BAS LES MASQUES !
La
crise du Covid-19 a bouleversé notre façon de vivre. Elle a engendré beaucoup
de souffrances. Mais elle a eu, aussi, des aspects positifs. L’air des villes
est devenu plus pur, le ciel s’est vidé des traînées blanches des avions et est
redevenu bleu. Elle a fixé l’attention des médias, de la classe politique, de
la population sur un seul et unique sujet. On a échappé ainsi au défilé
habituel des infos où les sujets ne sont que survolés. On s’est enfin intéressé
sérieusement à quelques sujets précis : Les MASQUES DE PROTECTION, leur
gestion, les EHPAD, SANOFI. Pendant cette période, le projecteur fut mis
sur le système sanitaire, l’hôpital, la médecine de ville, les labos
pharmaceutiques. On a pu comparer notre gestion de la crise avec d’autres pays,
et nous, qui avons l’habitude de penser qu’ailleurs c’est mieux, on a pu se
rendre compte que par exemple, en Espagne, la crise a été gérée de façon à peu
près aussi catastrophique qu’ici.
En plus, cette crise nous a permis d’échapper à Roland Garros, rendez-vous
de la High Society devant les caméras
du service public. Elle va peut-être nous permettre d’échapper au Tour de
France. Cette « fête du vélo et de la nature» organisée par le même groupe
privé que le Paris-Dakar (Amaury) va
lancer sur les routes de Haute-Saône quelques milliers de véhicules afin
d’encadrer quelques cyclistes millionnaires médicamentés comme des boeufs aux
hormones américains.…
Revenons sur la magnifique GESTION DES
MASQUES DE PROTECTION
Le 11 mai 2005 Marie-Christine Blandin, ancienne professeure, sénatrice
Europe Ecologie-Les Verts disait dans un rapport sur le risque épidémique : « Les
maladies respiratoires tuent plus de 3 millions de personnes par an. Elles
évoluent constamment nous obligeant à vivre avec un vaccin de retard. Il faut
donc absolument se doter d’un matériel préventif conséquent, masques pour le
public, équipements spécifiques pour les soignants ». Le gouvernement
en place, ainsi que les suivants, s’appuyant sur ce rapport ont donc décidé de
réduire puis supprimer les stocks stratégiques, entraînant en 2018 la fermeture
de PLAINTEL dans les Côtes d’Armor qui fabriquait 2 millions de masques par an.
Honeywell qui a racheté cette usine a fait tronçonner les machines pour les
mettre à la ferraille .... on connaît la suite....! Au principe « gouverner
c’est prévoir », Macron et ses
prédécesseurs préfèrent « Gouverner c’est faire croire ». On
n’a pas de masques donc on fait croire que ça ne sert à rien. Donc le 7 avril
2020, « notre chère » porte-parole du gouvernement déclarait
officiellement « porter un masque en public est inutile et
contre-productif ». Un mois plus tard, l’absence de masques dans les
transports publics était verbalisée par une amende de 135 euros ! Au
passage, si on infligeait une amende de 135 euros à chaque stupidité et à
chaque mensonge qu’elle proclame, on aurait moins de déficit public ! Donc
après avoir détruit l’usine de masques de Plaintel, le gouvernement a organisé
un magnifique pont aérien entre la France et le Chine pour se procurer des
masques. On a assisté à des scènes dignes de mauvais films d’action où les
cargaisons de masques étaient dans les aéroports, subtilisés par les uns,
détournés par les autres... Exemple à Mulhouse où une commande de masques de la
Région Bourgogne-Franche-Comté fut réquisitionnée sans aucune concertation ni
information, au profit des services de l’Etat : réquisition réalisée par
l’armée quasiment sur le pied de guerre. Autre information concernant les
masques français, ceux que vous avez peut-être achetés à 5 euros pièce : ils
sont fabriqués par des personnes en contrat intérimaire à domicile avec leur
machine personnelle. La production journalière demandée est de 250 masques, le
tout pour un salaire quotidien environ 70 euros, soit 0,28 euros par masque. La
crise des masques n’a pas fait que des malheureux !
En Espagne, la gestion des masques a été quasiment aussi
calamiteuse. La même guerre a eu lieu entre les régions et l’Etat central. On
en est même arrivé à des sommets dans la provocation et dans la victimisation.
En effet, le gouvernement central a livré à la Catalogne, 1 714 000 masques or
1714 est un chiffre particulièrement symbolique pour les Catalans puisque c’est
l’année où l’Espagne a mis fin à la période d’indépendance de la Catalogne. Le
ministre de l’Intérieur de la Région a dénoncé la volonté d’humilier le Peuple
Catalan. Ultra victimisation de la part des Catalans ?? Je pense qu’à
Madrid les esprits tordus d’anciens franquistes ont été tout à fait capables de
manigancer ce genre de provocation. Je rappelle que, jusqu’en 2019 la Fondation
Francisco Franco recevait des subventions de l’Etat et que les dons des
particuliers étaient déductibles de leurs impôts.
Pour en finir avec les masques rappelons tout de même que le
Maroc a été capable de couvrir tous les besoins de la population avec une
production locale.
Enfin sous le feu des
projecteurs ! Les EHPAD
Dans ces établissements d’hébergement pour personnes âgées
dépendantes, faute de masques et protections pour le personnel et pour les
familles, des patients ont été contaminés et certains en sont morts.
Heureusement des parents ont déposé des plaintes et ces affaires ne seront pas
oubliées. La situation de ces personnels sous-payés, sous-équipés, sous-formés
et super exploités est à mettre en
relation avec la rentabilité de ces établissements. En effet, la rentabilité
locative des EHPAD est parmi les plus élevées du marché. Leurs rendements y
sont d’environ 5%, pour les supermarchés 4,5% et pour l’habitat classique c’est
de l’ordre de 3%. Ces revenus bénéficient en plus d’avantages fiscaux. Ehpad Invest assure que 20 000 euros
placés dans l’achat d’une chambre en Ehpad restitue à l’investisseur, après 10
ans et revente de la chambre, 40 000 euros. Mais ces établissements rapportent
encore plus à leurs propriétaires. JF Gobertier, propriétaire du Groupe GDP
Vendôme (530 millions de chiffre d’affaires) est 99ème fortune
française. JC Maria, propriétaire
d’Orpéa (260 millions de chiffre d’affaires) est 197ème fortune
française. Rappelons que dans ces « machines à dividendes et à profits », près
de 10 000 personnes âgées ont trouvé la mort. Rapporté à une population totale
de 800 000 résidents, c’est comme si en France nous avions dénombré 9 millions
de morts du Covid. Même si, bien sûr, ce public est beaucoup plus fragile que
l’ensemble de la population française, cela interroge tout de même sur la
gestion de la crise dans ces établissements. Il semblerait assez normal que les
dirigeants de ces EHPAD rendent des comptes. En Espagne, ce fut encore plus
dramatique. Début mai 2020 on comptait déjà plus de 10 000 morts et plus de 110
enquêtes préliminaires. Quand le 19 mars, l’Etat ferme ses maisons de retraite,
pour la plupart, le virus y est déjà entré. A partir de fin mars, les hôpitaux
espagnols n’acceptaient plus d’accueillir les patients des Ehpad, ceux-ci
deviennent alors de véritables mouroirs.
Parlons maintenant de SANOFI
Ce fleuron de l’industrie française du médicament, cette
entreprise exemplaire, fierté de « nos » élites a fabriqué et vendu
entre 2007 et 2014 la dépakine, antiépileptique pris par 14 000 femmes
enceintes qui a provoqué plus de 3 000 malformations majeures sur leurs enfants.
Sanofi a été condamné le 27 novembre 2017 mais a toujours refusé de participer
au fonds d’indemnisation des victimes alors que l’Etat, lui aussi condamné, le
fait. L’affaire est en appel. Sanofi fabriquait le principe actif de cette dépakine
à Mourenx, dans les Pyrénées Atlantiques dans une usine qui rejeta pendant 2
ans, 190 000 fois plus de substances cancérigènes que la norme
autorisée. Cette entreprise n’est pas néfaste pour tout le monde : son
ex-PDG Olivier Brandicourt, nommé en 2015, quittait l’entreprise début 2020
après avoir engrangé 63 millions d’euros. Il touche actuellement une retraite-chapeau
de 530 000 euros par an et une retraite « normale » dont les cotisations ont
été payées par l’entreprise. Pendant son passage à la tête de l’entreprise, les
résultats de celle-ci ont stagné. Sanofi a pour l’année 2019, tout de même
versé 4 milliards de dividendes à ses actionnaires, dont 120 millions à la
famille BETTENCOURT et 200 millions au fonds de pension BLACK ROCK.
On a vu que la gestion de la crise fut plutôt calamiteuse,
responsabilités à partager avec les gouvernements précédents. Mais
rassurez-vous en Espagne, c’était
pire ! Jusqu’au 14 mars, début du confinement, le gouvernement n’a pas limité
les rassemblements mais les a même encouragés : le 8 mars, 120 000 personnes
étaient rassemblées à Madrid, certes pour une bonne cause, les Droits des
Femmes. Ce même jour, 10 000 personnes étaient réunies dans les arènes de cette
même ville pour le Congrès du Parti VOX (d’extrême droite). Le monde sportif
s’est montré particulièrement imprudent puisque le 19 février 2020, 3 000 supporters
de Valence se sont rendus à Milan,
considéré alors comme l’épicentre de l’épidémie, pour assister au match de
foot. Les Catalans pour une fois se sont montrés guère plus fins que les Espagnols
puisque le 29 février plus de 100 000 Catalans se sont rassemblés à Perpignan
pour accueillir leur ex- président Carles Puigdemont.
J’espère que cette crise aura au moins permis à beaucoup de gens
de s’apercevoir que la rentabilité à court terme et donc les privatisations dues
aux politiques néolibérales actuelles, dans le domaine de la santé comme dans
les autres, nous mènent directement à la catastrophe. En toute logique, on
devrait se retrouver en très très grand nombre dans les futurs mouvements
anti-libéraux pour enfin faire tomber les masques.
Jean-Louis Lamboley