Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 28 mai 2018


à lire...

1968. De grands soirs en petits matins
Ce que nous livre l’auteure, c’est une « histoire par en bas » qui donne toute sa force aux « évènements de 68 ». Y sont restitués les luttes, les débats, les émotions qui agitèrent cette contestation qui ébranla le régime gaulliste. Ouvriers, étudiants, militants, paysans, artisans, toutes ces femmes et ces hommes en mouvement firent preuve d’une créativité et d’une inventivité que rien, a priori, ne laissait prévoir. Et pourtant, ce qui a nourri cette explosion trouve son origine à la fois dans la politisation qui s’est opérée dans une fraction de la jeunesse lors des guerres successives d’Algérie, du Vietnam, des 6 jours en Israël/Palestine, dans ces contestations étudiantes mondiales et parmi la classe ouvrière insubordonnée, notamment des OS qui ne supportaient plus les cadences tayloriennes et la dictature des petits chefs. Plus généralement, la France d’en bas rejetait ce paternalisme étouffant et l’archaïsme des mœurs bridant la génération du baby-boom. Ce qui en outre est instructif dans cet ouvrage, c’est l’analyse à travers les archives de l’époque, de la volonté répressive de la police, de l’Etat et de ses divisions, laissant vacant, un bref moment, le pouvoir. De même le rôle néfaste du PC et de la CGT pour étouffer, circonscrire le mouvement, tout comme les manœuvres de la social-démocratie tentant de le récupérer tout en se posant comme alternative au gaullisme, sont éclairants.
Certes, à l’orée de la fin des Trente Glorieuses, la conjoncture n’était pas, au sens classique du terme, révolutionnaire. Toutefois, pouvait s’ouvrir une autre voie que celle de la mondialisation financière. Autogestion, pouvoir populaire, autonomie des sujets individuels et collectifs, avaient pour objet de changer la vie. « Par le rire et l’oubli » de ce moment d’effervescence intellectuelle et populaire, de cet épisode d’où surgit le plus grande grève générale de l’histoire de France, le « spectre » de mai 68 hante toujours ceux et celles qui « veulent faire du politique une chose partagée, le bien commun de toutes et tous, où chacun peut s’exprimer, délibérer, décider ». Un ouvrage à mettre entre toutes les mains pour en tirer le meilleur pour l’espérance sociale à venir. 
Ludivine Bantigny, éd. Seuil, 2018, 25€