Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 3 avril 2023

 

Nous avons lu

 

Sobriété (la vraie)

Pénuries d’énergie, coupure d’approvisionnement, inflation… Dans un environnement économique, social, géopolitique tourmenté, notre bulle de confort est atteinte de nouvelles adversités. Face à ces bouleversements, le concept de Sobriété prend une nouvelle réalité. Celle-ci, dont la traduction se perd au gré de multiples affirmations, ne doit pas être comprise comme une politique punitive afin de surmonter telle ou telle crise, mais le retour d’une consommation plus rationnelle, avoir de tout, mais sans excès. Faire avec moins. Mais moins de quoi ? Et comment ? La sobriété n’est pas la fin de l’abondance, c’est la fin d’une addiction de surconsommation, gaspilleuse et insoutenable. Il ne s’agit pas d’en finir avec une certaine insouciance, mais de redécouvrir la coopération avec son entourage, avec convivialité. Faire moins pour faire mieux et être entièrement acteur de ses besoins émancipateurs. Les auteurs ont mis au point un manuel émancipateur explorant des alternatives autonomes et joyeuses. Il regroupe conseils, astuces et bonnes pratiques au quotidien afin de faire des économies tout en réduisant son empreinte carbone. Tous les postes de consommation sont examinés : logement, alimentation, numérique, culture et loisirs, transport. Nombre de pratiques « tombent sous le sens » et ne sont que des rappels d’une économie qu’utilisent déjà et en particulier les ménages modestes ; d’autres, moins courantes, complètent un comportement économe et anti-gaspi. Si à la lecture, le sentiment d’une expression d’« écolo-bobo » se révèle par moment, le caractère social du guide ne laisse aucun doute : rejet du productivisme, malsain pour l’économie, pour la santé, pour la satisfaction du travail bien fait ; en finir avec le burn-out et le bullshit-job (emploi inutile, superflu ou néfaste). La sobriété est le socle sur lequel nous devons inventer un nouveau vivre ensemble : moins de biens, plus de liens. JC

Isabelle Brokman et Vincent Liegey. Editions Tana, février 2023, 13,90€

 

Minerais de sang : les esclaves du monde moderne

L’auteur  nous embarque dans un long voyage, celui de la cassitérite (principal minerai de l’étain), depuis son extraction dans des conditions esclavagistes dans les mines de Bisie au Nord-Kivu en République Démocratique du Congo, mais aussi au Rwanda, en Tanzanie et jusqu’en Malaisie où elle est transformée pour se retrouver dans tous les objets électroniques de notre quotidien. Ce livre est l’aboutissement d’une enquête internationale de deux ans, allant à la rencontre des creuseurs à mains nues qui ne comptent pour personne telles des taupes s’enfonçant à 200 ou 300 mètres sous terre  pour extraire le minerai précieux, payé une misère au prix du kilo de haricots (3 dollars), juste de quoi « renouveler sa force de travail » par  multiples « prédateurs » qui guettent sa remontée. L’enquêteur a bien des difficultés à retrouver la trace du minerai transformé en Malaisie pour être vendu à la Bourse, au London Metal Exchange, pouvant atteindre près de 30 dollars. Après des détours par l’Asie, l’Europe, les Etats-Unis, l’étain congolais revient en Afrique, au Ghana notamment, où le monde entier déverse ses rebuts, ordinateurs, consoles de jeux…que  les enfants ghanéens décortiquent pour récupérer le cuivre, les plaques d’aluminium, tout ce qui peut se vendre à « la balance ». Ce lieu, où les enfants collectent les articles dont plus personne ne veut, ce lieu qui autrefois attirait les pêcheurs et les flamants blancs, s’appelle Sodome et Gomorrhe. La cassitérite, c’est la mondialisation telle qu’elle est. Ce livre se lit comme un roman, l’écriture est remarquable et nous saisit de colère face à l’injustice ou de sourires face à des scènes cocasses. L’auteur nous démontre, une fois de plus, la part tragique de la participation des populations africaines à la mondialisation capitaliste. OM

Christophe Boltanski. Gallimard/Folio actuel, 2014, 8.40€

 

Le jour où la Chine va gagner

La fin de la suprématie américaine

L’auteur, d’origine indienne, vivant à Singapour, est un fin connaisseur de la confrontation des Etats-Unis et de la Chine. Il a occupé pendant 33 ans différentes fonctions diplomatiques et a même présidé le Conseil de sécurité de l’ONU. Il explicite les deux visions du monde et les pratiques qui s’affrontent. Les USA revendiquent la liberté du capitalisme néolibéral, aggravant les inégalités, l’ingérence dans les affaires des pays, l’agressivité en mer de Chine... Promouvant l’harmonie et le développement économique maîtrisé sous l’égide du Parti-Etat, la Chine développe une sorte de méritocratie et se prévaut du principe de non-ingérence. Elle pratique des alliances de revers avec la Russie, tente de réconcilier l’Iran et l’Arabie Saoudite, sapant l’influence des Etats-Unis. Son multilatéralisme, sa politique commerciale mercantile, les routes de la soie, sont autant de facteurs qui assurent son influence et sa conquête des marchés. Peut-on pronostiquer « la fin de la suprématie américaine » ? Malgré le titre de l’ouvrage, rien  n’est encore assuré. « Si les USA souffrent d’un déficit d’infrastructure, leur richesse par habitant reste bien supérieure à celle de la Chine, même si la situation de la moitié la plus pauvre de ses habitants s’est détériorée au cours des dernières décennies »… A lire pour l’importance des données et des références suscitant la réflexion. GD

Kishore Mahbubani, édition Saint-Simon, 2022, 23€