Turquie.
Evocation historique
Pour mieux comprendre le jeu d’Erdogan
La
Turquie est un Etat de 85 millions d’habitants, une fois et demi plus grande
que la France. Elle a la particularité d’avoir 3 % de sa surface et 14 % de sa
population sur le continent européen. La partie asiatique, l’Anatolie, est plus
rurale, moins dynamique économiquement que la partie européenne. Istanbul qui
se trouve dans la partie européenne compte 12 millions d’habitants alors que la
capitale Ankara, située dans la partie asiatique n’en compte que 6 millions.
Ces deux parties sont séparées par le détroit du Bosphore, la mer de Marmara et
le détroit des Dardanelles. Ce dernier relie la Méditerranée à la mer de Marmara
et le Bosphore la mer de Marmara à la mer Noire. La Turquie contrôle ainsi totalement le trafic maritime dans cette région.
Pour bien comprendre l’importance de ces deux détroits, il faut rappeler que la
mer Noire est le débouché maritime de la Bulgarie, la Roumanie, la Moldavie,
l’Ukraine, la Russie (pour elle ce n’est pas le seul) et la Géorgie. Tous ces
pays (hormis la Russie) dépendent donc de ces deux détroits turcs pour
rejoindre la mer Méditerranée et le reste du monde.
Empire
byzantin
Le
territoire de la Turquie actuelle est une des régions qui a toujours été
habitée dans l’histoire de l’humanité. De nombreux empires s’y succèdent
jusqu’en 300 après JC, date à laquelle le territoire est conquis par les Romains. Ils y installent alors l’empire romain d’Orient : l’empire byzantin qui doit son nom à la
grande ville située côté européen, Byzance. Cette dernière sera renommée
Constantinople (ville de Constantin). Cet empire deviendra très puissant et
très riche car il se trouve à l’arrivée des routes de la soie et des routes
maritimes qui viennent d’Orient.
En
l’an 400, cet empire s’étend de l’Algérie au Soudan, au Yémen, à la Judée, à la
Syrie et, côté européen, il englobe la Grèce, la Bulgarie, la Roumanie. Il
devient rapidement totalement indépendant de Rome, économiquement mais surtout
idéologiquement puisqu’en 312 Constantin le Grand se convertit au christianisme.
L’empire romain d’Occident lui n’adoptera cette religion qu’à la fin du siècle.
Le christianisme se développera de
façon différente (culte, mariage des prêtres autorisé) et donnera naissance à
l’église orthodoxe. Cet empire d’Orient prospère survivra à la chute de
l’empire d’Occident(476), pour devenir le lieu d’une culture originale.
Cette
richesse attire les convoitises des peuples voisins. Il subira de nombreuses attaques : les runes, les
normands, les perses l’affaibliront progressivement. Même les Croisés
saccageront Constantinople en 1204. C’est l’empire turc des Ottomans qui lui
donnera le coup de grâce en prenant Constantinople en 1453. L’empire byzantin
laisse alors la place à l’empire ottoman.
Empire
ottoman
Cet
empire s’étend rapidement et recouvre quasiment les mêmes frontières que
l’empire byzantin à son apogée. A l’intérieur, il regroupe les minorités non
musulmanes en millets, qui sont des organisations administratives avec une certaine
autonomie à condition de rester loyales à l’empire et de payer un impôt
spécifique, le Harac. Afin d’y échapper, les plus pauvres de ces communautés se
convertissent à l’islam.
A
partir du début du 17ème siècle, l’empire ottoman perd peu à peu des
territoires : la Grèce puis l’Algérie, enfin les Balkans. Dans le même
temps, les populations arméniennes se révoltent pour obtenir davantage de
droits et de liberté. Entre 1894 et 1896, 200 000 de ces Arméniens seront
massacrés.
En
1912, à l’issue d’une guerre contre l’Italie, l’Empire perd la Lybie. En 1914,
il entre dans la 1ère guerre
mondiale aux côtés de l’Allemagne. En 1915,
l’empire décide de « régler définitivement » le problème des
Arméniens sur son territoire et en massacre près de 1.2 million : c’est le génocide
arménien. Le 30 octobre 1918, la défaite militaire de l’empire ottoman est
avalisée et son démembrement est programmé. Le traité de Sèvres prévoit un
Kurdistan autonome, une Arménie indépendante, la région de la mer Egée revient
à la Grèce et les territoires arabes sont sous le contrôle de la France et du
Royaume Uni.
Au
cours de la guerre des Dardanelles, un militaire s’illustre et devient un héros
national en battant les Français et les Anglais. Puis, durant l’occupation
alliée de l’empire ottoman, il refuse de voir sa nation démembrée par le traité
de Sèvres. Il se révolte alors contre le gouvernement impérial et crée un
deuxième pouvoir politique à Ankara. Cet homme, c’est Mustapha Kemal. A la tête de ses partisans, il repousse les armées
arméniennes, italiennes, grecques hors d’un territoire qu’il considère comme
devant devenir un Etat indépendant. A la suite de ces victoires, les forces
alliées s’engagent à quitter le pays et le 29
octobre 1923, il proclame la République
de Turquie. Il rebaptise Constantinople, Istanbul, et fait d’Ankara la
nouvelle capitale du pays.
Nouveau
régime et modernisation
Dans
une volonté farouche de tirer un trait sur le passé ottoman et islamiste du
pays, il décide d’engager la Turquie dans une occidentalisation forcée, donc un rapprochement vers l’Europe, tout
en gardant l’islam comme religion
quasi officielle mais très contrôlée. Cet islam « étatique » sera le
ciment entre des Turcs de régions de traditions différentes. Il prend une série
de mesures assez radicales :
-
la laïcité est
inscrite dans la Constitution
-
l’alphabet arabe
est remplacé par l’alphabet latin
-
le port du voile
est interdit
-
les femmes obtiennent le droit de vote et d’éligibilité aux élections locales en 1930 et aux élections nationales en 1934. Sur ce point, il devance nombre d’Etats européens, dont la
« patrie des droits de l’homme » (ceux de la femme attendront encore
un peu) !
-
la polygamie est
interdite, le mariage civil est le seul mariage reconnu par l’Etat
-
les 144 membres
de la famille impériale (dynastie ottomane) sont exclus du pays
-
l’école primaire
devient gratuite et obligatoire
-
le jour de repos
hebdomadaire est le dimanche à la place du vendredi.
Mais,
Mustapha Kemal (devenu en 1923, le premier président de la République turque)
s’il s’est montré très progressiste dans le domaine social, fut, au niveau
politique, beaucoup plus conservateur. Il instaure en 1923 un parti unique
(Parti républicain du peuple). Il fera, certes, un petit effort pour faire
entrer la Turquie dans un régime plus démocratique en demandant à un ami en août
1930 de créer un parti d’opposition mais, en octobre de cette même année, il
dissout ce parti car rapidement dominé par les islamistes, estimant que « ses réformes ont besoin d’être consolidées
avant d’être confrontées à un parti d’opposition ».
En
interdisant le port du voile aux femmes, et le port du fez (coiffe
traditionnelle) aux hommes contraignant ceux-ci à utiliser des chapeaux
« occidentaux », en forçant les gens à adopter un patronyme (comme les
Européens) - le sien était Atatürk - le
père des Turcs - il fait naître des frustrations, de la rancœur, qui finiront
un jour ou l’autre par s’exprimer.
Il
sera très dur vis-à-vis des Kurdes
(musulmans eux aussi mais de culture différente des Turcs). Régulièrement, ils
seront réprimés dès qu’ils manifesteront
la moindre volonté d’autonomie. Les
Alévis (musulmans « hétérodoxes ») vivront la même chose. En
1938, 40 000 seront tués dans la révolte de Dersim.
Atatürk
a changé radicalement la Turquie. Il meurt en 1938. Le nouveau président Ismet Inönü sera très prudent
concernant l’engagement de la Turquie dans la 2ème guerre mondiale.
Après avoir signé un pacte de non-agression avec le 3ème Reich, la
Turquie s’engage au côté des Alliés, deux mois avant la capitulation de
l’Allemagne. Elle devient un des 51 membres fondateurs de l’ONU. Elle
« bénéficiera » du plan Marshal.
Les
décennies suivantes se caractérisent par l’abandon
lent et progressif des principes instaurés par Atatürk. Les forces
religieuses reprennent de l’autonomie et du pouvoir (l’appel à la prière se
fait à nouveau en arabe). En 1950,
le Demokrat Parti (DP) gagne les élections législatives. Celâl Bayar devient président,
le parti adopte une ligne beaucoup plus favorable à l’islam. Il développe une
politique économique visant à aider les régions rurales. Il aide les
agriculteurs à se mécaniser, à cultiver des céréales… Les régions rurales
deviennent un important réservoir de voix pour le DP. A cette époque, 80 % de la population vit en zone rurale. Mais en 1955, les USA
mettent fin à leur aide économique ce qui provoque une crise. Le gouvernement
engage alors une politique de rigueur qui crée beaucoup de mécontentement. Et
en 1960, l’armée prend le pouvoir après
un coup d’Etat, dissout le DP, instaure l’Etat d’urgence. L’ancien président
Adnan Menderes est pendu pour haute trahison. Une nouvelle Constitution qui
conforte le rôle politique de l’armée est mise en place. Les militaires vont
progressivement rendre le pouvoir aux civils et à chaque élection les islamistes progressent.
La
Turquie traverse à cette époque une période
très chaotique. En 1974, elle
intervient militairement à Chypre,
face à la volonté grecque de rattacher l’île à son territoire. La victoire
turque amène à la partition de l’île. En 1975, « l’Armée secrète de
libération de l’Arménie » commence à organiser des attentats. Jusqu'en 1977,
120 attentats tueront 22 diplomates turcs et 46 personnes. En 1977, le défilé
du 1er mai est attaqué par des militants d’extrême-droite faisant 27
morts. Cet évènement marque le début d’une quasi
guerre civile qui fera plus de 5 000 morts jusqu’au début des années1980.
En décembre 1978, près de 1 000 Alevis sont massacrés pour écraser un
mouvement révolutionnaire qui naissait parmi cette minorité durant le massacre
de Maras. En 1980, une centaine d’Alévis seront tués à Corum. La Turquie est
confrontée à un tel chaos sécuritaire et économique que le 12 septembre 1980, a lieu un coup
d’Etat militaire, entraînant l’arrestation de 250 000 personnes, la
dissolution du parlement, l’interdiction des partis politiques. La répression
brutale de l’armée est principalement menée à l’encontre de la
« gauche », « la menace communiste », mais également contre
la droite radicale. Se multiplient alors la torture, les emprisonnements, la
suspension des libertés. De nombreux Turcs prennent le chemin de l’exil.
La
nouvelle Constitution (1982) concoctée par les militaires concentre le pouvoir
entre les mains de l’exécutif. Le Parlement est facilement contrôlable :
pour s’y présenter, il faut réunir 10 % des voix au niveau national ;
ainsi les partis minoritaires ne peuvent bloquer les votes. Même si la
Constitution a été depuis, un peu amendée, cet « autoritarisme démocratique »
est toujours en vigueur aujourd’hui. Les militaires veulent une Turquie unie,
identitaire, « cimentée » par un islam sunnite contrôlé. Malheur aux minorités : les Alévis
sont discriminés, voire persécutés. Les Kurdes, tentant d’affirmer leurs
différences et de s’émanciper de la Turquie à travers le PKK (Parti des
Travailleurs du Kurdistan), subiront la plus dure répression. La brutalité de
la répression turque à qui répond la lutte armée kurde fera près de 40 000
morts en quelques années. Les putschistes dont l’idéologie est le militarisme
et le nationaliste instrumentalisent la religion et « impriment »
très fortement ces « valeurs » dans la société turque, et ce, jusqu’à
l’époque actuelle.
Les
militaires rendent peu à peu le pouvoir aux civils mais dans le cadre d’une
société où la dissidence, la différence n’ont pas de place. Cette atmosphère de
« crainte étouffante » gagne des secteurs qui semblaient
intellectuellement armés pour y résister : médias, intellectuels,
enseignants.
L’ère
Erdogan
En 1994,
sous la bannière du Refah, « parti de la prospérité », un certain
Recep Tayyip Erdogan est élu maire d’Istanbul. Ce parti islamiste
modéré et conservateur, pro-européen, progresse à chaque élection. En 2001
devient l’AKP (Parti de la Justice et du développement) et Erdogan en est le chef.
En novembre, l’AKP remporte les élections législatives et Erdogan devient 1er ministre en mars 2003. Ankara adopte alors de nombreuses
réformes pour répondre aux critères d’adhésion à l’UE. La Turquie avait déposé
sa candidature en 1987 et l’UE ne montrait pas un ardent désir de voir ce pays
la rejoindre… Toutefois, le statut de candidat à l’adhésion est accordé à la
Turquie en 1999 (avec des conditions : abolition de la peine de mort, liberté
de culte, autorisation de l’enseignement de la langue kurde… La France et
l’Allemagne bloqueront les négociations en 2007. Il est vrai que la situation
géographique, le manque de liberté d’expression, l’autoritarisme, l’arbitraire
des autorités au pouvoir, la place de la religion musulmane et
« l’annexion » de la moitié de Chypre par la Turquie, posaient
question.
A
partir de ce moment, Erdogan change d’attitude et fait de moins en moins de
compromis en direction de l’UE. Est-ce le refus d’entrée dans l’UE qui provoque
ce changement ou ce changement qui provoque la rupture des négociations ?
La question reste posée pour longtemps. Toujours est-il qu’Erdogan applique une
politique plus dure encore envers ses opposants et accentue le pouvoir
présidentiel aux dépens des représentations démocratiques. En août 2014, il devient président de la Turquie. 16
de ses opposants sont condamnés à la prison à perpétuité pour avoir voulu
renverser le gouvernement ; les négociations avec les organisations kurdes
sont rompues et la Turquie se lance dans une véritable guerre contre le PKK. Elle
s’éloigne de plus en plus des « standards » occidentaux et européens
mais reste membre de l’OTAN ; elle accepte de « réguler » le flux des réfugiés et d’accueillir des
expulsés venant d’Europe, contre une enveloppe de 6 milliards d’euros.
En
2016, la « légère » dérive
autoritaire prend une autre dimension. Le 15 juillet, une partie de l’armée
tente de renverser le gouvernement. Ce putsch
fait 290 morts et l’arrestation immédiate de 7 500 militaires. Erdogan en profite pour
« purger » toute la société turque des personnes qui ne lui sont
pas totalement « dévouées ». Il désigne Fethulla Gülen (cr encart)
comme le « mentor » du coup d’Etat. Dès lors, toute personne
soupçonnée de gülenisme subira les « foudres du pouvoir d’Erdogan ».
Les
chiffres sont effarants. On peut citer, pour exemples :
-
dès le 19 août,
26 000 personnes placées en garde à vue, 13 500 en détention
provisoire, 75 000 voient leur passeport confisqué
-
en novembre 2016,
85 000 fonctionnaires limogés et un
certain nombre, incarcérés
-
en juin 2018,
plus de 140 000 personnes limogées ou suspendues et 50 000 arrêtées
Toutes
les strates de la société turque sont purgées (armée, justice, médias, police,
associations…). Même la fédération turque de football a licencié 94 arbitres…
Erdogan
sort renforcé de cette période. Il devient, aux yeux de nombre de Turcs
aspirant à une vie plus calme, l’homme providentiel assurant la continuité des
institutions. Il reconstruit une nouvelle armée (40 % des hauts gradés ont été
limogés après le putsch) et la réarme : le budget militaire passe de 14
milliards en 2016 à 20 milliards en 2020 (cette même année, la France y
consacre 53 milliards et les USA 700 milliards €). Il achète des armes à
l’étranger - même à la Russie - tout en étant membre de l’OTAN. Les Occidentaux
étant de plus en plus prudents à son égard, il développe l’industrie militaire
turque. En 2020, la Turquie produit 70 % de son armement et en exporte dans
beaucoup de pays sunnites, comme, par exemple, les drones qui ont bien aidé les
Ukrainiens face à la puissance de feu russe, ou en Libye, en Syrie. Ces drones
sont fabriqués par la société privée turque Baykar et sont très performants (à
noter que le PDG de cette entreprise est le gendre d’Erdogan).
La
popularité d’Erdogan vient aussi de la « réussite économique » de la
Turquie, au début des années 2000. Entre 2003 et 2015, la Turquie a triplé son
PNB. Cette prospérité s’explique par un effet de rattrapage. A la fin du 20ème
siècle, la Turquie, si elle était en retard économique, est boostée par un
modèle économique libéral reposant sur le développement du marché intérieur et
sur l’ouverture des frontières, esquissée dès les années 80. La perspective de
l’adhésion à l’UE a attiré les investisseurs. Elle est devenue durant ces
années, la Chine de l’Europe. Ce « miracle » économique contraste
avec les années de croissance faible, d’inflation, de corruption de la fin du
20ème.
Erdogan
« surfe » sur cette popularité pour renforcer les pouvoirs du
président. En 2017, les Turcs approuvent, par référendum, une réforme de la
Constitution qui accentue ses pouvoirs. En 2018, il est réélu, comme en 2014,
au 1er tour de scrutin. Il le sera à nouveau en 2023 (au 2ème
tour cette fois-ci) pour un 3ème mandat.
Après
avoir « maté » l’armée, les oppositions de gauche, les opposants
culturels, il a les mains libres pour conduire, à sa manière, le futur de la
Turquie et ce, avec l’approbation et le soutien de la majorité des Turcs. Il a
réussi, grâce à une propagande forgée sur une image populaire : enfant
d’un quartier pauvre d’Istanbul, devenu footballeur professionnel abandonnant
cette carrière pur se « mettre au service de la Turquie ». Il a même
réussi à se faire emprisonner 4 mois par les militaires en 2001 pour ses idées
islamistes.
Le
futur de la Turquie, pour lui, c’est redevenir une grande puissance, à l’image
du « sauveur » de l’empire ottoman, très présente dans l’inconscient
ou le conscient de nombreux Turcs. Il veut faire de la Turquie le leader
sunnite du Moyen-Orient. Pour y parvenir il s’appuie sur une société très
contrôlée, soumise, une armée dévouée. Il a les moyens de pression sur l’Europe
et les Occidentaux. Il s’inscrit dans la politique de rejet des migrants menée
par l’Europe et, surtout, il joue de sa position géostratégique très favorable.
La Turquie contrôle l’arrivée d’une partie
du pétrole et du gaz venant du Moyen-Orient, qui approvisionne l’Europe par des gazoducs et oléoducs passant par la
Turquie. Elle contrôle le passage entre la mer Noire et la mer Méditerranée.
Dans cette région extrêmement instable, la Turquie est le dénominateur commun
de nombreux conflits (Russie/Ukraine, Haut Karabach, Syrie, Palestine, Libye…).
Il a la prétention d’apparaître le médiateur dans certains conflits et
notamment entre la Russie et l’Ukraine.
Erdogan
a de nombreux atouts dans son jeu et, même si une crise économique très
violente touche la Turquie aujourd’hui (l’inflation a atteint 60 % en 2023), il
a toujours le soutien d’une majorité de la population qui n’a pas oublié que,
depuis son accession au pouvoir, en 20 ans, le revenu moyen des Turcs a été
multiplié par trois.
Jean-Louis
Lamboley, le 6.12.2023
Sans connaître l’histoire, impossible de
comprendre le présent.
Ce
qui est retracé ci-dessus de façon succincte, suggère qu’au sein de l’histoire
s’inscrivent des évènements qui nous concernent aujourd’hui. Ainsi,
l’effondrement de l’empire ottoman et son démembrement provoquent le mandat
colonialiste de la Grande-Bretagne sur la Palestine. Sans la 2ème guerre mondiale et la « solution finale
nazie », il n’y a pas l’émergence du sionisme et la constitution d’Israël.
Sans la tentative d’imposer la « démocratie occidentale » au Moyen
Orient par les Etats-Unis des Bush, il n’y a pas l’émergence d’al Qaïda ni de
l’État Islamique en Irak. Plus généralement, pas de révoltes sans oppression
contre les Kurdes, les Palestiniens etc. Sans l’effondrement du nationalisme
arabe, il est impossible de comprendre l’émergence des conflits entre sunnites
et chiites et leur instrumentalisation. GD
encart
Fethullah Gülen
Intellectuel
musulman turc, enseignant une vision d’un islam « moderne ». Il
exprime sa croyance en la science, au dialogue interconfessionnel et en la
démocratie. Après avoir soutenu Erdogan (2002/2011), il en critique les choix.
Il est accusé en 2014 d’être à l’origine de révélations dans une affaire de
corruption impliquant des ministres et des cadres de l’AKP. Son mouvement est
déclaré terroriste et ses membres réprimés. Il se réfugie aux Etats-Unis où il
vit toujours. Il nie être à l’origine du coup d’Etat de 2016, et condamne les
putschistes.