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Parasites
Parasites est le mot juste pour désigner les classes
possédantes, faites d’individus de chair et d’os et non de flux financiers
abstraits. Ces parasites, les 500 plus grandes fortunes françaises,
responsables de la dégradation des services publics, des bas salaires, de la
souffrance au travail… celles « qui se
nourrissent sur la bête » sont la concrétisation du
capitalisme : la classe possédante se nourrit du travail des autres,
soutenue par l’Etat-providence. Les idéologues du système capitaliste tentent de
nous convaincre que les décisions économiques ont à voir avec « la loi du
marché, « la concurrence », la « mondialisation ». Dans ces
conditions, à quoi sert-il de se battre ? D’ailleurs contre qui ? La
difficulté à se représenter l’ennemi est apparue au début des années 1990 quand
la plupart des organisations politiques et syndicales ont abandonné la
rhétorique anti-bourgeoise. Nous subissons toujours les conséquences de ce
changement idéologique profond. Dans les années 1980, le PS se fait artisan du
grand bond en avant néolibéral jusqu’à ce qu’une « gauche plus
radicale » apparaisse dans les années 2010. Même si la colère demeure et
se manifeste dans les grèves 1995, 2006, 2010 et 2019, les mots pour désigner
l’adversaire ont été remplacés par une soupe idéologique forgée par les
intellectuels et politiques voulant en finir avec toute pensée critique du
capitalisme. La perte de la lutte des classes est liée au triomphe d’une
idéologie bourgeoise usant de concepts qui s’imposent même aux plus rebelles :
« réussite personnelle », « faire des projets »,
« rechercher l’ascension sociale », adhérer à la « valeur
travail ». L’auteur, pour son
analyse, nomme les parasites bourgeois les plus emblématiques et les
plus toxiques. Ils nous empoisonnent, invités tous les jours dans notre
salon-télévision. Les symptômes en sont, par exemple, la grande
dépossession : privatisation d’EDF mais aussi démolition du système de
santé, industrie bradée… Ce sont également les « réformes » de la
fiscalité au profit des grandes fortunes
et du capital, dont Bruno Lemaire est l’inconditionnel artisan. Si l’on
considère la part du budget de l’Etat dépensé pour le patronat, il est le pire
assisté de France : un quart du budget est dédié aux multiples aides aux
entreprises privées contre 3,2 % à la solidarité et à l’insertion... Rien
d’étonnant : Lemaire est l’un de ces hauts fonctionnaires biberonnés à la
glorification du capitalisme. Mais pourquoi les gens ne se révoltent-ils
pas ? C’est la dernière partie de cet ouvrage « fouillé et
radical ». Nous sommes heureux d’y lire les mots justes qui parlent aux
classes non possédantes et nous appellent à la lutte collective pour que
l’avenir « puisse nous appartenir ». OM
Nicolas Framont (fondateur de la revue Frustration) ed. Les liens
qui libèrent, 02/2023, 19.50€