Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


mercredi 3 novembre 2021

 

L’aigle de proie

 

Il y a des raisons que l’on ne contrôle pas

c’est ce qui me pousse à vous dire tout ça

ceci est plus fort que moi

je suis un bénévole comme il se doit

qui voudrait alléger le monde de son poids

ne vous imaginez pas que quand tout d’efface tout s’en va

il y a une chose que l’on ne vous dit pas

que leur bêtise suit nos pas

offre spéciale du gouvernement et du sénat

tous ces régisseurs qui font la justice et la loi

n’osent pas montrer du doigt

ces entreprises qui les emploient

ils multiplient les conflits d’intérêt et de droit

leur serment n’a rien d’un engagement de foi

ils sont les dignes représentants du cercle des malfrats

ils rongent notre société comme des rats

le bateau sombre mais personne ne le voit

ils nous ont distraits nous faisant prendre d’autre voie

celle de la peur sous tous les toits

pour que le peuple n’ait plus le choix

ne voyez-vous pas cet aigle de proie

à l’affût du moindre de vos pas ?

 

Hassen

 

ETE 2021 : COUP DE CHAUD À CUBA !


Nous publions, ci-après, la 2ème partie du reportage sur Cuba envoyé par un de nos abonnés.


Y-a-t-il un économiste dans la salle ?

Selon la légende, le Che avait répondu par l'affirmation à cette question de Fidel lors d'une réunion, et était devenu... Ministère de l'Economie.

Alors que la crise économique s'amplifiait lors du 2° semestre 2020, le mouvement de San Isidro et sa mouvance d'artistes et de pseudo-artistes provocateurs (l'un se faisant photographier sur des toilettes avec un drapeau cubain sur le dos), bloggeurs payés par la NED (New Endowment for Democracy) ou d'autres associations américaines, faisaient le siège du Ministère de la Culture pendant plusieurs semaines et occupaient la toile et une partie de l'espace médiatique officiel cubain. Soutenus de manière parfois maladroite par des personnalités connues comme Jorge Perrugoria, l'acteur du célèbrissime Fresa y Chocolate et Humberto Perez, célèbre réalisateur cubain mais aussi l'écrivain Padura, ils avaient manifesté plusieurs fois en petit comité dans les rues vides de la Vieille Havane sans que la Police n'intervienne. La police est-elle terrifiée par les téléphones portables ou est-ce un message envoyé à l'étranger ? Le mouvement San Isidro avait fini par se discréditer suite aux provocations évoquées ci-dessus, aux révélations des liens entre certains bloggeurs et la Floride et surtout après le soutien très appuyé et officiel de Mike Pompéo avant de quitter la Maison Blanche. Les réseaux sociaux (en particulier Facebook) avaient relayé un appel à un cacerolazo (un tintamarre de casseroles) la nuit du 31 décembre 2020 ; la Havane avait retenu son souffle et finalement rien ne s'était passé !


Bonne année 2021 !!!

C'est dans un contexte économique tendu par la pandémie que le gouvernement cubain a choisi d'effectuer, le 1° janvier, sa réforme monétaire consistant à faire disparaitre le CUC (le peso convertible), disparition annoncée par Raul Castro dès 2013. Les Cubains avaient 6 mois pour échanger leurs CUC en CUP (peso non convertible). Désormais, les dollars ou euros sont changés directement en CUP, respectivement et officiellement à 24 et 28 CUP.

Dans le même temps, il multiplie (restez assis!) les tarifs de l'électricité par... 4 pour la première tranche, et par 5 pour les tranches suivantes et relève le prix de l'eau dans les mêmes proportions (sans affecter les volumes cependant) et annonce dans la foulée la possibilité de payer sa facture d'électricité depuis les... USA ou l'étranger. Malgré le discours consistant à faire avaler la pilule en parlant d'économies, d'écologie (l'électricité est principalement produite en brûlant du diesel dans des centrales thermiques), la grogne aidant, le gouvernement annonçait à l'aide d'un spot publicitaire, dès janvier, une légère baisse du prix de l'électricité, les Cubains ayant gagné 5 millions de pesos ! Marketing politique d'Etat, à pleurer ! Pour amortir le choc, le gouvernement cubain a relevé de manière significative les salaires du secteur étatique et les pensions de retraite mais les a convertis en monnaie nationale (CUP). Disparue la partie du salaire versée en CUC.

Pas besoin d'être économiste pour imaginer la catastrophe annoncée car le gouvernement a provoqué de façon mécanique cette inflation ; les prix se sont envolés sur les marchés (peu approvisionnés à cause de la crise sanitaire) ; ainsi, la livre de riz est passée de 5 pesos à 60 pesos !!! Le gouvernement a eu beau annoncer que l'augmentation des prix coïncidait à une augmentation de la qualité des produits (par quel miracle?) et que des inspecteurs contrôleraient les prix sur les marchés d'approvisonnement, la flambée des prix n'a eu de cesse. Quelques ajustements à la marge ont été effectués notamment envers ceux qui louent des chambres aux étrangers via... RB&B et qui ont l'air conditionné, ceux qui pleurent tout le temps et qui gagnent en 3 nuits ce que gagne un professeur en un mois ! On ne prête qu'aux riches ! Cependant, ce secteur est globalement à l'arrêt depuis plusieurs mois à cause du Covid ; beaucoup de Cubains souhaitent vendre et quitter le pays. Les notariats sont fermés pour 6 mois à la Havane. En janvier la TV d'Etat parlait ouvertement du change au marché noir, 60 pesos cubains pour un dollar. L'euro se change actuellement en la calle (dans la rue) entre 70 et 80 pesos. Donc, pour les dépenses quotidiennes, les prix varient en fonction du taux auquel on change ses euros ou ses dollars - si vous avez la chance d'en avoir ou d'en recevoir. Sinon, avec le peso cubain, c'est la galère ! En fait, la hausse annoncée des salaires n'a été qu'un rattrapage par rapport à l'inflation des 5 dernières années et l'inflation fulgurante de l'année 2021 a définitivement lissé cette hausse des salaires et a plombé le pouvoir d'achat de la majorité de la population. La recherche effrénée de MLC (monnaie librement convertible) a accentué la chute du peso. Un pays incapable d'imposer des prix fixes sur les marchés vivriers peut-il toujours se prétendre socialiste ou la loi du marché ne s'est-elle pas déjà imposée à un Etat de plus en plus faible ? Mais cela n'est rien quand on sait que la libreta (carnet de rationnement) est vouée à disparaitre et que les entreprises d'Etat vont voir leurs aides diminuer drastiquement. Les entreprises étrangères pourront investir (+ de 500 projets selon Granma) dans des joint-ventures dont elles pourront être désormais majoritaires (biotechnologie, commerce de gros, tourisme...)


Le calice jusqu'à la lie !

Le gouvernement en profite pour ouvrir des magasins MLC où l'on peut acheter UNIQUEMENT avec une carte prépayée (USD ou €) ou une carte bancaire internationale... américaine VISA ou MASTERCARD. L'objectif annoncé est clair : drainer les devises fortes dans le système bancaire cubain et surtout les capter pour importer ce dont le pays a besoin sur les marchés étrangers. Le paradoxe veut que dans un pays exangue, des queues immenses se forment devant ces magasins (il y a donc de l'argent pour certains) où l'on trouve de tout alors que la majorité de la population peine à vivre avec ce que le carnet de rationnement fournit aux citoyens cubains. Les tensions sont monnaie courante dans ces foules de citoyens prêts à en découdre pour acheter. Des coleros (ceux qui font la queue) professionnels opèrent, revendant à 10 ou 12 dollars, le paquet de poulet aux hormones (américain!!!) acheté à 3 dollars après des heures de queue ou un passe-droit ou un bakchich ! La Police est présente !

Le gouvernement a annoncé mi-juin, que désormais, il n'accepterait plus que les euros, créant un nouvel effet de panique, 80 % des remesas proviennent des USA donc en dollars.


Le secteur de la santé et la production de vaccins...

Pendant ce temps, le virus progresse car les vaccins cubains tardent. Narcissisme nationaliste, besoin de montrer au monde entier que Cuba, selon le souhait de Fidel, ne dépend de personne ? Le gouvernement cubain déclare que ses vaccins mis au point avec l'Iran (Abadala) ou le Soberana (souveraineté) ont pris du retard à cause des difficultés à se procurer les ingrédients nécessaires à leur fabrication. Selon le MINSAP (Ministère de la Santé Publique), leur efficacité varie entre 98% et 100%. Avec le retard pris ces derniers mois, la situation est devenue intenable dans certains hôpitaux avec l'accumulation de patients et un système de santé fortement dégradé. En août, des ruptures d'approvisionnement en oxygène dues à des avaries techniques sur les lieux de production ont entraîné la mort de plusieurs malades du Covid. Certains médicaments ne sont plus accessibles à Cuba. D'ailleurs le gouvernement cubain a officiellement autorisé les voyageurs à importer pratiquement librement nourriture et médicaments jusqu'à la fin de l'année 2021, c'est dire la gravité de la situation. Idem pour... les panneaux solaires !


La carotte ou le baton ?

Comme les écoliers sont à la maison depuis plus d'un an et demi sans pouvoir sortir, pas étonnant que la déstabilisation des réseaux sociaux et les appels à la révolte orchestrés par les officines américaines et certains opposants cubains coïncident avec l'été (par chance très pluvieux et pas très chaud cette année) qui généralement surchauffe les habitats des quartiers pauvres et insalubres comme le Centro Habana, pour tenter de porter l'estocade. Les plages fermées , les enfants ne pouvant sortir, l'économie pratiquement à l'arrêt, la situation était explosive. D'autant plus que Biden n'a pas bougé d'un iota la politique de Trump. L'équipe de Blinken, le chef de la diplomatie américaine, s'est dite déçue du manque de retombées de la politique de la carotte sous Obama. De plus, les Démocrates qui pensaient naïvement gagner l'Etat de Floride lors des dernières présidentielles, se sont pris une dérouillée et sont maintenant prisonniers de l'élection des mid-terms, si importante pour la majorité au Congrès américain. Rappelons que, sans l'accord du Congrès, le blocus ne peut pas être levé ! Et comme l'anti-castrisme est un business politique et financier aux USA, les choses resteront figées malgré les appels de certaines associations comme Puentes de amor ou de rares élus démocrates, et ce jusqu'à la chute du régime castriste, désormais dans toutes les têtes.


Communication étatique : 15 jours de pédagogie !

Suite aux événements du 11 juillet 2021, la TV d'Etat Cubaine n'a cessé de faire passer en boucle les images de cette voiture de police retournée par des manifestants. Idem pour les images de pillages ! Pendant 2 semaines, matin et soir, des émissions spéciales suivant les actualités ont analysé les mécanismes qui ont conduit à ces événements, reprenant les propos de certains opposants de Miami ainsi que les fausses nouvelles des réseaux sociaux, les décortiquant et les analysant pour mieux les ridiculiser... et surtout montrer que la violence était dans le camp des opposants ! La TV a montré certaines publications Facebook comme celle où le soi-disant Malecon avait été envahi par des centaines de milliers de personnes, en fait des images du soulèvement du “printemps arabe” en... Egypte. Ou encore la vidéo virale de cette ménagère annonçant la prise de l'hôtel de Ville de Camagüey qui a été tournée en ridicule. Tout comme l'image montrant Raul Castro “fuyant” au Vénézuela... Le président de la République Diaz-Canel l'a explicitement déclaré : les Etats-Unis attendent un bain de sang qui sera le prétexte pour une intervention militaire, cela ne se produira pas !”  Il a aussi déclaré que “la rue appartenait aux Révolutionnaires”; les réseaux sociaux lui ont vite rappelé que la rue appartenait aux Cubains, à tous les Cubains!


Le gouvernement a lourdement insisté sur la violence des manifestants et ainsi montré que les agresseurs n'étaient pas du côté gouvernemental. Cependant, montrer en boucle des policiers ou des membres du Ministère de l'Intérieur, tuméfiés après avoir été tabassés, peut avoir un effet néfaste et encourager certains à passer à l'action en sachant que potentiellement tout acte dissident fait de vous un héros à Miami et à Washington. Bien sûr, cette communication victimaire a pour but de discréditer le mouvement, et certainement, les Cubains le savent, d’identifier les auteurs de ces faits de violence ou de pillage afin que la population les dénonce. Le pouvoir a communiqué en montrant les groupes d'intervention (Boinas Negras - “Avispas Negras” pour les Cubains) encadrant pacifiquement les manifestants et un mois plus tard, livrant des bouteilles d'oxygène aux hôpitaux. Ce qui n'a pas empêché que cette unité ainsi que le Ministre de la Défense soient ciblés par le Département d'Etat Américain.

Le message gouvernemental est adressé à l'Europe et notamment à la France avec laquelle Cuba cherche à négocier l'annulation de sa dette. Profil bas de rigueur, l'Administration U.S et certains opposants de Floride le savent... et en profitent  tout comme l'extrême-droite espagnole à la manoeuvre au Parlement Européen pour faire condamner la supposée violence de la police cubaine. Pas sûr que cette dernière, si crainte à une époque, continue à être respectée ! Elle est restée particulièrement passive ce 11 juillet car peu équipée pour du maintien de l'ordre. Il lui serait difficile de faire face à un mouvement de type Gilets Jaunes (régulièrement montré à la TV cubaine). Ces images de saccages et de pillages passées en boucle auront montré les failles dans le maintien de l'ordre cubain.. Disons-le franchement, le pouvoir s'est laissé surprendre le 11/7. Une semaine après, la police s'était discrètement positionnée, sur les axes stratégiques notamment ceux menant à la Place de la Révolution, prête à intervenir à la moindre alerte !


La Doctrine Monroe toujours d'actualité !

Les Etats-Unis sont en train de garroter économiquement Cuba pour des raisons purement politiques pour montrer que le seul modèle de société viable est la société capitaliste... (sauvée du désastre par... Obama en 2008). Cuba, sans ce blocus mortifère, serait un pays prospère. D'ailleurs, c'est cette prospérité potentielle qui attise les convoitises américaines sans oublier la Doctrine Monroe qui ferait de Cuba le 52° état américain après... Porto Rico (pour le moment toujours simple territoire américain). Les résolutions de l'ONU n'ont jamais rien changé au blocus et ne changeront rien à la situation ! Dans cette guerre opposant les deux pays depuis 1959, nous sommes passés de la guerre conventionnelle (tentative d'invasion le 17 avril 1961 de la Baie des Cochons par les contre-révolutionnaires cubains appuyés par Washington) aux conflits extra-territoriaux en Ethiopie, Angola opposant les deux pays, puis à une guerre de basse intensité mais il semble que la période TRUMP et l'avènement des réseaux sociaux utilisés aux niveaux individuel, institutionnel (NED...), associatif et médiatique ouvrent désormais la voie à une guerre de déstabilisation beaucoup plus puissante. L'accès à internet a permis aux ennemis de Cuba d'agir à l'intérieur même de l'île car les réseaux sociaux, Facebook en tête, ne censurent pas les personnes qui prêchent la haine et participent de fait, au mouvement hostile à Cuba notamment depuis Miami. Les opposants ont pu s'organiser et des "soft targets" ont été ciblées (UCI – Université des Sciences Informatiques accusées d'espionner la toile à Cuba). Le gouvernement cubain n'ignore pas les réseaux sociaux et combat pied à pied les mensonges véhiculés par la toile. Le très respecté Ministre des Affaires Etrangères, Bruno Rodriguez Parrilla est monté au créneau pour démentir les insanités véhiculées, avant, pendant et après les événements du 11/7. Cela n'a pas empêché, suite aux émeutes, l'apparition, sur la toile, de nouvelles rumeurs de disparition de personnes arrêtées pour violences ou dégradations ! Une photo de travaux effectués par des ouvriers au centre du pays a suffi à relancer des informations fallacieuses... de disparitions de masse et de... fosses communes. Nouveaux démentis du gouvernement cubain, donnant l'impression de sans cesse courir après les pyromanes de la toile afin d'éviter la propagation des incendies. D'ailleurs, l'accès à internet a été bloqué pendant trois jours du dimanche 11/7 au mardi 13/7, le temps que la tension retombe !


Epilogue

Les événements de juillet auront néanmoins eu un petit aspect positif, bien dérisoire mais hautement symbolique. Le gouvernement a décrété la distribution dans chaque foyer du pays de denrées alimentaires de première nécessité hors libreta. La politique d'ouverture des années Raul Castro a plutôt accentué les inégalités entre les personnes ayant de la famille aux Etats-Unis ou en Europe qui reçoivent des remesas, des devises fortes, ceux qui ont pu monter un commerce lié au tourisme ou à d'autres secteurs lucratifs (restauration) et le reste de la population. Cela génère des frustrations. D'ailleurs, le président a mis l'accent en août sur les quartiers “abandonnés” et est venu reconquérir le territoire du quartier de la Güinera, livré le temps d'une journée à la vindicte populaire, aidé par les travailleurs sociaux et une figure importante de la... Santeria, la religion afro-cubaine, si vivace dans l'île.

Les Cubains sont fatigués par des décennies de privation et une grande partie de la population reste attentiste. Le "cambio" (changement) est désormais dans toutes les têtes. Le gouvernement lui-même attend des gestes de Biden qui pourraient desserrer l'étau qui écrase le pays ! Mais Sleepy Joe (Biden) ne fera pas ce cadeau aux Républicains en volant au secours d'un pays communiste ! L'avenir de la Révolution semble désormais liée à l'attitude de son bourreau ! Terrible, même si Cuba en a vu d'autres. Les jeunes générations ne sont plus politisées et la société de consommation fait des envieux ! Pas sûr qu'elles aspirent au sacrifice ultime pour défendre la nation et les corrompus de haut-vol ! Patria o Muerte... Veremos !


MONCADA, 19/09/21



 

La parole aux AES

 

Les Amis de l’Emancipation Sociale (réunis en AG le 16 octobre 2021) ont débattu des orientations de l’association (extraits ci-dessous). L’association devient Alliance pour l’Emancipation Sociale 

 

Entrons-nous dans l’ère des turbulences ?

 

La mondialisation du capitalisme financiarisé a fait émerger des aristocraties prédatrices et une croissance des inégalités, rarement vue dans l’histoire. Elle s’est accompagnée du surgissement de son contraire, à savoir l’apparition de blocs de puissances étatiques, USA et Chine, et, dans une moindre mesure, la Russie de Poutine. Par ailleurs, des impérialismes secondaires, comme la Turquie, s’engagent également dans la conquête de marchés et d’une influence contredisant l’hégémonie des deux superpuissances qui s’affrontent à fleuret moucheté et participent à une nouvelle course aux armements. L’Europe reste un nain politique en voie de fracturation et sous dépendance des USA, de la Russie et de la Chine. La crise de 2007-2008 a fait apparaître, de manière flagrante, des inégalités dans les pays centraux, tout en accentuant déclassement et appauvrissement des classes populaires. Les USA et leurs alliés occidentaux tentent désormais de contenir la Chine, ce nouvel impérialisme commercial et mercantile. Toutefois, ils sont confrontés au déchirement du tissu social et à la difficulté de promouvoir une forme de relance de leur économie dégradée qui repose essentiellement sur le complexe militaro-industriel. En Chine, on assiste à un dirigisme d’Etat qui conjugue capitalisme d’Etat et économie privée en expansion ; sa force réside essentiellement dans sa capacité d’exportation mais c’est aussi sa faiblesse, ce qui la conduit à étendre son économie dans la partie ouest du pays. Quant à la Russie, dont l’économie est extrêmement fragile, elle tente de déstabiliser le camp occidental dans l’Europe de l’Est, en Syrie et en Afrique.  Ces rivalités s’exercent dans le cadre d’une crise climatique où certains experts annoncent, si rien n’est fait, des températures de + 2.7° en 2050. Dans ces conditions, des dégâts économiques et humains seraient considérables en particulier dans les zones côtières, comme le Bangladesh.

 

Dans la dernière période, face aux inégalités, on a assisté à des rebellions massives, notamment au Moyen-Orient, qui ont conduit à des répressions impitoyables et au retour des dictatures encore plus féroces. Les populations dominées qui se sont mobilisées ne sont parvenues qu’à exiger le départ des dictateurs les plus en vue. Ce dégagisme et l’emprise des religions n’ont pas permis le surgissement d’une stratégie anticapitaliste et anti-impérialiste. En Europe, notamment dans les pays de l’Est, on assiste à la montée de nationalismes régressifs (négation d’une justice indépendante, antiféminisme, rejet du césarisme européen). En tout état de cause, les mobilisations sociales ne parviennent pas à sortir du parlementaro-capitalisme et à faire prévaloir une vision collective du Bien Commun. Elles s’en tiennent le plus souvent à la lutte contre les aspects les plus repoussants du capitalisme réel, à savoir : antiracisme, défense des services publics, lutte contre la précarisation, pouvoir d’achat…  

 

En France, on assiste à une forme de désespérance sociale, de rejet des partis qui ont mis en œuvre la mondialisation puis son programme d’austérité ainsi que la casse de son système de protection sociale. On n’a certainement pas fini de faire le bilan catastrophique du point de vue des espérances sociales, des épisodes de la « gauche de gouvernement » qui ont provoqué ressentiment et fracturation des classes ouvrières et populaires. C’est dans ces conditions que l’extrême-droite a pu brandir des boucs émissaires et cultiver la  haine. Entrons-nous dans l’ère des démagogues ? Et en particulier de ceux, comme Zemmour, qui favorisent une ambiance de guerre civile. L’expérience du fascisme démontre, s’il en est besoin, qu’une fraction des classes populaires peut être séduite par un nationalisme chauvin, au vu des dégâts produits par le système lui-même. La question est de savoir si le capitalisme, tel qu’il est, a véritablement besoin, dans la période, d’un régime autoritaire et fascisant. En tout état de cause, l’échec des néo sociaux-démocrates (Podemos, Syriza) ne peut qu’engendrer de nouvelles frustrations, d’autant que la seule voie dominante, promue dans la période, se réduit à un électoralisme conduisant vraisemblablement à de nouveaux échecs. Le mouvement France Insoumise peut-il parvenir à ouvrir une brèche dans laquelle s’engouffreraient les classes ouvrières et populaires ? Rien n’indique, pour l’heure, que l’abstention massive puisse se réduire. La leçon qu’on peut tirer de l’épisode des Gilets Jaunes démontre que les classes régnantes et dominantes feront tout pour se maintenir au pouvoir, y compris par une répression féroce. Les manifestations, les occupations de places ne peuvent être suffisantes en elles-mêmes. La classe dominante ne peut céder sur certains aspects de sa politique que par le blocage de l’économie (grève). Le bloc bourgeois d’un point de vue électoral, ne représentant pas plus de 20% des votants, peut-il s’effriter sans qu’émerge un intellectuel collectif, organisé, issu et enraciné dans les classes ouvrières et populaires ? On n’en est pas là. Toutefois, le capitalisme français, dans son mode de domination impérialiste, se trouve de plus en plus en difficultés ; c’est un empire qui ne veut pas mourir, notamment dans la Françafrique où il connaît des reculs importants (Centrafrique, Mali, Burkina Faso…). Cet effritement de la domination française a amené dernièrement Macron à tenter d’utiliser la diaspora africaine, dans l’espoir qu’une partie d’entre elle, à l’occasion d’un coup d’Etat puisse prendre le pouvoir tout en restant dans le giron français.

 

Assiste-t-on plus globalement à une situation de chaos difficilement maîtrisable où les impérialismes dominants cherchent à détruire les Etats-Nations, alors même que rien de conséquent n’est tenté pour réduire l’emploi des énergies fossiles, la déforestation, et apaiser les tensions guerrières qui s’exacerbent ? Les peuples sont confrontés à la nécessité de concevoir une lutte de longue haleine qui puisse tirer le bilan des expériences révolutionnaires et de leurs échecs, pour faire resurgir une vision partagée de l’émancipation de l’Humanité (...). Toutefois, il ne faut pas se laisser gagner par la sinistrose : on a vu apparaître, dans la dernière période, des médias indépendants et alternatifs, des manifestations contre le démantèlement du code du travail, des services publics, contre la précarité et les lois liberticides, ainsi que des manifestations d’écologistes radicaux, de féministes et d’antiracistes qui n’ont pas dit leur dernier mot. Il faut arriver à vaincre l’apathie, tout en s’appuyant sur le rejet des partis néolibéraux (…). Enfin, dans la séquence immédiate, marquée par l’électoralisme présidentialiste et l’emprise du corporatisme, de l’économisme (pouvoir d’achat, emploi…), il conviendra d’insister sur l’idée qu’il n’y a pas de sauveur suprême, que seule la lutte des exploités et des dominés peut modifier le rapport de force et poser la question politique : quel pouvoir populaire ? Nous allons assister à des turbulences importantes, pour le meilleur ou pour le pire, où la lutte des classes va se faire plus intense.

 

AES, le 11.10.2021      

 

Pour soutenir et adhérer, à l’association AES - Alliance pour l’Emancipation Sociale

-        25€ (actifs et retraités) 

-        5€ (étudiants, sans travail et faibles revenus)

 

par chèque libellé à AES à envoyer à Odile Mangeot 43 j rue Jean Jaurès 70200 Lure