Ci-dessous, l'édito
du PES n° 34
et quelques articles publiés dans ce dernier n°
Le loufoque
Trump recadré ?
On le disait imprévisible, versatile,
protectionniste, xénophobe, antimusulman, on ne doute pas qu’il le soit
toujours mais il semble sous pression de « l’Etat profond », et tout
particulièrement du complexe militaro-industriel (1). Certes, ses rodomontades
agacent toujours, comme ses menaces contre la Corée du Nord. Mais les
bombardements en Syrie contre l’armée d’Assad ont été applaudis, tout comme
l’expérimentation de cette mère des bombes, à 16 millions de dollars, larguée pour
pulvériser un réseau de tunnels occupés par les djihadistes de l’OEI en
Afghanistan. Quant à ses visites au Moyen-Orient et en Europe, elles confirment
à la fois la brutalité du personnage et sa mise sous tutelle.
En Arabie Saoudite, il a confirmé l’alliance
stratégique avec les Saoud. Ce pays n’était plus celui qui « asservit les femmes et tue les
homosexuels », mais un « royaume
magnifique ». 380 milliards de dollars, dont 110 de contrats
militaires, et les fastes déployés pour le recevoir, valaient bien revirement.
D’ailleurs, le soutien à la guerre meurtrière au Yémen était confirmé.
« L’allié russe », lui, est devenu celui avec lequel « nos relations sont au plus bas ».
L’axe du mal désormais, c’est l’Iran, qui finance, entraîne les
terroristes ! Hégémonique sur l’Irak aujourd’hui, demain sur la Syrie,
voire le Liban… Alors, laissons faire nos drones et « nos boys, d’ailleurs ce ne sont pour la plupart que des prolétaires
volontaires ». Tel fut le message transmis aux rois du pétrole.
En Palestine, rien de neuf, sinon la
confirmation du soutien au sionisme, légitimé. Rien sur la colonisation, les
prisonniers politiques palestiniens… L’Etat palestinien, il n’en fut pas
question. A Mahmoud Abbas, cette « quantité négligeable », un sermon :
« évitez les manifestations
violentes » ! Rien, à part beaucoup de mise en scène, y compris
devant le mur des lamentations…
En Europe, Bruxelles n’était plus ce
« trou à rats », l’OTAN
n’était plus « obsolète »
et le Brexit plus tout à fait « merveilleux ».
Demeuraient en revanche l’unilatéralisme US et ses exigences de partage de la
charge de l’OTAN. « 23 pays sur 28
continuent de ne pas payer », ce qu’ils doivent faire, sermonne Trump.
Passez à la caisse : 2% de votre PIB. Les diplomates furent choqués par ce
langage si peu diplomatique. Tous s’inclinèrent, sauf Merkel : « On ne fera ni plus, ni moins », soit
1.2% du PIB. Et Donald de tempêter « Les
Allemands sont mauvais », « faut
stopper l’importation de leurs voitures » ! Cette brutalité
verbale fut même physique lorsqu’il bouscula le 1er ministre du Monténégro
qui, certes, en dollars, ne pèse pas lourd.
Toute cette mise en scène, de
Bruxelles à la Sicile… pour si peu. L’accord sur le climat attendra. Faut dire
que la lutte des fractions de la classe dominante aux USA n’a pas trouvé de
compromis entre les pétroliers, le complexe militaro-industriel, la Silicon
Valley et toutes les entreprises qui, en Californie notamment, utilisent la
main d’œuvre à bas coût, mexicaine en particulier. Le mur attendra… comme les mesures
xénophobes. Le 25 mai, la justice américaine a d’ailleurs confirmé en appel la
suspension du décret anti-immigration. Quant aux petits blancs prolétaires de la ceinture de la rouille, ces électeurs
de Trump, ils continueront à cauchemarder : la diminution d’impôts pour
les riches, c’est pas pour eux, et les emplois promis relèvent du mirage.
De fait, Trump demeure sous
surveillance. Selon Broder, l’ancien conseiller des 3 présidents successifs
Nixon, Reagan, Clinton, il serait « rentré
dans la zone d’une possible destitution ». Le FBI, la presse… laissent
bruire des rumeurs déstabilisantes : l’irascible serait un foldingue
livrant des secrets aux Russes… « L’Etat profond » le rappellera-t-il
à l’ordre, la majorité républicaine se résoudra-t-elle à le virer ? Rien
n’est assuré. Ce qui est sûr, c’est que les temps de crise produisent des
énergumènes incontrôlables.
Le 27.05.2017,
(1) Lire l’édito
de Serge Halimi et l’article de Michael T. Klare, le
Monde Diplomatique mai 2017