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vendredi 26 février 2021

 

Compétence et responsabilité des élus

De nouvelles preuves accablantes

 

Les deux derniers principes qui tiennent notre système politique debout sont des arguments en mousse.

Quand on en vient à évoquer le sujet de la démocratie réelle, et donc directe, avec un partisan de notre système politique actuel (qu'il soutienne ou fasse partie de la majorité ou de l'opposition), deux arguments sont généralement mis en avant comme derniers remparts contre la chienlit : la compétence et la représentativité.

 

Les élus sont compétents. Ah bon ?

La plus grosse mystification de l'élection est de nous faire croire que, comme par enchantement, le fait de sélectionner des gens parmi une liste qu'on n'a pas choisie, et qui est établie à partir de critères totalement décorrélés de la notion de compétence (en gros : se présente qui veut), les gens qui sont élus sont intrinsèquement plus compétents que les citoyens qui les élisent.

L'élection les rend littéralement compétents, alors qu'ils ne l'étaient pas avant, quand ils n'étaient encore que de vulgaires citoyens. C'est à dire, je suppose, que puisqu'une majorité de suffrages ont été exprimés en leur faveur, ce ne sont nécessairement pas les derniers des crétins comme les électeurs le sont a priori. Bon, l'énoncé même de cette affirmation est problématique puisqu'on a d'un côté des gens supposément idiots (les électeurs) qui sont quand même capables de produire un choix éclairé malgré leur étroitesse d'esprit, de l'autre côté une personne issue du même contingent d'abrutis (l'élu) qui se retrouve tout d'un coup frappé par la grâce et doté d'une intelligence supérieure qui le rend compétent.

À partir de ce présupposé fragile, on considère que les assemblées d'élus, par exemple les parlementaires, sont généralement mieux éduqués, plus instruits, et ont une hauteur de vue supérieure à celle des citoyens. Bien sûr, chaque jour qui passe, chaque loi votée, chaque intervention télévisée d'un député ou d'un sénateur nous fait grandement douter de ce postulat. On a même l'impression que ça empire au fil des années. Prenons quelques exemples de députées élues LREM :

 

  Bon je n'ai que des femmes, là, sous la main à vous montrer, mais n'y voyez aucun sexisme, en général les hommes sont plutôt empêtrés dans des affaires politico-judiciaires, chacun son truc ! Le patron de la police, c'est à dire notre ministre de l'intérieur était d'ailleurs entendu pour une affaire de viol cette semaine. En tant que "témoin assisté", j'imagine que ça veut dire que c'est lui qui tenait la victime pendant l'acte mais qu'il n'a rien fait lui-même... Bref. je m'égare.

Cette semaine également est paru un sondage commandité par l'ADEME sur les "Représentations sociales du changement climatique". Alors c'est intéressant parce que l'idée communément admise c'est que les français sont trop attachés à leur SUV diesel pour s'occuper du climat et donc les élus qui représentent si bien nos intérêts et nos idées ne font que traduire ces préoccupations en se dépêchant de ne rien faire pour l'environnement. Une majorité de français veulent bien faire des efforts et n'accordent qu'une confiance limitée aux progrès technologiques pour nous sauver des contraintes climatiques. Chez les parlementaires au contraire, on accepte moins volontiers de changer ses petites habitudes et on pense qu'avec une poignée de voitures électriques et quelques panneaux solaires, ça devrait bien se passer.

Tout individu qui a un peu travaillé sur ces questions sait qui a raison ou tort à ce sujet. Nos parlementaires dont c'est le job (grassement payé) de travailler ces dossiers et de prévoir les conséquences à long terme de nos modes de vie et de nos choix économiques sont à la traîne.

Et je suis certain que chacun dans vos domaines d'expertise, vous avez pu vous rendre compte à quel point les députés et sénateurs sont à l'ouest, sur à peu près tous les sujets. Les élus ne sont pas seulement incompétents, ils incarnent l'incompétence.

 

Notre démocratie est représentative. Mais de quoi ?

L'autre argument tarte à la crème pour justifier d'une représentation élue, c'est le fait de porter la parole de tous les français dans l'hémicycle, toutes les régions, tous les courants de pensée... Cela présuppose bien sûr que tous les courants de pensée sont déjà représentés parmi les candidats, pour qu'on puisse en choisir un qui nous correspond. Par exemple, moi qui pense que les élections ne permettent pas la démocratie, il faudrait que je trouve un(e) candidat(e) qui se présente aux élections avec le programme affiché d'en finir avec les élections. Top crédibilité ! Et comme il faut nécessairement voter pour un seul candidat, il faut embrasser tout son programme. Je plains les écolos pro-nucléaire, les chefs d'entreprise homosexuels , les souverainistes de gauche et les xénophobes non libéraux car ces cases n'existent pas dans le paysage politique français, alors que j'ai déjà rencontré des électeurs qui ressemblent à ça...

Mais revenons au sondage de l'ADEME qui illustre bien le problème également : si les français sont plutôt partagés sur la bonne façon de relancer l'économie du pays après la crise sanitaire, avec une majorité de 55% qui pensent qu'il faudrait quand même commencer à soutenir plutôt les activités qui préservent l'environnement, les parlementaires sont, eux, aux trois quarts convaincus qu'il faut relancer l'économie coûte que coûte, sans se préoccuper de ces conneries d'environnement.

 

Manifestement, les parlementaires ne représentent absolument pas l'ensemble de la population, nos idées divergent même grandement. Alors je peux entendre que cela ne doit pas être la rue qui gouverne, parce que des manifestants, même par milliers ne sauraient représenter l'avis de la population complète. Mais que penser alors de quelques centaines d'élus dont les opinions sont à ce point différentes de la population ?

Principes du gouvernement représentatif

En tant que modeste blogueur intermittent, évidemment, je peux me tromper. Mais quand je lis la plupart des penseurs et politologues de notre époque (Manin, Sintomer, Castoriadis, Dupuis-Deri...) et des époques bien plus lointaines (Aristote, Montesquieu...), tous s'accordent à dire que le système représentatif est incompatible avec l'idée même de démocratie, et qu'il a même été conçu pour ça ! Nous élisons, tous les cinq ans, des gens incompétents et non représentatifs pour tout décider à notre place. Et on s'étonne que ça ne marche pas très bien ?

Ayons au moins l'honnêteté intellectuelle de ne plus appeler ça "démocratie".

 

Merome – 16.12.2020  Jeux de société