Macron,
broyeur d’espérance à l’accès au savoir
Faire
prendre des vessies pour des lanternes fait partie intégrante du discours
dominant, cette novlangue qui renverse le sens des mots : les régressions
sociales devenant des « réformes », les licenciements se traduisant
par des « plans de sauvegarde de l’emploi » ; toute cette
logomachie vaut pour la « loi d’orientation et de réussite des étudiants ».
Il s’agit, en réalité, d’introduire la sélection à l’université. Macron l’avait
promis : « il faut arrêter de
faire croire que l’université est la solution pour tout le monde ». De
fait, les mesures mises en œuvre préfigurent l’établissement d’un système à
l’anglo-saxonne. La loi de 2007 avait préparé le terrain à l’offensive
macronienne de destruction de la démocratisation du système scolaire. Telle est
la raison de la mobilisation étudiante, largement déformée par les médias.
Etouffer les
universités pour mieux les démanteler
La
loi de 2007, dite « d’autonomie des universités », correspond à un
retrait de l’Etat. Financièrement, il ne participe plus qu’à hauteur de 60/70%
à leur fonctionnement, laissant aux présidents d’université le soin de
solliciter les collectivités régionales et sponsors privés pour pallier les
déficits. Une inégalité entre facs, régions s’est donc installée :
amphithéâtres surchargés, locaux délabrés, moyens matériels insuffisants
jusqu’à l’asphyxie et le scandale, en 2017, largement provoqué par le tirage au
sort des étudiants sans affectation. Tout compte fait, ils ne représentaient que
0.9 % des étudiants. Bref, le terrain était préparé, d’autant que de 2009 à
2015, face à 280 000 étudiants supplémentaires, 7 147 postes furent
supprimés. La plate-forme APB (Admission Post-Bac) expérimentait par ailleurs
ce qui allait suivre. Elle sélectionnait les étudiants pour les filières
sélectives BTS et classes préparatoires aux grandes écoles. En outre, la
capacité d’accueil dans certaines filières, comme psychologie, droit, médecine,
STAPS (sciences des techniques et activités physiques et sportives)… était
largement insuffisante.
Une usine à
gaz pour sélectionner
Pour
camoufler la sélection, la loi ORE – Orientation et Réussite des Etudiants –
laisse penser qu’en définitive ce serait l’élève de 15/16 ans qui opèrerait un
choix… multiple. 900 000 demandeurs furent donc appelés à faire 10 vœux,
soit 9 millions de vœux, qu’enseignants, chercheurs, vacataires, seront amenés
à trier, départager, repousser dans d’autres facs, selon les places disponibles,
ou reléguer dans une remise à niveau problématique. Ces vœux doivent être
formulés dans des « fiches-avenir » ( !) comportant, pour
chacune d’entre elles, notes, appréciations matière par matière, évaluation de
la motivation de l’élève, de son autonomie, de sa méthode de travail, de son
esprit d’initiative, de sa capacité à réussir dans la formation visée… Au
boulot, les enseignants du secondaire et les conseils de classes pour la
présélection ! Les élèves, et les parents anxieux, devaient s’y mettre
avant le 13 mars ! Et, tout ça, sur la plate-forme virtuelle
« Parcours Sup » pour y inscrire les 10 vœux et toutes les pièces
accompagnatrices.
L’on
vit, aussitôt, fleurir des sociétés privées comme « Tonavenir », proposant de faire ce travail fastidieux pour
560€ selon la « formule « publicitaire » Sérénité ( !) ».
Bref, un nouveau marché s’est ouvert, l’industrie pharmaceutique vantant, pour
sa part, les pilules miracles contre le stress !
L’affaire
semblait dans le sac à malices de Blanquer jusqu’à ce que les enseignants et
les étudiants s’en mêlent. Les enseignants du supérieur, face aux 9 millions de
vœux (et pour chaque postulant-étudiant 10 vœux, 10 lettres de motivation, plus
les dossiers rassemblant tous les bulletins de notes et d’appréciations)
s’indignèrent : impossible d’évaluer réellement, guère envisageable de
recourir à des algorithmes locaux, de se faire les censeurs des choix des
élèves. 8 000 d’entre eux, par pétition, ont condamné « Parcours
Sup » et décidé de boycotter ce dispositif. Une motion signée par des
enseignants de Lille, Bordeaux, Paris I et Paris X, Aix-Marseille, Lyon, ont
refusé de participer à ce classement. Le SNES-SUP FSU défend cette position. Une
association « Sauvons l’université » demande des moyens pour garantir
une place pour tous les bacheliers dans la formation de leur choix. Puis ce fut
la mobilisation étudiante et l’occupation des facs en plein milieu de la
mobilisation sociale. Et le ministre de brandir la menace de sanctions aux
enseignants et la répression face à l’occupation de locaux universitaires.
Le projet
macronien anglo-saxon
S’il
est mis en œuvre, ce serait la fin du BAC comme référence commune ouvrant
l’accès aux études universitaires au choix des étudiants. Cette déconstruction
de la démocratisation du système scolaire entend favoriser la concurrence
accrue entre disciplines, une hiérarchisation entre lycées et facs et sera assortie
de suppression de postes… Qui plus est, la dérégulation du système éducatif,
telle que prévue, devrait s’accompagner de la refonte des programmes, d’offres
de formation réduites, et, pour les lycéens, d’un grand oral. Tout serait fait
pour exclure les moins dotés en capital culturel et donc, de refouler les
jeunes issus des classes populaires.
Déjà
pointe l’augmentation des tarifs universitaires expérimentée dans les filières
les plus sélectives. A l’université de Nice Sophia-Antipolis, l’AG des étudiants
a bloqué le conseil d’administration. Ils protestent notamment contre
l’instauration de nouveaux diplômes à 4 000 euros pour des cours en master
de biologie (au lieu de 256€). « On
est dans une logique de privatisation », l’administration prétend
qu’elle est en grande difficulté financière et pointe la volonté du ministère
de laisser les universités se financer toutes seules, progressivement.
Plus
subversifs, les étudiants, occupant Science Po Paris, dénoncent le contenu des
enseignements qui leur sont dispensés, véhiculant l’idéologie néo-libérale. « De nombreuses multinationales
subventionnent notre école pour que soient vantées leurs pratiques d’exploitation
des travailleurs, d’appropriation des ressources naturelles des pays du Sud, de
violations des droits humains et de destruction de la planète… Notre école est
pleine de modules visant à former les hauts fonctionnaires zélés du régime
libéral et autoritaire ». Ils appellent à « faire de Sciences Po-Paris un lieu ouvert à tous les étudiants,
chômeurs, précaires, salariés, exilés avec ou sans papiers, à briser ce temple
de l’enseignement injuste, inégalitaire et élitiste que l’on essaie de nous
imposer ». Serait-ce là un joli mois de mai en perspective ? (1)
Gérard
Deneux, le 21 avril 2018
(1)
Communiqué « Sciences-Po entre dans la lutte »
du 18 avril 2018
Lire
l’article d’Annabel Allouch « Les
étudiants livrés au marché de l’anxiété » le Monde Diplomatique avril 2018
Et si les
Versaillais s’y mettaient ?
Etienne
Pinte s’est fendu d’une tribune dans le
Monde (11 avril). C’est le cri du cœur d’un Versaillais qui, après avoir
été député RPR et UMP (1978-2012), maire de Versailles de 1995 à 2008, est
devenu président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté
et l’exclusion. Sa découverte d’un monde qu’il ignorait l’amène à invoquer
l’appel de l’abbé Pierre en 1954.
Et
d’évoquer la situation dramatique dont il a dû longtemps ignorer
l’existence : 3 millions d’enfants sous le seuil de pauvreté n’ayant pas
accès à la cantine scolaire, à la protection maternelle et infantile, à la
médecine scolaire et qui vivent en hôtels ou dans des bidonvilles. Et ces 54 %
des jeunes dans les quartiers dits prioritaires qui souffrent d’un manque
d’accès au savoir, dont 40 % sont privés de loisirs et encore 25 % de jeunes
qui sont sans domicile fixe…
Et
des chiffres, il en assène : 9.5 millions de Français reportent ou
renoncent à des soins, dont 64 % sont des femmes. 4 millions de mal logés
auxquels il faut ajouter 140 000 sans-abri. Et puis ces 12 millions qui
souffrent de précarité énergétique. Quant aux étudiants on apprend que 50 %
d’entre eux rencontrent des difficultés financières, qu’ils sont nombreux à fréquenter
les restos du cœur et à se loger en habitats insalubres, à la merci des
marchands de sommeil.
On
rêve que tous entendent l’appel des étudiants Science-Po Paris et convergent
dans la protestation subversive contre ce régime à la tête d’un pays qui se
vante d’être la 6ème puissance mondiale.
GD
le 21 avril 2018
Les mauvais
comptes
Tant qu’il y aura des
fraudes fiscales (80 milliards), des optimisations fiscales agressives, grâce à
une non régulation et une législation laxiste et complaisante + le verrou de
Bercy (60 milliards),
Tant qu’il y aura des fraudes aux cotisations sociales (25 milliards
que les entreprises fraudent au fisc),
Tant que les amendes aux grandes surfaces non récupérées par
Bercy (418 milliards, un quart de la dette publique),
Tant qu’il y aura des niches
fiscales concoctées pour les riches (90 milliards) et l’arnaque aux emprunts
toxiques sur les collectivités locales (13 milliards),
Tant que l’Etat se privera des recettes légitimes qu’il ne
veut pas prendre aux riches, faisant croire à la théorie du
« ruissellement » (100 milliards),
Tant qu’on n’aura pas récupéré les 10% transférés du travail au bénéfice du
capital (200 milliards par an),
Tant que les multinationales du CAC 40 ne paieront pas leurs
impôts à égalité avec les PME,
Tant que les banques d’affaires ne seront pas dissociées des
banques de dépôt (ce qui fait que la finance casino colossale atteint 100 fois
le PIB de l’économie réelle),
Tant que tout cela continuera, toute politique économique et sociale, toute rhétorique
capitaliste néo-libérale, toute énonciation de déficit et de dette publique
(odieuse car 59% de la dette publique proviennent des cadeaux fiscaux et des
taux d’intérêt excessifs), toute dénonciation de fraude sociale (la seule dont
on parle dans les médias), toute proclamation d’assistanat et toute plainte de
coût du travail et de marges insuffisantes, et bien sûr, toute casse du code du
travail et de la protection des travailleurs et des retraités… etc… seront
caduques, non prises en considération et combattues par le peuple volé et
maltraité !!!
Ils
peuvent bien faire ce qu’ils veulent, et enfumer les masses qui vont voter dans
l’ignorance mais nous sommes de plus en plus nombreux, conscients de l’arnaque.
Et
pour finir, avec la COP 21, ils rechignent à mobiliser 100 milliards de dollars
(84 milliards d’euros) par an d’ici 2020 sur l’ensemble des pays ! Là je
ne parle que de la France ! Imaginez…
Les
riches détruisent la planète et le capital nous coûte très cher !
Alain
Mouetaux