Nous avons lu…
L’urne et le fusil.
La garde nationale
parisienne 1830-1848
Cet ouvrage vient nous rappeler que la
domination de la bourgeoisie, en France, fut l’objet d’une âpre lutte. La
constitution d’un bloc historique
autour de la classe dominante pour rejeter la monarchie, y compris sous sa
forme constitutionnelle, supposait à la fois la mobilisation de la petite
bourgeoisie et des classes populaires, son épuration-répression des fractions
les plus radicales. Pour se défendre et s’imposer, l’insurrection, c’est le
recours aux armes, l’émergence renouvelée (1830-1848-1870) d’une garde
nationale « démocratique ». Elle se forme dans les quartiers. Elle
est l’enjeu d’une lutte entre la bourgeoisie et les classes
« prolétaires ». C’est le processus révolutionnaire lui-même qui impose cette institution et la
volonté de la bourgeoisie de la mettre sous tutelle, de la dissoudre pour, en
fin de compte, la remplacer par une force professionnelle. Il s’agit de
remplacer le fusil par les urnes, celles-ci devant, en définitive, assurer la
représentation parlementaire des intérêts des classes dominantes. Cette
histoire est celle où la « populace » est matée par les Républicains.
La démocratie parlementaire, telle que la concevaient ceux qui voulaient
l’imposer contre les monarchistes, devait être censitaire, excluant les
citoyens « passifs ». Le suffrage dit universel ne pouvait l’emporter
qu’à la condition d’exclure, de fait, les classes ouvrières et populaires, y
compris par l’imprégnation dans le corps social de la légitimité du régime
institué. Le long combat pour la démocratie réelle s’est poursuivi autour des
droits à acquérir (liberté d’opinion, de presse, de réunion, de manifestation,
d’organisation syndicales, des étrangers) après l’écrasement de la Commune
(1870).
Reste à restaurer le « droit à
l’insurrection » que, dans les faits, les Gilets Jaunes ont remis à
l’honneur. Connaître le passé, cette histoire par en bas, n’est pas anodin. Il
est source de réflexion pour les luttes présentes et à venir. L’auteure, maître
de conférences à l’université Paris-Est, a participé au film-émission de Là-Bas si j’y suis : « Le grand procès de Macron ». GD
Mathilde
Larrère.
PUF, 2016, 27€