré qu’elle était plus zélée que la Droite. Marisol Touraine s’en défend piteusement, Hollande se tait et le ni droite ni gauche Macron ignore son passé de ministre de l’économie… et son présent de Président. On connaît la musique « Responsables mais pas coupables ». Cherchent-ils déjà des boucs émissaires pour s’absoudre comme ce fut le cas dans le scandale du sang contaminé ? Serge Victor, le 24.04.2020   

Des vérités qui ne sont pas bonnes à dire

Le 4 avril, le Préfet sanitaire du Grand Est confirme publiquement que le plan de l’ARS, prévoyant la suppression de 174 lits et de 598 postes au CHU de Nancy, serait bien mis en œuvre. Et le bal des hypocrites de clamer en chœur  « indécent »  ce qui était approuvé fin janvier et, en premier lieu par le maire de Nancy, Mathieu Klein, ex PS, rallié à LREM, ne pouvait être dit en cette période ! A cette époque, c’était pour l’édile, un projet « formidable assorti d’un bâtiment hôpital-usine de 515 millions ». Dans la lutte pour ravir la municipalité de Nancy, le petit Klein se devait de faire de la surenchère face à son adversaire PS qui n’en pense pas moins mais l’a mis en ballotage défavorable. Le conseil des Ministres a mis fin à cette polémique en révoquant le préfet trop bavard. La vérité austéritaire d’hier et de demain n’est pas bonne à dire aujourd’hui. Le bouc émissaire est tout contrit de l’apprendre à ses dépens. Serge Victor

Ils savaient mais n’en avaient rien à foutre !

Comme pour les alertes sur le réchauffement climatique et la destruction de l’écosystème, les politiciens sont sourds et aveugles à ce qui contrarie leurs obsessions idéologiques : néolibéralisme, productivisme, austérité… Eux qui prétendent que le surgissement de la pandémie Covid 19 était imprévisible, ont ignoré les experts, et non des moindres, qui les avertissaient.
2005 : les professeurs JP Derenne et F. Bricaire, puisqu’ils ne sont pas entendus publient un livre « La grande menace de la grippe aviaire » (Fayard). Ce neurologue et cet infectiologue suggèrent : prévoir le confinement, des équipements de réanimation, des respirateurs ; il faut former des médecins, des infirmiers. Et ils alarment : « 2 millions de masques par jour, des bottes, des casques, des bonnets, sont nécessaires. Vite, il faut faire un état des stocks ».
De l’autre côté de l’Atlantique, en 2003 déjà, un rapport de la CIA adressé à Obama alertait sur « l’arrivée d’une épidémie de virus » provoquant une maladie respiratoire « virulente » « extrêmement contagieuse », « sans traitement adéquat ». Elle pourrait entraîner « la dégradation des infrastructures vitales et des pertes économiques ». Le rapport fut transmis aux alliés des USA…
Juillet 2008, sous Sarko, le livre blanc de la Défense soulignait « le risque plausible d’une pandémie massive à forte létalité dans les 15 années à venir ». Des dispositions furent prises pour établir des stocks de matériels sanitaires, puis abandonnées ! 
 En 2013, nouveau livre blanc de la Défense, préfacé par Hollande ( !) précisant : « le risque existe d’une nouvelle pandémie hautement pathogène, résultant de l’émergence d’un nouveau virus qui aura franchi la barrière des espèces ».
Décembre 2017. La revue de la Défense des armées était tout aussi alarmiste. Ce qui fit dire à un haut dirigeant de la Sécurité intérieure sous forme interrogative : « Les décideurs politiques lisent-ils vraiment les notes qui leur sont adressées » ? La réponse est dans la question !
Serge Victor d’après des articles du Canard enchaîné du 8.04.2020


Bangladesh. Apocalypse pour les ouvrières du textile

Du fait du confinement, les grandes marques européennes de prêt-à-porter ont annulé plus de 3 milliards de dollars de commandes auprès de leurs fournisseurs bangladais qui ne peuvent plus payer leurs salariés. Les 2000 couturières de l’usine de jeans de Mostafiz Uddi n’ont plus de travail. Les clients, comme l’espagnol Zara et l’allemand Takko ont stoppé leurs commandes et ne prennent même plus les marchandises commandées : Mostafiz Uddin se retrouve avec 20 000 jeans sur les bras. Il a payé d’avance le tissu et le port, mais les grands groupes ont des mois pour régler les factures, sachant que chaque  salariée fait vivre en moyenne 5 personnes…

Le néerlandais C&A et l’irlandais Primark ayant annulé pour plusieurs centaines de millions€ de commandes, les fabricants des pays d’Asie luttent pour leur survie, en Birmanie, au Cambodge et au Bangladesh où le prêt- à-porter représente 84% des exportations. Aucune solidarité à attendre de leurs donneurs d’ordre. L’allemand KiK annonce « qu’il a à cœur les intérêts des couturières » mais ses préoccupations concernent déjà le sauvetage des emplois en Allemagne. « Chez nous, perdre son travail c’est en général ne plus avoir à manger » déclare la directrice du centre bangladais pour la solidarité des travailleurs. De plus, les travailleuses sont exposées à un risque d’infection élevé à l’usine et dans les baraquements qu’elles louent 100 dollars/mois près de l’usine. La situation est « apocalyptique » affirme Rubana Huq (association des fabricants et exportateurs de vêtements du Bangladesh). Sans soutien des entreprises dans les trois mois à venir c’est plus de 4 millions de personnes travaillant dans quelque 4 000 usines qui seront à la rue.

Primark a annulé pour 273 millions de dollars de commandes, C&A, 166 millions. Au total, 46 % des productions ont été annulées. 72 % des donneurs d’ordre n’ont pas réglé les tissus achetés par leurs fournisseurs. Primark se dit prêt à un compromis et accepte de financer le salaire des ouvrières travaillant sur les commandes, annulées, C&A assure vouloir « minimiser les effets sur les fournisseurs »… D’autres, comme le suédois H&M ou l’allemand Tchibo ou encore Takko semblent davantage ouvertes au dialogue ?

« Cette crise fera peut-être prendre conscience que beaucoup trop de gens paient bien trop cher pour une production excessive à bon marché. Peut-être arrivera-ton à la fin de l’ère de la mode jetable », veut croire Gisela Burckhardt (Femnet, organisation de défense des droits des femmes). Rubana Huq a peu d’espoir « Les grands groupes reviendront vers nous et nous diront : le monde est différent maintenant, il nous faut des produits encore moins cher ».
Extraits d’un article de Nils Klawitter, Courrier International du 21.04.2020, transmis par William, abonné

Pour refuser les dégâts de la mondialisation ultralibérale, nous devons au minimum boycotter toutes ces marques (ndlr)