Rouges de colère car les classes populaires ne doivent pas payer la crise du capitalisme.



Verts de rage contre le productivisme qui détruit l’Homme et la planète.



Noirs d’espoir pour une société de justice sociale et d’égalité


vendredi 30 octobre 2020

 

 

La crise

 

Le monde est seul quand tout va de travers

quand il y a des crises tout va à l’envers

on embarque sur le bateau de la misère

ça fait longtemps que l’on rame dans cette galère

je ne suis pas un ver de terre

et encore moins un esclave de cet enfer

sûrement pas le bouc de ces émissaires

je ne ferai l’objet de leurs affaires

comme le vent je suis libre comme l’air

il faut que l’on parle ou que l’on se taise

doit-on subir ou ouvrir la parenthèse ?

quant aux victimes elles sont dans le malaise

dans leurs vitrines tourne le manège

de l’infortune en boule de neige

elle tombe en avalanche comme un piège

sur nous les prolétaires toujours en arrière

cela commence réellement à bien faire

les politiques ne sont pas là pour la terre

les sociétés deviennent austères

de nos vies notre travail et de nos salaires

eux vivent dans le luxe pendant que le peuple misère

c’est l’unique affaire du ministère

organiser la violence et la guerre

et si tout continue à aller de travers

nous ne serons plus des frères

nous retournerons à la poussière

alors combattons soyons révolutionnaires

 

Hassen

 

 

Non au « forfait urgences »

Macron nous a prévu un « cadeau » pour le 1er janvier 2021 : le forfait urgences. Il en coutera aux usagers 18 € (ou 24 en cas d’acte biologique ou de radiographie). Rage de dent, otite, migraine, mal de ventre, entorse, déchirure musculaire… si le délai pour un éventuel rendez-vous chez le médecin est trop long ou s’il n’y a pas de praticien près de chez soi, il nous restera à souffrir ou à mettre la main à la poche. Il s’agit de renflouer la Sécu et de taxer les usagers allant aux urgences sans qu’une hospitalisation s’avère nécessaire. C’et inscrit dans le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2021. Inacceptable ! Les usagers ne sont pas responsables du manque de médecins « de ville » ni de la fermeture de lits à l’hôpital, et du manque de personnels soignants dans tous les services. Qui organise le pillage de la Sécu en exonérant les entreprises et leurs actionnaires de cotisations sociales ? Sachant que 80 % des passages aux urgences ne débouchent pas sur une hospitalisation et que de nombreux retraités ne disposent d’aucune assurance complémentaire, la décision gouvernementale va encore aggraver des situations déjà très précaires. Ce forfait doit être retiré du plan de financement de la Sécu ! Une pétition est lancée par la CGT sur www.cgt.fr/ relayée dans les unions locales et départementales.

 

Victoire en Grèce contre « Aube dorée »

Après 5 ans de procès, la justice grecque a déclaré le 7 octobre 2020 le groupe néonazi « organisation criminelle » : « Aube dorée », ce gang paramilitaire nazi s’est livré à des actes criminels depuis les années 1980 contre les immigrants, les militants, les anarchistes, les LGBT… avec des discours islamophobes, antisémites, négationnistes, homophobes… Le verdict vient de rendre justice à Pavlos Fyssas, le rappeur antifasciste poignardé le 18 septembre 2013 ou encore au jeune pakistanais Sahzat Luckman. 43 membres sont condamnés pour « appartenance » à une telle organisation. Ce verdict résonne pour toutes les victimes mais aussi pour tous ceux et celles qui ont participé à la lutte contre le fascisme pendant une trentaine d’années ainsi que pour les avocats militants qui ont formé « l’action civile » et mené une dure bataille juridique. Le 7 octobre au matin, avant la décision des juges, une rivière antifasciste humaine a rempli la longue avenue Alexandras et s’est déversée dans les rues et les ruelles environnantes  scandant « Le peuple exige de mettre les nazis en prison pour leurs crimes ! ». Le procès comportera encore des épisodes à venir pour établir les sanctions et les militants doivent encore faire pression dans la rue. Mais juste pour aujourd’hui, nous pouvons nous asseoir et sourire joyeusement « Pavlos Fyssas : Presente ! Nous avons fait notre part mon frère. Et ils n’ont pas réussi ». Panos Pétrou (rédacteur du bimensuel Ergatiki Aristera et membre de DEA – gauche ouvrière internationaliste) sur alencontre.org

 

La 3° Marche des Sans papier.es

méprisée par l’ensemble de la presse

 

Après plusieurs semaines de marche, les collectifs de sans-papiers partis de Marseille, Montpellier, Lille, Le Havre, Rennes et Strasbourg ont convergé ce samedi vers la place de la République à Paris. Malgré l’interdiction de la préfecture de poursuivre jusqu’à la place de la Concorde pour marcher vers l’Élysée, plusieurs milliers de manifestants ont défilé en direction de la gare Saint-Lazare.

La date est symbolique : le 17 octobre 1961, environ 200 Algériens étaient assassinés par la Préfecture de police alors qu’ils manifestaient contre un couvre-feu imposé aux « français musulmans d’Algérie ».

Le SUB-TP-BAM-CNT (syndicat du BTP de la région parisienne) nous interpelle par son communiqué, posté sur sa page facebook ce lundi 19 octobre.

Ainsi, des milliers de prolétaires sont « oubliés » par une « gauche » - en perdition apparente il est vrai. J. C.

 

Les noirs fantômes de l’oubli

 

Au lendemain de la 3ème marche des Sans-Papièr.es à Paris, il est des constats difficiles, douloureux, mais nécessaires à faire : 

Tout le monde (ou à-peu-près), s’en fout.

 

Des hommes, des femmes, condamné.es à la clandestinité, ont traversé la France et piétiné, par milliers, hier dans Paris …mais, 

Personne ne semble les avoir vu.es !

 

Aucune couverture de presse écrite, aucun relai radio, aucune image télévisée.
Pour cela il aurait fallu sûrement des vitrines brisées, des charges de police, ou peut-être plutôt des entreprises arrêtées, des chantiers déserts, des métros et des hôpitaux sans nettoyage.

 

La France d’hier, semblait vouloir préférer pleurer son professeur assassiné, la liberté d’expression violée, la République bafouée. C’est du moins ce que laissaient entendre les médias.

 

Loin de nous l’envie ou l’idée de mettre en concurrence ces deux faits. Notre syndicat, organe collectif de solidarités, se bat pour la liberté contre tous les obscurantismes, outils de domination.
La France, et souvent trop de français.es, professent la Liberté, l’Egalité et la Fraternité comme des valeurs universelles mais ne la pratiquent que dans l’entre-soi. Oubliant facilement notre devoir de réparation pour nos « quelques moments » de colonisation, on s’étonne alors que cet humanisme ne soit pas partagé par tous.


Le « eux et nous » redevient de rigueur, 


Cachez ce noir (à coup-sûr musulman) que je ne saurais voir !

 

Au moment où Macron dit comprendre la part de notre jeunesse, qui dit la gâcher avec l’arrêt des concerts et la fermeture des bars, était-il judicieux de « marcher sur l’Elysée » ?
Ce président, marionnette du Grand Capital, est-il bien l’interlocuteur de notre colère ?
N’aurait-il mieux pas valu rejoindre la Seine, lieu commémoratif du massacre d’octobre 1961, pour rappeler aux Français.es que, 60 ans après, nous devons toujours nous interroger sur les questions de décolonisation ?

 

Les temps sont difficiles. Pour les militant.es et pour les Sand-Papièr.es
La crise sanitaire, et la crise économique qui l’accompagne, rendent difficiles les mobilisations pour la régularisation de tous et toutes. Comment lancer, en effet, un mouvement de grève générale, de cette partie la plus précarisée du prolétariat, comme ce fut le cas en 2008 ?


• Comment révéler le travail des « soutiers de cuisine » de restaurants aujourd’hui quasiment à l’arrêt ?

• Comment arrêter les chantiers, sans inquiéter les collègues fragilisés par le risque du chômage ?

• Comment ne pas nettoyer les couloirs des gares ou du métro quand les masques qui les jonchent font craindre à tous les voyageurs le risque de la contamination.


En cette période de crise on sait la foule prompte à trouver des boucs-émissaires, et ce ne peuvent être nos camarades Sans-Papièr.es

 

Il nous faut savoir aussi rassembler les militant.es que la pandémie à éloignés de nos organisations. Si la solidarité doit s’exprimer c’est bien en ces temps malheureux de crise mondiale.

 

A nos organisations le devoir de dépasser la (si facile) signature de complaisance des nombreux Appels pour reprendre le chemin d’un travail effectif, fructueux et collaboratif de mobilisation de nos propres militant.es. 

 

Nos camarades sont : Sans-papiers, mais aussi pour beaucoup depuis le confinement Sans- boulot, Sans-revenus, et donc Sans-rien à bouffer !

 

Notre solidarité doit alors s’exprimer au-delà d’une manif invisible dans Paris.
Notre syndicat y travaille quotidiennement.


Aidez-le par vos dons, ou de votre présence dans ses actions !

 

facebook.com/CNTsub/

CNT SUB-TP-BAM 33 rue des Vignoles 75020 Paris

 

 

Un pacte européen pour la migration et l’asile

est-il possible ?

 

Le 23 septembre, Madame Von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a proposé sa réforme de la politique migratoire sous forme d’un pacte européen pour la migration et l’asile, une « approche axée sur l’humain et empreinte d’humanité », précisant d’emblée que les pays les plus exposés aux migrations doivent pouvoir compter sur la solidarité de toute l’Europe et que tous doivent intensifier leurs efforts.

Certes, elle est préoccupée par la situation intenable des pays « en première ligne » (Italie, Grèce, Malte notamment), par le chantage d’Erdogan qui en demande toujours plus pour contenir les exilés (Syriens notamment) en Turquie et menace d’ouvrir les frontières vers l’UE. Elle n’est pas sans s’inquiéter de l’extension de la guerre (Syrie, Libye, Yémen, Azerbaïdjan…) grossissant les rangs des exilés. Elle n’ignore pas la situation intenable des exilés qui errent ou meurent en Méditerranée ou dans les camps. Mais elle mesure les divisions profondes en matière de politique migratoire au sein de l’UE : 27 Etats et autant de politiques différentes.

Alors, ce nouveau pacte est-il un choix politique fort pour un accueil large des exilés qui mettent le pied en Europe ou de la poudre aux yeux pour tenter d’en amoindrir les impacts et de colmater les divergences profondes entre les membres d’une Union qui est, avant tout, financière et économique ?

 

1 – L’art du grand écart

 

La politique commune de l’UE en matière de migration et d’asile n’existe pas, même si les Etats membres se sont engagés en signant, notamment, la convention de Genève, c’est l’impasse totale. Contraindre les Etats récalcitrants à l’accueil est une mission impossible dans le contexte actuel. L’on voit mal l’UE sanctionner un pays récalcitrant en lui retirant, par exemple, des fonds européens attribués par ailleurs ! Il s’agit donc de pratiquer le grand écart, sans écarteler encore plus, une UE fragmentée, entre les Etats qui refusent d’accueillir et ceux qui, situés aux portes de l’Europe, sur les routes de l’exil, sont contraints d’instruire les demandes, sans omettre ceux qui affirment être solidaires sans pour autant en faire la preuve, au contraire. Pour ne prendre que l’exemple de la France, tournons notre regard vers les camps de Calais/Grande-Synthe pour mesurer l’hypocrisie du gouvernement, prompt à affirmer sa générosité et, « en même temps », à ordonner aux forces de police de pourchasser ceux qui tentent de réinstaller des campements de misère, au plus près du Royaume Uni.   

 

Le pacte se veut donc rassurant en affirmant en priorité l’objectif de « maîtrise » et « normalisation » de la migration à long terme. Plus question de se laisser déborder par des arrivées non contrôlées, dans l’espace européen et plus question de laisser les pays d’entrée seuls face aux arrivées par la Méditerranée. Une gestion efficace et humaine serait mise en place dans le respect du droit international. Dans cet esprit, le pacte décline les moyens pour contrôler les frontières, rationnaliser et accélérer les procédures d’asile et mener une politique efficace en matière de « retour » (qu’il faut nommer « expulsion »).

 

Tout se passera avant de mettre le pied en Europe avec un filtrage  à l’entrée, à la frontière, pour déterminer si l’exilé relève d’une procédure d’asile ou non. Celui qui sera considéré comme ayant peu de chances d’obtenir une protection statutaire (parce qu’il provient d’un pays sûr ou d’un pays qui présente un faible taux de reconnaissance) n’aura pas le droit d’entrer ; de même celui considéré comme une menace pour la sécurité. Tous ceux-là seront renvoyés directement dans leur pays d’origine. Ce tri arbitraire ne reconnaît plus, dès lors, le droit au refuge dû à chacun et de fait, le pacte supprimerait le droit  automatique d’entrer sur le territoire de l’UE. De nouveaux camps verraient le jour pour filtrer, trier, renvoyer : déjà un est construit sur l’île de Samos en Grèce, un autre est prévu à Lesbos.

 

Cette barrière franchie, qui va prendre en charge la demande d’asile ? Mme Von der Leyen, au risque de se mettre à dos les pays du groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie…) ne peut proposer d’annuler les accords Dublin (accords qui leur conviennent car ils contraignent le pays d’entrée à prendre en charge la demande). Mais elle ne peut plus ignorer la colère qui monte dans les Etats « en première ligne ». Comment faire ? Elle invente un nouveau « mécanisme de solidarité » auquel tous les Etats seront tenus : soit l’Etat accepte la relocalisation d’un certain nombre de demandeurs d’asile sur son territoire, soit il parraine leur « retour », en prenant en charge l’expulsion des demandeurs et, dans le cas où celle-ci s’avère impossible, de l’instruction des demandes. Mme Von der Leyen a trouvé l’élégante formule de « solidarité flexible » ! Cette solidarité « à la carte » pourrait aussi se matérialiser par d’autres moyens, fourniture de bateaux, d’avions, de matériels techniques ou encore de garde-frontières… pour mieux contrôler.

 

Pour boucler ce processus, il convient d’instituer un pilote commun, le pacte use de la formule militaire de « task force intégrée », à savoir une force d’intervention entre les Etats membres et les agences de l’UE, comme Frontex, Eurodac, Europol… tout en renforçant leurs systèmes informatiques de contrôles.   

 

Trier, ne pas laisser entrer, renvoyer, pour réduire le nombre de demandeurs d’asile en UE, c’est le socle de la politique européenne d’asile à venir. Encore faut-il en prouver l’efficacité !

 

2 – Contrôle renforcé au nom de l’efficacité

 

Pour être crédible, dit le pacte, il faut veiller à un « retour » effectif de ceux qui n’auraient pas à prétendre à la demande de protection d’un Etat européen. Actuellement seul 1/3 des personnes ayant reçu obligation de quitter le territoire l’exécute et le contrôle est impossible à exercer du fait notamment de systèmes variant d’un Etat à l’autre. En conséquence, un système organisé, centralisé, est proposé. Des moyens supplémentaires seraient attribués à l’agence européenne Frontex grâce à un nouveau corps permanent de garde-frontières et garde-côtes européens, dotés de pouvoirs exécutifs (10 000 agents). Ces pouvoirs exorbitants de Frontex seraient facilités par une base de données communes, développée par Eurodac (système d’information contenant les empreintes digitales servant notamment à la mise en œuvre des accords de Dublin), ce qui permettrait le « traçage » des mouvements non autorisés. Big-brother disposerait d’une plateforme informatique intégrée de gestion des frontières permettant de connecter tous le systèmes européens relatifs aux frontières, aux migrations, à la sécurité et à la justice ; ils pourraient « parler » entre eux, système d’information de Schengen inclus. Ce croisement des fichiers informatiques, interdit en France et réglementé par la CNIL, serait-il autorisé en Europe ? Ne doit-on pas parler de règlement liberticide interdisant d’aller et venir ? Chaque exilé déposant son empreinte digitale en mettant le pied en Europe sera repérable dans tous les fichiers. Il ne pourra échapper à l’arbitraire de son classement en « vrai » ou « faux » demandeur d’asile. Effrayante cette conception du contrôle de la population migrante et demain… d’autres populations « indésirables » ?

 

Le contrôle ne fait pas une politique de migration et d’asile. Mme von der Leyen le sait. Mais elle doit persuader les 27 Etats d’accepter des quotas de demandeurs d’asile. Elle envoie des signaux tous azimuts pour convaincre. La réalité frappe à la porte de l’Europe tous les jours et elle ne peut l’ignorer ni fermer les yeux sur les scandales répétés de bateaux de sauvetage en Méditerranée, à la recherche désespérée d’un port de débarquement des exilés à leur bord. La question essentielle reste donc celle de l’accueil. Elle botte en touche et propose un dispositif pour les sauvetages en mer, sous forme d’une « conférence annuelle » au cours de laquelle seraient fixés des quotas d’admission des pays  volontaires… assez peu nombreux, certes, reconnaît-elle, mais il y aurait des mesures incitatives….

 

L’élégance des formules a ses limites. L’on peut trier, refuser l’accueil, expulser, contrôler, les migrations se poursuivront et seront toujours plus dangereuses et risquées tant que les capacités de réponse en nombre d’accueils seront largement insuffisantes en Europe. La « vieille » Europe est-elle prête à s’interroger sur sa démographie, sur le vieillissement de la population ? Non, cette Europe de la finance et de la concurrence, et les Etats qui la constituent, s’obstinent à ignorer la racine du mal et poursuivent ventes d’armes et guerres, politiques d’appauvrissement des populations, néocolonialisme, dérèglement climatique…

 

Ils préfèrent renvoyer la question hors de l’UE en tentant de nouer des coopérations renforcées avec les pays hors de l’UE pour faciliter les renvois en favorisant la réadmission dans les pays d’origine ou de transit. Cette pratique n’est pas nouvelle : l’UE et ses Etats membres ont mis en place une étroite coopération avec les pays tiers afin d’externaliser les frontières européennes. L’accord de réadmission est un traité international par lequel chaque partie s’engage à réadmettre sur son territoire ses propres citoyens ainsi que, dans certains cas, les ressortissants d’autres pays ayant transité par son territoire. En facilitant la réadmission des étrangers, ces conventions neutralisent leur droit au recours effectif et accroissent le risque de refoulement, en cascade, des demandeurs d’asile, car les pays de réadmission concluent eux-mêmes des accords avec d’autres pays. D’autres types d’accords non conventionnels se multiplient, le plus récent étant l’accord UE-Turquie du 18 mars 2016, la Turquie s’engageant à retenir sur son territoire les demandeurs d’asile syriens notamment, et obtenant en échange une compensation financière (6 milliards€). De la même manière, le Conseil européen a félicité l’Italie des accords qu’elle a signés avec le Soudan (2016) ou la Libye (2017). Les pays tiers participent ainsi à la fermeture arbitraire des frontières européennes (cf encart).  

 

<<<>>> 

 

Ce pacte dit de « solidarité » compte plusieurs dispositions allant à l’encontre du droit d’asile et notamment du principe de non-refoulement ; en fermant ses frontières extérieures, l’UE refuse d’exercer le droit d’asile sur son sol, ce qui contrevient directement à la convention de Genève. Le principe de « solidarité flexible » autorise les pays à décider eux-mêmes s’ils accueillent ou non. Les quelques ouvertures (si tenté qu’elles en soient) comme le regroupement familial facilité, ou l’arrêt des poursuites judiciaires pour la participation à un sauvetage en mer (qui ne fait qu’appliquer le règlement maritime !), restent à préciser…

 

Dans sa dernière partie, le pacte énonce des politiques plus globales et des intentions de partenariats internationaux, concernant la coopération au développement, la sécurité, les visas, les voies légales d’accès à l’Europe (travail, formation…). Mais la 1ère étape consiste à dégager, avant fin 2020, un consensus sur le nouveau régime de « solidarité » et les nouvelles dispositions comme le filtrage et les procédures à la frontière, ce qui ne semble pas gagné ! En effet, ce projet laisse assez circonspects les Etats membres. Certes, il est indispensable de tenter de sortir de l’impasse de l’UE en matière d’accueil et d’asile. Mais compte tenu du contexte général où se répandent plus facilement les odeurs nauséabondes de nationalisme, racisme et xénophobie que l’air frais de l’internationalisme, on ne peut que s’inquiéter du résultat. En France, cette annonce de pacte a permis au RN de Le Pen de se remettre en selle pour la campagne présidentielle à venir. Elle appelle à signer une pétition européenne contre « le flux migratoire gigantesque qui va déferler sur l’Europe » !

 

Triste avenir si nous laissons faire ! Sans un régime d’asile commun, avec des critères de protection harmonisés, un tel pacte est voué à l’échec. Il est temps encore, de le dénoncer, puisque les négociations avec les Etats membres vont s’ouvrir. 

 

Odile Mangeot, le 24.10.2020

sources : www.eur-lex.europa.eu/  - www.touteleurope.eu/ - www.euractiv.fr/

www.gaucheanticapitaliste.org/ - www.gisti.org/  

 

encart 1

 

L’UE achète des drones pour repérer les bateaux transportant des migrants

Dans le cadre des services de surveillance aérienne maritime, Bruxelles a commandé auprès d’Airbus des drones. Airbus travaillera avec la société publique Israel Aeorspace Industries (IAI). Un autre contrat a été signé avec Elbit Systems, une société d’armement israélienne privée. 50 millions d’euros par contrat. Les drones israéliens sont le résultat d’une technologie de surveillance qu’Israël a développée et testée lors d’une série d’attaques sur Gaza (selon Human Rights Watch).

https://www.euractiv.fr

 

encart

 

L’Europe pactise avec les milices

Depuis janvier 2020, 20 000 migrants sont arrivés en Italie, dont plus de 11 000 en provenance de Libye et près de 9 000 de Tunisie ; environ 3 000 boat people ont accosté à Malte. Dans le même temps, plus de 8 000 personnes ont été livrées aux garde-côtes libyens par le mécanisme de « refoulement par procuration » qui consiste, pour l’Italie, à fournir les moyens techniques d’intervenir sans avoir à le faire elle-même… Après un accord passé en février 2017 avec la Libye, l’Italie renforce l’externalisation de sa politique migratoire avec la Tunisie ; Malte affrète en avril 2020, trois chalutiers pour renvoyer des migrants vers la Libye, avec laquelle elle signe, le 28 mai, un accord qui prévoit la création de deux « centres de coordination » et une aide aux opérations de refoulement – illégales - opérées par les garde-côtes libyens. L’UE et son agence Frontex, avec ses garde-frontières et garde-côtes, soutient l’Italie et Malte, participent à définir la stratégie libyenne de gestion et de sécurité des frontières. Pour empêcher les migrants de quitter la Libye et repousser les frontières de l’UE au-delà du continent. Peu importe que les camps libyens soient des centres de torture et la Méditerranée un cimetière…

www.gisti.orf/

 

 

 

Nous avons lu…

 

Repères (II) pour résister à l’idéologie dominante

Tous les militants, tous ceux qui prennent parti pour le combat social devraient lire cet essai de « sociologie, sport de combat » (Bourdieu). Comprendre les rapports sociaux et sociétaux n’est pas excuser, comme l’a prétendu Valls : l’itinéraire de nombre de djihadistes passant de l’échec scolaire à la délinquance, pour se trouver une identité illuminée, est à prendre au sérieux, tout comme les raisons du vote FN d’une fraction des classes populaires ou l’abstention massive d’une autre partie, doit être portée à la compréhension. L’auteur démontre comment la propagande sur les « talents », les « dons » légitime la classe sociale dominante, comment le champ politique est devenu illisible au travers des catégories, gauche, droite… Pourquoi est brandie la notion « galvaudée » de populisme ? Ces analyses des discours dominants, comme celui opposant les beaufs aux bobos, justifient l’abandon de la réalité de la lutte des classes, masquant la fonction du « gouvernement moderne (celle) d’un comité qui gère les affaires communes de la bourgeoisie » (K. Marx). Ce rappel conduit à s’interroger : que signifie la répartition des propos sur l’assistanat dans un monde marqué par le chômage et la précarité ? La moralisation du quotidien par des gestes individuels pour protéger la planète ? Et bien d’autres interrogations sur « l’Europe qui protège » ( !), sur l’appel à « une autre Europe » après « l’expérience » grecque… GD

Gérard Mauger, ed. du Croquant, 2018, 18€ 

 

D’une crise à l’autre, et après ?

 

Les leçons de la crise de 2007-2008 n’ont pas été tirées. Il ne pouvait d’ailleurs en être autrement. Il ne s’agissait pas, comme au sortir de la 2ème guerre mondiale, d’un repartage du monde sous l’égide des Etats-Unis sur fond de reconstruction et d’opposition au système de capitalisme d’Etat, qui pouvait encore entretenir des illusions de libération sociale et politique. De fait, l’heure était au sauvetage du capitalisme financiarisé afin de maintenir à tout crin le stade  néolibéral imposé depuis les années 1980. Sur ce, a surgi la crise sanitaire provoquée par la pandémie du Covid 19, affectant l’économie réelle. C’est sur ces deux moments historiques que je me propose de revenir, non seulement pour les distinguer mais également pour montrer que les logiques à l’œuvre visent le même objectif de « relance » pour que rien ne change.

 

La logique et les effets de la crise de 2008-2009 sont toujours là

 

De 1990 à 2007, les titres des dettes privées et publiques sont passés de 100 % du PIB mondial à 200 %. Une énorme bulle financière s’est formée. Le rétrécissement, voire l’insuffisance d’opportunités d’investissements rentables dans l’économie réelle, la baisse du taux de profit, ont accentué les tares du capitalisme financiarisé : le recours au crédit jusqu’à l’aberration consistait, aux Etats-Unis tout particulièrement, à endetter les plus vulnérables tout en titrisant ces titres de dettes qui contaminèrent l’ensemble du système bancaire mondial. C’était là un moyen catastrophique pour tenter de remédier, dans l’immobilier, à l’offre de capital-argent qui ne trouvait pas à s’employer.

 

Et la crise éclata. Il fallait sauver les banques pleines de crédits pourris. Rien qu’en Europe, la BCE (1) suivant la FED (1), renfloua les banques privées à hauteur de 1 310 milliards d’euros à un taux de 1 % puis à un taux négatif de – 1 %... L’objectif affiché consistait à renforcer la capacité des banques à prêter (à un taux supérieur) à leurs clients, notamment les PME, mais aussi aux Etats-Unis eux-mêmes endettés.  Plus fondamentalement, ce sauvetage visant à restaurer la rentabilité des banques, des assurances, des fonds dits d’investissement, bref, les marchés financiers, qu’il fallait rassurer en accroissant leurs capacités de versement de dividendes à leurs actionnaires. Il y eut bien quelques velléités de réguler la finance. Les paroles ne se traduisirent guère en actes : pas question de séparer les banques de dépôts et d’affaires, de supprimer les paradis fiscaux ou encore les bourses et la spéculation. Il s’agissait de poursuivre le processus historique entamé depuis les années 80 : liberté de circulation sans entrave du capital financiarisé et des marchandises, délocalisations d’entreprises vers les pays à bas salaires, endettement… Et ce, malgré les mises en garde, bien timides, il est vrai, du FMI(1) lui-même ; son diagnostic est toujours valable : Attention ( !) à une « ingouvernementalité incontrôlable (jusqu’à asphyxier la Grèce), à un découplage entre la finance et l’économie réelle »… C’est peu de le dire en ces termes. Que l’on pense aux traders de plus en plus remplacés par des traders automatiques gérés par le big data à l’aide d’algorithmes. Les « opérateurs de marchés » exécutent désormais des ordres de vente et d’achat de titres à la vitesse de la lumière : 20 millisecondes en 2010. Les « transactions à haute fréquence » représentent 35 % de la capitalisation boursière de Wall Street. Ces traders, dits de « gestion passive » ( !) automatisée, en novlangue, qui jouent sur les différents taux d’intérêt et de rendement des actions, géraient en 2010 4,3 mille milliards de dollars.

 

Tous ces éléments constitutifs du système  néolibéral n’ont pas changé. Certes, le système financier ne s’est pas effondré mais l’intervention des banques centrales a accusé un lourd passif en sauvant les banques, en rachetant des « crédits pourris », en rachetant des dettes des Etats en espérant les revendre plus tard. Le passif de la FED atteint désormais 5 billions de dollars (1 billion = 1 000 milliards). Le système financier est complètement hors sol. Il ne repose plus que sur la croyance d’une relance économique à venir…

 

Et survint la crise sanitaire Covid 19

 

Cette crise a provoqué, pour des raisons sanitaires et de préservation de la population, un blocage de la production et de la consommation. C’est un arrêt simultané de l’offre et de la demande que les gouvernements tentent, vainement pour le moment, de surmonter. La crise s’est traduite par une chute brutale du PIB, accroissant encore plus les inégalités, la corruption, la spéculation, bref, aggravant les tares du système et son caractère parasitaire.

 

Le chômage touche les moins qualifiés, les plus précaires, les femmes plus que les hommes, le secteur informel au niveau mondial (2 milliards de personnes) et tous les pays qui possèdent un secteur de santé soit déficient, soit pratiquement inexistant, tout comme ceux qui dépendent de la demande extérieure (exportations de matières premières…) dont les marges de manœuvre budgétaire sont très faibles. Ne plus produire, ne plus vendre ou le faire à moindre échelle, c’est risquer la faillite et des licenciements massifs.

 

Autre spécificité de cette crise, c’est qu’elle frappe de manière inégale les divers secteurs de l’économie réelle. Les plans de relance mis en œuvre en arrosant tous azimuts, sans contreparties ni contraintes pour les entreprises, provoquent des effets d’aubaine dont profitent les grands groupes soit en spéculant, soit en se saisissant des prêts garantis, des exonérations et baisses d’impôts pour augmenter le versement de dividendes et conserver leurs actionnaires. Ainsi, on assiste, d’une part, à une survalorisation boursière de certaines actions comme celles de Tesla (+ 750 %) alors même que la production et les ventes diminuent. D’autre part, les grands groupes ne sont aucunement gênés de verser des dividendes et en même temps de licencier : l’énumération qui suit, non exhaustive, est parlante : Vivendi, versement de dividendes 690 millions (+ 20 %), Schneider Electric 1,4 milliard (+ 8,5 %), Danone 1,37 milliard (+ 8,2 %), Total 6,93 milliards (+ 4,7 %)… C’est un véritable ruissellement d’argent public vers le haut et dans le même temps, les entreprises du CAC 40 annoncent 60 000 suppressions d’emplois.

 

En d’autres termes, un fossé énorme se creuse entre, d’une part, les classes populaires et moyennes, et d’autre part, la classe rentière, propriétaire d’actions. Avant la pandémie, l’on dénombrait 5 millions de pauvres qui recevaient de l’aide alimentaire, ce chiffre va grimper en flèche avec les licenciements (800 000 annoncés) et la nationalisation partielle des salaires (chômage dit partiel) ne sera qu’un piètre amortisseur. Il en sera certainement du plan de relance (mais cette fois à plus grande échelle) comme du CICE (2). Mis en œuvre sous Hollande, avec la promesse de création d’un million d’emplois sur 5 ans (2013-2017), il a coûté 1,8 milliard et  n’a créé, tout au plus, que 160 000 emplois. Je laisse le soin au lecteur-contribuable de calculer le coût pour un emploi créé… Mais la goinfrerie est loin de s’arrêter à cette « légalité ». Une enquête d’un consortium de journalistes d’investigation établit que 2 100 milliards de dollars d’argent sale provenant de la fraude fiscale, de trafics de drogue, d’armes, d’œuvres d’art, ont transité pour se blanchir dans des banques prestigieuses : HSBC, Deutsche Bank, Société Générale…, tout en circulant par les paradis fiscaux des îles britanniques, des Emirats Arabes Unis…

 

Cette gabegie acceptée repose sur l’aphorisme ringard « les profits d’aujourd’hui sont les emplois de demain », sur cette « confiance » dans les vertus du système ( !). Quoique… ceux qui nous dirigent sont inquiets. Ils vitupèrent contre l’épargne de précaution, nous incitent à consommer à coups de remises et de crédits pas chers… Et dans le même temps, ils invitent les « partenaires sociaux », complaisants, à signer des « accords de compétitivité pour l’emploi » pour sauver des postes à coups de baisse de salaires, de réduction des congés payés…

 

Cette politique de gribouille néolibérale joue sur la peur, la démoralisation et le découragement des travailleurs, tout en se préparant à canaliser et à réprimer les colères. Ils en ont les moyens, ce qui n’est pas le cas pour les promesses de réindustrialisation et de relocalisation. Il faudrait pour le moins un dirigisme d’Etat interventionniste qu’ils ne sont pas prêts d’utiliser malgré les appels en ce sens : reconstruire des filières dans les secteurs industriels stratégiques - transport, énergie, médicament, alimentation, recherche - comme y invite la CGT (3) est un leurre réformiste sans effet.

 

Depuis 30 ans, le capital porteur d’intérêts et de dividendes a assuré sa suprématie mondiale. Pour les anticapitalistes, c’est lui la cible ainsi que tous les dirigeants des Etats qui le servent. Dans l’immédiat, le plus probable, est la sortie de cette crise dans le cadre du système, après la découverte d’un vaccin susceptible d’enrayer la pandémie. Ce pessimisme dans la réflexion n’empêche nullement le déploiement de volontés optimistes pour contrer l’après qui nous attend.

 

Et après

 

Blocage de la production, restriction de la consommation, avec son cortège de faillites, de licenciements, de concentrations capitalistes et d’une mutation systémique au profit des nouvelles technologies : c’est la voie ouverte à deux scénarios noirs.

 

D’une part, celui, classique, dans le cadre d’une crise mondiale du capitalisme, consisterait dans l’effondrement des prix, la perte de valeur des produits. On peut penser qu’instruits par la crise de 1929-1930, les élites mondiales feront tout pour l’éviter, c’est d’ailleurs déjà le cas. La BCE a prévenu : il faut « enrayer la spirale des prix négatifs » Pour esquiver cet écueil, elle s’emploie, comme les autres institutions du même type, à racheter les dettes publiques et privées ; il faut à tout prix empêcher toute panique des marchés. Elle a d’ailleurs débloqué 1 500 milliards d’euros à cet effet. Son passif représente 50 % du PIB de la zone euro. On s’acheminerait par conséquent, dans cette hypothèse, vers la solution de la banque centrale japonaise (120 % de dettes par rapport au PIB), c’est-à-dire un endettement massif, assorti d’une croissance faible. C’est la raison des plans de relance historiques qui sont à l’œuvre. Certains économistes en viennent à parler de dettes perpétuelles, d’autres plus réalistes à prôner, pour contrer la spirale néolibérale, d’abolition des dettes. Envisager sous cet angle la sortie de crise, c’est omettre pour le moins d’autres facteurs de perturbation : l’éclatement d’une nouvelle bulle financière, la montée en puissance du capitalisme d’Etat chinois, les révoltes et soulèvements populaires déréglant les calculs des élites financiarisées.

 

Autre scénario, encore plus perturbant - et c’est le FMI qui le dit - « Le système financier n’est pas préparé », « le risque climatique peut se transformer en catastrophe et toucher les ménages, les entreprises non financières et le secteur public ». S’enclencherait ainsi « un retrait important des dépôts des clients dans les banques » provoquant « un manque de liquidités », « la fonte des actions en raison de la destruction généralisée des actifs et de la capacité de la production des entreprises ». On ne peut  guère être plus alarmiste, encore que ces admonestations ne prennent pas en compte les migrations climatiques, la montée des nationalismes guerriers, l’emprise des idéologies conservatrices ou archaïques manipulées…

 

Il n’en reste pas moins que l’hégémonie néolibérale à la mode occidentale s’effrite. Elle repose sur deux piliers : le libéralisme économique fragilisé et le libéralisme culturel, sociétal, consumériste de libertés des mœurs, auquel est attachée la petite et moyenne bourgeoisie. Si l’on peut être amené à penser que l’avenir du capitalisme est chinois, force est d’omettre qu’il se heurterait, du moins en Europe, à des résistances extrêmement fortes sur le plan des libertés. Comme l’écrit Gramsci « le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent des monstres ». Pour l’heure, ils prennent la forme de « dingos » dangereux comme Bolsonaro, Trump, Orban, Poutine, Erdogan ou de figures théâtrales comme Boris Johnson, voire Macron. Déconstruire l’hégémonie néolibérale et le nationalisme xénophobe, passe par l’émergence d‘une nouvelle hégémonie de luttes pour des sociétés de sobriété, égalitaires. La fraternité ne peut s’exercer qu’entre égaux, la liberté réelle suppose le recul de l’ignorance vis-à-vis des phénomènes économiques et historiques dans lesquels nous sommes empêtrés. Le néocolonialisme, la corruption font resurgir, surtout dans les pays pauvres de culture islamique, des grilles de lecture du monde archaïques et mortifères. Même si l’Etat islamique a été démantelé, l’instauration probable d’un régime taliban en Afghanistan en dit long sur les impasses historiques qui se profilent. Reste l’énergie à déployer afin de faire advenir une nouvelle civilisation, l’éco-socialisme démocratique : un chemin escarpé semé d’embuches…

 

GD le 19.10.2020

 

(1)   BCE = Banque Centrale Européenne. FED = Banque centrale étatsunienne. FMI = Fonds Monétaire International

(2)   CICE = Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi

(3)   interview de MC Cailletaud, membre de la direction confédérale dans Vie Nouvelle

 

Sources : Alencontre, en particulier les articles de François Chesnais et Michel Husson, bastamag, le Monde…

 

encart

Le confinement à Wuhan, impossible en France ?

« Le virus, apparu à Wuhan fin déc. 2019, s’est propagé à travers la ville comme une traînée de poudre. Le 23 janvier, le gouvernement chinois a ordonné la mise en quarantaine totale de Wuhan (11 millions d’habitants). Deux jours plus tard, toute la province du Hubel (45 millions de personnes) a été fermée pour 3 mois. L’ordre du confinement a imposé à tous les résidents de ne pas sortir de chez eux pendant 3 mois. Quelque 580 000 bénévoles venus de la campagne ou d’autres villes ont été mobilisés pour aider les résidents et pourvoir à leurs besoins ; conseils de quartier et conseils de surveillance liés au parti, ont organisé ces bénévoles « régleurs de problèmes » qui, tous les jours, livraient la nourriture et les médicaments aux familles. Quelques heures après le début du confinement, des médecins volontaires de tout le pays ont commencé à arriver : 35 000 entre fin janvier et avril pour Wuhan. En 10 jours, 12 000 travailleurs sont arrivés pour construire deux hôpitaux spéciaux d’infection de campagne, en mesure de traiter des milliers de malades du Covid-19. L’armée chinoise a envoyé 340 équipes médicales, plusieurs milliers de médecins, des équipes logistiques, des étudiants en médecine miliaire.

Début janvier, la Chine a rapidement manqué d’équipements de protection individuelle (EPI). Les besoins quotidiens de Wuhan comprenaient 60 000 combinaisons, 125 000 masques médicaux et 25 000 lunettes médicales. La Chine ne produisant que 30 000 combinaisons/jour, le gouvernement a rapidement mobilisé des entreprises d’Etat, pour accélérer la production existante et construire de nouvelles lignes de production. Mi-février, la crise de l’EPI était terminée. Enfin, le gouvernent a mis en place des installations de dépistage publiques et privées avec des kits d’essai, une société de génétique et de dépistage a été capable de tester des dizaines de milliers de personnes ».

 

Ces extraits d’article, cité par François Chesnais, pour illustrer le succès de la campagne sanitaire en Chine, même si ce « reportage » passe totalement sous silence la nature du régime chinois, la répression massive contre les Ouighours entre autres et le la non prise en compte, dès la fin novembre 2019 des indications des médecins sur la possible pandémie.

 

Nous avons lu

Histoire de l’Angola de 1820 à nos jours

Colonisé par le Portugal, ce pays est d’abord celui de l’exportation d’esclaves. Ce n’est que sous la pression abolitionniste que l’Angola devient une colonie de peuplement blanche, exploitant la canne à sucre, le coton, le maïs et le café, dès 1834. Mais, à Luanda surtout, va se jouer une histoire complexe et meurtrière avec la présence d’une population mixte : blanche, noire et créole. En 1961, éclatent trois rébellions au nord, au sud et à Luanda, donnant naissance à trois guérillas menées par le FNLA, le MPLA et l’UNITA. Dans le contexte de la guerre froide, les interventions étrangères vont peser lourd dans ce long conflit sanglant, opposant d’abord les guérilleros et l’armée portugaise. John Kennedy fournit du napalm à l’aviation portugaise de Salazar, l’OTAN, des armes ; l’URSS soutient le MPLA qui a des liens avec le parti communiste portugais. Après la « révolution portugaise » qui chasse le dictateur fasciste Salazar (1974), dont les exactions sont dénoncées (décapitation des chefs de villages, tortures), une autre histoire encore plus meurtrière va opposer les trois mouvements de guérillas. Les découvertes minières (diamants, cuivre, pétrole) ont ouvert les appétits des grandes puissances et des voisins immédiats (Congo de Mobutu et Afrique du Sud de l’apartheid raciste). Pour contrer le pouvoir du  MPLA, l’invasion sud-africaine menace Luanda, l’UNITA de Jonas Savimbi joue la carte raciste de la République noire contre les métis et les créoles qui, au sein du MPLA, occupent des postes stratégiques. Des commandos cubains interviennent pour sauver le MPLA d’Agostino Neto. Ces guerres, d’interventions étrangères et guerre civile, vont s’achever véritablement en 2002 puis par les élections de 2008 et la victoire de José Dos Santos du MPLA. Entre temps, un régime dictatorial (dépendant des revenus du pétrole, gangrené par le népotisme et la corruption) s’est installé, tout comme les aspirations du peuple angolais dans sa diversité. La crise de 2015 (chute des cours du pétrole) ouvre, espérons-le,  un nouveau chapitre avec le président Lourenço qui ne soit pas aussi dramatique que les précédents.

A découvrir pour saisir les affres qui tourmentent les peuples africains, subissant dictatures et interventions néocoloniales. GD

David Birmingham, ed. Chandeigne, 2019, 21€  

 

 

Pour évoquer l’assassinat de l’enseignant du collège de Conflans-Sainte-Honorine,

nous avons choisi le texte de la Coordination nationale de l’Union Juive Française pour la Paix.

 

«  De l’art d’utiliser le fanatisme religieux pour légitimer le racisme d’Etat

 

L’assassinat atroce d’un enseignant par un jeune fanatique nous émeut et nous bouleverse tous. Les enseignants, en général méprisés par le pouvoir, s’interrogent sur les conditions d’exercice de leur métier et sur la liberté d’enseigner. Le jeune terroriste a agi avec les motivations d’un fanatique religieux, qui prétend se revendiquer de l’islam. Il faudra dire un jour les ravages psychologiques qu’auront faits guerres et répressions génocidaires en Tchétchénie.

 

Ce crime atroce se double désormais d’une exploitation sans vergogne.

 

Autrefois, le pouvoir protestait contre l’idée qu’il y aurait un racisme d’Etat et niait l’existence d’une islamophobie. A présent, ce même pouvoir veut interdire de lutter contre l’islamophobie, en s’en prenant à des associations musulmanes, dont le CCIF (Collectif de lutte contre l’islamophobie en France), calomnié, sali, injurié parce qu’il veut faire respecter les droits des citoyens musulmans en France et lutter contre les discriminations.

 

Il y a quelque chose de totalitaire dans la nouvelle étape du discours raciste et islamophobe d’Etat qui vient d’être franchie avec l’introduction frauduleuse dans le débat national du concept du « séparatisme » supposé qu’entretiendraient nos concitoyens de culture musulmane, croyants ou non, avec la Nation.

 

De quelques fanatiques, on passe à des groupes entiers qualifiés d’islamistes, puis à toute organisation indépendante s’appuyant sur l’Islam, comme le Secours catholique s’appuie sur le christianisme, des ONG comme Baraka City, une organisation antiraciste comme le CCIF. D’ennemis intérieurs hier, les voilà aujourd’hui accusés d’entretenir dans leurs rangs un projet de séparatisme avec, à terme, une volonté de créer des espaces de non-droit où seules des lois prétendument inspirées du Coran remplaceraient les lois de la République. Vieux discours de l’extrême-droite parés de nouveaux oripeaux… Le véritable séparatisme, c’est la désignation assumée à la vindicte générale de pans entiers de notre société au seul motif qu’ils sont musulmanes et musulmans.

 

L’utilisation de la notion de « liberté d’expression » jusqu’à la nausée par un pouvoir qui la brime depuis des années, en instaurant des lois d’exception, en interdisant ou en réprimant les manifestations populaires, et désormais en appelant à l’interdiction d’organisations humanitaires ou militantes, a quelque chose d’obscène.

 

Nous connaissons les effets de cet engrenage criminel du racisme pour en avoir nous-mêmes subi les conséquences. La généralisation des discours antimusulmans à chaque fois que se produit un acte criminel d’un jeune égaré constitue, en quelque sorte, une victoire des auteurs de ces actes contre la démocratie. L’atmosphère empoisonnée d’aujourd’hui peut permettre de comprendre ce qui a dû se passer en France et en Allemagne pendant les années 1930. Comment une société entière a pu être, petit à petit, contaminée par des discours politiques et la presse antijuive, pour se retrouver embrigadée dans une croisade exterminatrice.

 

Plus qu’à tous autres, il nous appartient d’alerter nos concitoyens sur les dangers qui menacent nos sœurs et nos frères musulmans, et plus largement notre société toute entière. Le temps nous est compté si nous ne voulons pas que se produise à nouveau une catastrophe.

 

Nous appelons les femmes et les hommes de bonne volonté, épris de justice et de respect mutuel, à refuser ce discours islamophobe – ce discours de haine raciste gros de dangers – à faire front, toutes et tous ensemble, contre le racisme qui risque de submerger notre société et de l’emporter très loin des valeurs démocratiques et républicaines qu’elle prétend défendre ».

 

La Commission Antiracisme Politique, pour la Coordination nationale de l’UJFP, le 19 octobre 2020

 

Pour en savoir plus sur l’UJFP : ujfp.org

 

 

JEU DE RACKET !

 

Dans PES n° 65, nous évoquions le Tour de France, cette « magnifique » épreuve populaire, gratuite, qui diffuse les valeurs humanistes du sport… mais qui est, en fait, un barnum privé dont le principal objectif, avec le concours du Service Public de la télévision, est d’abrutir les classes populaires et au passage de gagner beaucoup d’argent que se partagent les coureurs, les entraineurs, les organisateurs… tous plus tricheurs les uns que les autres. L’objectif était cette année qu’un Français remporte (enfin) cette épreuve, 35 ans après Bernard Hinault - celui qui disait éprouver de la jouissance à dominer les autres. Le but étant de relancer l’intérêt du public français surtout jeune, et les audiences TV et amener de nouveaux sponsors. Pour cela, un parcours sur mesure avait été tracé pour favoriser les coureurs français. Raté ! la dernière étape (Lure/La Planche des Belles Filles), qui devait voir un Français triompher dans la liesse populaire a vu, en fait, s’affronter pour la 1ère place, deux coureurs slovènes et un coureur né en Tasmanie ; cela aura au moins permis de réviser sa géographie. Le 1er Français est à la 11ème  place.

 

La moyenne d’âge des téléspectateurs est de 62 ans et beaucoup disent regarder cette course pour voir des paysages… Il semble donc que cette épreuve « machiste et polluante », selon le nouveau maire de Lyon – premier homme politique ayant osé critiquer cette institution - va perdre de sa notoriété. Les temps de retransmission TV vont sans doute diminuer et l’épreuve perdre donc de son impact. Mais les classes dirigeantes ne vont pas laisser le cerveau des masses ouvrières sans occupation. Celles-ci risqueraient de lire, parler à leurs voisins, échanger, s’enrichir mutuellement, réfléchir sur les conditions de leurs exploitations et chercher des solutions pour y échapper. Face à un tel danger, il leur faut réagir rapidement : TF1, BFM TV, CNEWS assument toujours leur part de « boulot » mais il faut des évènements exceptionnels, des pics d’émotion pour être plus efficaces.

 

Le tournoi de tennis Roland Garros

 

Il semble être l’événement en passe de surpasser le Tour de France. Un signe qui ne trompe pas, est l’investissement énorme du service public : plus de 200 heures de retransmission en France et des droits d’images d’environ 20 millions d’euros. Le chiffre exact est difficile à connaitre car, si le cyclisme nage en eau trouble, le tennis lui c’est carrément dans les eaux noires. Si les sommes d’argent brassées par le cyclisme (prime au vainqueur du Tour de France = 35 années de Smic) vous procurent des haut-le-cœur, prenez préventivement des anti-nauséeux, car pour les tennismen (tenniswomen), c’est de l’argent de poche !

 

Au cours de ce tournoi les 200 joueurs et joueuses vont se partager 42 millions d’euros. Ceux qui sont éliminés au premier tour, donc qui n’ont fait qu’un seul match, empochent 60 000 euros. Celui et celle qui vont gagner le tournoi empocheront chacun.e 1,6 million d’euros. A noter que le tennis est le seul sport où les primes distribuées sont les mêmes pour les joueurs que pour les joueuses.

 

Le vainqueur du tournoi cette année est un espagnol, Raphaël Nadal, dont la fortune est de plus de  200 millions d’euros. La montre qu’il portait pendant cette finale est une édition limitée d’une grande marque vendue 650 000 euros. Il possède une école de tennis sur l’île de Majorque où les jeunes peuvent pratiquer cette discipline ; il vaut tout de même mieux qu’ils aient des parents un peu fortunés puisque la cotisation est de 56 000 euros/an. Ses revenus journaliers sont estimés à environ 13 000 euros.

 

Ce tournoi se déroule au stade Roland Garros, situé dans le bois de Boulogne à Paris. En 2015, des travaux d’agrandissement prévoyaient de détruire une partie des serres d’Auteuil (classées monument historique). Heureusement, des associations locales s’y sont opposées et cette extension a été revue à la baisse. 350 millions d’euros y ont tout de même été consacrés pour construire 2 nouveaux courts et des gradins qui ne sont utilisés que 15 jours par an.

 

150 personnes sans domicile fixe ont été dénombrées dans cette forêt, au cours de la nuit de la solidarité du 30 au 31 janvier 2020,

 

Pendant les 15 jours du tournoi, ces personnes n’ont pas été conviées dans le public. Pour protéger les jambes des spectateurs de la fraîcheur, on n’utilise pas des couvertures du Secours Populaire : la mode cette année, c’était le plaid Louis Vuitton à 1030 euros pièce. C’est l’élite fortunée parisienne qui s’y retrouve. A Roland Garros, pas d’agitateurs, pas d’idéologues… que des gens bien- pensants et sympathiques ! Parmi les habitués qui viennent se montrer dans les tribunes et qui bien évidemment sont invités : Patrick Bruel, Louis Sarkozy, Arthur, la famille Belmondo, Dominique de Villepin, Jérôme Cahuzac… Que du beau monde… !!

 

Pas de risque d’y voir des drapeaux palestiniens !

 

Si je vous parle de drapeaux palestiniens c’est que, pendant le Tour de France, pour protester contre la présence de l’équipe Israël Start-up Nation, des militants ont tenté de protester en les déployant. La télévision a « bien » joué son rôle, a « bien » censuré, et donc, aucun de ces drapeaux n’a pu être vu à l’écran. A Roland Garros, aucun risque d’en voir dans les tribunes, des drapeaux israéliens peut-être … !

 

Les sponsors

 

Concernant l’éthique des principaux sponsors il faut reconnaitre que le tournoi de Roland Garros a frappé très très fort. En effet les 2 sponsors principaux sont BNP Paribas et la compagnie aérienne des Emirats Arabes Unis.

 

BNP PARIBAS est une banque française visée par une enquête pour complicité de crimes contre l’humanité, pour sa participation active au financement du gouvernement soudanais d’Omar El Bachir, impliqué dans le génocide du Darfour. Elle est également visée par une autre enquête lors du génocide du Rwanda. Dans ce dernier cas, elle a déjà été condamnée à verser une amende de 8,8 milliards de dollars pour ne pas avoir respecté les sanctions édictées par l’ONU, les USA et l’Union Européenne.

 

Les Emirats Arabes Unis, quant à eux, sont décrits par l’ONG Human Rights Watch comme un pays ultra réactionnaire et conservateur, dont le système social est « un système archaïque exposant les travailleurs émigrés à des conditions proches de l’esclavage ». Les ouvriers sont sous la tutelle d’un patron responsable des démarches pour les visas. Ces derniers sont confisqués systématiquement à leur arrivée, les empêchant de repartir librement. Bien évidemment,  manifestations et syndicats sont interdits. Dans ce charmant pays on peut être condamné.e à mort pour avoir menacé « la paix sociale ». A noter que les Emirats Arabes Unis possèdent une équipe cycliste professionnelle et c’est d’ailleurs un de ses coureurs qui a gagné le Tour de France cette année. Entre coquins, pardon, copains, on se retrouve dans la pratique sportive.

 

Un autre sponsor important est la société PSA. Peugeot met gracieusement à disposition des joueurs, des organisateurs, des VIP,  250 véhicules. Que des véhicules de très haut de gamme ! Les ouvriers de PSA, qui n’ont quasiment pas le temps d’aller aux toilettes pendant leur travail, apprécieront.

 

Concernant l’éthique des joueurs, là c’est presque parfait… De très rares cas de dopages sont avérés ; pourtant certains joueurs qui pèsent 55 kg à 17 ans en font 80 à 18, mais bien sûr rien que de très naturel dans ce changement … ! André Agassi, joueur américain, numéro 1 mondial dans les années 90, a reconnu, dans son autobiographie, qu’il avait été contrôlé positif à un produit dopant et que la Fédération Internationale de Tennis lui avait proposé d’étouffer l’affaire, de ne pas la rendre publique, en échange d’un éloignement de quelques mois des courts afin de ne pas salir l’image de ce sport. Il semble que cette pratique soit généralisée dans ce sport car beaucoup de joueurs disparaissent momentanément du circuit quelques mois, voire une année, puis réapparaissent et reprennent leur participation aux compétitions, tout naturellement. La Fédération, les organisateurs, sont complices d’un dopage quasi systématique, mais les affaires sont méthodiquement étouffées pour ne pas nuire à l’image du tennis et surtout pour ne pas réduire les sommes astronomiques que ce sport engendre.

 

Dans l’article sur le Tour de France je demandais, symboliquement, aux travailleurs exploités de se mettre sur la route pour empêcher l’épreuve de se dérouler mais pour le tennis, ce sera beaucoup plus difficile puisque, pour accéder aux courts, il faut payer son entrée (prix des places pour la finale entre 155 et 325 euros), alors que les membres de la Haute Société Parisienne sont invités gratuitement.

 

Malgré tout le mal que se donnent les journalistes pour vanter les mérites du tennis, celui-ci est, comme tous les sports de compétition professionnels avant tout un spectacle, un moyen d’aliéner les travailleurs exploités.

 

« Du pain et des jeux », cette formule vieille de plus de 20 siècles semble hélas toujours d’actualité.   

 

Jean-Louis Lamboley