Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 3 avril 2023

 

Faire plier Macron

(édito de PES n° 91)

 

Est-ce possible ?  Inflexible, il l’est vis-à-vis du vaste mouvement populaire qui le désapprouve : plus de 70 % de la population sondée et, parmi eux, 90 % des actifs. Docile, il l’est vis-à-vis des instructions européennes, des commanditaires qui réprouvent les 3 000 milliards de dette publique alors même que pointe une nouvelle crise financière assortie d’une montée des taux d’intérêt. Son ex-premier ministre, Edouard Philippe, ne disait-il pas que, depuis 2017, les régressions, « ça passe » « on se dit, ça va être terrible, mais ça passe ». Enfin, depuis, il y a eu les Gilets Jaunes.

 

Dans un premier temps, l’entêté de l’Elysée y a cru. Siphonner les LR pour atteindre une majorité semblait probable mais le nombre des ralliés a fait défaut. Il pouvait également être conforté par les sages déambulations autorisées, bien encadrées et ce, malgré le nombre impressionnant de protestataires.

 

Et puis, le recours au 49-3 a indigné, renforcé la radicalisation, amené les confédérations à appeler au blocage de l’économie. Irascible, le bonimenteur de l’Elysée a dépassé les bornes, affirmant d’une part que sa contre-réforme était juste et nécessaire et que les femmes et les séniors seraient mieux lotis.

 

Et les villes, notamment Paris, se sont garnies de poubelles… Et la violence policière en fut décuplée… Dépité, le méprisant de la République dut modifier son agenda monarchiste. Lui, le roitelet de l’Elysée qui avait prévu d’accueillir le monarque anglais, Charles III, du 26 au 29 mars, a dû annuler les agapes programmées : le dîner fastueux à la résidence du roi Soleil, dans la galerie des glaces à Versailles, le bain de foule à Paris (le fumet des effluences des sacs poubelles n’était pas très appétissant pour sa majesté). Annulés, également, le discours au Sénat, le voyage en TGV – évitant les émissions de CO2 - jusqu’à Bordeaux… Macron avait rêvé d’être intronisé aux côtés de la suite royale…

 

Fâché, le roquet de l’Elysée se mit à aboyer contre tous ces factieux et contre cette foule, le privant de son lustre international, lui, devenu la risée de tous les chefs d’Etats qu’il côtoie.

 

Dès lors, ce fut Macron, le baston, organisant la répression sur les rétifs à la soumission : coups, gaz lacrymo, grenades de désencerclement, tirs LBD, arrestations en masse et des blessés par centaines, pour certains très graves, y compris en plein champ. Les manifestants écolos contre les mégabassines n’en sont pas revenus. Le déploiement massif des gardes mobiles, des Brav’M et autres Brigades anti-criminalité contre eux fut d’une brutalité inégalée : deux d’entre-eux sont entre la vie et la mort. En fait, ce qui se joue, par cette violence policière, c’est le droit de manifester et la montée d’un Etat policier.

 

Macron, le parvenu, issu de la Banque Rothschild, le fondé de pouvoir du Capital, est chargé de défendre l’intérêt général de la classe dominante. Si elle sent que son chargé de mission ne parvient plus à ce que ça passe et que le personnage met, par son intransigeance, ses profits en danger, elle s’en débarrassera. Ce n’est pas encore le cas, loin de là.

 

Ça va être dur de déloger le forcené de l’Elysée et de le renvoyer au Touquet. Les dirigeants des confédérations qui demandent à être entendus, lui ont même proposé de nommer un médiateur entre eux et lui. Jupiter peut-il se mettre au même niveau que ses interlocuteurs ? Impossible, il est sourd et dingue à la fois. Le sourdingue est prêt à mettre de l’huile sur le feu pour mieux jouer au pompier. Et il continue à jouer sa partition jusqu’au-boutiste : j’attends la décision du recours du Conseil Constitutionnel pour ne pas perdre la face et je m’en vais parader au lac de Serre-Ponçon pour me présenter en défenseur de l’eau de cette super bassine naturelle…

 

En outre, on assiste à un débat dérisoire opposant la légalité électorale et institutionnelle à la légitimité des aspirations populaires, tout en s’en remettant au Conseil Constitutionnel qui a, plus que rarement, désavoué le pouvoir en place, sinon sur des détails. Faut-il rappeler que lors du 2ème tour des législatives, en juin 2022, 53 % des inscrits se sont abstenus, sans compter les 5 à 6 % de non-inscrits. C’est donc un électeur sur six qui ne vote plus.

 

Faute d’un mouvement gréviste d’ampleur suffisante, le mouvement populaire va-t-il battre en retraite? Qu’en sera-t-il de la mobilisation du 6 avril ? En tout état de cause, les temps changent : « Il semble de plus en plus difficile de subordonner les syndicats au pouvoir de la finance, comme en ont rêvé nombre de gouvernements depuis 1983 » (1). Une fraction de la jeunesse s’est également mise en mouvement. Reste que les grèves par procuration isolent et fatiguent les plus déterminés. Nombre de travailleurs leur adressent bien des messages de soutien… qui ne se convertissent pas en débrayages ou grèves sur les lieux de travail. Macron mise là-dessus : l’essoufflement des plus mobilisés.

 

On peut espérer que les illusions sur ce système vont continuer à s’effondrer. L’inflation, la hausse des prix, la crise bancaire qui menace, peuvent y contribuer. Quoique… Les fachos du RN attendent au coin du bois et l’ultra-droite, dans les cortèges des manifestants, n’hésite pas à agresser les étudiants, les lycéens et la gauche radicale.

 

GD, le 30.03.2023

 

(1)   voir l’article de Sophie Beroud et Martin Thibault ainsi que le dossier constitué par le Monde Diplomatique d’avril 2023