Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


lundi 1 juin 2020


Comment les banques et les Bourses évitent la faillite

Quel « mécanisme » évite la baisse des Bourses, voire la faillite de certaines banques  alors même que l’endettement des Etats et des entreprises prend une ampleur redoutable ? La réponse réside dans le rôle joué par les Banques centrales (FED, BCE, Banque centrale du Royaume Uni, du Japon…). Il consiste à apaiser les marchés financiers, leur « redonner confiance » dans la possibilité d’accumuler du capital malgré l’effondrement des chiffres d’affaires des entreprises, l’ampleur du chômage, la baisse de la consommation, qui se dessinent. Les moyens mis en œuvre sont de deux ordres. Le rachat des dettes des Etats et des entreprises d’une part, et d’autre part, l’émission de liquidités au profit des banques privées à des taux extrêmement bas, voire gratuits, afin de les inciter, en prêtant à des taux supérieurs, à maintenir en survie les entreprises (et les Etats) et éviter, à la plupart d’entre-elles, la faillite. Cette fonction d’amortisseur, aux effets immédiats de la réduction de la production et de la consommation, repose sur le pari qu’à brève échéance, les moteurs de l’économie en réalité vont repartir comme avant. Effets pervers à court terme : les entreprises s’endettent encore plus, la dette des Etats s’accroît. Si les marchés financiers sont ravis de l’aubaine, la volatilité des capitaux à la recherche de rentes financières les plus sûres tout comme la fuite de capitaux de certains secteurs ou pays (en particulier des plus pauvres) n’augure rien de bon. La restructuration du capital laissera des pans entiers de l’économie en déshérence et plus qu’avant, les entreprises endettées qui s’en sortiront chercheront à recourir à une main d’œuvre à bas coût. Les secteurs de l’industrie « lourde » (métallurgie, automobile) seront incités à délocaliser. Qui plus est, les capitaux flottants pourraient bien investir dans la pierre, suscitant la formation de bulles immobilières d’autant que la reprise risque d’être bloquée par l’épargne de précaution des consommateurs. Par elle-même, l’offre de crédit ne rencontrera pas une demande accrue si, comme le supposent nombre d’économistes, nous entrons dans une période marquée, pour le moins, par la stagnation.

Illustration de la monétisation des dettes : la BCE détient 20 % des dettes publiques de la zone euro et s’achemine vers 25 % d’ici la fin de l’année. Elle procède à des rachats d’obligations émises par les Etats quelques jours, voire quelques semaines après leur émission. Ainsi l’Italie peut emprunter à 2 % auprès des marchés, se délester d’une partie de ses emprunts auprès de la BCE qui rémunère les intérêts à sa place, tout en différant les remboursements du capital. La FED, la banque centrale US, va plus loin en rachetant des créances immobilières, des dettes des municipalités. Dans ce système de domination du capital financiarisé, les marchés mesurent les risques et les capacités des entreprises et des Etats à rembourser (1). Ainsi, la dette de l’Etat français est constituée à 54 % d’obligations détenues par des « résidents » étrangers (fonds de pension, fonds souverains comme ceux des pays pétroliers du Golfe), à 25 % par des banques et assurances tricolores, à 20 % par la BCE. Quant aux pays pauvres surendettés, leurs obligations proviennent de créanciers publics et en grande partie du FMI et de la Banque mondiale ainsi que de fonds vautours (spéculatifs). La chute des prix des matières premières dont ils dépendent pour assurer des rentrées fiscales n’a rien de rassurant. En tout état de cause, les inégalités entre pays, leur dépendance s’en trouveront renforcées. Autre élément à prendre en compte : le traumatisme des populations suite à l’impact de la crise sanitaire et économique. Il induit certainement de la réflexion et des changements de comportement : baisse de la consommation frivole et épargne de prévention, frilosité des investissements dans l’hôtellerie, la restauration, le tourisme ici et ailleurs, révoltes sociales (comme au Liban...), voire émeutes de la faim et migrations. Pour les peuples, s’attaquer aux effets de la crise sans viser les causes ne les délivrera pas de leurs chaînes. Reprendre en main leur destin suppose d’effacer les dettes, de chasser les gouvernements acquis au capitalisme qu’ils servent et dont ils se servent, de déterminer par eux-mêmes leurs besoins, ce qui implique un projet politique de transformation radicale et une restructuration et conversion de leur système économique… On en est encore loin !

GD le 22.05.2020  

(1)              A cette « complexité », guère explicitée dans les médias, il faut ajouter le fait que les Etats, à la différence des collectivités locales, n’inscrivent dans leur budget que les intérêts de la dette à rembourser. Le « principal » (le capital emprunté) est détenu par une agence de l’Etat, chargée de vendre sur le marché « secondaire », les emprunts contractés : ce qui s’appelle dans le langage de l’économie classique : « faire rouler » la dette.

Le coût du risque
Si le sacré a été percuté, le veau d’or est toujours debout. La finance continue à bien se porter grâce à des perfusions massives d’euros et de dollars. Un exemple : Brico-Dépôt et Castorama obtiennent un prêt de 600 millions d’euros garantis par l’Etat. Ces enseignes appartiennent au groupe anglais Kingfisher. En février 2018, la partie comptable de son activité est délocalisée en Pologne avec 409 suppressions d’emplois à la clé. En juillet 2019, 11 magasins sont fermés, laissant sur le carreau 789 employés. Pour la 4ème année consécutive, Kingfisher est aujourd’hui  en recul en France. La Covid-19 n’est pas à l’origine des difficultés (?) du groupe. Kingfisher annonce une prime de 1 000€ à ses équipes. Merveilleux ! On dirait du Macron. Signalons - c’est un peu plus qu’une anecdote - que Black Rock Fund Advisors figure parmi les principaux actionnaires du groupe. Banques prêteuses : BNP Paribas, Crédit Agricole Corporate and Investsment Bank, Crédit Lyonnais.
Bricoler, au prochain confinement, sauvera l’économie !

Collectif Droit à la Parole/Saint-Dié, le 17.05.2020