Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 3 avril 2023

 

La Sécurité Sociale et « la Sociale »

 

Le film documentaire de Gilles Perret, « la Sociale », remet à l’honneur les conditions d’instauration du régime de Sécurité Sociale en France. Cette formidable avancée au sortir de la 2ème guerre mondiale dans une France meurtrie, appauvrie, où tout est à reconstruire, démontre la détermination sociale de ses initiateurs communistes et Cgétistes. Instaurer la protection vieillesse, la protection maladie/accidents du travail/maladies professionnelles ainsi que les allocations familiales, n’était pas une mince affaire.

 

Toutefois, ce documentaire occulte le contexte, les difficultés rencontrées et les répressions qui se sont produites à la Libération. « Les jours heureux », l’intitulé du programme du Conseil National de la Résistance, ont eu du mal à émerger et furent ignorés dans la douleur pour beaucoup d’autres… de l’Empire français. Pour que l’on évite de sombrer dans l’illusion d’une nostalgie d’un âge d’or, le contexte et des faits propres à cette époque, se doivent d’être rappelés.

 

Tout d’abord, le contexte était favorable à la mise en place de lois sociales. Après la crise économique et financière de 1929-1930, la misère, le fascisme et la guerre, l’esprit qui dominait était « plus jamais ça ». Même un conservateur comme Keynes était favorable à une modification d’ampleur du capitalisme qui devait être régulé. A l’époque, le prestige de l’URSS libératrice et des communistes était d’une ampleur considérable. Quant au patronat, et à une grande fraction de la bourgeoise, ils s’étaient complètement discrédités dans la collaboration avec les nazis.

 

Toutefois, le parti colonial, la volonté de conserver, de restaurer l’Empire, était largement partagé, comme les idées racistes malgré la défaite du nazisme. A preuves.

 

En décembre 1944, les tirailleurs sénégalais (1 600 soldats) sont rapatriés et incarcérés à Thiaroye, près de Dakar, dans l’attente de la promesse de démobilisation et du versement de leur solde. Réclamant le versement de cette prime, pour tout pécule ils ne recevront que du plomb. Le général Dagnan donna l’ordre de tirer sur ces protestataires, le 6 mai 1945 : 191 tués, les autres furent condamnés à 10 ans de prison puis… graciés en 1947. Cette répression est à mettre en relation avec « l’opération de blanchiment » de l’armée française. Il ne devait pas y avoir de « taches noires » dans le défilé parisien. A la différence de la guerre 14-18, on ne célébrait plus la « force noire », première appellation des tirailleurs sénégalais.

 

Les résistants FTP, et autres incorporés dans les FFI, après avoir combattu en France et en Allemagne nazie, furent engagés dans les colonies. Après le massacre de Sétif et Guelma en Algérie, contre les partisans de l’indépendance de ce pays (30 000 à 40 000 morts) et ce, en 1945, les répressions sanglantes et les guerres coloniales vont se succéder : à Madagascar contre l’insurrection populaire (89 000 morts !), en Indochine jusqu’en 1954, en Algérie (1962). Ce furent pour ces populations des jours malheureux.

 

En outre, l’opération d’épuration de l’Etat pétainiste n’a touché que les personnalités les plus compromises. Ainsi, Mitterrand, le décoré de la francisque, et Bousquet, l’organisateur de la déportation des Juifs, sortirent blanchis à la Libération. Plus repoussantes encore furent les exactions des résistants de la dernière heure, tondant publiquement les femmes ayant eu ou soupçonnées d’avoir eu des relations avec les Allemands.

 

Plus fondamentalement, les Trente Glorieuses commençaient mal. Le 4 mars 1947, les Communistes étaient expulsés du gouvernement. Préparées par la CIA et l’AFL-CIO (syndicat étatsunien, la scission de la CGT et la création de FO affaiblissaient l’unité de la classe ouvrière en recomposition.

 

Tout n’était pas rose malgré les 2.7 milliards de dollars consentis dans le cadre du Plan Marshall. Les tickets de rationnement ne furent supprimés qu’en décembre 1949. En 1954, lors de cet hiver rigoureux, l’abbé Pierre tonnait contre la misère et le mal-logement.

 

Ce billet, pour insister sur deux principes :

-         Sans connaissance du passé, l’on peut être amené à reproduire des erreurs similaires

-         un peuple qui en domine un autre (ou des autres) ne peut être un peuple libre.

 

GD, le 26.03.2023