Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 1 juin 2020


Ça va tanguer très fort !
Editorial du PES n° 63

Jupiter marche sur des œufs, déséquilibré qu’il est par les conséquences du Covid-19. Si ce n’est pas la boule, il semble avoir perdu sa boussole. Dans le château vermoulu de la 5ème République, s’instituant chef de guerre contre le virus, il n’a pas ravitaillé à temps la première ligne de feu. Invoquer les taxis de la Marne et l’union sacrée ne procurait pas les masques et les tests tant attendus. La rhétorique guerrière s’avérait incapable de dissimuler de piteux mensonges. La figure tutélaire dont Macron s’était affublée, disparaissait au profit des premiers de corvée : les vaillants soldats hospitaliers tant ignorés et toutes ces petites mains méprisées qui faisaient vivre le pays confiné. Start-up et milliardaires n’étaient d’aucune utilité ! Alors le petit théâtreux se fit dégoulinant de compassion, tout en se réfugiant derrière un comité d’experts à sa main, puis derrière son premier sinistre : le verbe du petit théâtreux était sans effet. Ça tanguait de tous les côtés, même parmi sa majorité de zélotes. Elle s’effritait par petits bouts de droite et de gauche.

Alors, comme Sarko jurant qu’il avait changé, Macron proclama qu’il se réinventait, déversa « un pognon de dingue » de chômage partiel et d’aides aux entreprises. Il fallait résoudre la difficile équation à quatre inconnues :
-        apaiser la colère populaire qui montait
-        sauver le système capitaliste quoiqu’il en coûte sans être sûr d’y parvenir avec toutes ces PME, ces sous-traitants et boutiquiers
-        maintenir une majorité présidentielle s’effilochant : le baron de Lyon, premier rallié, s’accrochant à Wauquiez pour sauver sa carrière, faisait mauvais effet à la veille du 2ème tour des municipales
-        contenir la Le Pen, engrangeant les mécontents et tous ceux ayant accès à la vitrine médiatique : le graveleux Bigard, le vicomte de Villiers et son Puy du fou, le professeur Raoult, ce druide enchantant toute la droite marseillaise… Et lui, sur les conseils de sa Brigitte, de saisir le téléphone pour leur dire « Je vous ai compris » et affaiblir la voix des réseaux sociaux.

Et puis va venir cette vague de faillites, de licenciements sur l’esquif présidentiel. Ça va secouer très fort d’autant que les hospitaliers, malgré tous les remerciements, veulent en découdre. Se renier, perdre la face ? Supprimer la tarification à l’activité de l’hôpital-entreprise, les ARS ? Accorder des augmentations de salaires, restaurer l’ISF… ? Impensable ! Les primes, les médailles, le défilé du 14 juillet en leur honneur, ils n’en veulent pas. Vite un comité Théodule avec à sa tête la Notat qui rempile pour calmer le tendre Berger… Faut passer l’été.

Le Macron navigue à vue pour retrouver le cap et maintenir le gouvernail de « l’aristocratie » stato-financière, lovée dans l’Etat de la 5ème République. La verticale du pouvoir présidentiel doit être maintenue et tout doit finir par des élections bien formatées.

A moins qu’un vent de révoltes, de manifestations, ne vienne chahuter ce navire qui prend l’eau. Restent pour contenir ces frappes, la diffusion de la peur, de la répression et la surveillance généralisée pour gérer ces populations en émoi.

Avec la récession-stagnation qui s’annonce, nous entrons dans l’ère de l’incertitude. L’espérance de transformation sociale et écologique radicale repose sur un changement culturel et comportemental qui refuse de s’en remettre aux puissants comme aux bateleurs fallacieux du style Beppe Grillo. C’est une longue marche à entreprendre, celle du débat par en bas, excluant tous les dignitaires du régime et ceux qui aspirent à les remplacer. La reconversion de l’économie, la définition d’un nouveau pouvoir à instituer, se doivent d’être l’affaire des travailleurs dans les usines comme dans les bureaux. Pas simple. Ça va tanguer très fort et ce, dans un contexte international tout perturbé. L’esprit des communards peut-Il infuser dans les têtes marquées par des décennies d’individualisme ? Sans organisations émergeant des profondeurs de la société, rien de réellement possible.

GD le 29.05.2020


Comment les banques et les Bourses évitent la faillite

Quel « mécanisme » évite la baisse des Bourses, voire la faillite de certaines banques  alors même que l’endettement des Etats et des entreprises prend une ampleur redoutable ? La réponse réside dans le rôle joué par les Banques centrales (FED, BCE, Banque centrale du Royaume Uni, du Japon…). Il consiste à apaiser les marchés financiers, leur « redonner confiance » dans la possibilité d’accumuler du capital malgré l’effondrement des chiffres d’affaires des entreprises, l’ampleur du chômage, la baisse de la consommation, qui se dessinent. Les moyens mis en œuvre sont de deux ordres. Le rachat des dettes des Etats et des entreprises d’une part, et d’autre part, l’émission de liquidités au profit des banques privées à des taux extrêmement bas, voire gratuits, afin de les inciter, en prêtant à des taux supérieurs, à maintenir en survie les entreprises (et les Etats) et éviter, à la plupart d’entre-elles, la faillite. Cette fonction d’amortisseur, aux effets immédiats de la réduction de la production et de la consommation, repose sur le pari qu’à brève échéance, les moteurs de l’économie en réalité vont repartir comme avant. Effets pervers à court terme : les entreprises s’endettent encore plus, la dette des Etats s’accroît. Si les marchés financiers sont ravis de l’aubaine, la volatilité des capitaux à la recherche de rentes financières les plus sûres tout comme la fuite de capitaux de certains secteurs ou pays (en particulier des plus pauvres) n’augure rien de bon. La restructuration du capital laissera des pans entiers de l’économie en déshérence et plus qu’avant, les entreprises endettées qui s’en sortiront chercheront à recourir à une main d’œuvre à bas coût. Les secteurs de l’industrie « lourde » (métallurgie, automobile) seront incités à délocaliser. Qui plus est, les capitaux flottants pourraient bien investir dans la pierre, suscitant la formation de bulles immobilières d’autant que la reprise risque d’être bloquée par l’épargne de précaution des consommateurs. Par elle-même, l’offre de crédit ne rencontrera pas une demande accrue si, comme le supposent nombre d’économistes, nous entrons dans une période marquée, pour le moins, par la stagnation.

Illustration de la monétisation des dettes : la BCE détient 20 % des dettes publiques de la zone euro et s’achemine vers 25 % d’ici la fin de l’année. Elle procède à des rachats d’obligations émises par les Etats quelques jours, voire quelques semaines après leur émission. Ainsi l’Italie peut emprunter à 2 % auprès des marchés, se délester d’une partie de ses emprunts auprès de la BCE qui rémunère les intérêts à sa place, tout en différant les remboursements du capital. La FED, la banque centrale US, va plus loin en rachetant des créances immobilières, des dettes des municipalités. Dans ce système de domination du capital financiarisé, les marchés mesurent les risques et les capacités des entreprises et des Etats à rembourser (1). Ainsi, la dette de l’Etat français est constituée à 54 % d’obligations détenues par des « résidents » étrangers (fonds de pension, fonds souverains comme ceux des pays pétroliers du Golfe), à 25 % par des banques et assurances tricolores, à 20 % par la BCE. Quant aux pays pauvres surendettés, leurs obligations proviennent de créanciers publics et en grande partie du FMI et de la Banque mondiale ainsi que de fonds vautours (spéculatifs). La chute des prix des matières premières dont ils dépendent pour assurer des rentrées fiscales n’a rien de rassurant. En tout état de cause, les inégalités entre pays, leur dépendance s’en trouveront renforcées. Autre élément à prendre en compte : le traumatisme des populations suite à l’impact de la crise sanitaire et économique. Il induit certainement de la réflexion et des changements de comportement : baisse de la consommation frivole et épargne de prévention, frilosité des investissements dans l’hôtellerie, la restauration, le tourisme ici et ailleurs, révoltes sociales (comme au Liban...), voire émeutes de la faim et migrations. Pour les peuples, s’attaquer aux effets de la crise sans viser les causes ne les délivrera pas de leurs chaînes. Reprendre en main leur destin suppose d’effacer les dettes, de chasser les gouvernements acquis au capitalisme qu’ils servent et dont ils se servent, de déterminer par eux-mêmes leurs besoins, ce qui implique un projet politique de transformation radicale et une restructuration et conversion de leur système économique… On en est encore loin !

GD le 22.05.2020  

(1)              A cette « complexité », guère explicitée dans les médias, il faut ajouter le fait que les Etats, à la différence des collectivités locales, n’inscrivent dans leur budget que les intérêts de la dette à rembourser. Le « principal » (le capital emprunté) est détenu par une agence de l’Etat, chargée de vendre sur le marché « secondaire », les emprunts contractés : ce qui s’appelle dans le langage de l’économie classique : « faire rouler » la dette.

Le coût du risque
Si le sacré a été percuté, le veau d’or est toujours debout. La finance continue à bien se porter grâce à des perfusions massives d’euros et de dollars. Un exemple : Brico-Dépôt et Castorama obtiennent un prêt de 600 millions d’euros garantis par l’Etat. Ces enseignes appartiennent au groupe anglais Kingfisher. En février 2018, la partie comptable de son activité est délocalisée en Pologne avec 409 suppressions d’emplois à la clé. En juillet 2019, 11 magasins sont fermés, laissant sur le carreau 789 employés. Pour la 4ème année consécutive, Kingfisher est aujourd’hui  en recul en France. La Covid-19 n’est pas à l’origine des difficultés (?) du groupe. Kingfisher annonce une prime de 1 000€ à ses équipes. Merveilleux ! On dirait du Macron. Signalons - c’est un peu plus qu’une anecdote - que Black Rock Fund Advisors figure parmi les principaux actionnaires du groupe. Banques prêteuses : BNP Paribas, Crédit Agricole Corporate and Investsment Bank, Crédit Lyonnais.
Bricoler, au prochain confinement, sauvera l’économie !

Collectif Droit à la Parole/Saint-Dié, le 17.05.2020


Epidémie de répressions en France…
Depuis le 11 mai, la machine répressive se remet en marche. Les poursuites judiciaires engagées à l’encontre de militants, suite à des actions de blocages et de rassemblements pendant le mouvement contre le « projet Retraites », se multiplient. A Nancy, mais aussi à Châlons-sur-Saône, La Roche-sur-Yon, Millau et en Ardèche, les convocations au commissariat s’enchaînent ainsi que les contrôles d’identité et verbalisations. Pour des faits remontant au 10 janvier, devant le dépôt de bus Kéolis à Nancy, 13 militants risquent 3 ans de prison et 4 500€ d’amende, alors que l’action n’a eu aucune incidence sur le fonctionnement de l’entreprise et n’a empêché aucun salarié de travailler. Il s’agit, selon le porte-parole de Solidaires Meurthe et Moselle d’une « guerre sociale contre les militants et contre toute forme de contestation. Si la vie démocratique doit reprendre, ce n’est pas seulement l’organisation du 2ème tour des municipales, c’est aussi la liberté d’expression et de rassemblement ». Aux motifs d’entrave à l’économie ou à la circulation ferroviaire, les militants sont poursuivis et condamnés. « Il s’agit de criminaliser. Il y a volonté de faire taire la parole dissidente, incapable qu’est le gouvernement d’avoir une parole politique empreinte de justice sociale ».
Paru sur bastamag.net   


…et en Algérie, où la répression s’accentue
« On se sent étouffés par ce qui se passe, des jeunes se retrouvent en prison pour une publication Facebook » selon Riadh Touat, fondateur en 2017 du site Weh Derna ?, un média citoyen, porte-voix de la jeunesse algérienne. Il s’inquiète du durcissement de la répression notamment sur les réseaux sociaux devenus le principal canal d’expression d’un Hirak suspendu. « La prison est systématique, il n’y a pas de demi-mesure. Ils foutent des jeunes en prison qui réclament simplement une vie meilleure ». Des collectifs citoyens s’organisent pour soutenir la cause des détenus d’opinion. La liberté de la presse est menacée : annonce de la suspension temporaire du média satirique El Manchar par son éditeur, blocage de trois médias d’information indépendante (Radio M, Maghreb Emergent et Interlignes) et incarcération de plusieurs journalistes.
Dans cette morosité ambiante, Radio Corona Internationale « la radio de la fin du monde » est née le 23 mars sur Facebook, un média drôle et engagé aux airs de radio pirate. D’autres initiatives sont nées sur le Web en vue de maintenir, voire « raviver la flamme du Hirak », à l’instar de l’Union des étudiants algériens libres (UEAL) qui propose des débats nocturnes avec des personnalités engagées du mouvement. Riadh Touat a lancé une série d’entretiens en direct où il dresse le portrait de jeunes engagés dans d’autres pays afin de « casser la déprime », de quoi apporter de l’optimisme au sein de la jeunesse particulièrement ciblée par les opérations de police. Beaucoup imaginent déjà la reprise du mouvement dans la rue « Néanmoins, il y a cette peur des arrestations qu’il faudra vaincre à nouveau. Il faut renouveler l’expérience à travers le génie populaire pour que le Hirak se réinvente ».
Paru sur alencontre.org