Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 1 juin 2020


Je suis comme la rose du matin
qui pleure sa rosée
à la fraîcheur de l’aube
frémissante et blême
sur laquelle les paupières de la nuit
laissent encore
difficilement
transparaître
la promesse d’un jour éclatant
à la faveur d’un soleil radieux et coquin
qui s’amusera à éclabousser la rose
encore humide
pour la cuire
en des reflets chatoyants
d’un rouge délicieusement velouté


Eric Meyleuc

Années 1990, Les lilas
In Mots-Miroirs : au cœur des maux
Paris, 2004
in Présence d’Eric Meyleuc –Pedro Vianna
La Ruche des Arts
Les numéros spéciaux de Plein Sens n° 01
Paris, 2018



Ça va tanguer très fort !
Editorial du PES n° 63

Jupiter marche sur des œufs, déséquilibré qu’il est par les conséquences du Covid-19. Si ce n’est pas la boule, il semble avoir perdu sa boussole. Dans le château vermoulu de la 5ème République, s’instituant chef de guerre contre le virus, il n’a pas ravitaillé à temps la première ligne de feu. Invoquer les taxis de la Marne et l’union sacrée ne procurait pas les masques et les tests tant attendus. La rhétorique guerrière s’avérait incapable de dissimuler de piteux mensonges. La figure tutélaire dont Macron s’était affublée, disparaissait au profit des premiers de corvée : les vaillants soldats hospitaliers tant ignorés et toutes ces petites mains méprisées qui faisaient vivre le pays confiné. Start-up et milliardaires n’étaient d’aucune utilité ! Alors le petit théâtreux se fit dégoulinant de compassion, tout en se réfugiant derrière un comité d’experts à sa main, puis derrière son premier sinistre : le verbe du petit théâtreux était sans effet. Ça tanguait de tous les côtés, même parmi sa majorité de zélotes. Elle s’effritait par petits bouts de droite et de gauche.

Alors, comme Sarko jurant qu’il avait changé, Macron proclama qu’il se réinventait, déversa « un pognon de dingue » de chômage partiel et d’aides aux entreprises. Il fallait résoudre la difficile équation à quatre inconnues :
-        apaiser la colère populaire qui montait
-        sauver le système capitaliste quoiqu’il en coûte sans être sûr d’y parvenir avec toutes ces PME, ces sous-traitants et boutiquiers
-        maintenir une majorité présidentielle s’effilochant : le baron de Lyon, premier rallié, s’accrochant à Wauquiez pour sauver sa carrière, faisait mauvais effet à la veille du 2ème tour des municipales
-        contenir la Le Pen, engrangeant les mécontents et tous ceux ayant accès à la vitrine médiatique : le graveleux Bigard, le vicomte de Villiers et son Puy du fou, le professeur Raoult, ce druide enchantant toute la droite marseillaise… Et lui, sur les conseils de sa Brigitte, de saisir le téléphone pour leur dire « Je vous ai compris » et affaiblir la voix des réseaux sociaux.

Et puis va venir cette vague de faillites, de licenciements sur l’esquif présidentiel. Ça va secouer très fort d’autant que les hospitaliers, malgré tous les remerciements, veulent en découdre. Se renier, perdre la face ? Supprimer la tarification à l’activité de l’hôpital-entreprise, les ARS ? Accorder des augmentations de salaires, restaurer l’ISF… ? Impensable ! Les primes, les médailles, le défilé du 14 juillet en leur honneur, ils n’en veulent pas. Vite un comité Théodule avec à sa tête la Notat qui rempile pour calmer le tendre Berger… Faut passer l’été.

Le Macron navigue à vue pour retrouver le cap et maintenir le gouvernail de « l’aristocratie » stato-financière, lovée dans l’Etat de la 5ème République. La verticale du pouvoir présidentiel doit être maintenue et tout doit finir par des élections bien formatées.

A moins qu’un vent de révoltes, de manifestations, ne vienne chahuter ce navire qui prend l’eau. Restent pour contenir ces frappes, la diffusion de la peur, de la répression et la surveillance généralisée pour gérer ces populations en émoi.

Avec la récession-stagnation qui s’annonce, nous entrons dans l’ère de l’incertitude. L’espérance de transformation sociale et écologique radicale repose sur un changement culturel et comportemental qui refuse de s’en remettre aux puissants comme aux bateleurs fallacieux du style Beppe Grillo. C’est une longue marche à entreprendre, celle du débat par en bas, excluant tous les dignitaires du régime et ceux qui aspirent à les remplacer. La reconversion de l’économie, la définition d’un nouveau pouvoir à instituer, se doivent d’être l’affaire des travailleurs dans les usines comme dans les bureaux. Pas simple. Ça va tanguer très fort et ce, dans un contexte international tout perturbé. L’esprit des communards peut-Il infuser dans les têtes marquées par des décennies d’individualisme ? Sans organisations émergeant des profondeurs de la société, rien de réellement possible.

GD le 29.05.2020


Comment les banques et les Bourses évitent la faillite

Quel « mécanisme » évite la baisse des Bourses, voire la faillite de certaines banques  alors même que l’endettement des Etats et des entreprises prend une ampleur redoutable ? La réponse réside dans le rôle joué par les Banques centrales (FED, BCE, Banque centrale du Royaume Uni, du Japon…). Il consiste à apaiser les marchés financiers, leur « redonner confiance » dans la possibilité d’accumuler du capital malgré l’effondrement des chiffres d’affaires des entreprises, l’ampleur du chômage, la baisse de la consommation, qui se dessinent. Les moyens mis en œuvre sont de deux ordres. Le rachat des dettes des Etats et des entreprises d’une part, et d’autre part, l’émission de liquidités au profit des banques privées à des taux extrêmement bas, voire gratuits, afin de les inciter, en prêtant à des taux supérieurs, à maintenir en survie les entreprises (et les Etats) et éviter, à la plupart d’entre-elles, la faillite. Cette fonction d’amortisseur, aux effets immédiats de la réduction de la production et de la consommation, repose sur le pari qu’à brève échéance, les moteurs de l’économie en réalité vont repartir comme avant. Effets pervers à court terme : les entreprises s’endettent encore plus, la dette des Etats s’accroît. Si les marchés financiers sont ravis de l’aubaine, la volatilité des capitaux à la recherche de rentes financières les plus sûres tout comme la fuite de capitaux de certains secteurs ou pays (en particulier des plus pauvres) n’augure rien de bon. La restructuration du capital laissera des pans entiers de l’économie en déshérence et plus qu’avant, les entreprises endettées qui s’en sortiront chercheront à recourir à une main d’œuvre à bas coût. Les secteurs de l’industrie « lourde » (métallurgie, automobile) seront incités à délocaliser. Qui plus est, les capitaux flottants pourraient bien investir dans la pierre, suscitant la formation de bulles immobilières d’autant que la reprise risque d’être bloquée par l’épargne de précaution des consommateurs. Par elle-même, l’offre de crédit ne rencontrera pas une demande accrue si, comme le supposent nombre d’économistes, nous entrons dans une période marquée, pour le moins, par la stagnation.

Illustration de la monétisation des dettes : la BCE détient 20 % des dettes publiques de la zone euro et s’achemine vers 25 % d’ici la fin de l’année. Elle procède à des rachats d’obligations émises par les Etats quelques jours, voire quelques semaines après leur émission. Ainsi l’Italie peut emprunter à 2 % auprès des marchés, se délester d’une partie de ses emprunts auprès de la BCE qui rémunère les intérêts à sa place, tout en différant les remboursements du capital. La FED, la banque centrale US, va plus loin en rachetant des créances immobilières, des dettes des municipalités. Dans ce système de domination du capital financiarisé, les marchés mesurent les risques et les capacités des entreprises et des Etats à rembourser (1). Ainsi, la dette de l’Etat français est constituée à 54 % d’obligations détenues par des « résidents » étrangers (fonds de pension, fonds souverains comme ceux des pays pétroliers du Golfe), à 25 % par des banques et assurances tricolores, à 20 % par la BCE. Quant aux pays pauvres surendettés, leurs obligations proviennent de créanciers publics et en grande partie du FMI et de la Banque mondiale ainsi que de fonds vautours (spéculatifs). La chute des prix des matières premières dont ils dépendent pour assurer des rentrées fiscales n’a rien de rassurant. En tout état de cause, les inégalités entre pays, leur dépendance s’en trouveront renforcées. Autre élément à prendre en compte : le traumatisme des populations suite à l’impact de la crise sanitaire et économique. Il induit certainement de la réflexion et des changements de comportement : baisse de la consommation frivole et épargne de prévention, frilosité des investissements dans l’hôtellerie, la restauration, le tourisme ici et ailleurs, révoltes sociales (comme au Liban...), voire émeutes de la faim et migrations. Pour les peuples, s’attaquer aux effets de la crise sans viser les causes ne les délivrera pas de leurs chaînes. Reprendre en main leur destin suppose d’effacer les dettes, de chasser les gouvernements acquis au capitalisme qu’ils servent et dont ils se servent, de déterminer par eux-mêmes leurs besoins, ce qui implique un projet politique de transformation radicale et une restructuration et conversion de leur système économique… On en est encore loin !

GD le 22.05.2020  

(1)              A cette « complexité », guère explicitée dans les médias, il faut ajouter le fait que les Etats, à la différence des collectivités locales, n’inscrivent dans leur budget que les intérêts de la dette à rembourser. Le « principal » (le capital emprunté) est détenu par une agence de l’Etat, chargée de vendre sur le marché « secondaire », les emprunts contractés : ce qui s’appelle dans le langage de l’économie classique : « faire rouler » la dette.

Le coût du risque
Si le sacré a été percuté, le veau d’or est toujours debout. La finance continue à bien se porter grâce à des perfusions massives d’euros et de dollars. Un exemple : Brico-Dépôt et Castorama obtiennent un prêt de 600 millions d’euros garantis par l’Etat. Ces enseignes appartiennent au groupe anglais Kingfisher. En février 2018, la partie comptable de son activité est délocalisée en Pologne avec 409 suppressions d’emplois à la clé. En juillet 2019, 11 magasins sont fermés, laissant sur le carreau 789 employés. Pour la 4ème année consécutive, Kingfisher est aujourd’hui  en recul en France. La Covid-19 n’est pas à l’origine des difficultés (?) du groupe. Kingfisher annonce une prime de 1 000€ à ses équipes. Merveilleux ! On dirait du Macron. Signalons - c’est un peu plus qu’une anecdote - que Black Rock Fund Advisors figure parmi les principaux actionnaires du groupe. Banques prêteuses : BNP Paribas, Crédit Agricole Corporate and Investsment Bank, Crédit Lyonnais.
Bricoler, au prochain confinement, sauvera l’économie !

Collectif Droit à la Parole/Saint-Dié, le 17.05.2020