Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


dimanche 30 août 2020

 

La 5G, une urgence, pour quoi, pour qui ?

 

Bienvenue dans la société hyper connectée, qui rend les objets « intelligents », les villes « intelligentes ». La 5ème génération de standards pour la téléphonie mobile (5G) est le nouvel eldorado pour les opérateurs de téléphonie qui préparent la mise en vente de l’Iphone 11. Quant au bien-être, aux relations humaines et sociales, à la santé, à l’environnement, y ont-ils songé ceux qui décident, sans nous, et imposent le « tout numérique », multipliant les antennes et ondes électromagnétiques sur une planète déjà bien surchargée ? Nous préparent-ils à la surveillance généralisée de toutes les activités humaines ? A quelles fins ? Pourquoi cette précipitation ? La course à la  technologie de communication dite « intelligente » s’accélère.         

 

1 - Quel est ce monde rêvé de la 5 G ?

 

La 5G promise pour 2021, succédera à la 4ème génération (4G), qui, pour l’heure, est encore loin d’être accessible à tous : les « zones blanches » sont encore nombreuses. Seul un quart des Européens y a accès et, en France, elle couvre principalement les zones urbaines - 40% du territoire n’en dispose pas et des centaines de communes en sont encore à la ZéroG ! Et nombre de citadins et villageois attendent encore le raccordement filaire par la fibre optique. Pourquoi tous ces outils de communication ?  

 

Pour Macron, et bien d’autres européens, l’avenir est à la technologie sans fil pour que « l’intelligence artificielle fasse disrupter tous les modèles économiques ». « Je veux que nous ayons des champions d’intelligence artificielle ici en France » et « pour que l’UE continue de faire la course en tête, j’ai lancé sans attendre une initiative afin d’accompagner et d’accélérer nos efforts de recherche en Europe sur la 6G ! (le Monde du 29.01.2020).

 

Ce monde rêvé de la 5G promet l’égal accès à internet partout. Avec un temps de latence inférieur à une milliseconde, mille fois plus de données transmises et un débit cent fois supérieur à la 4G, cette technologie ouvre la voie du téléchargement éclair, des voitures autonomes, des villes intelligentes, des opérations chirurgicales à distance, des usines dirigées par des robots, connectées H24. Elle promet la démocratisation de « l’internet des objets » avec des frigidaires qui indiquent les aliments périmés, des poubelles informant les éboueurs qu’il faut les vider et l’éclairage public qui s’adapte à la position du soleil…

 

Cette course de vitesse engagée entre les géants de la téléphonie mobile est indispensable aux robots-traders sur les marchés de la finance ou encore aux GAFAM voulant traiter, à des fins commerciales, toutes les empreintes numériques de nos cartes de crédit, de fidélité, etc. La 5G est, avant tout, un vaste marché à conquérir. Des millions d’iphone 11 vont déferler sur le monde mais aussi tous ces objets connectés (34 milliards d’objets en 2025), portant les données personnelles en provenance de nos bracelets, nos maisons, nos voitures ou nos hôpitaux connectés, transmises aux géants de télécommunication grâce au méga-débit de la 5G. Et puis il y a tous les gadgets inutiles connectés : les baskets Nike auto-laçantes, la fourchette anti-bâfrement qui envoie une vibration si on mange trop vite, la montre qui décompte notre temps de vie, le décapsuleur qui, lorsqu’on ouvre une bière, envoie une notification à nos amis…. Alors, fais gaffe aux lunettes que portent tes amis d’apéro, ce sont peut-être des lunettes-espions avec caméra vidéo enregistreuse intégrée. Eh oui ! tous ces « objets à la con » (1) connectés sont disponibles à la vente !  

 

Ce monde « rêvé » que les gouvernants nous imposent est celui du capitalisme technophile et son credo néolibéral : produire, vendre, s’enrichir, puis… jeter pour produire, vendre, s’enrichir encore… Peu importe ce que l’on produit, peu importent les besoins des populations en matière alimentaire, sanitaire, éducative, culturelle, sociale… Il ne s’agit pas de permettre à chacun de vivre dignement, dans un monde écologiquement sûr, socialement juste. Il s’agit de gagner la guerre technologique déjà engagée entre les Etats-Unis, l’UE (l’allemand Vodaphone, Telecom Italia et les français Bouygues Telecom et Orange) et la Chine (Huawei). Selon la Commission européenne, cela représenterait 500 milliards d’euros d’investissements sur les dix prochaines années, faisant bondir le PIB européen de 6% et créer 1.3 million d’emplois.

 

2 - Au diable la démocratie, au diable le principe de précaution

 

Le gouvernement français veut passer en force, lancer la procédure d’attribution des fréquences en septembre pour la mise en œuvre des premiers relais 5G en 2021. Aucun débat démocratique n’a été ouvert sur les enjeux de cette version « intelligente » du capitalisme technophile, avec ses risques de nuisances environnementales  et écologiques, ses dérives sécuritaires et de surveillance généralisée, l’exercice d’un techno-totalitarisme selon Pièces et Main d’œuvre (2). Pendant l’état d’urgence sanitaire, le gouvernement a autorisé (ordonnance du 25 mars 2020) le déploiement libre de la 5G sur le territoire français et supprimé, au passage, l’obligation pour les opérateurs, d’obtenir l’accord de la Commune pour implanter les antennes. La voie est libre ! La ministre de l’industrie affirme : « Oui, nous avons pris nos responsabilités sanitaires, environnementales » sans pouvoir montrer l’ombre du résultat d’une étude : l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) ne rendra ses conclusions que fin 2021. Le principe de précaution est pourtant inscrit dans la loi européenne exigeant du producteur d’une nouvelle technologie la preuve de son absence de danger avant de la commercialiser. A ce titre, deux ministres ont demandé au 1er ministre d’attendre l’étude, des élus LR ont proposé une commission d’enquête, la Convention Citoyenne pour le Climat a adopté à 98 % un moratoire sur la mise en place de la 5G. Proposition écartée par Macron, qui s’était engagé « à reprendre sans filtre » les propositions de ladite Convention !

 

Et pourtant, le Comité scientifique européen sur la santé, l’environnement et les risques émergents a  pris position (prudemment) fin 2018 « la technologie 5G ouvre la possibilité de conséquences biologiques imprévues ». Les chercheurs indépendants ont détecté des effets néfastes sur les organismes vivants, plantes, insectes et animaux car « la 5G nécessite des ondes particulièrement puissantes produisant une pénétration accrue des champs électromagnétiques. Leur idée est d’utiliser beaucoup plus d’antennes qu’avant, pour mieux tout couvrir et tout pénétrer, les murs par exemple ! Des dizaines de millions d’antennes 5G vont affecter tout le monde dans l’Union et ce sans un seul véritable test biologique ».      

 

3 - Les capitalistes technophiles n’ont que mépris pour l’écologie qui ne leur rapporte rien !

 

Les risques ont été dénoncés par des chercheurs indépendants, mais aussi par le très officiel CNRS qui titrait en 2018 : « Numérique : le grand gâchis énergétique ». Car, pour fonctionner, internet a besoin de supports matériels, d’espaces territoriaux et d’une énergie électrique considérable. En 2018, les ordinateurs, mobiles, tablettes, Data Centers, Réseaux, absorbaient à eux seuls, 10 % de la consommation d’électricité mondiale. Dans les années 2020, « l’économie digitale » qui regroupe l’univers cybernétique (terminaux, réseaux, crypto-monnaies, stockage et transmission d’information), pèsera pour 20 % ; la croissance en besoins énergétiques de cette économie est de l’ordre de 10% par an » (3). Les équipements 5G consommeront 3 fois plus que ceux de la 4G et les internautes passeraient de 3,9 milliards en 2016 à 5 milliards en 2021.

 

Par ailleurs, de gigantesques infrastructures sont nécessaires, très voraces en consommation de métaux rares qui s’épuisent déjà. C’est pourquoi la Chine a développé une politique offensive d’extraction et contrôle 90 % de la production mondiale. Les enjeux géopolitiques sont énormes et les politiques extractivistes vont se développer dans les pays comme l’Afrique du Sud (rhodium), le Brésil (niobium), la République Démocratique du Congo (cobalt). Une puce électronique de 2 grammes implique le rejet de 2 kilos de matériaux ; un courriel avec pièce jointe consomme autant d’électricité qu’une ampoule basse consommation de forte puissance pendant une heure. Cette course à la technologie n’est en rien une réponse aux besoins fondamentaux des populations, ne se soucie nullement de l’utilité des produits fabriqués dont l’obsolescence programmée les fait échouer dans les pays du Sud pour « recyclage ». A l’heure où les instances internationales évoquent l’urgence de la transition énergétique, de la réduction de l’empreinte carbone, de la préservation de la biodiversité, pour limiter les effets du réchauffement climatique, les capitalistes technophiles ne se posent qu’une seule question : comment trouver de nouvelles ressources en minerais ? Ils sondent les fonds marins, en rajoutant encore à la pollution des océans. Olivier Vidal (CNRS) alerte : d’ici 2050, il faudrait extraire du sous-sol plus de métaux que l’humanité n’en a extraits depuis son origine.

 

La 5G accentuera les risques sanitaires sur la Terre. Pour couvrir l’ensemble du territoire, il faudra plus d’antennes. Combien ? Aucune estimation n’a été dévoilée. Aujourd’hui, le déploiement de la 4G nécessite 45 823 antennes. En faut-il 45 000 supplémentaires ? La 5G nécessite l’utilisation de fréquences plus élevées, d’ondes millimétriques plus courtes qui ne peuvent traverser certains bâtiments et obstacles comme les arbres, ce qui impose une augmentation exponentielle des antennes et, par conséquent l’augmentation de l’exposition de la population aux ondes électromagnétiques. On ne pourra plus y échapper ! s’indigne le CRIIREM (centre de recherche et d’information indépendant sur les rayonnements électro magnétiques non ionisants). Même son de cloche du côté de l’association Robin des toits qui dénonce l’absence d’étude d’impact sanitaire. PRIARTEM (4) alerte sur l’augmentation constante du nombre de personnes électro-sensibles et des Collectifs anti5G démontent des antennes.

 

La menace se situe aussi dans l’Espace. Pour supprimer toutes les zones blanches dans le monde, il faut mettre sur orbite basse (entre 500 et 2 000 km d’altitude) plus de 20 000 satellites autour de la terre et installer plusieurs dizaines de millions d’antennes relais dans nos villes et campagnes. Ces opérations peuvent altérer l’ionosphère, cette couche supérieure ionisée de l’atmosphère qui interagit avec la lumière ultra-violette du soleil. Que savons-nous de l’effet que produiront ces interférences en haute altitude, sur la météorologie, le climat, la protection contre les rayonnements cosmiques, la filtration des rayonnements solaires ? La terre serait ceinturée par un bouclier électromagnétique artificiel, fait d’ondes pulsées induisant des effets sur le vivant.  Pas un être vivant, humain, mammifère, oiseau, insecte, ni les végétaux et la masse de nos mers et océans, ne pourrait se soustraire à une exposition, 24H/24, à des niveaux de rayonnement de radiofréquences, des centaines de fois supérieurs à ceux que nous connaissons. Dans 30 ans, nous déplorerons les effets de cette politique, que subiront les générations futures !!!

  

4 – La surveillance généralisée des populations rendue possible

 

Les tenants de la 5G évoquent la nécessaire vidéosurveillance « intelligente » pour lutter contre la délinquance. Aujourd’hui on identifie ou on saisit le flagrant délit, demain, on anticipera une anomalie. Qui va déterminer les comportements dits « anormaux » ? Les programmateurs des futurs algorithmes ? Le système judiciaire en serait bouleversé : à quoi serviraient les magistrats qui jugent sur le fondement de faits établis ? Des outils de vidéosurveillance se sont développés dans les villes ; en leur donnant  une dimension « intelligente », les reliant à d’autres fichiers (santé, infractions, etc.), ce sont nos libertés publiques qui seront menacées. Ce nouvel ordre urbain doit être soumis au débat avec la population. Certes, on n’en est pas encore à la reconnaissance faciale instituée partout, mais elle se pratique déjà, et pas qu’en Chine, où depuis fin 2019, le Covid-19 a accéléré le recours aux technologies de traçage. Imaginons des badauds sur passage piéton, identifiés automatiquement par les caméras de surveillance d’un Etat autoritaire, capables d’afficher aussitôt le nom et le numéro de carte d’identité d’un individu. Et de faire remonter son casier judiciaire ou le dossier conservant sa loyauté politique au régime…. En Chine, cette vision devient réalité. Début 2018, la police de Zhengzhou (est du pays) affirmait que ses agents portant des lunettes « intelligentes » avaient identifié 7 personnes impliquées dans des enlèvements. Depuis décembre 2019, il est obligatoire de se soumettre, pour l’achat d’une carte SIM, à un scan de reconnaissance faciale, en plus de la présentation de la carte d’identité. Parallèlement, s’ajoute un système de « crédit social » par l’attribution d’une note en fonction du comportement, pouvant empêcher un Chinois qui, par ex., se soustrait à une décision de justice ou ne paie pas une dette, d’acheter un billet de train. Un fichier national de surveillance au service de la répression est très poussé dans le Xinjiang, à l’encontre de la minorité ouïgoure et autres ethnies musulmanes. De la même manière, les réseaux sociaux Tencent et Alibaba se sont associés au gouvernement chinois et développé une application d’identification avec un code couleur les individus exposés au Covid-19. De quels outils de contrôle dispose la population sur l’arbitraire qui peut se mettre en œuvre ?

 

En France, les partisans de la reconnaissance faciale piaffent, estimant que l’autorisation législative à sa mise en place, suggérée fin 2019 par Cédric O, alors secrétaire d’Etat chargé du numérique, est un obstacle. Le procédé d’authentification de l’identité d’un individu est autorisé dans les enquêtes judiciaires pour la recherche de suspects ; il existe dans 3 aéroports d’Ile-de-France. L’autre usage, par contre, l’identification « à la volée » - fonctionnant en temps réel avec les images des caméras de vidéosurveillance - est soumis à autorisation de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés ; s’appuyant sur le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD), elle proscrit tout traitement des données sensibles (comme le visage). Même si quelques exceptions sont possibles, la procédure est dissuasive et exigeante : les ordonnateurs de ce type d’usage doivent réaliser une étude d’impact et prouver sa conformité au RGPD, l’expérimentation devant se borner à une seule finalité. Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, dénonce cette « idéologie poussiéreuse de la Cnil » et  Christian Estrosi, maire de Nice, pointe « des principes dépassés ». Une loi d’expérimentation sera-t-elle votée au prétexte de sécuriser le Mondial de rugby de 2023 puis les JO de 2024 ? Les industriels français, comme Thales ou Idemia, attendent cette aubaine. Pour l’heure, pas de texte déposé devant le Parlement. Les opposants à ce procédé, comme la Quadrature du net, sont très vigilants craignant qu’une expérimentation de la reconnaissance faciale soit sans retour en arrière possible.

 

Une « avancée » technologique ou scientifique, par ses applications n’est jamais neutre ; elle est l’affirmation d’un choix politique de fonctionnement de la société. En l’occurrence, 5G et autres outils « intelligents » grignotent les principes de liberté et de sûreté. 

 

5 – Préserver les principes de liberté et de sûreté  

 

Comment peser face à la puissance des géants du numérique ? Les technologies numériques vont-elles gouverner nos vies ? Allons-nous laisser le capitalisme technophile confisquer notre mode de pensée ?

 

Les opposants à la 5G, et à l’usage disproportionné de la technologie « intelligente », sont traités d’alarmistes, de rétrogrades, de ringards, d’opposants au modernisme, etc. Mais avons-nous besoin d’être reliés 24/24 au monde entier ? Avons-nous besoin d’outils qui décomptent les yaourts restant dans notre frigo ? Après avoir démembré les services publics de proximité, les gouvernants nous présentent des services « intelligents » pour consulter un médecin à distance, suivre les cours de l’université… Voulons-nous des algorithmes pour trouver un présumé coupable… pour ensuite supprimer les services de la Justice, devenus inutiles ?

 

Les algorithmes de ces machines « intelligentes » sont préparés par les industriels-mêmes qui vendent ces outils, formatant nos comportements et nous transformant en consommateurs « décervelés ». Ce que nous voulons c’est une société plus juste, plus humaine, plus soucieuse du bien-être et du développement humain, grâce à des services de proximité, l’expression libre et l’échange des idées… Ce que nous voulons ce n’est pas la liberté ou la sécurité, mais les deux ! La sécurité nous l’entendons au sens de la sûreté, celle qui figure dans la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, celle qui nous protège contre l’arbitraire de l’Etat. Vivre en sécurité, ce n’est pas être dans un univers saturé de caméras de surveillance, c’est avoir un logement digne, ne pas être contrôlé dans la rue pour un rien, respirer un air pur, pouvoir se défendre contre l’oppression de l’Etat… C’est lutter contre les politiques qui imposent, subrepticement, des outils de surveillance généralisée, tout en donnant l’illusion aux populations de participer à la décision. Ainsi du Ségur de la Santé, pendant lequel l’Etat continue de fermer des services hospitaliers. Ainsi de la Convention Citoyenne pour le Climat que Macron salue, tout en ré-autorisant les néonicotinoïdes, insecticides tueurs d’abeilles, pour satisfaire les industriels agricoles de la betterave à sucre ! 

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Partout des colères, des mécontentements montent face à l’angoissante catastrophe écologique. Mais on ne pourra infléchir les choix politiques en la matière sans remise en cause profonde de la société et des grandes institutions capitalistes qui la dominent ; l’Etat et les gouvernements successifs font partie du problème, nous livrant au despotisme des intérêts privés.

 

Certes, reconstruire par en bas des services associatifs et locaux offre des alternatives rassurantes dans des territoires spécifiques mais le rouleau compresseur poursuit sa route, s’il n’est pas stoppé par le blocage du système basé sur le profit. Quelques victoires électorales donnent, parfois, l’illusion du changement, comme celle des Verts lors des élections municipales récentes. Mais on sait trop ce que sont les exécutifs locaux coincés dans leurs alliances de façade et découvrant, dans l’exercice du pouvoir, les désaccords avec leurs alliés d’un jour. Peut-on imaginer la sortie de la dépendance collective au numérique généralisé (la fibre optique n’est pas encore totalement installée qu’elle est jugée obsolète !) ? Si l’on ose une comparaison avec le nucléaire, l’on ne peut qu’être inquiet !

 

Chaque fois qu’une ressource d’énergie a menacé de manquer, nous l’avons remplacé par une autre, sans jamais mener de réflexion sur nos modes de consommation. « On ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré » (5).

 

Odile Mangeot

Le 20.08.2020

Sources : Politis, Fakir, reporterre.net, bastamag, Thur Ecologie Transports

 

(1)   Fakir juillet-septembre 2020

(2)   Pièces et Main d’œuvre- atelier de bricolage pour la construction d’un esprit critique à Grenoble. Dénonce le projet de société techno-totalitaire (nanotechnologies, transhumanisme, etc.) www.piecesetmaindoeuvre.com

(3)   Analyse de Damien Ernst, professeur spécialiste de l’énergie (université de Liège) citée par Thur Ecologie Transports

(4)   Association PRIARTEM – Pour Rassembler Informer et Agir sur les Risques liés aux Technologies Electromagnétiques  

(5)   Guillaume Pitron (auteur de La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique – ed. Les liens qui libèrent) a emprunté ce constat amer à Albert Einstein

 

 Pétitionnaires de tous les pays...

Pour tenter de convaincre qu’il faut conjuguer réflexion et action collective, nous publions ci-après des extraits de l’article de Benoît Bréville « Pétitionnaires de tous les pays… » (Le Monde Diplomatique août 2020). Sans quitter notre canapé, rien ne changera. Gramsci écrivait que seule la vérité est révolutionnaire, encore faut-il préciser qu’elle est enfouie dans la gangue de l’idéologie dominante qui la rend méconnaissable. C’est dire que les dominés doivent « se lancer dans des lectures impossibles » (dans La nuit des prolétaires de Jacques Rancière), échanger, agir en toute autonomie. Que les médias dominants façonnent l’opinion est une évidence de plus en plus partagée mais celle-ci ne suffit pas à faire émerger des forces organisées délivrées de toute illusion. Pétitionner encore pour que rien ne change, attendre les prochaines élections, ou plus radical en apparence, manifester pour nous faire entendre du pouvoir qui restera sourd aux doléances. Or, le monde tel qu’il va voit surgir des révoltes à répétition qui, quand elles ne sont pas brisées par la répression, sont manipulées afin que le cours normal de l’ordre mondial reste, pour l’essentiel, inchangé, faute de perspectives radicales. Et les élites après les remous et vagues successives se remettent en selle. Les extraits ci-après sont une invitation à lire le Monde diplomatique. Certes, ce n’est pas une publication révolutionnaire mais elle contribue à comprendre le monde tel qu’il va. Dans le numéro d’août, Pierre Rimbert « sévit » contre cette bourgeoisie intellectuelle héréditaire, David Garcia contre France Inter qui ne s’adresse qu’à l’opinion la plus conformiste et bien d’autres encore, l’édito de Serge Halimi... Bref, à la résignation, il faut opposer la force de l’intelligence éclairée afin qu’elle ait un impact réel sur les rapports de forces sociales. Il y a urgence, face aux dérèglements qui s’annoncent : crises sanitaire, économique, écologique, sociale, famines et même la guerre, qui, potentiellement se laissent entrevoir… GD

 

Pétitionnaires de tous les pays

de Benoît Bréville (extraits)

 

« Les vedettes s’ennuyaient pendant le confinement. Elles ont donc fait des concerts de salon, des entretiens sur webcam, des photos sur Instagram et même des performances engagées sur YouTube, tels ces 25 artistes américains qui entonnèrent en chœur, depuis de luxueuses résidences, Imagine, de John Lennon : « Imagine la fin de la propriété. Imagine tous les gens se partageant le monde » (…) 200 artistes et scientifiques ont signé le manifeste « Non à un retour à la normale » lancé par la comédienne Juliette Binoche et l’astrophysicien Aurélien Barrau, avec le soutien de Madonna, Robert De Niro et Emmanuelle Béart (...) « La transformation radicale qui s’impose – à tous les niveaux – exige audace et courage. Elle n’aura pas lieu sans un engagement massif et déterminé » (...) Et avec la pétition mise en ligne par Nicolas Hulot le 5 mai qui décline cent fois la phrase « Le temps est venu » ... d’en finir avec les manifestes de bons sentiments ?

 

Ce n’est à l’évidence pas l’avis des « 150 personnalités de gauche » (le communiste Ian Brossat, l’écologiste Yannick Jadot, le socialiste Olivier Faure, M. Raphaël Glucksmann de Place Publique…) qui ont publié, quelques jours après M. Hulot, la pétition « Construisons l’avenir » (...). N’était-ce pas déjà l’idée de M. Glucksmann quand il a créé, en novembre 2018, le mouvement Place publique autour de l’appel « Agir avant qu’il ne soit trop tard » ?

 

(…) On retrouve dans tous ces textes les mêmes grands principes flous et consensuels (réinventer l’Europe, imaginer une planète solidaire, lancer une dynamique citoyenne…), la même volonté d’éviter les sujets épineux (la monnaie unique, le protectionnisme, les alliances avec le Parti socialiste) (…) En fait, n’importe quel sujet peut donner lieu à un manifeste, qui trouvera toujours un journal ou un site d’actualité pour l’accueillir (…). Rien qu’en février dernier, 160 personnalités se sont mobilisées dans le Journal du dimanche pour dire « Stop aux écrans vidéo publicitaires », 278 personnalités ont préconisé dans Politis la création d’un comité de soutien aux mobilisations sociales, 140 autres (ou souvent les mêmes) ont demandé dans L’Humanité l’organisation d’un référendum sur la réforme des retraites. Sans parler des 27 maires pour les cantines sans nitrite, des 1 000 scientifiques contre le réchauffement climatique, de sportifs de haut niveau contre les violences sexuelles, des patrons de l’aéronautique pour la transition écologique (…). Ces textes s’adressent également aux anonymes, incités à ajouter leur paraphe tantôt via un site ad hoc, tantôt sur Change.org, la multinationale américaine de la pétition en ligne (…) Il ne faut que deux minutes pour défendre une cause sur internet (…), n’entraînant pas de retenue de salaire ; tout risque de recevoir un coup de matraque, d’inhaler du gaz lacrymogène, de terminer en garde à vue est exclu (…) pour ces militants paresseux qui voudraient changer le monde sans quitter leur canapé (...)

 

Les signataires professionnels s’abritent souvent derrière une histoire glorieuse des pétitions quand il en coûtait d’associer son nom à une cause. Les auteurs du « Manifeste des 121 » sur le droit à l’insoumission pendant la guerre d’Algérie risquaient ainsi de se retrouver en prison, d’être la cible d’un attentat de l’OAS). En, déclarant « Je me suis fait avorter », les signataires du « Manifeste des 343 » s’exposaient elles aussi à des poursuites pénales ; et si Catherine Deneuve et Simone de Beauvoir savaient qu’elles seraient épargnées, de nombreuses anonymes furent poursuivies. A présent, la pire peine qu’encourt une personnalité dénonçant la dérive autoritaire de M. Emmanuel Macron est d’être invitée à en débattre sur France Culture ».

 

 

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La pornographie. Du viol tarifé…

 

Au même titre que le système prostitueur, le système porno-criminel peut être considéré comme une arme d’asservissement, utilisée par les capitalistes contre les plus faibles, tant ce système légitime, encadre et perpétue des viols tarifés filmés et renforce le patriarcat.

 

Viols tarifés filmés

 

Pornographie signifie représentation,  graphê signifiant écriture, de femmes en situation de prostitution, pornê. Des sculptures aux peintures, en passant par la littérature et la chanson paillarde, elle a toujours réussi à jouer son rôle : proposer des modes opératoires aux agresseurs, donner des armes aux hommes et sidérer les femmes et les enfants confronté.es à cette violence érotisée. L’érotisation des violences masculines, commises par surprise, menace, contrainte et violence, amplifiées et diffusées par les pornographes et les voyeurs-violeurs par substitution, est un outil sûr et efficace pour maintenir le patriarcat.

 

L’association américaine Culture Reframed indique que 88% des scènes contenues dans les films pornographiques les plus regardés et téléchargés contiennent des violences masculines. L’ajout d’une caméra pour capter des scènes de violences sexuelles ne doit pas représenter  un argument validant la pornographie, mais bien une circonstance aggravante aux viols subis. Selon le Code Pénal, tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol.

 

La surprise : il suffit de rassembler des témoignages d’associations en contact avec des survivantes du système porno-criminel pour réaliser que ce n’est pas parce qu’elles signent un contrat avec les pornographes, contrat supposé réguler les violences durant les séances de viols collectifs, que les femmes et filles ne se voient pas imposer des actes non prévus par avance. Ici, certains des actes de pénétration sexuelle sont commis par surprise.

 

La menace : Intimidation, chantage, risque de subir une violence pire que la précédente ou de voir sa paie réduite et par conséquent subir une plus grande précarité, toutes ces stratégies d’agresseurs constituent des menaces qui peuvent obliger les femmes sous emprise à subir toujours plus de violence. Ici, certains des actes de pénétration sexuelle sont commis par menace.

 

La contrainte : Rappelons que la nécessité d’une caméra, d’un contrat et d’un scénario constitue structurellement des contraintes auxquelles les femmes ne peuvent se soustraire. Ensuite, être une victime de la pornographie n’est pas un métier, n’est pas une position souhaitable, désirable. Les femmes sont dans des contextes vulnérabilisants, lorsqu’elles sont en insécurité psychologique, physique ou financière, lorsqu’elles souffrent des conséquences de psycho-traumatismes antérieurs. Les raisons amenant à faire partie de ce système porno-criminel  sont la précarité, l’emprise, les mécanismes psycho-traumatiques. Ici, tous les actes de pénétration sexuelle sont commis par contrainte.

La violence : La porno-criminalité constitue un système d’impunité, de promotion et de déploiement des violences sexuelles, des hommes contre les femmes. L’étude de Bridges montre à quel point ces films contiennent et propagent des scènes de violences verbales et physiques contre les femmes (dans respectivement 48,7 et 88%). Ces violences sont aggravées par la présence d’une caméra sur les lieux des viols collectifs, la caméra étant extrêmement dissociante pour les femmes et les filles durant une situation sexualisante. Ces violences sont décuplées puisque non seulement commises par les violeurs-acteurs, mais également par tous les agresseurs impliqués sur le plateau, porno-voyeurs, sans oublier les violeurs par substitution derrière leurs écrans d’ordinateurs, ceux-ci étant à l’origine et responsables de la demande. Ici, tous les actes de pénétration sexuelle sont commis par violence.

 

Summum du capitalisme

 

Il est urgent de se positionner pour défendre les droits humains des personnes esclaves du système porno-criminel, et de s’interroger sur l’origine, la racine, des viols tarifés filmés : pourquoi ces violences existent-elles et à qui profitent-elles ?

 

L’érotisation des violences sexuelles masculines contribue par essence à une mise sous emprise globale des femmes et des filles, colonisées. Les porno-violeurs font la promotion des violences masculines, propagande donnant des armes à tous les autres agresseurs, notamment en empêchant femmes et filles de différencier excitation sexuelle issue d’un véritable désir libre et éclairé, et excitation génitale traumatique. Il nous faut aussi penser aux jeunes enfants exposé.es en moyenne dès 11 ans à la violence banalisée véhiculée par la pornographie. D’autant que ce système s’impose dans chaque recoin de nos vies quotidiennes (publicités, film, clip…), et représente près de 35% du contenu du web. Aux garçons apprenant que c’est cette violence qu’ils doivent aimer et réclamer. Aux filles, sidérées, forcées de considérer ces actes comme ceux d’une sexualité désirée. Il est impératif de décoloniser les imaginaires, de pouvoir s’écouter soi-même et de s’incarner pleinement en se libérant de tout regard extérieur rendu invasif. Et surtout, il faut penser aux femmes et filles directement victimes de ce système esclavagisantla torture des femmes rapporte...

 

28 000, c’est le nombre de personnes qui visitent un site à caractère pornographique toutes les secondes, un des 25 millions de sites présents sur la toile… En France, 8 utilisateurs d’Internet sur 10 visionnent ce genre de contenu. Aux Etats-Unis, pays producteur de 90% des contenus, les productions pornographiques rapportent 10 milliards de dollars annuellement. La France n’est pas en reste avec 200 millions d’Euros de revenus annuels. Cependant bien que cette ‘industrie’ continue d’être en pleine expansion, ces revenus ne bénéficient évidemment pas aux personnes contraintes sexuellement par celle-ci. Si certaines sources parlent d’une fourchette comprise entre 700 et 2500 euros par tournage (dont la durée varie de quelques heures à plusieurs jours), la réalité est drastiquement différente puisqu’une jeune femme témoigne d’un salaire mensuel d’à peine 500 euros pour les tournages, alors que les crimino-producteurs vont continuer à utiliser et tirer profit de son image 30 années durant.

 

Porno ‘féministe’ ?

 

Le porno ‘féministe’ est-il une solution pour lutter contre le système porno-criminel ? Le porno féministe serait une alternative aux films dominants (les ‘tubes’) et mettrait en avant le plaisir féminin et le ‘consentement’. Le but de ce format serait de briser les stéréotypes et les schémas habituels des vidéos issues des tubes (comprenant toujours les mêmes pratiques filmées dans le même ordre et centrées exclusivement sur le plaisir féminin). Le porno féministe permettrait également de représenter une diversité des corps et de la beauté, d’émanciper les femmes à travers la réappropriation du système pornographique et la mise en scène sexuelle de soi qui viendraient renverser la situation en se focalisant sur les femmes et le plaisir féminin.

 

Cette démarche peut sembler promouvoir l’égalité et l’émancipation des femmes. Les pornographes ‘féministes’ bénéficient d’une très large couverture médiatique. Tout est fait pour promouvoir un porno branché, libérateur et dans l’air du temps. Pourtant, même ses plus farouches partisanes se contredisent en mettant en évidence que le porno incite à la performance, à une course à la popularité (ou plutôt au profit ?). Elles reviennent sur le fait qu’il ne peut être vendeur que s’il est ‘mis en scène’ est donc tout sauf naturel. Toutes insistent sur le caractère indélébile de son image numérique qui, quoiqu’il arrive, laissera une trace sur le plan de la diffusion de l’intimité de la personne que sur le plan psycho-affectif. Cette ambivalence dans les discours pro-porno est révélatrice de l’arnaque que représente l’autonomisation des femmes par la représentation sexuelle de soi : la personne filmée répond de fait aux attentes des autres. De plus, son image est appropriée par des personnes tierces et par quiconque utilisant internet. La personne ‘consent’ à être photographiée ou filmée (afin de lutter contre une précarité financière et affective) mais elle n’est absolument pas dans une démarche de désir libre et éclairé. En quoi le fait de s’exposer sur Internet, donc au monde entier, est-il bon pour quoi que ce soit ? A qui profite alors le porno ‘féministe’ ? Aux proxénètes qui continuent de s’enrichir sur des actes sexuels non désirés ; aux agresseurs en demande d’images violentes. Le porno féministe étant vu essentiellement par des hommes. Même estampillé féministe, le système pornographique n’est qu’un des maillons de l’aliénation des femmes.

 

Imaginaires racistes

 

Sur la majorité des sites pornographiques, les porno-criminels classent les femmes dans des catégories profondément racistes et coloniales, et leurs attribuent des spécificités en fonction de leur origine ethnique, réelle ou supposée. Ils sexualisent les femmes sud-américaines, animalisent les femmes noires en les associant à la vie sauvage et considèrent les femmes dites ‘asiatiques’ dociles et soumises par nature. Les clichés sont ancrés dans le système pornographique, où les agresseurs réduisent les femmes à des sous-catégories censées satisfaire leur besoin, et réutilisent les codes du racisme pour les rabaisser encore plus. Les femmes maghrébines sont dénigrées, traitées de ‘beurettes’ et réduites à l’exotisme. On réalise à quel point les imaginaires racistes du quotidien sont non seulement présents mais exacerbés dans ce système, incitant les hommes à s’en servir et à les propager.

 

Croire qu’il n’y a aucune reproduction de ces schémas dans la vie réelle est un leurre, et on assiste ici à une imbrication de ces systèmes d’oppression, et donc à leur aggravation.

Mettre fin au système porno-criminel et prostitueur, c’est en finir avec des agresseurs qui se nourrissent des oppressions misogynes, racistes, classistes, et les perpétuent.

Stephanie Roussillon